vendredi 23 mars 2012

Soldats de sable

Higa © Le Lézard Noir 2011
J’avoue avoir un peu tiqué en découvrant dans ma boîte aux lettres ce manga envoyé par Choco dans le cadre du loto BD de Mo’. Un récit de guerre, pas mon truc ça ! Sur la seconde guerre mondiale et la bataille d’Okinawa en plus, encore moins mon truc. Surtout, je pensais que le point de vue serait ultra patriotique avec des kamikazes élevés au rang de martyrs à tous les coins de page. Je m’apprêtais donc à me lancer dans une lecture des plus indigestes lorsque j’ai parcouru la postface. Et là, pour le coup, j’ai été sacrément rassuré. L’auteur y précise en effet que son but était de mettre en valeur les témoignages de villageois ayant vécu et subi les horreurs de la bataille. Une sorte de devoir de mémoire, notamment envers ses parents, natifs de l’île.

Ce manga est en fait un recueil de nouvelles. La plus poignante est sans conteste celle que Susumu Higa consacre à la mémoire de sa mère, une femme remarquable qui, pendant le conflit, n’a vécu que pour protéger ses enfants. Mais le mangaka parle aussi du traumatisme ressenti par les autochtones, en grande partie à cause du jusqu’auboutisme de l’armée japonaise qui s’est souvent mêlée aux civils, en a enrôlé de force un très grand nombre et n’a pas hésité à assassiner ceux qui tentaient de lui résister. Au final, les sujets abordés sont tous très différents. Seul point commun évident, la présence de ces petites gens dont l’histoire avec un grand H ne parle que trop rarement. Le propos est limpide, la situation infernale vécue par tous les protagonistes japonais de la bataille d’Okinawa est clairement exposée et l’antimilitarisme qui affleure dans chaque nouvelle est amené avec suffisamment de finesse pour ne pas sombrer dans la prise de position simpliste.

Si je devais émettre une réserve, elle concernerait le dessin, assurément pas le point fort de cet ouvrage. Le trait de Susumu Higa manque de souplesse, les visages sont figés et laissent difficilement transparaître les émotions mais le découpage rend l’ensemble très lisible, c’est bien là l’essentiel.

Un superbe recueil proposé par les éditions Lelézard Noir. Et une bien belle découverte que je dois à Choco. Nul doute que sans elle je n’aurais jamais posé les yeux sur ce manga, ce qui aurait quand même été fort regrettable !


Soldats de sable de Susumu Higa, Le Lézard Noir, 2011. 252 pages. 21.00 euros.  


Higa © Le Lézard Noir 2011 



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12 commentaires:

  1. BD et Japon, pas de doute, c'est encore tout rien que la faute de Choco ;)
    Malgré ton billet qui explique bien tes réticences et finalement ta découverte, j'hésite encore. ( suis toujours en train de digérer l'album sur le Cambodge " L'eau et la terre " de Séra )

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    1. Je ne connais pas l'album sur le Cambodge mais dans celui-ci, l'horreur des combats n'est pas montrée de manière réaliste. Il est donc plutôt facile à digérer :)

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  2. Ah merci pour ce billet et ta participation assidue ! Je suis contente de ne pas m'être planté dans ce choix :) C'est toujours délicat... EN tout cas, si tu me lisais plus assidument, tu aurais moins de crainte au commencement de ta lecture... ^^
    http://legrenierdechoco.over-blog.com/article-soldats-de-sable-susumu-higa-91005778.html

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    1. Je ne lis jamais les autres avis avant de rédiger le mien. Par contre, après, j'aime bien aller voir si les autres lecteurs ont (ou pas) pensé la même chose que moi.

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  3. oh, ce doit être un beau manga et je trouve la couverture sublime. Moi aussi j'ai quelques craintes généralement sur ces sujets rebattus. Il est appréciable de trouver des auteurs qui savent renouveler ce thème sans tomber dans le pathos.

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    1. Oui, c'est un très beau manga. Le sujet est traité avec beaucoup de sensibilité.

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  4. Comme je le disait à David (iddBD) pour le graphisme, il s'agit d'une œuvre de jeunesse, ce qui explique aussi le côté "figé" dont tu parles.
    C'était bien l'impression que j'en avais aussi lorsque j'ai feuilleté l'album.
    L'auteur a bien voulu tout redessiner, et a fait la proposition à son éditeur, mais celle-ci a été refusée.

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    1. Je ne savais pas qu'il avait proposé à son éditeur de le redessiner. C'est certain qu'il y a quelques maladresse mais pas non plus au point de tout jeter à la poubelle. J'ai déjà vu bien pire !

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  5. L'un des rares mangas actuels qui, je pense, me permettrait de me réconcilier avec ces albums asiatiques que je délaisse de plus en plus. Ton avis me conforte dans cette idée en tout cas

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    1. Tu as raison, c'est sans doute le titre idéal pour te réconcilier avec le genre. Le ton est vraiment particulier et très éloigné de ce que l'on trouve d'habitude dans les mangas.

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  6. Je l'avais noté chez Choco, justement à cause du côté "guerre vue par les habitants" qui m'intéressait et qui est peu développé en BD ou manga ... je trouve que ça peut changer complètement la vision qu'on en a !

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    1. Oui le point de vue est original, c'est ce qui fait tout l'intérêt de ce titre.

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