Jonas, Ixe, Lahuisse, Untel, Sucré, Miskine, Romain, Poto, Habib. Les rois de la glande. Une bande d’inséparables où on se salue à coups de checks épaule contre épaule, où on enchaîne les moqueries et les insultes bon enfant, où on passe ses journées à jouer aux cartes et à la console, à fumer des pétards, à dealer un peu aussi à l’occasion, à faire quelques virées nocturnes alcoolisées et à fréquenter la salle de boxe. Dans leur petite ville de province, il n’y rien d’autre à faire. Rien de mieux à faire surtout.
Je ne connais rien de David Lopez, à part qu’il a 32 ans et que Fief est son premier roman. Impossible donc de savoir si ce livre a quelque chose d’autobiographique mais force est de constater qu’il sent le vécu à plein nez. Il raconte au fil des chapitres le quotidien des pas grand-chose, l’existence ordinaire d’une France sans avenir qui ne se plaint pas de son sort mais ne peut pas se projeter dans le futur, à court ou à long terme. Une France qui a appris que « le seul chemin vers le bonheur c’était la résignation, pas honteuse mais clairvoyante ».
Il ne faudrait pas faire l’erreur de prendre ce texte pour un roman de racailles à la vulgarité gratuite enfilant les clichés comme des perles. L'écriture est vivante, elle saisit la vitalité, la répartie et la dérision d’une langue propre à des gamins dont la nonchalance peut agacer mais que pour ma part j’ai trouvés particulièrement attachants. Il se dégage du récit une poésie crue, spontanée, sans fioriture, illuminée par des scènes aussi belles qu’improbables comme cette dictée improvisée autour d’un extrait du « Voyage au bout de la nuit » ou les références au jardin de Candide que Jonas et ses compères ont bien du mal à interpréter.
Loin d’une apologie de l’oisiveté, loin de tout jugement, David Lopez croque la réalité d’une jeunesse sans rêve qui ne cherche en aucun à élargir son horizon, une jeunesse prête à basculer dans l’âge adulte sans la moindre illusion. Désespérant, exagéré ou lucide, à chacun de se faire sa propre idée. Personnellement, j’ai quitté ces lascars à regret et j’aurais adoré continuer à faire un bout de chemin vers nulle part avec eux.
Fief de David Lopez. Seuil, 2017. 252 pages. 17,50 euros.
Vraiment joli billet!
RépondreSupprimerMerci.
SupprimerRecommandé aussi par un des critiques du Masque et la Plume... pas trop ce que j'ai envie de lire, mais comme tu notes l'absence de clichés, je ne l'écarte pas totalement.
RépondreSupprimerSi Le Masque et la Plume a apprécié... ;)
SupprimerJ'aime bien ce genre de roman qui permettent de toucher du doigt une réalité que l'on ne connaît pas, que l'on ne fréquente pas. ça permet de comprendre un peu mieux notre société...
RépondreSupprimerUn petit pan de notre société on va dire.
Supprimertrès joli billet !
RépondreSupprimerDécidément^^
SupprimerMmouais, sûrement un texte intéressant mais pas certaine de vouloir faire un bout de chemin vers nul part ... je note parce que ton avis est très tentant, en attendant une sortie en poche !
RépondreSupprimerNulle part est toujours pour moi une destination pleine de charme.
Supprimerjevais essayer de lire ce roman tu en parles trop bien
RépondreSupprimerMerci du compliment !
SupprimerMalgré ton engouement, je ne suis pas tentée.
RépondreSupprimerEt je ne t'en veux pas pour ça :)
Supprimerpourquoi pas? je ne sais plus où donner de la tête avec cette rentrée littéraire...
RépondreSupprimerViolette
C'est tous les ans la même chose^^
SupprimerAh tiens, je n'avais pas encore repéré ce roman.
RépondreSupprimerIl va faire beaucoup parler de lui je pense.
SupprimerJe ne sais pas si ça me plairait, mais ça m'intrigue, en tout cas. Et je n'en avais pas entendu parler de celui-ci. Merci pour la découverte.
RépondreSupprimerCe fut une magnifique découverte pour moi en tout cas.
SupprimerJe l'avais noté ! beau billet !
RépondreSupprimerJ'espère que tu finiras par le lire.
SupprimerHmm je ne sais pas... A priori la thématique ne m'attire pas, j'ai lu quelques livres comme ça à une époque, qui m'avaient vaguement amusée ou laissée totalement de marbre, mais l'auteur semble être sorti des clichés. A voir (mais un jour^^)...
RépondreSupprimerUne année même...^^
Supprimer"Il se dégage du récit une poésie crue, spontanée, sans fioriture, illuminée par des scènes aussi belles qu’improbables" - j'aime cette authenticité de personnages vrais et humains...
RépondreSupprimerIls te plairaient ces personnages, j'en suis certain.
SupprimerUn avenir vers nulle part, c'est désespérant
RépondreSupprimerJ'ai malheureusement tendance à penser que c'est réaliste.
SupprimerBien essayé mais...non...sans façon.
RépondreSupprimerJ'aurais tenté :)
SupprimerJe viens relire ton avis maintenant que je sais qu'il est dans la liste du Renaudot mais il me semble que tu es le seul (avec le jury Renaudot donc) à être enthousiaste.
RépondreSupprimerPlus maintenant, il est entré dans des tas d'autres listes depuis la publication de ce billet.
SupprimerFranchement j'hésite... Pas du tout certaine que ce soit pour moi ce genre de roman...
RépondreSupprimerJ'en doute fort moi aussi ;)
SupprimerSur le papier, ça ne me tente pas plus que ça, mais il n'y a pas dire, tu en parles bien ;)
RépondreSupprimerC'est gentil de me le dire en tout cas ;)
SupprimerQu'il me tente ce roman! Et aussi parce qu'il parle de boxe!
RépondreSupprimerLes passages sur la boxe sont très nombreux en plus.
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