Yôko Hiramatsu est reporter culinaire. Dans ce recueil de chroniques, elle parcourt le Japon et se régale de ses richesses gastronomiques. Cuisine de saison, cuisine bouddhique, cuisine populaire, cuisine chinoise, dégustation de bières accompagnées de raviolis croustillants au printemps ou d’anguilles en été, les chapitres thématiques abordent tous un sujet bien précis. Gargote ou restaurant de prestige, établissements centenaires ou à la mode, la curiosité et la recherche de la qualité sont les moteurs de ses choix et de ses envies.
Sociologue de formation, Yôko Hiramatsu ne donne pas dans l’analyse pointue des plats. Son regard se porte davantage sur l’histoire des lieux, des personnages qui les font vivre et de l’ambiance qui y règne. Point de critique gastronomique donc mais plutôt un ressenti, l’expression du plaisir simple de manger, seule ou accompagnée. Elle insiste sur l’importance de prendre son temps et de faire de chaque repas un moment de joie : « la précipitation vous fait passer à côté de ces petits bonheurs. […] Il faut se laisser porter et savourer. »
J’ai adoré découvrir la diversité de la cuisine japonaise au fil de ses chroniques. Sa démarche est avant tout épicurienne, son enthousiasme ne tombe jamais dans l’exagération, rien ne semble jamais surjoué. Manger est une fête, connaître les bons produits et les lieux où la qualité prime sur toute autre considération évite forcément les désillusions. Après, tout ne m’a pas mis l’eau à la bouche. Le chapitre sur les sandwichs est particulièrement appétissant, tout comme celui consacré aux pot-au-feu typiquement japonais mais la soupe de baleine, les cocons de vers à soie frits et le ragoût d’ours, très peu pour moi.
Proposer à Jirô Taniguchi de faire quelques illustrations semblait couler de source tant, entre son Gourmet solitaire et la sociologue hédoniste, les connexions quasi philosophiques sont nombreuses. Les dessins du regretté mangaka sont distillés avec parcimonie mais ils complètent le texte à merveille.
Un voyage culinaire dépaysant, qui permet de découvrir à la fois la richesse d’une cuisine dont le patrimoine ne cesse d’être entretenu par des chefs passionnés et le rapport assez particulier (et fascinant) des japonais à la nourriture.
Un sandwich à Ginza de Yôko Hiramatsu (illustré par Jirô Taniguchi). Editions Picquier, 2019. 250 pages. 20,00 euros.