Février 1939, dans une ville de Bohème. Les nazis enlèvent
des enfants tziganes pour mener des expériences abjectes au nom de la pureté
raciale. Leurs parents partent à leur recherche, accompagnés d’un
« gadjo » prénommé Josef, mais ils sont rapidement arrêtées par la
police et déportés au camp de travail de Lety puis à Auschwitz. Placés dans une
section baptisée Zigeunerlager (camp tzigane aussi appelé « camp de
famille » puisque les déportés peuvent y rester avec les leurs) ils vivent
dans des conditions difficiles, notamment à cause des ravages provoqués par le
typhus. Le 22 mars 1943 a lieu le premier gazage de tsiganes et dans la nuit du
1er août 1944, Himmler expédie dans les chambres à gaz les
survivants du « camp de famille ».
Un album très documenté qui revient avec une grande rigueur
historique sur le génocide tsigane, une tragédie qui, rappelons-le, n’a été
reconnue par le parlement européen que le 3 février 2011. Un pan méconnu de
l’holocauste où l’on découvre les terribles motivations du Reich : pour le
docteur Ritter, chef de L’institut de recherche pour l’hygiène raciale et la
biologie de la population, les tsiganes représentent un danger de
dégénérescence pour les allemands. Il préconise donc dans un premier temps le
rassemblement de cette communauté dans des camps de travail forcé et la
stérilisation massive. Son but est d’éviter tout métissage et, à terme
« d’éliminer ces êtres indignes de la société. »
Michaël Le Gali a aussi souhaité mettre en valeur les
traditions propres au peuple rom, leur vocabulaire, leurs croyances, leur façon
de rendre la justice, leur passion pour la musique et la difficulté pour eux,
nomades dans l’âme, de se voir à ce point priver de liberté de mouvement dans
les camps. Liant la petite et la grande histoire, il insère dans son récit une
part non négligeable de fiction, notamment à travers le personnage de Josef, le
gadjo témoin et narrateur de ce voyage au bout de l’horreur. C’est sans doute
dans cette part de fiction que réside les quelques faiblesses de l’album. La
voix de Josef est souvent trop « neutre », comme détachée des
événements qu’elle relate, d’une froideur presque clinique. Il manque ce petit
supplément d’émotion qui aurait donné à l’ensemble davantage d’ampleur.
Au niveau graphique, le dessin
réaliste et le choix des tons sépia donnent une patine particulière
parfaitement adaptée au propos.
Un album instructif abordant un
sujet trop méconnu, qui sonne comme un hommage des plus sincères au peuple
tsigane et à la tragédie qui l’a frappé. Il est juste regrettable qu’il soit
plus didactique que poignant.
Batchalo de Le Galli et Bétend. Delcourt, 2012. 80 pages. 14 euros.
Un titre qui m'est totalement inconnu !
RépondreSupprimerIl me l'était aussi. Pour tout t'avouer c'est une lecture "de commande". Le prochain numéro de la revue "Les années" sera consacré aux gens du voyage et on m'a demandé de trouver un titre sur ce thème pour la rubrique BD. Du coup j'ai lu Batchalo et je ne le regrette pas, c'est très instructif.
Supprimer67 ans pour reconnaitre ce génocide... comme l'Homme peut être pathétique ! C'est le genre de constat qui me terrasse.
RépondreSupprimerCompte-tenu de ton avis, je ne regrette finalement pas de t'avoir fait faux-bond sur cet album ;)
ça m'a scié de découvrir cette reconnaissance si tardive. En tout cas ça ne m'aurait pas déplu d'avoir ton avis sur cet album.
SupprimerOui mais là il y a ce coté didactique que tu soulèves. Et puis je reste encore sur la malaise que j'ai eu en lisant "Auschwitz" de Croci. J'appréhende de revenir à ce sujet en BD (il faudrait que je relise une énième fois Maus pour balayer d'un revers de la main ces mauvaises représentations)
SupprimerRelire Maus, tu dis. De mon coté il faudrait déjà que je lise une premières fois, n'est-ce pas ?
Supprimerpas certaine que ce soit en BD que j'ai envie de lire cette tragédie
RépondreSupprimerLuocine
A toi de voir...
SupprimerC'est fou le nombre de génocides que l'on ne reconnait que tardivement ou qui ne sont pas encore reconnus. Pour l'album, je ne sais pas, je ne suis pas BD en ce moment, donc on verra quand l'envie reviendra.
RépondreSupprimerSi tu n'es as BD, forcément...
SupprimerCa a l'air passionnant en effet. Je le note.
RépondreSupprimerJ'ai appris plein de choses, même si elles sont terribles...
SupprimerIl est dans ma pile ! Je vais le garder un peu sous le coude au vu de ton retour...
RépondreSupprimerIl vaut la peine d'être lu, ne te m'éprends pas ;)
SupprimerCe pan de l'Histoire ne m'était pas inconnu, malheureusement j'ai envie de dire... Je ne sais pas si j'aimerais lire tout ça sous forme de BD, d'autant que tu soulignes que c'est plus didactique que poignant. A voir donc...
RépondreSupprimerVoila, à voir pour ce faire sa propre idée...
SupprimerPas pris le temps de chroniquer cet album mais ce fut une bonne surprise ! Un sujet peu traité comme tu dis. On y découvre pas mal de choses.
RépondreSupprimerJ'y ai découvert beaucoup de choses en effet.
SupprimerCe n'est pas particulièrement un sujet qui m'attire mais, contrairement à toi, je trouve que c'est mieux qu'il soit didactique plutôt que poignant. Déjà parce que, de mon point de vue, ça y perdrait en crédibilité. Et d'autre part parce que, sur un sujet aussi grave, y a-t-il vraiment besoin d'en rajouter dans le pathos ? La lecture de sujets aussi difficiles me semble plus facilement supportable quand l'auteur garde une certaine distance et reste factuel.
RépondreSupprimerJe ne regrette aucunement le manque de pathos, je dis juste que le narrateur semble regarder cela de tellement loin que l'on a parfois du mal à se persuader que la situation de ces pauvres gens était à ce point tragique. Mais je reconnais aussi que c'est un équilibre difficile à trouver...
SupprimerBon, bah comme d'habitude, je suis tentée. Je viens sur ton blog le stylo à la main ^^
RépondreSupprimerCe n'est pas un mauvais réflexe ;)
SupprimerHmm, dommage que tu n'aies pas été plus emballé, ce qui ne m'incite pas des masses à l'essayer MAIS comme le sujet est fort intéressant, il se peut que je l'embarque avec moi si je le trouve à la bibliothèque. Comme ça, je ne prends pas trop de risques.
RépondreSupprimerFigure-toi que moi je l'ai eu à la bibliothèque ;)
SupprimerJ'aime beaucoup le sépia en photo donc surement que cela me ferait le même effet ici :)
RépondreSupprimerAu niveau des couleurs, cet album est une vraie réussite, rien à dire !
SupprimerJ'ai beaucoup aimé cette BD. Le côté fiction comme le côté historique pur (notamment le dossier final, effrayant...), le dessin et les couleurs
RépondreSupprimerOui le dossier final est effrayant... et passionnant.
SupprimerJe ne connais que très peu cette histoire: cette BD serait une bonne occasion pour me documenter!
RépondreSupprimerExactement, c'est l'outil idéal pour en apprendre davantage sur ce sombre épisode.
SupprimerOh, celui-ci, même si hélas je connais cette histoire, je ne vais pas pouvoir m'en passer !
RépondreSupprimer( faut que tu lises Maus ! )
Oui, je sais, il faut que je lise Maus. Cet été peut-être, s'il fait beau et que je peux m'installer dans le jardin avec ces petites souris... Autant dire que c'est pas gagné.
SupprimerGénéralement je n'accroche pas trop aux récits de ce scénariste... je passe donc...
RépondreSupprimerJe ne le connaissais pas du tout mais pour l'instant je ne suis pas déçu même si j'ai émis quelques bémols.
Supprimermoi je note! Le thème m'intéresse.
RépondreSupprimerTu fais bien de noter, c'est un très bon album.
Supprimer