Pour tout vous avouer, j’ai commencé
ce livre pendant l’accouchement de ma femme. Je savais que
ça allait être long et que mon champ d’action serait relativement limité durant
plusieurs heures alors j’avais prévu un peu d’occupation. Je n’ignore pas que
le papa peut soutenir la future mère pendant le travail, qu’il peut l’aider à
trouver les positions les plus confortables au moment des contractions et qu’il
peut même lui faire un massage pour la soulager mais je ne m’en sentais pas
capable (il faut dire que j’avais séché les cours sur la place des papas au moment de l'accouchement proposés par les sages femmes et que du coup je manquais sérieusement de références).
Alors oui, pendant que ma femme souffrait le martyre dans une baignoire de la
maternité, je lisais un livre. Du moins j’essayais parce qu’entre ses cris de
douleur et les allées et venues incessantes du personnel médical, difficile de
se concentrer (oui, je sais, je suis horrible, mais c’est la pure vérité,
lynchez-moi sur la place publique si le cœur vous en dit, j’assume). Bref, j’ai
dû tout reprendre à zéro la semaine dernière tant mes conditions de lecture lors
de ma première tentative n’avaient pas été idéales…
Deux nouvelles dans ce recueil.
La première est celle que j’ai préférée. A Shanghai, on suit la jeune Caimei,
défigurée par une horrible tumeur qu’elle ne peut soigner faute d’argent et qui
va perdre son emploi de servante dans une famille cossue. Commencent pour elle
des heures d’errance au cours desquelles elle croisera quelques personnages
chaleureux cherchant à lui venir en aide. Une bien jolie réflexion sur la
trajectoire de ces petites gens venus de la campagne pour faire fortune en
ville et qui se retrouvent le plus souvent dans une misère noire et une
promiscuité difficilement supportable : « Sanglots de gens de la
campagne venus à la ville. Ces pleurs recelaient d’indicibles et d’innombrables
souffrances, mélange de situations compliquées, de combats, de revers, de
désarrois, de doutes, mêlés à d’infinies espérances… » Avec comme petite note positive la solidarité
et l’altruisme des personnes originaires de la même région.
Le second texte se déroule à Pékin.
Une femme reconnaît dans le chauffeur taxi qui l’amène à l’aéroport un homme qu’elle
a follement aimé vingt ans plus tôt. Elle n’ose lui parler et se souvient avec
nostalgie de leur première étreinte : « cela avait été beau, très
beau, car tout était parti du cœur, tout avait été si harmonieux, une telle
complicité les liait ; tout avait été parfait sur tous les points… Marée
haute graduelle, ondes successives, déferlement de vagues, secousses
telluriques, ébranlement céleste… Tout le monde n’a pas la chance d’avoir connu
une telle première nuit… ». Mais les années ont passé et leurs chemins se
sont séparés. Elle s’est mariée à un américain et est devenue riche alors qu'il est resté un homme du peuple. Le temps du trajet, elle se demande ce qu’elle
serait devenue si elle était restée avec lui…
Deux portraits de femmes
touchants, teinté d’une veine humaniste typique de la littérature chinoise. Voila
en tout cas un auteur que j’aurais le plaisir de retrouver d’ici peu avec
Poussière et sueur, un court roman qui vient tout juste d’atterrir sur ma pal. Merci Natiora !
La Cendrillon du canal
de Liu Xinwu. Folio, 2012. 115 pages.
2,00 euros.
Ma foi, lire est mieux que s'évanouir et gêner le bon déroulement de l'accouchement...
RépondreSupprimerJe suis d'accord. Et puis le principal est d'être présent, même dans le rôle du spectateur attentif.
SupprimerT'aurais pu faire pire, genre prétexter qu'il fallait s'occuper des deux autres enfants ou t'isoler en écoutant de la musique :) !
RépondreSupprimerImpensable de ne pas être présent. Et puis concernant la musique, si tu n'amènes pas tes propres CD, il faut se taper la radio, ce qui n'est pas l'idéal...
SupprimerJe suis ravie de t'avoir réconcilié avec la littérature chinoise, du moins pour cette fois :) Ce que tu en dis me rappelle Poussière et sueur, on voit le contraste entre les gens de la ville et les gens de la campagne. Ces nouvelles m'ont aussi l'air très touchantes, je me laisserais bien tenter.
RépondreSupprimerQuant à la partie de ton billet consacré à l'accouchement ma foi, j'ai honte mais tu m'as fait rire ^^
Poussière et sueur m'attends sur le haut de ma pal, je vais vite m'y plonger.
SupprimerConclusion : il ne sert à rien d'apporter de la lecture pendant un accouchement.
RépondreSupprimerOu alors il faut aussi apporter des boules quies.
SupprimerHi hi, moi aussi, j'ai bien ri !
RépondreSupprimerSur le coup ce n'était pas si drôle que ça (surtout pour ma femme...).
SupprimerPareil, pendant mon accouchement, je lisais mais impossible de me concentrer avec le personnel !!! Pfft
RépondreSupprimerMoi aussi, ça fait un bail que je n'ai pas lu de livre chinois. Tu me donnes envie de m'y remettre :)
Tant si je te donne envie de t'y remettre, cette une littérature de qualité.
SupprimerToujours avoir un livre en toute circonstance... :)
RépondreSupprimerC'est exactement ça. Une devise à ne pas oublier.
SupprimerBonsoir Jérôme, ta femme lit ton blog ? Le premier paragraphe est croustillant de drôleries... hum...
RépondreSupprimerSinon, j'aimerais bien lire la seconde histoire, la première est triste. Livre noté.
Oui, il lui arrive régulièrement d'y jeter un oeil. Après, on est ensemble depuis bientôt 19 ans, elle me connaît par coeur et m'a déjà pardonné bien des frasques...
SupprimerCocasse comme contexte de lecture. J'espère que tu n'as pas fait la lecture à haute voix à ta femme, parce que la tumeur, l'amour déçu, etc, bonjour l'ambiance en plein accouchement ;-) A part ça, moyennement tentée par ces deux nouvelles, même si je me dis depuis longtemps qu'il faudrait que je découvre la littérature chinoise.
RépondreSupprimerNon, je n'ai pas osé la lecture à voix haute. De toute façon le public n'aurait pas été très réceptif^^
SupprimerPas trop tentée par ces nouvelles non plus. Plus que le côté comique, ce qui me marque dans ton anecdote, c'est le souvenir auquel il me renvoie : la peur panique que m'ont causé, lors de la visite de la clinique avant l'accouchement, les cris d'une femme qui devait apparemment accoucher sans péridurale. Lors du mien, je me suis, heureusement, surtout ennuyée : mon ex n'avait pas pris de livre, je n'ai donc pas osé sortir le mien.
RépondreSupprimerLes cris ce n'est heureusement pas automatique^^ Mais là, avec le déclenchement "artificiel" les contractions étaient beaucoup plus fortes que lors d'un accouchement naturel.
RépondreSupprimerTss, tss, tss... comment dis-tu déjà ? Tu manquais "sérieusement de références"... au bout de la 3e ?
RépondreSupprimerBah, je reste sur mon quant-à-soi concernant la littérature japonaise à laquelle je suis visiblement hermétique ...
Nul n'est parfait que veux tu (et surout pas moi^^).
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