vendredi 10 avril 2015

Plus de morts que de vivants - Guillaume Guéraud

Dernier jour de cours avant les vacances d’hiver dans un collège de Marseille. « Aucune menace dans l’air. Juste le froid coupant de février. Qui glaçait les mains. Qui gelait les oreilles jusqu’à les rendre cassantes. Et qui tailladait les poumons à chaque inspiration. » Aucune menace et pourtant à 8h25 un élève de sixième s’est mis à saigner du nez sans raison. Puis une cinquième a perdu ses cheveux par poignées et « la grosse Anouk » s’est écroulée dans la cour, les tripes à l’air. Le début du chaos, une épidémie qui se répand plus vite que la peste, un établissement en quarantaine et la mort qui frappe. A tour de bras. Sans distinction…

Guéraud… ce gars est frapadingue mais c’est pour ça que je l’aime ! Pour avoir lu quelques avis ici ou là avant de me lancer, je suis rentré dans ce roman à reculons. J’ai tourné les premières pages avec pour leitmotiv un « jusque là tout va bien » de façade, car je savais que ça allait déraper à un moment ou l’autre. Il ne m’a pas fallu attendre longtemps. Après, l’engrenage se met en route, on ne voudrait y glisser qu’un ongle mais on y passe la main, le bras et tout le reste. On en ressort en lambeaux et ce n’est pas joli à voir, croyez-moi ! Guéraud donne dans le gore. Il mène sa barque tout en tension avec son écriture au scalpel, jouant avec nos nerfs comme le sadique fait crisser la craie sur le tableau noir. Surtout, on sent qu’il s’amuse, qu’il prend son pied (et, je ne devrais pas le dire, mais nous avec !).

En fait, lire ce roman, c’est plonger dans un paradoxe permanent, dans un grand huit où alternent fascination et répulsion. Je ne vais pas vous décrire ce qu’il arrive concrètement à ces pauvres personnages frappés par le virus mais franchement, il y a de quoi rendre son quatre heures. Répulsion donc, mais en même temps fascination liée au rythme du récit, au huis clos irrespirable, à l’avancée de cette folle journée, à l’espoir (totalement illusoire quand on connaît un peu l’univers de Guéraud) que les choses vont finir par s’arranger. C’est vraiment une drôle d’expérience de lecture qui dérange, bouscule, interpelle. Au-delà du simple déballage sanguinolent et des descriptions à l’efficacité très cinématographiques, il faut voir dans cette sombre histoire une allégorie de la violence gratuite et aveugle qui peut frapper partout, à n’importe quel moment, et sous n’importe quelle forme. Une violence aussi insidieuse que cette épidémie face à laquelle il est impossible de se prémunir.

Un roman haletant, impossible à lâcher. Mais un roman flippant, totalement flippant même. Vous êtes prévenus.

Plus de morts que de vivants de Guillaume Guéraud. Rouergue, 2015. 252 pages. 13,70 euros. A partir de 15 ans.

Une lecture commune que j'ai une fois de plus le plaisir de partager avec Noukette.

Les avis de Clara et Moka.







38 commentaires:

  1. L'auteur de "Je mourrai pas gibier"... très envie de découvrir son univers. Je ne sais pas si je commencerais par ce titre mais je note ;)

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    1. Commencer avec "Je mourrai pas gibier" est peut-être plus cohérent pour mieux comprendre son univers tellement particulier. Mais ce n'est pas une obligation non plus.

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    1. Tu fais partie de ses fans inconditionnelles, je sais ;)

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  3. Oh la la la la la la !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

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    1. C'est à peu près ce que je me suis dit tout au long de ma lecture ;)

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  4. Waou. C'est tout ce que j'aime. J'adore ces univers sombres et angoissants, j'aime encore plus les huis-clos. Mais n'ayant pas d'ado de 15 ans pour l'en faire profiter, est ce que c'est une lecture aussi adulte? Le style n'est pas trop ado…?

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    1. Ah non le style n'est pas trop ado du tout. D'ailleurs avant 15 ans, c'est une lecture qui me paraît difficile.

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  5. J'adore Guillaume Guéraud et son univers.Vraiment flippant comme tu dis mais on en redemande !
    Ce roman m'attend sur ma PAL. Je le lirais , comme les autres , dans la journée et avec un certain temps devant moi pour le finir ;-)

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    1. Le lire juste avant de te coucher pourrait te jouer des tours, je comprends que tu veuilles t'y plonger dans la journée ;)

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  6. Ce type est dingue. Et moi j'aime les dingues, ils me font un peu flipper mais je les admire d'oser à ce point. Et dans le domaine Guéraud excelle, vraiment ! Je ne sais pas si tu as déjà jeté un œil à ses vidéos qu'il fait sur son boulot d'écrivain, c'est absolument génial !

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    1. Non je n'ai jamais regardé ses vidéos mais je suis d'accord avec toi, il est cinglé, talentueusement cinglé même !

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  7. Je ne crois pas que je le lirai malgré ton grand entousiasme

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    1. C'est tellement particulier, je comprends que tu puisses avoir des réticences.

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  8. oh mais quelle horreur! bon, je suis quand même intriguée (suis curieuse, moi!)

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    1. C'est tout le problème, on est à la fois effrayé et terriblement attiré.

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  9. Ce serait intéressant d'avoir des avis d'ados sur ce bouquin... tu l'as peut-être fait lire autour de toi?

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    1. Mon fils (en 5ème), l'a commencé un soir alors que nous étions en soirée chez des amis. On ne l'a plus décroché. Il l'a fini le lendemain matin au réveil et il a a-do-ré !!!!
      Vu que je l'avais lu avant, on a pu en parler ensemble, et nous sommes aussi enthousiastes l'un que l'autre.

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    2. De ce qu'il m'a dit, il a été captivé par le rythme, par l'humour de Guillaume Guéraud. Et bien sûr, l'aspect gore l'a réjouit, parce qu'il sait que ça ne pourrait jamais arriver (d'ailleurs, je vais attendre un peu avant de lui faire lire les autres romans de Guéraud qui eux sont plus "réalistes"). Il a été impressionné, mais pas effrayé. Notamment grâce à l'écriture, qui est vraiment bien ficelée. Et puis tout le côté des compte-rendu des journaux l'a beaucoup intéressé aussi. Il a pu constater qu'on ne pouvait pas croire tout ce qui se disait dans les journaux/à la radio/à la télé. Du coup, il se montre plus critique et commence à ne pas prendre pour argent content tout ce qui se dit dans les médias.
      Étonnamment, je pense que ce roman lui fait prendre du recul sur certaines choses... (Ça c'est mon ressenti de mère).

      Mais donc, pour lui en tout cas, ce roman fera date !

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    3. Moi je n'oserais pas le faire lire à ma fille, aussi en cinquième. Mais je trouve génial que ton fils ait pris autant de recul et ait autant apprécié le roman pour ce qu'il est finalement.

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  10. Je pense, en y réfléchissant, que je ne suis pas fan des romans flippants. Je ne sais pas si j'en ai vraiment lus d'ailleurs.

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    1. Moi non plus je ne suis pas du tout fan du genre. Mais là, j'ai été bluffé.

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  11. Hmmm vu de loin comme ça, j'irais à reculons aussi, et je crois que je vais continuer dans ce sens.;-)

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    1. !tu tournes le dos à un roman sacrément barré, tant pis pour toi ;)

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  12. Je ne suis pas sûre que ce soit pour moi. Et je n'aime vraiment pas cette couverture.

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  13. Ton billet a bien attiré mon attention, ce roman a l'air très original, je vais le noter.

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  14. Il n'y a pas à dire , cet auteur ne sait pas faire dans la bluette ! J'aime aussi comment il emmène dans une spirale infernale à chaque fois, sans lâcher le lecteur. Franchement, je n'aimerais pas habiter dans sa tête !
    Je note quand même et je ferai tester à des ados.

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    1. Tu as raison, ça doit être assez effrayant dans sa tête. Mais quel plaisir pour le lecteur !

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  15. Ah c'est tentant mais mon petit coeur tout mou antique-gore resistera-t-il... Je pourrais l'offrir à mon fils par contre, c'est de son âge :-)

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    1. Tu peux lui offrir les yeux fermés, il va adorer !

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  16. Je viens de découvrir ce roman, et youhou, sur Google je trouve un billet de toi !
    Je viens de découvrir mes nouvelles classes, et comme chaque année, je cherche un roman pour commencer l'année, avec pour seul but de leur montrer qu'on peut être happé par une lecture.
    Il faut qu'il y ait de l'action et que ce ne soit pas trop long.
    Tu penses que celui-ci pourrait être une bonne idée ?
    Ce sont des élèves de 1ère en lycée technique, et uniquement des garçons.

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    1. Je crois que ça peut tout à fait fonctionner, ils sont suffisamment âgés pour se régaler avec assez de recul pour ne pas prendre l'histoire au premier degré ;)

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