mercredi 22 mars 2017

La Famille Fun - Benjamin Frisch

La couverture annonce la couleur : les Fun, représentent la famille américaine parfaite. Robert, le père, est un dessinateur de BD dont les strips autobiographiques connaissent un grand succès dans les journaux. Marsha, la mère, femme au foyer, est  une épouse modèle. Et leurs quatre enfants Robby, Molly, Mikey et J.T sont d’adorables garnements. Tout va bien donc chez les Fun, tout le monde s’aime et n’arrête pas de se le dire pendant que le sucre et la guimauve dégoulinent et que le lecteur a l’impression d’avoir été projeté dans une pub vantant l’American way of life.

Je vous rassure (ou pas), cette impression ne dure que les cinq premières pages. Parce qu’après les choses se gâtent. Un coup de téléphone annonce le décès de la maman de Robert. Ce dernier sombre dans la dépression, Marsha plie bagage et s’acoquine avec un gourou pendant que les enfants tentent de sauver les meubles. En vain.

J’ai rencontré Benjamin Frisch à Angoulême. Un jeune homme souriant, charmant et affable à qui on donnerait le bon Dieu sans confession. Un jeune homme doux comme son dessin tout en rondeur aux couleurs chaudes. Je ne savais pas alors ce qu’allait donner la lecture de l’album mais après coup, je me dis que ce cher Benjamin cache drôlement bien son jeu. Je ne pouvais pas me douter que ce visage d’ange et ce style « cartoonesque » dissimulaient un humour noir féroce et une critique acerbe du politiquement correct made in America.

Je vais rester évasif pour ne pas trop en dévoiler mais sachez que la famille Fun n’a rien de fun et que sous le verni très hypocrite du « tout le monde est happy » on trouve des névroses corsées et des pathologies plutôt lourdes. Le propos est grinçant et la fin, loin d’apaiser la situation, installe un malaise que je n’avais pas vu venir et que j’ai trouvé très dérangeant.

Une chronique familiale sans concession, portrait au vitriol d’une Amérique rongée par la religion, l’égoïsme et la cupidité. Le décalage entre le dessin tout mignon et les horreurs racontées est à l’évidence la trouvaille la plus remarquable (et la plus efficace) de l’album. Assurément une de mes plus belles surprises de ce début d’année en matière de BD.

La Famille Fun de Benjamin Frisch. Ça et là, 2016. 240 pages. 22,00 euros.










27 commentaires:

  1. Ah ben oui, là ça m'a foutu un coup déjà ton deuxième paragraphe annonçant la (vraie) couleur ! Mais du coup, me voilà bien intriguée par cet album qui a l'air d'une sacrée découverte en effet !

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  2. Il y avait déjà la chronique de Syl qui m'avait intriguée. La tienne l'est tout autant pourtant, pas certaine du tout que j'accroche avec cet album-là !

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  3. Ha tiens, j'avais déjà noté ce titre et je croyais que c'était de chez toi... toujours est-il que ça confirme mon envie de découvrir cette famille!

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  4. Le dessin ne me plait pas du tout mais le thème de la famille névrosée beaucoup! :-D

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    1. C'est le décalage entre les deux qui fonctionne je trouve.

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  5. Il m'attend de pied ferme celui-ci ! J'ai rencontré Benjamin Frisch juste après toi, à Paris la semaine suivant Angoulème, une belle personne ! Son trait me parle moins dans cet album que ce qu'il a pu nous montrer de son prochain projet, mais il faut parfois passer au delà...

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    1. Ce serait dommage d'en rester à un graphisme avec lequel on n’accroche pas.

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  6. Intriguée aussi même si le dessin est à peu près tout ce que je n'aime pas en BD...

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  7. Ohhhhhh ! je note jeune homme, cette BD a tout pour me plaire
    Des bises immenses <3

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  8. Je partage ton impression de malaise mais je l'ai lu d'une traite.
    Je ne sais pas dire si l'ai aimé ou pas mais c'est une curiosité, cette BD;

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    1. En tout cas c'est un album qui ne peut pas laisser insensible !

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  9. c'est très intrigant. je note !

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  10. Côté dessin, je n'aime pas trop les yeux vides... ça créé déjà un malaise !

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    1. Il n'y a pas que ça qui crée un malaise dans cet album, crois-moi !

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  11. Cool! J'adore être surprise par un auteur! L'humour noir féroce, trop bon :D

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  12. La couverture ne m'aurait pas attirée mais ton avis m'intrigue :)

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    1. La couverture est tellement décalée par rapport au contenu !

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  13. Pas fan du dessin mais si l'histoire est chouette et qu'elle croise ma route je pourrais sans doute passer outre.

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    1. Il faut vraiment aller au-delà du dessin, ça vaut la peine !

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