- Tu crois qu’elle finira un jour, la guerre ?
- Bien sûr, nous allons remporter la victoire et…
- Tais-toi ! Tant que vous parlerez de victoire, alors ça continuera ! Faut que la guerre s’arrête, c’est tout. On n’a pas besoin d’un gagnant. C’est pas un jeu, tu sais.
21 mars 1915, sur le front de la Somme. Oan le poilu breton s’est perdu dans le no man’s land du champ de bataille. Dans les ruines d’une ferme, il découvre une petite fille venant d’enterrer ses parents après un bombardement. Ensemble, Oan et Angèle vont tenter de rejoindre les lignes françaises pour se mettre à l’abri. Un voyage dangereux qui va permettre à chacun de deviser sur la guerre et sa folie…
Jolie réflexion sur la barbarie d’un abominable conflit, cet album au noir et blanc dense et profond, uniquement éclairé par le rouge de la robe d’Angèle, offre une dimension onirique laissant à distance un réalisme dont la portée serait au final bien moins forte. La boucherie est là, partout, présente dans chaque brin d’herbe roussi, dans chaque arbre déraciné, dans chaque carcasse de cheval éventré, dans les barbelés délimitant les tranchées, mais le graphisme tout en suggestion fait basculer le récit dans une sorte de douce poésie nimbée d’une touche de fantastique.
Une histoire belle et triste, porteuse d’espoir malgré tout, sublimement mise en images par la grâce d’un découpage inventif jouant sur les ombres et la lumière et n'hésitant pas à s'affranchir des codes narratifs propres à la BD pour, entre autres, profiter au maximum des possibilités offertes par le format à l'italienne.
Un superbe album, dédicacé et ramené rien que pour moi du dernier festival d’Angoulême par une bande de blogueuses amatrices de mojitos. Merci les filles, j’ai vraiment apprécié ce cadeau à sa juste valeur ❤
Le printemps d’Oan d’Éric Wantiez et Marie Deschamps. Comme une orange, 2015. 120 pages. 12,00 euros.