jeudi 26 mai 2016

Les rêveries d’un gourmet solitaire - Taniguchi et Kusumi

Il me ressemble le gourmet solitaire. Enfin, j’aimerais lui ressembler plutôt. Solitaire, je le suis, assurément. Gourmet, sans doute bien moins que lui. Mais j’ai souvent, comme lui, cette mine renfrognée, tête légèrement inclinée vers le bas, perdu dans mes pensées. Je l’apprécie parce qu’il est simple, il va à l’essentiel sans se départir d’une certaine exigence vis-à-vis de la nourriture. Il est curieux aussi, il aime sortir des sentiers battus pour trouver la gargote qui ne paie pas de mine où le patron, derrière son comptoir et sans avoir l’air d’y toucher,  mitonne des plats délicieux.

Le gourmet solitaire est friand d’expériences culinaires nouvelles. Il flâne, il prend son temps. Personne ne l’attend, personne ne lui met la pression. Célibataire et travailleur indépendant, il avance à son rythme. Comme beaucoup de personnages de Taniguchi, c’est un rêveur, un méditatif. Ses recherches de restaurants sont autant de balades où le chemin compte presque plus que la destination finale.

Il ne se passe rien dans ce manga. L’histoire se répète à chaque chapitre. Notre gourmet profite de la moindre occasion pour se lancer en quête d’un endroit où manger, au petit bonheur la chance. Il ne s’interdit rien, des nouilles chinoises à la pizza, du repas péruvien au japonais le plus classique en passant par le couscous. Le schéma est toujours le même : il cherche sans but précis, il trouve, s’installe, choisit et mange. Dit comme ça, bonjour l’ennui ! Et pourtant ce n’est pas du tout le cas, on se régale autant que lui. Une question d’atmosphère, de façon d’être au monde. Une posture où la seule chose qui importe est de n’être lié à aucune obligation. Il est toujours seul et heureux de l’être. Il se parle à lui-même, se félicite quand il dégotte la perle rare, s’enguirlande quand il se goinfre trop.

C’est un intuitif, le gourmet. Il hésite souvent, se demande s’il a fait le bon choix, reconnaît quand il se trompe. Mais il se laisse porter par son envie, il avance sans tergiverser, sans chouiner, il profite de ce qui s’offre à lui. J’aime sa modestie, j’aime le voir s’empiffrer, j’aime son enthousiasme jamais feint face à la nourriture. Plus que tout, j’aime sa liberté. Mon héros de manga préféré. Sans doute parce qu’il est tout sauf un héros.

Les rêveries d’un gourmet solitaire de Taniguchi et Kusumi. Casterman, 2016. 132 pages. 16,95 euros.









34 commentaires:

  1. Rien que le titre fait furieusement envie...

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  2. excellent souvenir de lecture! (qui donne faim
    ;...)

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    1. Attention, c'est la suite là, pas le premier volume ;)

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  3. J'avais adoré le premier, je compte bien lire celui-ci !

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  4. j'aime beaucoup ce gourmet solitaire moi aussi. il peut être tout le monde, donc ça peut être nous, et c'est ça qui touche (et qui donne faim)

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  5. Elle a l'air bien sympathique cette petite ballade...! Il faudrait que je m'intéresse au premier tome !

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  6. Taniguchi, j'adore... qu'il se promène de restaurant en restaurant devrait me plaire tout autant que ce que j'ai déjà lu.

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  7. tentant... en plus, je suis fan de ses dessins...

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    1. Des dessins reconnaissables au premier coup d’œil d'ailleurs.

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  8. J'ai beaucoup aimé le premier, que je tarde un peu à chroniquer.

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  9. J'aime ce dessin le seul auteur de Manger que j'ai lu

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    1. Logique, c'est, dans l'esprit, le plus européen des auteurs de manga ;)

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  10. mon ventre gargouille une fois encore, j'avais beaucoup aimé ce manga paru en 2005 il me semble. Belle idée de le republier !

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    1. Ah non, ce n'est pas le même, c'est sa suite inédite ;)

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  11. Un Taniguchi que je n'ai pas lu tiens...

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  12. Je garde un bon souvenir finalement du Gourmet même si le côté contemplatif me convient moins. Alors pourquoi pas.

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    1. Celui est tout aussi contemplatif, autant te prévenir ;)

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  13. Tu sais ce qui m'arrête ? Le noir et blanc ! j'ai l'impression que pour s'épanouir la poésie de ce gourmet aurait été mieux en couleurs...

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    1. L'absence de couleur ne nuit pas du tout à l'esprit contemplatif de l'ensemble.

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  14. attends mais Le Gourmet solitaire a été pour moi une révélation!! Je ne connaissais pas ce "supplément"?

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    1. C'est plus qu'un supplément, c'est carrément un second tome !

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  15. Solitaire, je le suis. Gourmet, certainement moins que lui. Moi aussi, j'aimerai ressembler à ce gourmet solitaire. Ses rêveries me paraissent si belles, les flâneries d'un homme qui marche de restaurants en izakaya sont si tentantes...

    Pour moi aussi, ce type pourrait ressembler à un héros. Libre dans sa tête et de ses choix. Le premier m'a emballé, malgré sa répétition, celui me tente également pour poursuivre les aventures culinaires d'un homme qui marche et rêve dans les rues de Tokyo.

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    1. La répétition ne me gêne pas du tout, ici du moins. Au contraire, à chaque nouveau chapitre j'ai la certitude de retrouver des repères qui me conviennent parfaitement.

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  16. J'avais déjà passé un moment fabuleux avec Le gourmet solitaire. Celui-ci est une sorte de suite ? Si c'est le cas, sûr que je le lirai !

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  17. Réponses
    1. Il a fait d'autres choses qui m'ont beaucoup moins séduit cela dit ;)

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