Anouk en a ras le bol. Du collège où tout va de travers,
de son père qui ne donne jamais la moindre marque d’affection, de sa mère
partie au bout du monde pour mener sa vie de scientifique et qu’elle voit deux
fois par an. Parce qu’elle n’en peut plus, elle décide de disparaître, de se
volatiliser. Sa fugue inquiète, forcément. La police enquête, ses parents et sa
petite sœur sont rongés par l’angoisse, les recherches s’intensifient sans
résultat. Car Anouk a trouvé la cachette idéale, une cachette à laquelle
personne n’a pensé.
Une jolie variation sur le thème de la fugue adolescente,
aussi originale qu’improbable. Anouk, sans s’épanouir totalement dans sa
disparition volontaire, y trouve l’occasion de réfléchir, de se poser les bonnes
questions sur sa situation, son avenir. Mais elle découvre aussi que les
décisions qui nous font du bien peuvent rendre les autres tristes. Elle a du
mal à supporter ce qu’elle inflige à sa famille alors qu’elle pensait ne pas
avoir à s’en soucier. Elle comprend ce
que ses proches ressentent, l’impression qu’ils lui disent : « Tant
que tu ne seras pas de retour, nous ne recommencerons pas à vivre ». Pour
autant, elle refuse de céder et de revenir, pour son propre bien.
J’ai trouvé ce texte fin dans sa construction et intelligent
dans sa réflexion. La mère qui n’assume pas son statut, la souffrance infinie
du père, la maturité de la pétiré soeur. Une famille « biscornue et rafistolée
comme tant d’autres ». Et cette jolie fin, positive sans mièvrerie,
porteuse d’espoir et d’avenir mais ne reniant pas une réalité bien plus
complexe que les apparences ne le laissent penser : « L’humanité tout
entière passe son temps à s’enfuir. Je crois que c’est le cours normal des
choses ». Pas faux ma chère Anouk.
Ma fugue chez moi de Coline Pierré. Rouergue, 2016. 115
pages. 10,20 euros. A partir de 12 ans.
Une lecture jeunesse commune que je partage une fois de plus avec Noukette.