Fébrilité, crise de délire, dépression… le mal est chaque jour plus profond. Sa femme ne baisse pas les bras mais elle sait que la démarche vers le sevrage doit venir de lui. Quant aux enfants, ils vivent les choses difficilement. Thomas le fils a compris à quel point son père est fragile et si la petite June semble perdue devant l’ampleur de la situation, elle continue de lui vouer un amour sans borne : « Mon papa, il a jamais fait de mal à personne. Pourquoi il serait devenu le diable tout à coup ? Il voulait pas qu’on sache que c’était la foire dans sa tête… alors il buvait. Comme un trou. A un moment il était oppressé comme un citron, il a plus supporté. Il voulait pas avoir l’air faible… comme si c’était un problème, comme si c’était honteux. C’est pour ça. Il nous a tellement donné… »
L’album est découpé en courts chapitres. Une succession de scénettes où les protagonistes donnent tour à tour leur point de vue. Le huis clos familial, cette volonté commune de ne pas ébruiter la situation, de ne rien dire aux voisins et aux amis. Si Otis a disparu depuis quelques semaines c’est parce qu’il est parti rendre visite à sa mère dans le sud. La fraternité entre les enfants, le soutien mutuel que l’on s’apporte pendant cette période difficile. La joie du retour à la maison après la cure. La mère, pleine d’espoir et de doutes : « Et la vie continue. Comme avant… enfin espérons. »
Les choses sont exposées sans fard, la simplicité du dessin et du découpage rend la narration d’une parfaite limpidité. Je ne connais pas Nicolas Moog ni son parcours mais on sent du vécu dans ce scénario. J’ai aussi beaucoup aimé la fin ouverte. Pas de happy end. Une histoire en suspens. Malgré l’apparente guérison, le mal rôde, une rechute est toujours possible… C’est fort. Très fort.