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dimanche 18 juin 2017

Les lectures de Charlotte (38) : Anna et Nougat - Kate Berube

Tous les jours après l’école, le papa d’Anna vient la chercher à l’arrêt de bus. Tous les jours après l’école, la chienne Nougat vient chercher Violette à l’arrêt de bus. Tous les jours après l’école, la maîtresse de Nougat propose à Anna de la caresser et tous les jours Anna répond « Non merci ». Jusqu’au jour où Violette annonce que Nougat a disparu. Chacun se lance alors à sa recherche. A la nuit tombée, aucune du trace du chien. Assise sur les marches de sa maison, Anna entend un drôle de bruit venant des buissons juste à côté d’elle…

Un album pour aider à dédramatiser la peur des animaux. Les dessins sont très doux, l’histoire, basée sur l’entraide, montre qu’il est parfois nécessaire de dépasser ses craintes quand la situation l’exige. C’est mignon comme tout, plein de bons sentiments, et ça fait un bien fou. Un livre pour enfants qui se conclut par un tendre câlin ne peut de toute façon qu’être hautement recommandable. Anna et Nougat est notre lecture du soir en ce moment et va à l’évidence devenir une valeur sûre de la bibliothèque de Charlotte. J’avoue que ce n’est pas pour me déplaire.




Anna et Nougat de Kate Berube. Albin Michel Jeunesse, 2017. 36 pages. 11,90 euros. A partir de 3 ans.







vendredi 2 juin 2017

Les lectures de Charlotte (37) : Les nuits de Lison - André Bouchard

Lison a peur du noir. Il est partout dans sa chambre. A cause de lui, ses doudous la regardent bizarrement et son ombre la poursuit. Lison pense qu’il y a un crocodile sous son lit. Lison entend un moustique et s’imagine qu’il va lui sucer le sang. Lison n’a pas sommeil et veux qu’on lui lise des histoires. En fait, Lison a beaucoup de mal quand l’heure du coucher arrive. Elle n’aime pas la nuit et il n’y a que dans le lit de papa et maman qu’elle se sent en sécurité.

Elle est espiègle la petite Lison. Malicieuse diront certains. Pour moi qui connaît particulièrement bien la question puisque j’ai la même à la maison, c’est une chieuse. Mais une chieuse qui sait y faire (comme la mienne), qui connaît les points faibles de ses parents et les exploite à merveille (comme la mienne). Une chieuse à la répartie surprenante qui, quand elle vous regarde avec ses grands yeux et avance des arguments pas franchement convaincants pour se retrouver dans votre lit, vous fait fondre comme neige au soleil (comme la mienne).



Un livre au format à l’Italienne regroupant des historiettes de quatre pages. Une image par page, façon strip, un dessin aussi minimaliste qu’expressif, une héroïne moderne à la forte personnalité avec une pointe d’insolence et beaucoup de fausse naïveté pour mieux tromper son monde sans avoir l’air d’y toucher.

Autant vous dire que Charlotte adore Lison. Il y avait déjà Boris et Émile comme gamins débrouillards à la langue bien pendue dans sa bibliothèque, je ne suis pas certain qu’y ajouter Lison soit une bonne idée, mais je dois reconnaître que cet album est drôle et sonne juste. Et puis elle a passé l’âge de s’extasier devant le mollasson T'choupi ou l’encore plus mollasson Petit Ours Brun, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. En somme, mon bébé grandit, je vais devoir m’y faire…

Les nuits de Lison d’André Bouchard. Seuil jeunesse, 2017. 64 pages. 11,90 euros. A partir de 4-5 ans.






jeudi 4 mai 2017

Les lectures de Charlotte (36) : Le dessert - Florence Koenig

Le printemps est arrivé. Dans sa grotte, l’ours se réveille. Il est tout maigre et meurt de faim. Mais il a trop dormi et ne se souvient plus de ce qu’il doit manger. Heureusement, il voit des poissons dans la rivière. En plongeant sa patte dans l’eau, il en attrape un et l’avale tout rond. C’est un bon début, cependant il lui faut un dessert. Le lapin a beau proposer une carotte, la grenouille une libellule et l’écureuil une noisette, rien ne lui convient. Pas plus que les nèfles du renard, le pissenlit de la souris ou le ver dodu du canard. Non, ce qu’il faut à l’ours, c’est du miel bien sûr ! Ça tombe bien, le papillon lui indique l’emplacement d’une nouvelle ruche. Mais peut-on se servir sans demander l’autorisation ? La réponse va être douloureuse…

Un ouvrage qui vaut surtout pour ses illustrations en papier découpé invitant à la rêverie. Le vernis sélectif sur chaque page pour représenter l’ours permet de se focaliser sur ses faits et gestes. Le petit format, l’épais papier cartonné et les coins arrondis achèvent de faire de cet album un superbe objet-livre que les enfants auront plaisir à manipuler. Charlotte en tout cas adore voir cet ours sans gêne être châtié par les abeilles.





Le dessert de Florence Koenig. Thierry Magnier, 2017. 24 pages. 11,90 euros. A partir de 3 ans.








dimanche 30 avril 2017

D’entre les ogres - Baum et Thierry Dedieu

Un couple d'ogres ne pouvant pas avoir d'enfant trouve un bébé dans la forêt. Comblés, ils l'élèvent comme leur propre fille. Choyée, Blanche grandit dans la joie jusqu'au jour où elle se rend compte qu'elle est différente de ses parents. Elle se demande pourquoi elle ne mange pas la même chose qu’eux, pourquoi elle ne peut pas les accompagner quand ils partent chasser la nuit et quelle est cette odeur venant la cave ? Conscient qu’avec les années la situation devient compliquée et ne peut plus durer, l’ogre et l’ogresse décident de l'emmener au village des hommes…

Un album jeunesse sombre et dérangeant. Ce qui ne me gêne pas le moins du monde. Parce qu’à tous les âges un livre peut interpeller, questionner, ne pas aller dans le sens de ce que l’on a l’habitude d’attendre d’une lecture. Parce qu’un livre peut provoquer, être triste, offrir de multiples interprétations sans pour autant traumatiser.

Graphiquement, les illustrations charbonneuses de Thierry Dedieu ont un petit quelque chose de lugubre qui colle parfaitement au récit.

Clairement pas un album qui tourne à la franche rigolade mais le propos pousse à la réflexion et offre une émotion aussi touchante que contenue. De la belle ouvrage doublée d’une indéniable prise de risque. Chapeau bas messieurs.

D’entre les ogres de Baum et Thierry Dedieu. Seuil jeunesse, 2017. 38 pages. 15,00 euros. A partir de 5-6 ans.





jeudi 13 avril 2017

Les lectures de Charlotte (35) : Loup-Gris et la mouche - Gilles Bizouerne et Ronan Badel

Après avoir avalé une mouche par inadvertance, Loup Gris se met à zozoter. Chassé de la meute à cause de ce défaut de prononciation, il pense avoir trouvé la solution à son problème en gobant une araignée qui, se dit-il, va le débarrasser de la mouche. Mais aussitôt l’araignée dans son ventre, du fil sort de ses oreilles. Dépité, Loup-Gris se rabat sur un oiseau. Les oiseaux aiment les araignées, c’est bien connu. Oui mais rien n’est simple pour Loup Gris. L’oiseau avalé ne va pas le sauver, loin, s’en faut…

Je suis un grand fan de Ronan Badel depuis des années maintenant. Félicien Moutarde et Émile étaient jusqu’alors mes personnages préférés parmi son riche répertoire mais ce facétieux Loup Gris pourrait bien les détrôner. Maladroit, malchanceux, pas particulièrement futé, il a tout pour plaire le pauvre bougre.


« C’est facile de se moquer, z’ai zuste avalé une mouss ! ». Voila, tout est dit. Il lui a suffit d’avaler cette « mouss » pour que tout le monde se fiche de lui. Un album hilarant, le plus gros coup de cœur de Charlotte depuis bien longtemps. Le lire à voix haute en zozotant est un plaisir dont je ne me lasse pas. Le texte est drôle, le dessin irrésistible et la solution proposée par le renard pour faire passer le zozotement, bien que ne faisant pas dans la dentelle, est à hurler de rire !

Décalée, irrévérencieuse et désopilante, cette histoire en randonnée est d’ores et déjà à classer parmi les incontournables de l’année. Un bijou d’humour à glisser entre toutes les mains, qu’on se le dise !

Loup-Gris et la mouche de Gilles Bizouerne et Ronan Badel. Didier jeunesse, 2017. 36 pages. 12,50 euros. A partir de 4 ans.






samedi 8 avril 2017

Kadogo - Ingrid Chabbert et Joël Alessandra

Aujourd’hui Gabriel fête ses 11 ans. Au village, les femmes dansent, « les chants se mêlent aux cris de joie ». Pour son anniversaire, le garçon reçoit une kalachnikov. Pas un jouet mais une véritable arme de guerre. « Tu es un homme maintenant », lui dit son oncle en lui pressant l’épaule. D’abord amusé et fier de posséder un tel objet, Gabriel déchante lorsque le soir même on l’oblige à monter à l’arrière d’une jeep qui l’emmène vers une destination inconnue pour faire de lui un enfant soldat…

Un sujet terrible. Terriblement casse-gueule aussi. Comment parler aux enfants des enfants soldats ? Sans les traumatiser, sans non plus adoucir la dramatique réalité ? Comment éviter le voyeurisme, la surenchère ? Comment trouver le juste équilibre, comment placer le curseur au bon endroit pour faire mouche ? A la lecture de cet album, cela semble simple. Il suffit d’un texte sobre mais explicite. De dessins tout en suggestion mais particulièrement parlants. Il faut conjuguer émotion et information, sans oublier de pousser le lecteur à la réflexion. Il faut enfin ouvrir une porte vers la reconstruction, vers un avenir possible où le retour à une vie « normale » est envisageable, pour que l’espoir demeure malgré l'horreur.

Finalement, il suffit de faire les choses intelligemment. Avec tact, conviction et sensibilité. Il suffit de ne pas avoir peur d’affronter des thèmes complexes mais importants. Bon, ok, je reconnais que c’est en fait loin d’être simple. Mais quand des auteurs de talent et engagés, soutenus par Amnesty International et par un éditeur tout aussi engagé, se lancent dans une telle entreprise, le résultat est à la hauteur et ne peut que susciter l’admiration. Un album essentiel, indispensable, incontournable. Autant d’adjectifs pour une seule et même conclusion : à lire et à faire lire au plus grand nombre !

Kadogo d’Ingrid Chabbert et Joël Alessandra. Des ronds dans l’O, 2017. 34 pages. 13,50 euros. A partir de 8-9 ans.


Une lecture commune que j'ai une fois de plus le plaisir de partager avec Noukette.





dimanche 26 mars 2017

Les lectures de Charlotte (35) : Minute papillon ! - Gaëtan Doremus

« Voici donc une chenille », nous annonce-t-on en première page. Une affirmation que ladite chenille s’empresse de rectifier : « Eh, minute papillon, je ne suis pas une chenille, je suis un ogre ! ». Le cadre est posé, cette chenille persuadée de ne pas en être une vit dans le déni permanent. Le narrateur nous dit qu’elle mange des haricots ? Elle réplique qu’elle déteste ça et préfère le poisson. Des aubergines lui conviendront davantage, peut-être ? Beurk ! Elle aime mieux grignoter des baleines. Fruits et légumes sont passés en revue et se voient opposer une fin de non-recevoir catégorique : la chenille est un ogre, elle mange des lutins, des enfants, des lapins ou des dinosaures et rien d’autre, nom d’une pipe !

Elle est marrante cette chenille un brin énervée, un poil tête à claque et sacrément râleuse mais surtout (et c’est à l’évidence son plus gros souci) incapable de s’accepter telle qu’elle est. Et pire encore, incapable d’accepter les changements que son corps subit avant une métamorphose à venir dont elle aura sans doute du mal à se remettre.

Un joli album qui vaut autant pour son texte drôle et décalé que pour ses illustrations rappelant des planches encyclopédiques d’antan. A chaque nouvelle « rencontre » avec un fruit ou un légume la chenille se pare d’une couleur supplémentaire pour finir en beau papillon multicolore. Une trouvaille aussi charmante qu’efficace, à l’image de ce bel objet-livre qui ravira à coup sûr petits et grands.



Minute papillon ! de Gaëtan Doremus. Le Rouergue, 2017. 32 pages. 13,90 euros. A partir de 4 ans.






samedi 18 mars 2017

Les lectures de Charlotte (34) : Le monstre du bain de Colin Boyd et Tony Ross

Vous êtes-vous déjà demandé où allait l’eau sale de votre bain ? La mère de Jackson connaît la réponse : elle est aspirée (à la paille) par un monstre caché sous la baignoire. Un monstre dont cette eau sale du bain est le SECOND plat préféré. Jackson le sait bien et c’est pour ça qu’il se lave tous les soirs, afin de s’assurer que le monstre est repu. Un jour pourtant il décide de ne plus y croire et file se coucher tout crotté. N’ayant rien à se mettre sous la dent, le monstre doit se rabattre sur son PREMIER plat préféré. Et la maman de Jackson trouve le lendemain matin le lit de son fils vide…

Je  vous rassure tout de suite, la chute est très drôle et absolument pas dramatique (en même temps il fallait s’en douter).  L’idée de départ est farfelue et le petit Jackson, garnement espiègle et pas franchement porté sur l’hygiène, plaira à nombre de petits lecteurs. Le dessin reconnaissable entre mille de Tony Ross offre au monstre du bain une bonne bouille, bien plus rigolote qu’effrayante.

Un album qui fait mouche, avec une thématique parlante, un texte savoureux, des illustrations particulièrement expressives et une conclusion aussi inattendue que rigolote. Le genre de petit bonbon à savourer le soir au moment du coucher. Et sans le moindre risque de carie en plus !

Le monstre du bain de Colin Boyd et Tony Ross. Seuil jeunesse, 2017. 32 pages. 12,90 euros. A partir de 3-4 ans.







dimanche 12 mars 2017

Le tunnel - Hege Siri et Mari Kanstad Johnsen

Ils s’aiment et sont inséparables. Il a le poil blanc, elle a la fourrure fauve. « Ils creusent un sentier sous le sol. L’un et l’autre, ensemble. Ils tracent leur route ». Jour et nuit ils avancent dans l’obscurité. Parfois ils sortent et gagnent la forêt. Pour manger et boire, fuir un danger, trouver une nouvelle cachette, faire leur toilette. Sous terre ils sont davantage en sécurité. Dehors la grande route les hypnotise. Mais jamais ils ne s’élanceront pour la franchir. Ils se souviennent du chat, de l’écureuil et du renard étendus sur le bitume. Alors ils continuent de creuser, côte à côte. Car rien n’est plus important que rester ensemble quand on s’aime.

Une histoire digne d’une fable, où la sagesse se conjugue à un soupçon de mélancolie. Un couple de lapins qui avance malgré les embûches, trace son chemin au cœur d’un monde hostile et affronte les dangers main dans la main, enfin patte dans la patte. Tout à leur travail, ils discutent, parlent des atouts et handicaps des lièvres par rapport à eux (ils courent plus vite mais creusent moins bien) ou encore des raisons qui les poussent à construire un tunnel sans fin.

Je trouve les illustrations, épurées à l’extrême, d’une grande puissance. Sobriété des images, poésie d’un texte tout en délicatesse et profondeur d’un propos quasi philosophique, il n’en fallait pas pour que je tombe sous le charme de cet album aussi somptueux qu'inclassable.

Le tunnel de Hege Siri et Mari Kanstad Johnsen (traduit du norvégien par J-B. Coursaud). Albin Michel jeunesse, 2017. 40 pages. 11,90 euros. A partir de 5 ans.






samedi 4 mars 2017

Les lectures de Charlotte (33) : Le chat le plus mignon du monde - Vincent Pianina

- Est-ce qu’on peut avoir un petit chat ? 
- Non !

Mille fois la fillette a posé la question, mille fois ses parents ont répondu non. Jusqu’au jour où, enfin, le non est devenu oui. Alors tout le monde est monté dans la voiture, direction l’animalerie. Sur place, un seul critère a guidé le choix de la famille : le chat devait être MIGNON ! « On est tombés sur le plus mignon des mignons alors c’est lui qu’on a voulu ramener à la maison ».

Arrivé dans son nouveau chez lui, le chaton joue, mange et fait des câlins, comme tous les chatons. A une différence près : jamais il ne montre sa trombine. « Mince, c’est vrai ça ! On n’avait pas pensé à le regarder bien en face, notre petit chat… il était déjà tellement mignon de dos ». Et le pire, c’est que le chenapan use de tous les stratagèmes pour ne pas se laisser regarder de face. Pourquoi tant de coquetterie ? Mystère…

Un album au ton décalé et à la loufoquerie assumée. C’est vif et coloré, on frôle parfois l’absurde, les doubles pages sous forme de listes insérées au fil de l’histoire offrent des ruptures rigolotes sur lesquelles on s’attarde longuement et la chute fonctionne à merveille. Bref, on se régale de bout en bout.

C’est simple, « Le chat le plus mignon du monde » est devenu le livre de chevet de Charlotte. Chaque soir, on n’y coupe pas. A force, ma femme et moi le connaissons par cœur et la pépette aussi, à tel point qu’elle se marre toujours aux mêmes endroits, c’est devenu un rituel où la lassitude n’a pas (encore) sa place. Rares sont les livres qui lui ont fait un tel effet. A bon entendeur...

Le chat le plus mignon du monde de Vincent Pianina. Thierry Magnier, 2017. 48 pages. 12,50 euros. A partir de 3-4 ans.




jeudi 16 février 2017

Le petit oiseau, la vache et le renard - Mathis

Mathis ne va jamais là où on l’attend. C’est sans doute pour ça que j’apprécie autant cet auteur. Prenez ce petit album qui ne paie pas de mine. Dessin rigolo en couverture, fond vert pomme et titre qui pourrait faire penser à une fable de La Fontaine. On découvre à l’intérieur que l’histoire est bien tirée d’une fable, mais d’une fable Tibétaine.

Première page, le petit oiseau, seul dans son nid, a froid (trop mimi se dit le lecteur). Deuxième page, en cherchant sa maman il se penche et tombe du nid (pauvre petit oiseau se dit le lecteur). Troisième page, en plus d’avoir froid, il a mal à la tête et il pleure (pauvre, pauvre petit oiseau se dit le lecteur). La suite ? Pas question de vous la raconter. Je vous donne juste les morales de la fable (il y en a trois), parce qu’elles valent leur pesant de cacahuètes et en disent bien plus qu’un long discours :
« Trois moralités à cette histoire. 
Celui qui te met dans la merde ne te veut pas forcement du mal. 
Celui qui t'en sort ne te veut pas forcément du bien.
Quand tu es dans la merde... ferme ta gueule. »

Bon, dans le livre, ce n’est pas tourné de façon aussi explicite (grossière diront certains) mais dans l’esprit, c’est exactement ça. Alors, la question est, est-ce que c’est un livre pour les tout petits ? Euh… A vous de voir. Personnellement, j’aurais tendance à dire oui. Même sans le second degré nécessaire pour prendre un minimum de recul, même si la cruauté de l’histoire risque d’en laisser plus d’un comme deux ronds de flan. Parce que c’est un texte issu d’un corpus traditionnel qui mérite d’être connu et surtout parce que l’adulte lecteur a un rôle d’accompagnateur et de médiateur essentiel pour présenter et expliquer les choses, notamment que la morale d’une histoire n’est pas toujours celle que l’on croit.



En plus, même prise au premier degré, cette fable et son traitement graphique vont faire rire, c’est certain. Après tout il n’y a pas d’âge pour s’initier à l’humour noir. Je vais très vite tester avec ma pépette de quatre ans et je pense qu’elle sera bon public, même pour un album aussi décalé. Et si ce n’est pas le cas, on le laissera de côté pour le reprendre dans quelques temps, quand elle sera davantage prête à s’y plonger.

Le petit oiseau, la vache et le renard de Mathis. Thierry Magnier, 2017. 24 pages. 12,00 euros. A partir de ???? ans.







mardi 14 février 2017

S’aimer - Cécile Roumiguière et 39 illustrateurs

Au début on s’est ignoré. Du moins, on n’a pas fait attention l’un à l’autre. On s’est aperçu sans se voir, sans se parler. On est reparti chacun de notre côté et pourtant, « on n’en savait rien encore mais on était déjà porté par un courant plus fort que nous ».

« S’aimer, ça commence par dépasser ses peurs. » Il faut trouver la façon d’ouvrir la page, de tisser ce lien qui va nous unir. Un premier rendez-vous pour confirmer la complicité, pour imposer l’évidence. D’abord de l’amitié, ensuite un sentiment plus fort, le bonheur de s’être trouvés, la certitude que la route est tracée. Ne pas trembler, ne pas être intimidé par l’aventure à venir. Succomber. « S’aimer enfin. Ne faire qu’un pour être pleinement soi ».

Laisser le temps filer, devenir parents, se noyer dans le quotidien. Dériver. « Un mur aurait pu nous séparer, celui des non-dits, le désir émoussé, l’amertume des jours qui passent et parcheminent les peaux ». Des envies d’ailleurs, de nuits dans d’autres bras. De quoi se perdre. Mais la volonté commune de dépasser les moments difficiles, de se retrouver malgré tout et de s’aimer, « dans les jours bleus, dans la nuit profonde, dans les rires et dans l’angoisse, dans les mélodies des matins soleil et dans la souffrance des enfants perdus, celle des femmes et des hommes humiliés, dans la colère face aux océans souillés et aux avenirs saccagés ».


S’aimer, quelle idée ! Un concept dépassé depuis longtemps. Parler d’amour dans un livre, c’est forcément tomber dans le neuneu, dans le cliché, dans le cucul la praline. C’est forcément tartiner chaque page de guimauve sucrée jusqu’à l’écœurement.  Mais quand Cécile Roumiguière vous parle d’amour, on ne prend pas l’affaire de haut. On se sent tout petit même. Surtout quand elle associe sa plume à tente-neuf illustrateurs aussi talentueux que Csil, Kris Di Giacomo, Gwen Le Gac, Carole Chaix, Barroux ou Rascal.
L’objet-livre est splendide, couverture cartonnée, format à l’italienne et papier épais. Les mots sont posés sur la page de gauche, rares et précieux, comme chuchotés au creux de l’oreille. Les illustrations les accompagnent sur la page de droite, aussi expressives que variées. Certaines m’ont évidemment plus touché que d’autres, à commencer par celle de Nathalie Novi que je trouve sublime. Mention spéciale également à la sirène de Régis Lejonc qui m’a rappelé tant d’inoubliables souvenirs de lecture.


C’est beau, simple, épuré. C’est l’amour dans son universalité et sa complexité, c’est une réflexion sensible et pleine de finesse sur un thème pourtant rabâché mille fois. Une totale réussite.

S’aimer de Cécile Roumiguière et 39 illustrateurs. Éditions A pas de loups, 2016. 96 pages. 20,00 euros.


Une pépite jeunesse véritablement tout public et parfaite pour la Saint Valentin que j'ai le plaisir de partager avec Noukette.












dimanche 12 février 2017

Les lectures de Charlotte (32) : Les rhinos ne mangent pas de crêpes - Anna Kemp et Sara Ogilvie

Mathilde a un problème, ses parents ne l’écoutent jamais. « Mathilde pourrait bien leur dire que ses cheveux ont pris feu ou que le chien vient de manger le facteur, ils répondraient : "C’est bien ma chérie" ou "Tu devrais raconter ça à Mamie" ». Si bien que le jour où Mathilde a voulu leur annoncer quelque chose d’important, personne ne l’a écoutée.

Pourtant l’événement était de taille puisqu’un matin au petit déjeuner, Mathilde a vu un rhinocéros violet traverser la cuisine. « Aussi gros qu’un camion et violet comme une prune », l’animal a grignoté une crêpe avant de monter à l’étage. Mathilde s’est affolée, elle a couru vers sa mère pour la prévenir, elle a foncé vers son père pour crier sa stupéfaction mais l’un comme l’autre ne l’ont pas laissée finir sa phrase, la coupant d’emblée avec un « ce n’est pas le moment ! ». Alors Mathilde n’a plus rien dit et elle s’est rapprochée du rhinocéros, passant ses journées à ses côtés, faisant de lui un complice et un confident. Tout serait resté en l’état si le rhino n’avait pas été aussi gourmand…

Un album loufoque et décalé, dont l’intrigue à première vue aussi ÉNORME que risible exprime en filigrane le manque de communication vécu par une petite fille. C’est tendre et rigolo, le dessin joue une part essentielle dans la portée comique de chaque situation. Au final tout se termine bien et le message est passé : être attentif, écouter et considérer la parole de ses enfants est bien plus que le minimum syndical, c’est une question de respect et surtout ce devrait être une évidence pour tous les parents.

Les rhinos ne mangent pas de crêpes d’Anna Kemp et Sara Ogilvie. Little Urban, 2017. 32 pages. 10,50 euros. A partir de 4-5 ans.

dimanche 5 février 2017

Les lectures de Charlotte (31) : La piscine magique - Carl Norac et Clothilde Delacroix

Si le lion est le roi des animaux, c’est parce qu’il a une piscine magique. Du moins c’est ce qu’il dit. Personne ne l’a vue pour de vrai cette piscine alors le doute persiste. D’après un oiseau moqueur, « elle serait si petite qu’il suffirait de pleurer deux fois pour la remplir ». Et selon le guépard, ce n’est rien d’autre qu’une marre de boue. Pour couper court aux rumeurs, le lion annonce qu’il va autoriser quelques uns de ses sujets à venir y faire trempette. Seule condition pour y piquer une tête, être chic !

Le lendemain, c’est le défilé dans les couloirs du palais. Les heureux élus sont l’ours, la girafe, le crapaud, le singe, le cochon et le phoque. Une fois devant le bassin, les invités s’interrogent : « Mais en quoi cette piscine est-elle magique ? ». En fait, il suffit de faire un vœu et de crier fort un mot avant de sauter dans l’eau. L’ours par exemple, lâche le mot « miel » et se retrouve immergé dans sa gourmandise préférée. Chacun va réaliser son vœu jusqu’à ce que la reine, pleine de morgue et de suffisance, décide de mettre tout le monde dehors pour profiter seule de la piscine magique. Et bien vous savez quoi ? Elle aurait mieux fait de s’abstenir !



Un régal d’album, drôle et rythmé, porté par les illustrations colorées de Clothilde Delacroix et le texte plein d’humour d’un Carl Norac dont les dialogues savoureux font mouche. La chute n’aura jamais si bien porté son nom, c’est rien de le dire ! Jubilatoire et irrévérencieux, indispensable quoi.

La piscine magique de Carl Norac et Clothilde Delacroix. Didier, 2017. 36 pages. 12,50 euros. A partir de 4-5 ans.


PS : je profite de ce billet pour souhaiter un bon anniversaire à ma pétillante Charlotte qui fête ses quatre ans aujourd’hui    








dimanche 22 janvier 2017

Les lectures de Charlotte (30) : C’est pas toujours pratique d’être une créature fantastique

Pas si facile qu’on le croit d’être une créature fantastique. Prenez les licornes. Sabots luisants, corne torsadée, robe brillante et crinière d’or, elles en mettent plein les yeux. Sauf que leur quotidien n’est pas si simple. Faire du sport par exemple est un vrai problème. Et puis la corne utilisée comme perceuse par une copine bricoleuse, c’est moyennement glamour. Le dragon a d’autres soucis. Une queue trop longue qui se coince dans les transports en commun ou un rôle de gardien de princesse prisonnière bien pénible à vivre, surtout si ladite princesse passe ses journée à se plaindre. Il vaut sans doute mieux être une sirène me direz-vous. Et bien pas vraiment. Déjà il faut la voir au réveil avec ses beaux cheveux soyeux en pétard et une tignasse impossible à démêler. Ensuite, son chant envoûtant attire tous les prétendants, même ceux dont elle ne veut absolument pas. Enfin, si elles souhaitent se mettre à la danse, pas moyen de faire le grand écart. Bref, être une créature fantastique, ça fait peut-être rêver les foules mais dans la vie de tous les jours, il y a bien plus de désagréments que de bons moments.

Une collection que l’on adore à la maison. La mécanique est simple, un gag en deux pages avec à gauche une affirmation et à droite une illustration pour valider ou (le plus souvent) remettre en cause cette affirmation. Finalement on n’est pas loin du dessin de presse avec une seule image (celle de droite) pour faire mouche. Et ça fonctionne très bien, même si certaines situations sont tirées par les cheveux. Le dessin rond et les couleurs pleines de peps de Marie Voyelle participent grandement à l’atmosphère drôle et décalée qui se dégage de chaque album.

Charlotte a un faible pour le dragon, personnellement je préfère la licorne. J’apprécie son physique rondouillard loin des licornes sveltes que l’on nous vend dans les contes de fée. Savoir que les licornes n’ont pas toutes la taille mannequin est rassurant je trouve. A la fin de chaque volume la dessinatrice propose de reproduire en quelques étapes la créature présentée. Le genre de petit plus qui est grandement apprécié, croyez-moi !

Finalement, ces petits livres offrent plusieurs options : lecture plaisir et détente au moment du coucher, lecture autonome de l'enfant sans rien demander à personne ou éclats de rire pour les parents qui verront entre les lignes une pointe d’humour noir et de second degré. De la vraie littérature jeunesse tout public, donc. On attend la suite avec impatience, tout en se demandant quelle créature fantastique va être passée à la moulinette dans le prochain volume. Allez, je mets une pièce sur le vampire !

C’est pas toujours pratique d’être une créature fantastique de Sibylline et Marie Voyelle. Des ronds dans l’O, 2015-2016. Chaque volume, 24 pages. 11,00 euros.




dimanche 15 janvier 2017

Pourquoi les lapins ne portent pas de culotte - Antonin Louchard

« Comme les lapins n’ont pas encore inventé l’école, Zou passe toutes ses journées à gambader dans les champs et dans les prés. […] Quand il est un peu fatigué, Zou s’allonge à l’ombre d’une futaie pour rêvasser ou faire la sieste. Bien sûr, il regarderait volontiers la télé, mais vous vous doutez bien que les lapins sont encore très loin de l’inventer un jour ».

Voilà, la couleur est annoncée dès les premières pages, on sent qu’une fois de plus Antonin Louchard va donner dans l’humour décapant. Il nous conte ici l’histoire de Zou, petit lapin amoureux de la jolie Betty. Problème, la concurrence est rude et Betty ne sait qui choisir parmi tous ces prétendants se ressemblant comme deux gouttes d’eau. Pour faire la différence, Zou doit se démarquer. En tombant par hasard sur une culotte rouge tombée d’un fil à linge, le lapin va sans le savoir trouver l’argument de séduction imparable. Et provoquer par la même une belle pagaille dans la vie de ses congénères.

Un régal cet album. De par ses illustrations si expressives et si colorées, mais aussi et surtout grâce à une histoire drôle et inventive. Le propos se double d’une véritable profondeur, démontrant avec brio comment un ordre social parfaitement serein et établi peut basculer vers un régime totalitaire et belliqueux au moindre bouleversement.

Détournant le principe des contes des origines (ou contes « des pourquoi ») popularisés, entre autres, par Kipling, Louchard s’en donne à cœur joie et pousse le bouchon loin, très loin même, sur un ton qui n’appartient qu’à lui, mélange de bienveillance un brin moqueuse (les lapins ne sont « pas très malins-malins ») et d’humour ravageur, voire très noir (à ce titre la conclusion est un modèle du genre, et tant pis pour les convenances).   

Du grand art, et un album jeunesse qui n’hésite pas à sortir des sentiers battus, voilà qui fait un bien fou !


Pourquoi les lapins ne portent pas de culotte d’Antonin Louchard. Seuil jeunesse, 2016. 64 pages. 14,50 euros. A partir de 4-5 ans.



samedi 10 décembre 2016

Les lectures de Charlotte (29) : Gloups ! J’ai avalé Cornebidouile ! - Pierre Bertrand et Magali Bonniol

J’espère que vous connaissez tous Cornebidouille. Si ce n’est pas le cas il faut réparer cette erreur au plus vite tant cette affreuse sorcière gagne à être connue.

Appelée par les parents de Pierre pour le forcer à manger sa soupe, elle ne parvient jamais à ses fins et subit systématiquement une déroute aussi pathétique qu’humiliante. Dans le premier volume, elle finissait emportée par la chasse d’eau des toilettes, dans le second elle était transformée en citrouille et dans le troisième, après s’être dédoublée, elle se voyait jetée à la poubelle. Au début de cette nouvelle histoire, Cornebidouille, devenue aussi petite qu’un grain de poussière, saute dans la bouche de Pierre qui l’avale d’une traite. Une fois dans son ventre, elle met à exécution un plan diabolique qui devrait enfin lui permettre de se venger. Sauf que le garçon a plus d’un tour dans son sac et qu’il va, comme d’habitude, retourner la situation à son avantage et punir chèrement sa « meilleure » ennemie.

Pierre et Cornebidouille, c’est le duo préféré de Charlotte. Elle adore leurs disputes, leurs joutes verbales piquantes, le bagout du garçon, jamais impressionné par son adversaire. Tout simplement, je crois qu’elle admire Pierre le malicieux et sa répartie cinglante bien cachée sous ses lunettes de premier de la classe. Il suffit de l’entendre éclater de rire lorsque l’insolence du garçon offusque la sorcière pour comprendre à quel point il lui fait de l’effet. Exemple :

- « Même pas peur, grosse momoche à vapeur ! Vous n’êtes qu’une margoulette en jupette. »
- « Comment ! »
- « Une triplette de vieille biquette à sonnette ! »
- « Comment ! »
- « Une mémé poulette qui pue et qui pète »
- « Comment ! »



Ce genre d’échange est la marque de fabrique de la série, ce sont des passages que Charlotte finit par connaître par cœur. Au-delà du texte, le dessin hyper expressif de Magali Bonniol participe grandement à l’atmosphère déjantée qui rythme l’histoire. Et puis chaque album s’ouvre sur la situation embarrassante  dans laquelle s’est empêtrée Cornebidouille à la fin du précédent, c’est une mécanique narrative qui fidélise le lecteur car elle lui permet de retrouver les personnages où il les a laissés.   

Bref, la recette fonctionne à merveille et le duo Pierre/Cornebidouille emporte une fois de plus tout sur son passage.  Vivement le prochain épisode !


Gloups ! J’ai avalé Cornebidouile ! de Pierre Bertrand et Magali Bonniol. L’école des loisirs, 2016. 32 pages. 12,20 euros. A partir de 4-5 ans.    





lundi 5 décembre 2016

Les lectures de Charlotte (28) : Boris : Mon petit manuel de politesse

Boris est le chouchou de Charlotte en ce moment. Pensez donc, il mange ses crottes de nez, rote sans dire pardon, se balade le kiki à l’air et le papier toilette à la main après avoir fait caca en demandant qui veut l’essuyer, se plaint d’avoir trop peu de cadeaux à noël et remet les bonbons dans le paquet après les avoir lécher s’ils ne sont pas à son goût. Entre autres. En gros, il est incontrôlable. Et transgressif, terriblement transgressif même. Il l’a fait rire aux éclats, elle aime son coté colérique et râleur. Les rebelles, c’est son truc je crois.

Dans ce petit manuel de politesse, Mathis voudrait inculquer à Boris quelques bonnes manières. Autant dire que ce n’est pas gagné. Comportement avec les copains ou en famille, vivre ensemble, propreté, les thématiques s’enchaînent et le petit ours ne fait rien comme il faudrait. Par exemple, quand sa mère lui demande de laisser sa place à une personne âgée dans le bus, il lui répond « Non, je suis fatigué moi ». En bas de la page quelques lignes expliquent quel aurait été la bonne attitude à adopter. Le modèle se répète pour chaque « leçon » de politesse et souligne le fossé abyssal entre ce que les règles de bienséance exigent et la conduite totalement inadaptée du chenapan. Fous-rires assurés !

Le trait minimaliste de Mathis va à l’essentiel. Simple et efficace, il se révèle au final très parlant. Ok, j’avoue, j’ai un faible pour Boris moi aussi. Ce n’est pas le genre de personnage que l’on croise souvent dans les histoires pour tout-petits et ce vent de fraîcheur fait un bien fou. Il fallait oser un tel registre, sans tomber dans une vulgarité facile et un peu gratuite. Pari réussi haut la main. Accessoirement, depuis que ce sale gosse est devenu le chouchou de Charlotte, on ne lit plus les histoires gnangnan du trop propre sur lui T’Choupi et franchement, je ne lui en serais jamais assez reconnaissant !

Boris : Mon petit manuel de politesse de Mathis. Thierry Magnier, 2016. 44 pages. 14,50 euros. A partir de 3 ans.



Et puisque j'ai eu la chance de rencontrer Mathis samedi à Montreuil, Charlotte a eu droit à une belle dédicace.





samedi 3 décembre 2016

L’arbragan - Jacques Goldstyn

« Moi, je suis ce qu'on appelle un solitaire.
Je fais les choses tout seul.
Et n'allez pas croire que ça m'embête.
Bien au contraire.

Parmi toutes les choses que j'aime faire,
ce que je préfère,
c'est grimper dans mon arbre.
 »

J’ai rencontré un petit bonhomme qui m’a fait fondre comme neige au soleil. Un petit bonhomme à part, un peu excentrique, qui n’a besoin de personne pour s’occuper et qui se fiche du regard des autres. Un petit bonhomme qui fait des gâteaux, joue aux échecs tout seul et fait du skate, la nuit, dans les cimetières.

J’ai aussi rencontré Bertolt. Bertolt est un chêne centenaire. Entre Bertolt et le petit bonhomme, c’est le grand amour. Bertolt est un camarade de jeu, un refuge, un poste d’observation, une cachette, un labyrinthe, une forteresse. C’est une maison habitée par des cigales, des abeilles des corbeaux, des écureuils et même un hibou.

J’ai enfin rencontré Jacques Goldstyn, un illustrateur canadien qui m’était jusqu’alors totalement inconnu. Un illustrateur dont le trait m’a par moments rappelé Sempé, et à d’autres le Bone de Jeff Smith. Deux belles références s’il en est. Un illustrateur qui a imaginé qu’un jour, alors que le printemps revient, que tous les arbres se couvrent de feuilles, de fleurs ou de bourgeons, Bertolt reste désespérément nu. Pour le petit garçon, pas besoin de nier l’évidence, Bertolt est mort. Et cette mort soulève en lui bien des questions. « Quand un chat ou un oiseau meurt, je sais quoi faire. Mais pour Bertolt, je fais quoi ? »

Prix Sorcières 2016, Prix du livre jeunesse des Bibliothèques de Montréal 2016, Prix TD de littérature pour l'enfance et la jeunesse 2016, Prix des libraires du Québec jeunesse 2015, une tonne de récompenses méritées pour cet album épuré tout en sensibilité offrant un moment de pure poésie, et dont le titre de prime abord si mystérieux prend sens à la toute dernière page. Sous son apparente simplicité, le propos apparaît à la fois frais, drôle et profond.

Un bonheur de lecture dont je dois la découverte à l’adorable Nadine qui a eu la gentillesse de m’offrir cet ouvrage après l’avoir fait dédicacé lors du dernier salon du livre de Montréal . Merci Nadine, tu ne peux pas savoir à quel point tu as fait mouche avec ce livre ! Je t’embrasse pour la peine.


L’arbragan de Jacques Goldtyn. La Pastèque, 2015. 96 pages. 16,00 euros. A partir de 6 ans.


L'avis de Nadine






vendredi 2 décembre 2016

Cambouis - Geoffroy de Pennart

Tom Beltruf, Ross et Gladys Nonosse, Nasty et Snicky, Jean Toutou et Marie Pompon, Madame Poildur, Lady Wawa et Bobby Beaupoil, autant de personnages à mettre en scène pour parler d’un orphelin mécanicien hors pair, de sa famille d’adoption qui l’exploite et fait tout pour détruire ses rêves, de deux frères stupides et odieux, d’un concours de chant, d’une obligation de rentrer à minuit, d’un soulier perdu et d’une course poursuite…


Geoffroy de Pennart et ses réécritures de contes, c’est toujours de l’or en barre ! Cendrillon en garagiste maltraité par ses parents adoptifs devenant une star de la chanson, il fallait oser ! La version qu’il offre ici est forcément inattendue, aussi décalée que rock’n roll. Je retrouve avec le même plaisir la richesse de sa langue, son lexique recherché et l’élégance de son trait reconnaissable au premier coup d’œil. C’est drôle, pêchu et extrêmement malin, comme d’habitude quoi.



Un album jubilatoire de plus pour ce grand monsieur qui reste un des auteurs les plus étudiés dans les écoles élémentaires et maternelles françaises, un auteur dont l’œuvre gigantesque est restée depuis ses débuts d’une totale cohérence, c’est suffisamment rare pour être souligné.




Cambouis de Geoffroy de Pennart. Kaléidoscope, 2016. 40 pages. 13,00 euros. A partir de 5-6 ans.