Cleland © Bernard Pascuito 2008 |
Pour créer le personnage de Fanny Hill, Cleland s’est inspiré de Fanny Murray, une prostituée de 17 ans qui était l’idole des aristocrates londoniens. Sous la plume du romancier, Fanny raconte ses expériences à travers deux longues lettres où elle décrit sa vie misérable à la campagne, son arrivée sans le sou dans la capitale, son initiation dans une fameuse maison close puis sa spécialisation dans les orgies les plus débauchées. On suit donc au fil des pages la transformation d’une oie blanche en prostitué de luxe. Mais le récit s’attarde également sur les considérations liées au savoir-vivre. Fanny insiste longuement sur la bonne attitude à adopter face à une clientèle haut de gamme et exigeante. L’intérêt réside aussi dans l’évolution de la jeune fille. D’abord pure et innocente, elle acquiert vite l’expérience suffisante pour comprendre comment profiter au mieux de sa situation. Fanny devient une forte femme, intelligente, clairvoyante. Loin d’être une incontrôlable nymphomane (comme les prostitués de Pierre Louÿs par exemple), Fanny ne dédaigne pas le plaisir, mais elle place aussi la vertu au-dessus du vice, ne perdant jamais de vue le fait que ses nombreuses expériences lui ont surtout permis de trouver sa place dans le monde et n’ont pas fait d’elle une débauchée.
Il n’y a rien de glauque dans le récit de Cleland. Les clients sont classe, jamais violents. Même l’adepte du fouet se révèle au final un garçon plutôt gentil. Bien sûr, on est souvent proche d’une certaine forme de caricature, mais je préfère retenir le bonne humeur et la joie de vivre qui traverse le récit. Dans ses deux lettres, Fanny s’attarde, non sans humour, sur les descriptions physiques de ses michetons. Pour ce qui est du passage à l’acte, les choses sont davantage suggérées qu’exprimées dans les moindres détails. Un style très imagé qui m’a beaucoup plu, surtout si l’on y ajoute l’emploi quasi constant d’un passé simple délicieusement désuet : « Comment pûtes-vous m’abandonner ? ».
Bref, je ne suis pas mécontent d’avoir découvert ce grand classique. Voila un roman libertin finalement assez peu émoustillant qui m’a pourtant fait passer un excellent moment de lecture.
Mémoires de fanny Hill, femme de plaisir, de John Cleland. Bernard Pascuito éditeur, 2008. 220 pages. 20 euros.
Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Marie.
Allez zou, rendez- vous chez Stephie pour découvrir les autre lectures inavouables du mois |
SI c'est peu émoustillant, c'est décevant...
RépondreSupprimerBen non, justement, parfois, la suggestion a du bon^^
SupprimerUn classique bien écrit plus qu'un truc glauque? Tant mieux!
RépondreSupprimerOui, il y a un peu de ça. Disons que l'ensemble reste assez joyeux même si la vie d eFanny n'a pas été des plus faciles.
SupprimerMouarf, les pages collées !!!!!
RépondreSupprimerC'est du vécu !
SupprimerSi la suggestion est bien écrite, en effet, ça peut être plaisant!
RépondreSupprimerQuant à moi, ce mois-ci j'ai suivi tes conseils, avec Les Combattants du feu. Merci!
J'espère que tu as aimé les beaux pompiers !
SupprimerJ'adore le passé simple désuet ... Et j'avais bien aimé Fanny aussi, même si la trame érotique en est devenue très classique avec le temps, le côté catalogue d'expériences, je veux dire. Je me souviens avoir plus souri à la lecture du "Sopha" de Crébillon fils et des "Bijoux indiscrets" du petit père Diderot ...
RépondreSupprimerA l'époque, c'était révolutionnaire, surtout en Angleterre. La France était la terre du libertinage alors que le Grande-Bretagne commençait à peine à s'y mettre.
SupprimerA y est, j'ai réussi à écrire mon billet!
RépondreSupprimerJe vois qu'on a le même ressenti positif, pour une raison à peu près similaire, mais, à te lire, j'ai l'impression qu'on n'a pas lu la même histoire et que j'ai raté quelques épisodes.
Ta version condensée t'a en effet fait raté quelques épisodes. En tout cas je suis content de voir que nous avons eu le même ressenti, je craignais que tu sois beaucoup plus sévère que moi (tu as une expérience de lectrice tellement supérieure à la mienne par rapport à ce genre d'ouvrage que ton analyse est forcément plus fine).
SupprimerTu m'as l'air d'être tombé sur une petite pépite du genre ! Parfois, franchement, ça fait du bien ! Et jamais entendu parler de ce classique non plus...
RépondreSupprimeroui, une lecture fraîche, légère et agréable, ça fait du bien comme tu dis.
SupprimerEt tu ne nous dis pas combien de pages tu as dû décoller...
RépondreSupprimerJe n'ai rien eu à décoller, cet exemplaire était en super état !
Supprimerah ah ah ! jusqu'à aujourd'hui je n'avais jamais pensé aux pages collées ;) Franchement je devrais m'inscrire à ce challenge, juste pour découvrir ça ! hihi
RépondreSupprimerJ'aimerais beaucoup découvrir une de tes lectures inavouables !
Supprimerarf, je n'ose pas encore passer le cap de la publication de ces lectures ! Mais la littérature asiatique que j'affectionne en regorge, de très beaux textes souvent ...
RépondreSupprimerJe n'avais jamais pensé à littérature asiatique dans le cadre de ce challenge mais c'est vrai que c'est une très bonne idée. Il y a des textes érotiques très raffinés, notamment en Chine.
SupprimerJe connaissais Benny Hill mais pas Fanny. Je note si je devais un jour croiser sa route. Pour une fois, ta lecture pour Stéphie m'intéresse.
RépondreSupprimerM'étonnerait qu'ils soient tous les deux de la même famille.
RépondreSupprimerContent que cette lecture t'intéresse. Je ne sais pas encore ce que je vais faire le mois prochain mais je ne serais sans doute pas aussi classique^^