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mercredi 9 avril 2014

Le train des orphelins T1 : Jim - Charlot et Fourquemin

Dans les années 20, à New York, un train s’apprête à partir pour un long voyage. A son bord, des orphelins qui vont être « distribués » aux familles en mal d’enfants de l’Ouest et du Middle West. Dans chaque ville où le train s’arrête, c’est un peu la foire aux bestiaux. Et pour les enfants, c’est la roulette russe avec, coté pile, la chance de tomber sur des adoptants aimants et généreux ou, coté face, de sombres énergumènes cherchant de la main d’œuvre bon marché voire même de la chair fraîche…

Ce premier tome s’attarde sur la situation de Jim, Joey et de leur petite sœur Anna. Une fratrie solidaire qui risque la séparation à chaque étape du train. Leur chemin croisera celui d’Harvey, gamin débrouillard et pragmatique : « Ce qu’il faut, c’est trouver une bonne famille… des parents pleins aux as… et après… la belle vie… ». Leur périple sera marqué du sceau de l’amitié et de l’entraide, malgré les coups durs.

Basée sur une histoire vraie, cette série revisite un pan méconnu de la conquête de l’ouest. 250 000 enfants embarquèrent de New York entre 1850 et 1929 vers des régions en mal de population jeune et travailleuse. Si le placement d’enfants des rues relève d’une démarche louable, le philanthropisme de façade se lézarde rapidement lorsque l’on découvre les méthodes employées. Le placement se fait sans aucune vérification préalable, les enfants sont simplement étiquetés comme des animaux et offerts à la première personne qui se manifeste. Sans compter les petits trafics menés par les adultes encadrant le voyage qui réservent à l’avance les « plus belles pièces » contre de confortables rémunérations. De fait, mieux valait être blond et en bonne santé pour trouver preneur. Le programme ne prenait par ailleurs pas en charge les enfants noirs (« Que voudriez-vous que nous fassions de négrillons… nous sommes une institution caritative mais il y a des limites à tout").

Le train des orphelins revient donc sur la plus grande migration d’enfants de tous les temps. Une migration nécessaire pour arracher à la misère des gamins abandonnés mais dont la mise en œuvre souffrit de nombreuses dérives. Alors que le quatrième tome vient tout juste de sortir, je n’ai qu’une hâte, savoir ce que vont devenir, Jim, Joey, Anna et Harvey…  


Le train des orphelins T1 : Jim de Charlot et Fourquemin. Grand Angle, 2012. 48 pages. 13,90 euros.

Un grand merci un Choco qui m'a offert cet album dans le cadre du loto BD. Un très bon choix !

Les avis de Choco et Hérisson.






mercredi 2 avril 2014

Max Winson T1 : La tyrannie - Jérémie Moreau

Max Winson est un phénomène. Le seul tennisman de l’histoire à avoir remporté tous ses matchs. N°1 mondial depuis 7 ans, 24 titres en grand chelem et 94 tournois gagnés d’affilée. Un gamin au physique de colosse qui ne se pose pas de question, une sorte de robot, programmé pour gagner, cornaqué par un père tyrannique ne lui laissant rien passer. Pourtant le jeune homme semble traîner une mélancolie persistante, une fragilité difficile à cerner.
Il va d’ailleurs suffire d’une interview télé catastrophique pour ébranler le mythe. Le paternel en fait une attaque et Max doit trouver un nouvel entraîneur. Ce sera Andy, un inconnu aux méthodes très particulières qui va le préparer au match le plus compliqué de sa jeune carrière….  

Avec ce diptyque, Jérémie Moreau (Le singe de Hartlepool) a voulu faire un shonen à l’envers. Dans Dragon Ball ou Naruto, le héros, chétif, honnête et un poil naïf, devient le plus fort de tous en franchissant les paliers petit à petit alors qu’ici, Max Winson est au sommet dès le départ et il voudrait descendre de son piédestal. En filigrane l’auteur dénonce avec une certaine finesse les méfaits du sport spectacle, de sa médiatisation et de sa proximité avec la pire forme de libéralisme économique. Mais le cœur du propos reste la compétition à outrance qui caractérise notre société, ce besoin d’être meilleur que les autres et cette violence de la victoire qui galvanise les foules. C’est d’ailleurs le reproche que fait une journaliste à Max : « Tu incarnes la compétition sauvage. Pour s’en sortir, il faut écraser son voisin. Il faut être plus fort, plus performant, plus endurant, et pire… impitoyable. »

Par rapport au singe de Hartlepool le trait est ici plus relâché, plus nerveux, plus dépouillé. Quelque chose de brut et d’instinctif qui rappelle par moments Bastien Vives. Autant dire que je ne suis pas fan… Par contre, le noir et blanc est sympa et le découpage est super dynamique, avec quelques effets vraiment astucieux et risqués mais toujours très lisibles.

Une bonne surprise. Avec ce premier album solo, Jérémie Moreau s’est lancé sans filet pour dénoncer un modèle social faisant de la recherche de la réussite notre seule raison d’être. Le tout sans passer pour un donneur de leçon rabat joie. Chapeau !


Max Winson T1 : La tyrannie de Jérémie Moreau. Delcourt, 2014. 158 pages. 15,95 euros.


L'avis d'Yvan






mercredi 26 mars 2014

Clair-obscur dans la vallée de la lune - Mongermont et Alcante

1998. José est guide touristique sur les hauts plateaux chiliens. D’habitude il encadre des groupes mais il se retrouve pour la première fois avec une seule et unique cliente, Joan, jeune femme insouciante et pleine de peps. Cette américaine à la chevelure flamboyante agace José autant qu’elle le trouble. Lui est un homme taciturne, torturé par un passé que l’on sent particulièrement douloureux. Ensemble, José et Joan vont peu à peu s’apprivoiser et les rôles s’inverser, le guide n’étant pas forcément celui que l’on croit.

Une très belle histoire. Je vous arrête tout de suite : non, Joan et José ne vont pas tomber amoureux l’un de l’autre, c’est beaucoup plus fin. Il est torturé par la haine et la vengeance et ne peut se libérer des terribles souvenirs laissés par la dictature de Pinochet. Elle, derrière le sourire et la bonne humeur de façade, porte les stigmates d’un drame personnel effroyable. Leur rencontre aura un effet cathartique et permettra à chacun, enfin, d’imaginer une possible reconstruction.

Si l’album est aussi somptueux, c’est parce que le dessin est à la hauteur du texte. Quels décors, quelle lumière, quelles couleurs ! Il se dégage de l’ensemble une vraie poésie douce-amère, où les silences en disent bien plus que de longs discours.

Un récit sensible qui avance par petites touches et amène de la clarté dans des existences meurtries. Une totale réussite !

Clair-obscur dans la vallée de la lune de Mongermont et Alcante. Dupuis, 2012. 64 pages. 15,50 euros.

Un album offert par Cristina. Je la remercie pour cette gentille attention et pour la pertinence de son choix.

Les avis de Cristina et Yvan.



mercredi 19 mars 2014

Mamette T6 : Les papillons - Nob

Mamette fête ses 84 ans. En cadeau elle reçoit un « ordonnateur », une box « internette » et un appareil photo « radioactif ». Sa petite fille, avant de s’expatrier à Londres, vient lui donner des cours d’informatique : transférer les photos, les poster sur son mur… tout ça c’est du chinois pour Mamette. La vieille dame se lance aussi dans le yoga avec ses copines, histoire de se relaxer un peu. Et puis sa mémoire lui joue des tours. Elle oublie des mots, elle ne sait plus où elle range ses affaires. Mamette se doute que quelque chose cloche. Surtout, elle se dit qu’en perdant la mémoire elle risque d’oublier son Jacques !

Un sixième album plus grave que les précédents. Mamette grandit encore, elle sent davantage le poids des ans. Son choupinet de fils s’inquiète de la voir décliner physiquement et moralement. Un album qui, sous couvert de perte d’autonomie, laisse une large place à la nostalgie. Mais entendons-nous, si le propos est plus sérieux, l’humour reste bien présent, tout comme la fraîcheur et la gourmandise qui caractérisent cette adorable grand-mère. Finalement, Nob a trouvé une façon intelligente de se renouveler. Sans rien forcer, en déroulant de nouvelles thématiques avec une parfaite évidence. Et puis la dernière page, magnifique de douceur, remet les choses en perspective et rappelle que cette série reste avant tout un hymne à la vie.

Pourquoi le nier, une fois encore je sors enchanté de ce rendez-vous avec Mamette, cette mamy que, décidément, j’aime d’amour. Oui, j’adore Mamette et Bukowski, c’est le grand écart mais je n’y peux rien, ces deux-là sont un peu mon Yin et mon yang.


Mamette T6 : Les papillons de Nob. Glénat, 2014. 48 pages. 10,00 euros.




mercredi 12 mars 2014

Le Horla - Guillaume Sorel et Maupassant

Dans Le Horla, Maupassant raconte, sous forme de journal, les hallucinations d’un homme persuadé qu’une présence maléfique veut prendre possession de son corps et de son esprit. Un être surnaturel imposant à sa victime sa propre volonté et absorbant peu à peu son énergie vitale. Une nouvelle vraiment flippante dont je garde un souvenir très précis des années après l’avoir lue.

Guillaume Sorel n’a pas choisi de faire une adaptation à l’identique. D’ailleurs il déclarait récemment qu’ « une bonne adaptation est une trahison ». Si certains monologues sont bien des passages du texte source, exit  le journal. Le narrateur est accompagné d’un chat (inexistant à l’origine) auquel il confie ses tourments et ses états d’âme. Il y a aussi une vraie ambiguïté quant au mal qui frappe la victime. Chez Maupassant, il ne fait aucun doute que l’homme souffre d’un trouble du système nerveux et bascule dans la folie. Dans la BD, le problème ne vient pas forcément de sa santé mentale mais il pourrait bien avoir des causes réellement surnaturelles. En tout cas rien n’est clairement tranché je trouve. Ce qui est certain c’est qu’il vit dans une grande solitude, dans un isolement qui va peu à peu accentuer le sentiment de terreur l’envahissant chaque jour davantage.       

Le dessin, c’est pas un scoop, est une tuerie totale. Je dis que ce n’est pas scoop parce que Sorel est un des plus talentueux dessinateurs actuels. Il y a dans cet album des planches incroyables, de véritables tableaux. Et le plus fort c’est que l’esthétisme reste constamment au service du récit, jamais il ne tombe dans la démonstration gratuite. Couleurs, décors, ambiance oppressante à la lueur des bougies, tout est parfaitement travaillé.

J’ai beaucoup aimé la façon dont Sorel s’est approprié le texte d’origine pour mieux le triturer avec ses propres références, finalement beaucoup plus fantastiques que psychanalytiques. Une adaptation à la fois fidèle et personnelle, visuellement somptueuse.



Le Horla de Guillaume Sorel. Rue de Sèvres, 2014. 64 pages. 15,00 euros.

Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Leiloona, Noukette et Stephie. Quel trio !

L'avis de Paikanne






mercredi 5 mars 2014

Perico T1 - Philippe Berthet et Régis Hautière

Cuba, 1958. Le président Batista a du mal à contenir la révolution castriste et les barons de la pègre locale s’inquiètent. Le meurtre d’un américain va mettre le feu aux poudres. Une mallette de billets qui disparaît et le jeune Joaquin, serveur sans histoire dans un casino de La Havane, va voir sa vie basculer. Impliqué malgré lui dans une affaire qui le dépasse, il part pour la Floride avec Elena, jeune chanteuse au charme vénéneux promise à Trafficante, le plus grand parrain de l’île. A leurs trousses, une horde de tueurs sans pitié...

Voila un pitch somme toute classique. Du noir bien serré à la trame simplissime mais d’une redoutable efficacité. Berthet a demandé à Régis Hautière de lui écrire une histoire après avoir lu et adoré Abélard (on peut le comprendre). Le scénariste lui a concocté un récit aux petits oignons dans une ambiance qui n’est pas sans rappeler le « Privé d’Hollywood », l’une de ses plus célèbres séries. En prime, j’ai retrouvé dans ce premier tome plusieurs éléments inspirés d’Abélard : le jeune naïf fou amoureux d’une femme fatale ne s’intéressant pas à lui, l’exil volontaire vers un avenir que l'on pense meilleur, la rencontre impromptue avec un inconnu croisé au cours du voyage... tout ça dans un diptyque. Pour le coup, on peut craindre le pire pour notre jeune naïf quand on connait la fin d'Abélard !

Le graphisme est somptueux et Berthet s’en donne à cœur joie. Cuba et la Floride des années 50-60 sont restitués avec une déconcertante facilité. Voiture, vêtements, architecture, tout y est. Sans compter les femmes à la plastique de rêve, une des « spécialités » du dessinateur des incontournables « Pin-up ».

Un excellent premier volume, qui se dévore d’une traite. Moi qui ne suis pas amateur de polar, je me suis régalé. Et connaissant Hautière, je ne doute pas une seconde que la conclusion de ce road trip trépidant soit à la hauteur.


Perico T1 de Philippe Berthet et Régis Hautière. Dargaud, 2014. 64 pages. 15,00 euros.






mercredi 26 février 2014

Pendant que le roi de Prusse faisait la guerre, qui donc lui reprisait ses chaussettes ? - Zidrou et Roger

J’aime Zidrou pour ses prises de risque. J’aime qu’un auteur puisse passer de Ducobu à Lydie, de Boule à zéro au Beau voyage, de Tamara à La peau de l’ours. Je n’ai pas lu tous ses albums, loin s’en faut. Certains ne m’attirent d’ailleurs pas du tout (Tueurs de mamans par exemple), mais il est impossible de ne pas reconnaître en lui un touche-à-tout de grand talent. Et ce qui est fort, c’est qu’il utilise la notoriété acquise avec ses séries phares pour faire passer auprès des éditeurs des projets beaucoup plus casse-gueule. Comme cet album au titre à rallonge par exemple.  

Parce que mettre en scène un adulte handicapé mental et une mère entièrement dévouée à son bien être, fallait oser. Une mère qui n’hésite pas à déclarer quand on lui demande des nouvelles de son fils : « Il vit sa vie, quoi ! Avec ses petites misères et ses grandes joies. Et moi aussi… je vis sa vie. » Une mère qui va au vidéo club lui emprunter son DVD porno préféré, qui supporte ses lubies et ses crises, ses questions répétées cent fois. Une mère fragile sous l’apparente solidité, une mère à qui le poids des ans rappelle qu’elle ne sera pas toujours là pour veiller sur lui.

Et tout ça sans pathos. Sans surjouer. Avec un enchaînement de petites scènes du quotidien où le voyeurisme et le misérabilisme n’ont pas leur place. Toujours cette humanité en marche chez Zidrou, cette façon de vous toucher avec trois fois rien. L’émotion est là, palpable mais jamais envahissante. C’est vraiment fort.

J’avais apprécié le travail du dessinateur espagnol Roger sur la série Jazz Maynard. Ici son trait s’arrondit quelque peu, il est moins heurté, moins nerveux, et c’est une bonne chose par rapport à l’histoire. Par contre niveau couleur, ce n’est pas une réussite (longtemps que n’avais pas râlé contre la couleur !).

Au final, cela reste un album superbe, tout en sensibilité. Un grand merci et un gros bisou à la blogueuse qui a eu la gentillesse de me l'offrir pour mon anniversaire.


Pendant que le roi de Prusse faisait la guerre, qui donc lui reprisait ses chaussettes ? de Zidrou et Roger. Dargaud, 2013. 56 pages. 15 euros.

Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Anne.

Les avis de Choco ; LasardinemanU ; Noukette ; Yaneck ; Yvan


mardi 25 février 2014

Amorostasia - Cyril Bonin

Des amoureux frappés de plein fouet par une étrange maladie : « rigidité, inertie musculaire, mutisme… les victimes sont dans un état cataleptique ou catatonique. » Le virus est baptisé Amorostasia. Et si au départ il ne semble toucher que Paris, il se répand rapidement dans toute la France. Les médecins ne trouvant aucun remède, les autorités prennent des décisions radicales (et absurdes) pour endiguer la maladie, mais rien n’y fait. Olga, journaliste, est chargée d’enquêter sur le sujet. Elle va constater, chemin faisant, le néant de sa propre vie sentimentale…

Une belle idée. A quoi bon vivre sans amour ? Pourquoi chercher à guérir les malades, statufiés mais semblant parfaitement heureux ? Après tout, plus rien ne peut leur arriver dans leur « bulle ». J’ai apprécié les réflexions que suscite l’émergence de cette drôle de maladie. Olga, en couple, se demande pourquoi ni elle ni son homme n’ont été touchés alors que sa concierge et son mari, qui ne cessent de s’engueuler, ont été retrouvés pétrifiés, assis face à face devant leur assiette de soupe. Finalement, l’amorostasia sert de révélateur pour les amoureux et ceux qui ont l’illusion de l’être. Pour autant, certains prennent les choses avec philosophie. Les parents de la journaliste ont échappé au virus et je trouve leur explication pertinente : « nous avons dû admettre que nous n’étions plus amoureux. Mais en revanche, nous avons aussi constaté qu’il y avait une grande tendresse entre nous, une grande complicité… nous nous connaissons si bien, nous nous faisons confiance et sommes fidèles l’un à l’autre. Jamais nous ne voudrions nous faire de mal. Peut-être même est-ce mieux ainsi ? ». Finalement, l’amour peut prendre tellement de formes, de l’amour fusionnel à l’amour idéal, de l’amour romantique à l’amour vain en passant par l’amour filial et l’amour-amitié, un concept que j’ai découvert il y a peu… Bref, cet album questionne énormément et apporte bien peu de réponses, mais cela me convient parfaitement.

Je ne connaissais pas Cyril Bonin et je dois avouer que j’aime beaucoup son dessin. Ses cadrages variés et son découpage dynamique rendent la lecture des plus agréables. Je suis juste un peu sceptique par rapport à l’absence de couleur (pour une fois !), je trouve ces tons de gris un peu tristounet.

L'idée de départ est excellente et la fin parfaite, je trouve. Entre les deux, beaucoup de pistes sont lancées sans forcément être creusées, ce qui peut donner l'impression d'un certain manque de profondeur. Personnellement, je n'ai pas ressenti les choses ainsi et cet album me paraît au contraire très abouti. Une vraie belle découverte ! 


Amorostasia de Cyril Bonin. Futuropolis, 2013. 128 pages. 19 euros.

Une lecture un peu particulière aujourd'hui, d'une part parce que je la partage avec Cristina (et je crois bien que c'est notre première LC), et d'autre part parce que cet album m'a été offert par quelqu'un de très cher. Une BD qui compte donc un peu (voire beaucoup) plus que d'autres...


Les avis de Cristie, Lasardine, MarionMoka, Natiora, Noukette,  Sandrine et Yvan.



mercredi 19 février 2014

Annie Sullivan et Helen Keller - Joseph Lambert

Incroyables destins que ceux d’Helen Keller et d’Annie Sullivan. La première est née en 1880 dans l’Alabama. A 19 mois, elle a contracté une maladie inconnue qui l’a rendue aveugle et sourde. La seconde est née en 1866. A cinq ans, cette fille d’immigrée irlandais fut victime d’une infection oculaire et perdit presque la vue.  Abandonnée par son père, elle fut recueillie avec son petit frère dans un hospice. En 1880 elle entra à l’institut Perkins, une institution chargée de fournir assistance et éducation aux personnes aveugles ou malvoyantes. A 20 ans, sortie diplômée de l’institut et major de sa promotion, elle accepta un poste de préceptrice auprès d’Helen Keller.

L’album raconte comment Annie a pu domestiquer et éduquer Helen, une gamine
sauvage et incontrôlable ne supportant aucune contrariété et aucun contact. De leurs luttes épiques, du combat quotidien mené par la préceptrice pour inculquer à son élève les règles de vie les plus élémentaires et la maîtrise du langage, va naître une relation quasi fusionnelle. Le face à face entre ces deux écorchées vives est parfaitement rendu. Les flash back dans la jeunesse d’Annie permettent de comprendre pourquoi cette jeune femme tient tant à réussir l’éducation d’Helen. Son acharnement sans faille apparaît à certains moments effrayant mais l’auteur montre à quel point le chemin menant la petite fille aveugle et sourde vers le savoir fut long et douloureux.

Niveau dessin, j’avoue que je ne suis pas fan du trait de Joseph Lambert. Son gaufrier de 15 ou 16 cases par planches est hyper répétitif mais il était je pense nécessaire pour détailler longuement chaque scène-clé de l’album. De toute façon, le lecteur n’est pas là pour prendre une claque visuelle. Il est là pour découvrir comment les liens se tissent, comment l’obstination sans faille et la certitude dans les méthodes pédagogiques déployées par Annie ont porté leurs fruits.

Une double biographie poignante et maîtrisée qui ne se laisse à aucun moment déborder par un trop plein d’émotion. Il aurait pourtant été facile de tomber dans le larmoyant mais Joseph Lambert évite ce piège avec brio.

Un album offert par Valérie dans le cadre du loto BD de Loula. Un choix pertinent, je me suis régalé.
Et une lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec Sandrine.


Annie Sullivan et Helen Keller de Joseph Lambert. ça et là, 2013. 94 pages. 22 euros.

Les avis de Valérie et Yvan.






mercredi 12 février 2014

Le jardin d’hiver - Dillies et La Padula

« On ne choisit pas toujours qui on adopte et par qui l’on peut être adopté ».

Une ville grise et terne, un temps de chien, un temps à s’ouvrir les veines. Sam vivote dans un apart minable. Il bosse dans un troquet sans âme et traîne une mélancolie dont rien ne semble pouvoir le débarrasser. Même s’il y a Lili, la danseuse qu’il rejoint certains soirs avec plaisir. Il croit qu’il l’aime et se demande si c’est réciproque. Sam navigue dans un quotidien bien rôdé, tellement bien rôdé qu’il en a depuis longtemps perdu tout intérêt. Un quotidien empli de solitude et d’indifférence. Il faudra une rencontre avec son voisin du dessus pour qu’une porte s’ouvre. Le vieil homme le prend pour son fils. Il va surtout lui faire comprendre qu’une douce folie est nécessaire pour embellir la vie, pour faire en sorte que les rêves puissent s’accomplir.

Pour une fois Dillies n’est pas aux pinceaux mais sa petite musique résonne toujours aussi fort. On se dit au départ que le récit va être d’une insondable tristesse, une « ode » à la déprime que l’on devine dès la couverture. Mais cette fois-ci il y a de la lumière, beaucoup de lumière. Une jolie forme d’humanité alliée à une tendre poésie. Des corps et des esprits cabossés qui reprennent des couleurs. A la fin, la pluie a cessé, c’est un signe qui ne trompe pas.

De prime abord, le dessin anguleux de l’italienne Grazia La Padula interpelle. Mais sous l’apparente (et fausse) impression d’une certaine maladresse se cache un vrai talent graphique capable de créer une atmosphère servant à merveille le scénario.

Du bon Dillies, de l’excellent Dillies même. J’ai le sentiment de redire toujours la même chose à propos de cet auteur mais il est tellement rare de construire une œuvre sans faire la moindre fausse note que cela mérite d’être répété encore et encore.


Le jardin d’hiver de Dillies et La Padula. Paquet, 2009. 66 pages. 15,50 euros.

Une lecture commune que j'ai l'immense plaisir de partager avec Moka

Les avis  de Choco, Loo, MarionNoukette et Yaneck.








samedi 8 février 2014

Quand ma pal BD grossit à vue d’œil

Début janvier, je faisais le point sur ma pal BD en me disant que la situation n’avait rien d’alarmiste : une grosse trentaine d’albums en souffrance pas de quoi s’affoler. Oui mais voila, depuis une dizaine de jours une véritable pluie de BD m’est tombé dessus, pour mon plus grand plaisir. Petit tour d’horizon de ces nouveaux arrivants sur mes étagères :

Les achats compulsifs (ceux auxquels je ne peux pas résister et surtout auxquels je n’ai pas envie de résister) :















Les albums offerts par deux adorables blogueuses (qui se reconnaîtront) pour mon anniversaire :


























Les albums gagnés dans le cadre des lotos BD organisés par Loula et Valérie :

















Douze nouveaux albums en quelques jours, une véritable avalanche. La question maintenant est : avec lequel vais-je commencer ? Et si vous êtes partant(e) pour une lecture commune, n’hésitez pas à me faire signe.



mercredi 29 janvier 2014

La guerre des lulus, 1915 : Hans - Régis Hautière et Hardoc

Rappelez-vous des Lulus. Lucas, Lucien, Ludwig et Luigi. Quatre orphelins picards abandonnés au moment de l’évacuation de leur village à l’automne 1914. Quatre gamins obligés de se débrouiller seuls dans la forêt où ils ont construit une cabane. Rapidement rejoints par un cinquième élément, Luce, les enfants tombent nez à nez avec Hans, un soldat allemand mal en point.

Dans ce second volume, on les retrouve au début de l’année 1915, au moment où ils découvrent que Hans n’est pas forcément un ennemi. Cet homme est un déserteur fuyant l’horreur des combats et son seul objectif est de retrouver sa femme enceinte. Avec ce nouvel allié les Lulus vont affronter dans la bonne humeur le printemps et l’été qui s’annoncent. Mais l’horreur de la guerre n’est jamais bien loin et les enfants vont l’apprendre à leurs dépens.

Quel bonheur de retrouver ces personnages si attachants. Il y a dans cet album une forme de fraternité et d’humanisme qui fait un bien fou. Pour autant point d’angélisme, ce serait mal connaître Régis Hautière. Si la partie se déroulant au printemps allie légèreté et tendresse, la fin de l’été sera tragique. Parce qu’au fond, tout cela n’est pas un jeu et les dernières planches de ce second tome laissent à penser que les Lulus ne sont pas au bout de leur peine.

Graphiquement, j’ai l’impression qu’Hardoc a beaucoup progressé. Les nombreuses scènes se déroulant en forêt sont magnifiques et le travail sur la lumière est somptueux. Et le fan du noir et blanc que je suis dois bien avouer que la mise en couleur est de toute beauté.

Un deuxième volume encore supérieur au premier. La profondeur du propos, la façon dont l’histoire progresse dans une succession de scènes enjouées et d’épisodes douloureux rendent l’ensemble absolument irrésistible. Pas besoin d'en dire davantage, la Guerre des Lulus est une très grande série tout public, rare et précieuse.  

La guerre des lulus, 1915 : Hans de Régis Hautière et Hardoc. Casterman, 2014. 64 pages. 13,50 euros.

Une lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec mes chères complices Moka et Noukette, elles aussi grandes fans des Lulus.

L'avis de Sandrine




Ce billet signe par ailleurs ma première participation au challenge « Une année en 14 » de Stephie.








samedi 25 janvier 2014

Goodbye Bukowski - Flavio Montelli

Bukowski est mon écrivain préféré celui qui a fait de moi un lecteur, rien de moins. On « fête » en 2014 les 20 ans de sa mort et pas mal d’ouvrages lui seront consacrés. Des rééditions de ses textes, un recueil d’inédits que je suis en train de dévorer, quelques biographies que j’ai déjà lues et donc cette BD réalisée par un jeune dessinateur italien né en 1984.

On y découvre Bukowski à 50 ans, au moment où il tente de percer en littérature. Poète reconnu pour ses lectures publiques mouvementées, père d’une fillette de six ans, il s’abîme chaque jour un peu plus dans l’alcool et la solitude. Sa courte liaison avec Diana met fin à plusieurs années sans femme. Entre deux frasques éthyliques, il parvient à être un papa plein de tendresse. Puis on revient sur sa jeunesse, le père violent qui le fout à la porte à 18 ans, les petits boulots qu’il enchaîne à travers l’Amérique, de chambres minables en chambres minables, ses premières tentatives d’écriture qui se soldent par des refus de tous les éditeurs auxquels il soumet ses textes. Il échappe à la mobilisation en 1945, réformé pour instabilité mentale. Puis ce sont ses années de travail abrutissant à La Poste. Montelli raconte aussi la fameuse anecdote où il se retrouve à l’hôpital pour un terrible ulcère dont il réchappe miraculeusement. Le médecin lui dit que s’il boit un verre de plus, il y laissera sa peau. Buk l’écoute religieusement et en sortant de l’hosto il rentre dans le premier troquet et s’en jette un derrière la cravate. 

L'ouvrage se termine sur deux rencontres qui vont changer sa vie. D’abord un éditeur qui lui demande d’écrire un roman et lui propose de le rémunérer avant même la publication, ce qui lui permet de quitter son boulot. Il rédige alors « Le postier » en 21 jours. Ce sera le véritable début de sa carrière. Ensuite il rencontre Linda, avec laquelle il se mariera en 1985. Une femme extraordinaire qui veillera sur lui et l’accompagnera jusqu’à son dernier souffle.

Un album sympa mais sans plus. C’est assez décousu, on passe d’un événement à l’autre, d’une période à l’autre sans véritable lien. Le portrait est touchant sans tomber dans l’idolâtrie, ce que je craignais le plus. Maintenant je me demande à qui s’adresse cette BD. Les fans connaissant sa vie par cœur (c'est-à-dire moi) n’y apprendront rien de nouveau. Les autres risquent d’être un  peu perdus. Surtout, le plus gros problème selon moi c’est que l’on ressort de cette lecture sans avoir compris à quel point cet écrivain est gigantesque. Je ne sais pas, ça manque de citations, de quelques extraits, d’indices permettant à un néophyte de déceler la nature si particulière et incroyablement moderne de son œuvre. Du coup, « frustration » est le mot que je garderais en refermant ce livre.


Goodbye Bukowski de Flavio Montelli. Casterman, 2014. 156 pages. 15 euros.



mercredi 22 janvier 2014

Les carnets de Cerise T2 : Le livre d’Hector - Chamblain et Neyret

Cerise l’apprentie détective, après avoir résolu le mystère du zoo pétrifié, se lance dans une nouvelle enquête. Pourquoi la vieille madame Ronsin se rend-elle toutes les semaines à la bibliothèque depuis des années pour emprunter toujours le même livre ? Un ouvrage sur la seconde guerre mondiale rédigé par un certain Hector Bertelon. Aidée de son amie romancière Annabelle Desjardin, Cerise s’investit tellement dans cette nouvelle affaire qu’elle va finir par se mettre à dos ses meilleures copines Line et Erica. Sans compter que pour parvenir à ses fins, elle va devoir mentir à sa mère…

Bon, soyons honnête, autant j’avais été séduit par le premier volume, autant cette seconde aventure m’a laissé sur ma faim. Il se dégageait du zoo pétrifié une forme de poésie rafraîchissante alors qu’ici l’histoire est attendue et manque singulièrement de peps. C’est peut-être une déformation professionnelle mais je n’ai pas non plus apprécié la mise en scène de la bibliothèque où les prêts se font encore sur des fiches, où la bibliothécaire n’est certes pas une vieille fille mais se voit affubler d’un chignon et d’une garde robe tristounette et où le mode de classement des documents m’est apparu des plus obscurs. Ce ne sont que des détails mais quand même…

Après, graphiquement, c’est toujours aussi agréable. Couleurs douces et chaleureuses, personnages aux mimiques craquantes, décors travaillés, alternance réussie entre les passages BD et le journal intime écrit de la main de Cerise, bref c’est un sans faute. Non, vraiment, c’est uniquement au niveau du scénario que je n’ai pas trouvé mon compte.

Je ressors certes de cet album assez déçu mais je ne compte pas pour autant abandonner Cerise et ses amies. Cette série girly à souhait possède trop de potentiel pour que je l’abandonne sans lui donner une nouvelle chance. Et puis j’ai une vraie fan à la maison donc quoi qu’il arrive, le troisième tome arrivera forcément sur nos étagères.

Les carnets de Cerise T2 : Le livre d’Hector de Chamblain et Neyret. Soleil, 2013. 80 pages. 15,95 euros.

Une lecture commune que j'ai une fois encore le plaisir de partager avec Noukette.

L'avis de Sophie/Herisson