Albert Lippincott, dit Mailman, est facteur à Nestor, petite
bourgade de l’état de New York. Mais Mailman n’est pas un facteur
comme les autres. C’est un facteur qui aime lire le courrier avant de le
distribuer. Il photocopie les missives après les avoir ouvertes à la vapeur.
Une sale manie qui va bien sûr entraîner sa perte. Il faut dire que Mailman est
un excentrique doublé d’un maniaque. Il a séjourné quelques temps à l’hôpital
psychiatrique, où il a rencontré une infirmière qui est devenue sa femme avant
de divorcer et de refaire sa vie avec un médecin. Il entretient une relation
particulièrement ambiguë avec sa grande sœur, il déteste les chats, qui le lui
rendent bien, il s’est lancé un temps dans l’humanitaire au Kazakhstan (le
fiasco total) et il sent depuis peu une grosseur sous son bras qui l’inquiète
au plus haut point. Bref, Mailman est un drôle de loustic un peu paumé, un
homme qui semble ne rien comprendre au monde et aux gens.
« Il se dit qu’il n’a ni passé ni avenir, qu’il n’y a
plus de kilomètres parcourus ni de kilomètres à parcourir, qu’il n’attend plus
rien, qu’il n’a plus honte de rien. » Et pourtant, il aurait de quoi avoir
honte, Mailman, parce que des casseroles, il s’en trimballe un sacré paquet :
la fois où sa mère lui a définitivement fait passer le goût de la masturbation,
la fois où il s’est fait choper devant un site porno sur un ordi de la
bibliothèque municipale, la fois où il s’est retrouvé devant une classe au Kazakhstan,
et tant d’autres encore… Ce personnage pourrait être tout droit sorti d’un
roman de John Kennedy Toole, même si je l’ai trouvé moins charismatique que le
Ignatius Reilly de La conjuration des imbéciles. Il possède néanmoins
ce coté misanthrope, ce coté gaffeur maladroit, cette dimension tragi-comique,
cette image de loser permanent qui caractérise le héros de Toole. Son combat
est perdu d’avance. D’ailleurs, contre qui, contre quoi se bat-il ? Uniquement
contre lui-même sans doute, c’est pour cela qu’il n’a aucune chance de gagner.
Un roman drôle, très drôle même, mais pas que.
Un roman tragique et au final terriblement pessimiste, mais pas que. Un roman
où l’Amérique semble habitée par une population au mieux névrosée, au pire
totalement cintrée. Bref, j’ai adoré. A part la fin qui, je dois l’avouer, ne m’a
pas plu du tout. Et puis ce pavé aurait mérité quelques coupes franches (je
parie que cela ne vous étonne pas venant de moi), certaines anecdotes n’ayant
pas grand intérêt. Mais bon, ça reste la littérature US décomplexée que j’aime
tant.
Encore une bonne pioche pour les éditions « Monsieur Toussaint
Louverture », dont le catalogue regorge déjà de nombre de pépites. En
plus, ce qui ne gâche rien, l’objet livre est vraiment magnifique. Un régal de
manipuler un ouvrage façonné avec autant de soin.
Mailman de J. Robert Lennon. Monsieur Toussaint Louverture,
2014. 668 pages. 23 euros.
Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Keisha.
il a rejoint ma PAL hier !!!!!
RépondreSupprimerHâte de connaître ton avis.
SupprimerLa fin m'a un peu laissée sur le sable, mais bon... ^_^
RépondreSupprimerSinon, tu sauras que j'ai adoré, bien sûr. Et j'ai une furieuse envie de lire cette Conjuration des imbéciles si c'est du même tonneau.
(quant aux chats, là j'ai failli me fâcher, m'enfin, mais ce type est malade! Mais j'avoue avoir rigolé - même là)
Quoi ? Tu n'as pas lu La conjuration des imbéciles ? Que dire, sinon... écoute ton envie !!^^
SupprimerOui, il faut lire la conjuration absolument. Quant aux scène avec les chats, j'ai tout de suite pensé à toi.
SupprimerAïe, si tu cites La conjuration des imbéciles, ça ne me convainc pas, c'est un livre que j'ai laissé tomber, je n'en voyais pas l'intérêt... Je tenterai plutôt un emprunt qu'un achat.
RépondreSupprimerPas d'intérêt à la conjuration ? Pfffff...
SupprimerJ'apprécie vraiment le travail éditoriale de Monsieur Toussaint Louverture et ce sont toujours de beaux objets. Tu associes à ce livre "La conjuration des imbélices" que j'adore, comment vais-je pouvoir résister à celui-ci ?
RépondreSupprimerNe résiste pas, ce n'est pas la peine^^
SupprimerA ma grande honte et confusion, je n'ai jamais pu terminer "La conjuration des imbéciles", mais pas grave, on n'est jamais à une contradiction prêt ... Ce titre me dit vraiment bien, et Keisha m'a déjà convaincue ... J'aime bien le "cintré", moi aussi !
RépondreSupprimerComment ça tu n'a pas aimé "La conjuration" ! Tu veux que je boude, c'est ça ?
SupprimerEncore une bonne pioche ! ;-)
RépondreSupprimerOui en ce moment la forme revient au niveau des lectures !
SupprimerJe ne peux comparer à la Conjuration, que je n'ai toujours pas lu (mais dans ma PAL grâce au prêt d'un ami) ; en revanche, il me semble détecter quelques liens de consanguinité avec Karoo, publié chez ce même éditeur.
RépondreSupprimerMoi je n'ai pas lu Karoo. Chez cet éditeur j'avais lu "Le dernier stade de la soif".
SupprimerC'est un peu embêtant tout de même si la fin ne t'a pas plu du tout ?
RépondreSupprimerJe suis passé à coté de la fin mais d'autres lecteurs pourront la trouver parfaite.
SupprimerJe n'ai pas lu non plus "La conjuration" donc je ne peux pas comparer. Par contre, In Cold Blog a raison pour le rapprochement avec "Karoo", même que "Karoo" est bien meilleur selon moi, il a un effet coup de poing que n'a pas Mailman et c'est pour cette raison que ça n'a pas été le coup de coeur attendu. Mais j'ai bien aimé quand même, l'épisode des chats m'a fait mourir de rire. Et d'accord avec toi, un peu plus court ne m'aurait pas gêné ( pour une fois ! ^^)
RépondreSupprimerDu coup il va falloir que je lise Karoo, pas possible autrement !
SupprimerCe n'est pas la littérature que je préfère surtout sur 668 pages, houlala, faut tenir !!! Keisha en parle sur un autre ton, c'est vraiment intéressant d'avoir vos deux avis ! :)
RépondreSupprimerC'est un vrai pavé mais pour que je sois allé au bout moi qui d'habitude déteste ça c'est un signe qui ne trompe pas.
SupprimerBon, moi le délai était trop court pour la LC, mais il est dans ma PAL ebook VO, donc un jour, un jour...
RépondreSupprimerUne année, une année...
SupprimerJe pense que j'aurais du mal avec ce genre. Moi non plus, je n'ai pas lu "La conjuration des imbéciles".
RépondreSupprimerC'est un peu barré mais ça reste de l'excellent littérature américaine.
SupprimerJe ne suis pas tentée mais tu plaisantes quand tu dis que tu trouves Ignatus charismatique, non?
RépondreSupprimerPas du tout. Ignatus irradie, il occupe tout l'espace, il est absolument charismatique !
SupprimerJe note donc qu'il me faut découvrir l'auteur car rien encore lu de lui.
RépondreSupprimerC'est la première fois qu'il est traduit en France.
SupprimerKeisha et toi, vous êtes des sacrés tentateurs ! Seules les 600 pages me refroidissent un peu... Je sors d'un pavé de cette taille et... il faut du temps !
RépondreSupprimerOui je dois reconnaître qu'il m'a fallu un certain temps avant d'en voir le bout. Mais je ne regrette pas.
Supprimer600 pages !! mais comme c'est américain et que tu dis qu'il y a des longueurs (comme chez beaucoup trop d'écrivains américains), on peut sauter des pages !
RépondreSupprimerOui on pourrait mais je ne l'ai pas fait ;)
SupprimerChronique plagiée par un utilisateur sur Amazon.fr :
RépondreSupprimerhttp://www.amazon.fr/review/R1FYDCQLI1LLAE/ref=cm_aya_cmt?ie=UTF8&ASIN=B00GOJWKC2#wasThisHelpful
Oui j'ai vu. Lamentable...
SupprimerJ'ai hésité à le noter en passant chez Aaliz, tu as fini de me convaincre!
RépondreSupprimerAaliz est moins enthousiaste que moi mais on est d'accord pour dire que c'est un excellent roman.
Supprimerje te remercie d'autant plus de l'envoi, après un billet comme ça, je ne peux qu'être ravie...(la loose c'est quand même un vrai état d'esprit)
RépondreSupprimerEn même temps je ne sais pas si ça va te plaire. Je me demande... (mais j'ai bon espoir).
SupprimerSi tu fais référence à La conjuration des imbéciles, pourquoi pas
RépondreSupprimerC'est la 1ère référence qui m'est venue à l'esprit.
SupprimerGaléa m'a parlé de ton billet car j'en ai posté un dimanche. du coup je viens voir ! effectivement on se rejoint pas mal ! J'ai adoré ce bouquin et tu as sans doute raison pour les coupes. Je me suis demandée si j'aimais la fin et j'ai décidé que oui, dans le genre complètement foutraque américain :)
RépondreSupprimerJe vais aller lire ton billet ;)
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