lundi 30 novembre 2015

Une vie entière - Robert Seethaler

« Comme tous les êtres humains, il avait, lui aussi, nourri en son for intérieur, pendant sa vie, des idées et des rêves. Il en avait assouvi certains, d’autres lui avaient été offerts. Beaucoup de choses étaient restées inaccessible ou lui avaient été arrachées à peine obtenues. Mais il était toujours là. »

Andreas Egger, né en 1898. Orphelin élevé à la dure par un fermier qui le battait comme plâtre, au point de le rendre définitivement boiteux un soir de dérouillée plus appuyée que les autres. Le lecteur le découvre à 33 ans, au moment où il rencontre Marie, qui deviendra sa femme. Dans ces montagnes autrichiennes où il passa sa vie, Andreas connut l’amour, une avalanche dévastatrice, l’arrivée du progrès et la construction des premiers téléphériques à laquelle il participa activement. Puis vint la guerre. Envoyé sur le front de l’Est, il fut prisonnier dans un camp russe et ne rentra chez lui qu’en 1951, pour devenir guide de montagne.

J’ai bien fait d’écouter Le petit carré jaune qui m’a chaudement recommandé ce roman. Forcément j’ai aimé ces petits riens d’une petite vie. Le destin d’apparence minuscule d’un taiseux épris de silence et de solitude ne pouvait que me parler. L’écriture se veut discrète, épurée à l’extrême, cheminant à son rythme, sans esbroufe. Un dépouillement proche d’une forme d’humilité bien loin des modes actuelles, et qui m’a parfois rappelé le meilleur de De Luca.

Une vie entière loin de la clameur du monde, à la fois heureuse et douloureuse, comme toute vie qui se respecte. Une vie d’isolement au cœur des montagnes, dont la beauté est restituée avec une touchante sobriété. Et puis ces dernières phrases, que j’aimerais faire miennes au soir de ma propre vie : « Il ne s’était jamais trouvé dans l’embarras de croire en Dieu, et la mort ne lui faisait pas peur. Il ne pouvait pas se rappeler d’où il venait, et en fin de compte ne savait pas où il irait. Mais, à cet entre-temps qu’était sa vie, il repensait sans regret, avec un petit rire saccadé et un immense étonnement. »

Un roman magnifique, tout en simplicité et en retenue.

Une vie entière de Robert Seethaler. Sabine Wespieser, 2015. 160 pages. 18,00 euros.



42 commentaires:

  1. Un auteur que j'aimerais bien découvrir. Son premier roman est à la bibli, il a eu de bons billets aussi. Yapluka ...

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  2. Belle citation, en effet. Si l'ensemble du livre est à cette image, il doit valoir la peine.

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  3. rhoooooooooo ben ça !
    Bon ben y a plus qu'à ....
    ;-)

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  4. Peut être... Il est à la bibli en tout cas (quand on le relâchera)

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  5. Quelle belle phrase ! oui elle est mienne aussi ! encore un livre que je te devrai quand il croisera ma route, merci

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    1. J'espère (et je pense sincèrement !) que tu me remercieras après la lecture ;)

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  6. Je vais me laisser convaincre...

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  7. Inconnu pour moi, je me laisserais bien tenter !

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    1. Il était inconnu pour moi aussi, heureusement que l'on m'a soufflé son nom à l'oreille.

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  8. Si tu ajoutes ta pression sur celle déjà forte du Petit carré jaune, il n'y a plus qu'à céder et lire ce livre au plus vite, n'est-ce pas?

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  9. Oui, un roman qui te correspond beaucoup.:-) Pour ma part, je pourrais m'y plaire, certainement, mais je suis en position bouclier levé jusqu'à la fin de l'année - normalement...;-)

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  10. Non mais là tu exagères ! Ce livre était dans ma wishlist de la rentrée mais à chaque visite de la librairie, il n'était point sorti et voilà que Monsieur Jérôme le lit avant moi et me confirme que mon intuition était la bonne ??!!! :-) Bon, il me le faut (et tous ses livres aussi) ...

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    1. Monsieur Jérôme l'a beaucoup aimé. Puis, Electra le veut. Alors... il me le faut.

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    2. J'aime le cheminement de ta réflexion ;)

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  11. Et dit par mail, mais je me répète : un grand merciiiii ;-)

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    1. Pas de quoi, le petit cadeau a été choisi avec soin ;)

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  12. C'est vrai qu'elle est belle cette dernière phrase... Je ne suis pas étonnée que tu aies succombé à ce roman, il était fait pour toi !

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  13. Des petits riens qui ont l'air passionnants.

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  14. Un roman qui devrait plaire à mon homme (et certainement à moi aussi ;-) )

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    1. Faire d'une pierre deux coups, c'est encore meilleur !

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  15. Le premier " le tabac Tresniek" fut un coup de cœur. Celui ci fera partie de mes prochains achats, car entre votre critique et celle de Petit carré jaune. Je ne peux que craquer.

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  16. C’est le style de livre que j’aime énormément. « ces petits riens d’une petite vie », « un taiseux épris de silence et de solitude », « qui m’a parfois rappelé le meilleur de De Luca » - c’est tout ça qui m’a convaincue… Super billet!

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    1. Il doit être fait pour toi aussi alors ce petit livre !

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  17. Bonjour Jérôme, je confirme, comme le tabac Tresniek : magnifique roman. Bonne journée.

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  18. J'ai failli l'acheter la semaine dernière :-) j'aurais dû :-)

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  19. Bonjour, mon mari m'a offert ce petit livre samedi sans savoir que j'avais sélectionné votre billet dans ma liste des livres à acheter. Je l'ai terminé hier soir. J'aime le personnage d'Egger pour sa droiture, son courage. Quelle vie de chien a t il eu ! Au final beaucoup de moments de labeur, de solitude et peu de moments de bonheur. Est-ce bien cela la vie ?

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    1. Je crois qu'il a aussi connu de vrais moments de bonheur dans la solitude des montagnes. C'est du mois comme cela que je l'ai ressenti.

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  20. Je viens de le lire et comme toi, j'ai beaucoup aimé cette sobriété et cet homme entier. Puis mon coeur de midinette a vibré face à sa déclaration d'amour tellement excentrique en regard de sa simplicité...

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