jeudi 6 janvier 2011

Concours première guerre mondiale et BD : 4 albums à gagner

Suite à la publication du billet sur la BD Vies tranchées : les soldats fous de la grande guerre, je vous propose de gagner ce mois-ci 4 albums ayant pour thème la première guerre mondiale.




Le concours est simplissime : Comme d'habitude, 3 questions, 3 bonnes réponses et le tour est joué. Les gagnants seront départagés par tirage au sort. Le premier nom qui sortira du chapeau remportera l'album Vies Tranchées. Les trois suivants auront un exemplaire de Paroles de poilus en BD : lettres et carnets du front 1914-1918.


Allez hop, voici les questions :

Parmi ces trois séries, laquelle n'a pas pour cadre la première guerre mondiale ?

a) Le vol du corbeau
b) Le coeur des batailles
c) Les sentinelles

L'album Vies tranchées a été coordonné et publié sous la direction de quel célèbre scénariste ?

a) Jacques Tardi
b) Jean Dufaux
c) Jean-David Morvan


Quel dessinateur a réalisé la planche ci-dessus extraite de l'album ?

- Jose Luis Munuera
- Benoît Blary
- Daniel Casanave

Vous avez jusqu'au jeudi 13 janvier 2011 à minuit pour participer. Les réponses sont à envoyer à l'adresse suivante : dunebergealautre@gmail.com


Les belges, les suisses, les québecois, les habitants des Dom/Tom et tous les membres de l'union europénne peuvent participer.


mercredi 5 janvier 2011

Vies tranchées : Les soldats fous de la Grande Guerre

Ils s’appelaient Jean-Marie, Maxime, Gabriel, Louis, Augustin, Edmond ou Paul. Envoyés au cœur du maelström entre 1914 et 1918, ils en sont quasiment tous sortis vivants. Mais à quel prix ? Si les tranchées ne les ont pas tués, elles les ont rendus fous. Élaborés à partir des travaux d’Hubert Bieser sur les « pratiques soignantes, sociales et éducatives en santé mentale », les quinze cas présentés dans l’album par quinze dessinateurs différents montrent à quel point les troubles pouvaient être polymorphes : schizophrénie, éthylisme, hyperémotivité, idées de persécution, dépression mélancolique, confusion mentale, paralysie générale… Loin des ouvrages contemporains qui se focalisent sur les souffrances physiques des soldats de la première guerre mondiale, on s’attarde ici sur des troubles psychiques qui se sont révélés tout aussi dévastateurs.

Dans la préface de l’ouvrage, Hubert Bieser précise que si certains soldats ont été traumatisés par le déluge de feu et d’acier des bombardements et que d’autres ont été rendus fous par la peur ou épouvantés par l’absolue désintégration de leurs camarades, il y eu aussi des soldats fous qui l’étaient avant la guerre. Et d’ailleurs, plus le conflit durait et les « ressources humaines » s’amenuisaient, plus les commissions de réforme réexaminaient les cas d’inaptitude afin de recruter des civils dont l’état mental aurait pourtant justifié le fait qu’ils soient réformés : « Après l’effroyable massacre des débuts de la guerre en 1914 et 1915, on ne fait plus la fine bouche pour recruter des combattants ». Reste des vies brisées à jamais, une prise en charge indigne dans les asiles et, pour ceux qui auront la chance de voir leur diagnostique évoluer vers une possible guérison, le spectre d’un retour dans les tranchées dès la sortie de l’hôpital.

Au niveau graphique, premier constat, la couverture est superbe. Pour le reste, l’ensemble est évidemment très hétérogène. J’avoue d’ailleurs que sur les quinze dessinateurs présents, je n’en connais aucun en dehors de Munuera. Dans une interview publiée dans la revue DBD de décembre 2010, Huebert Biefer expliquait que beaucoup d’auteurs avaient au départ tendance à penser le poilu en termes de super-héros. Autre cliché concernant cette fois l’hôpital psychiatrique, la représentation des malades en pyjama restant au lit toute la journée alors qu’en fait, la plupart effectuaient des petits travaux dans l’enceinte de l’établissement et que les pyjamas étaient quasiment inexistants à l’époque. Il a donc fallu énormément d’échanges entre le spécialiste et les dessinateurs pour que le projet aboutisse : trois ans en tout !

Chaque histoire tient en quatre pages et si chacune aborde un cas différent, il y a une sorte de fil rouge que l’on retrouve tout au long de l’album à travers la figure d’Emile P., un soldat atteint de délires et d’hallucination qui aura alterné pendant le conflit les périodes à l’asile et celle sur le terrain des opérations. Trente-six pages lui sont consacrées au total, insérées entre les autres histoires. Cette petite trouvaille scénaristique permet de donner plus de densité à l’ensemble du recueil.

Vies tranchées, c’est une plongée effarante dans l’univers psychiatrique du début du XXème siècle. Aujourd’hui, dixit Hubert Bieser, « les fous, devenus malades mentaux, vivent chez eux, seuls, recevant quelques rares visites de contrôle, anéantis par les psychotropes, victimes de l’opprobre sociale ». Finalement, rien n’a réellement changé.

Vies tranchées : les soldats fous de la grande guerre, ouvrage collectif, Delcourt, 2010. 100 pages. 19,90 euros.





L’info en plus : Si le thème de la folie vous intéresse et que vous préférez la littérature à la bande dessinée, je ne peux que vous conseillez la lecture de Chez les fous. Ce recueil, rédigé par Albert Londres en 1925, dresse l’état des lieux des hôpitaux psychiatriques de la France de l’entre-deux-guerres, et a provoqué un véritable tollé dans le milieu de la psychiatrie. Un texte magnifiquement écrit, entre fausse naïveté et réelle rigueur journalistique.




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lundi 3 janvier 2011

Un jour en mai

Washington, mai 1972. Trois jeunes blancs se lancent dans une virée en voiture au cœur d’un quartier noir pour faire les malins. Ils sillonnent les rues lentement, vitres baissées, la musique à fond. Lorsqu’ils croisent des gars de leur âge le long d’un trottoir, ils les traitent de nègres et leur balance une tarte à la crème. Mais tout ne se passe comme prévu et la situation dérape. Un coup de feu est tiré… Trente cinq ans plus tard, les protagonistes de cet après-midi tragique s’en souviennent encore. Et si la plupart ont pu se reconstruire en devenant adultes, d’autres gardent chevillée au corps une rancune tenace.

George Pelecanos est un métronome. Chaque année depuis 1997, il sort un nouveau roman. Une sorte d’Amélie Nothomb du polar ! Tous ses livres se caractérisent par une écriture très particulière, extrêmement visuelle. Il aime décrire dans les moindres détails les faits et gestes de ses personnages. Si la scène se situe dans un magasin de chaussures, vous aurez droit à une description quasi documentaire des différentes tâches effectuées par le vendeur. Idem pour les barmen, les cuisiniers où les garagistes. Autre particularité, il cite tous les noms de marque de voitures, de vêtements, de boissons, de chaines-hifi et de quasiment tous les objets qui entrent dans le champ de sa caméra. Un roman de Pelecanos se reconnaît aussi au nombre important de morceaux de musique écoutés par les protagonistes (tous les titres sont évidemment cités) et aux dialogues ciselés qui sont un vrai régal. Dernier détail, et pas des moindres, tous se passent à Washington, la ville de naissance de l’auteur. Un jour en mai n’échappe pas à la règle. Une fois encore, il y est question de rédemption et de reconstruction après un traumatisme. Une fois encore, les « méchants » sont des crétins finis et les « gentils » défendent des valeurs morales chères à l’Amérique. Et une fois encore, après avoir déroulé son action en toute tranquillité, il laisse éclater en quelques lignes une violence inouïe d’une terrible froideur.

Vous l’aurez compris, tous les livres de Pelecanos se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Et il faut bien reconnaître que les tics d’écriture qui les caractérisent agaceront à juste titre plus d’un lecteur. Personnellement, et de manière assez incompréhensible, j’adore. C’est une sorte de marque de fabrique assez unique que j’aime retrouver une fois par an dans mes lectures. Je crois que cela tient surtout à l’ambiance incroyablement réaliste avec laquelle il décrit sa ville. Au fil de ses romans, on découvre Washington des années 70 à nos jours. L’évolution de la capitale américaine est palpable et racontée par quelqu’un qui l’a vécue de l’intérieur. On n’est pas loin de la sociologie et c’est ce que je trouve passionnant.

C’est un fait, je me garderais bien de recommander cet auteur à qui que ce soit et je comprends parfaitement que l’on puisse se lasser d’un écrivain qui donne l’impression d’écrire à chaque fois la même chose. Mais pour moi, un roman de Pelecanos, c’est un peu comme cette pâtisserie que j’achète à la boulangerie. Toujours la même. J’y ai déjà gouté des dizaines de fois et pourtant j’y reviens toujours, tout simplement parce que je sais que je ne vais pas être déçu. Alors vivement l’année prochaine que je retourne arpenter les rues de Washington avec des sales gosses pas toujours fréquentables.

L’info en plus : La cuvée Pelecanos 2011 aura pour titre Mauvais fils et sortira au mois de mars. L’histoire d’un gamin de 17 ans envoyé en maison de correction et qui, dix ans plus tard, reviens travailler dans l’entreprise de son père.

Un jour en mai, de George Pelecanos, Points, 2010. 376 pages. 7,50 euros.

jeudi 30 décembre 2010

Bilan des lectures 2010 : les tops et les flops (3)

Après les romans et les BD, je termine le tour d'horizon 2010 avec mon top/flop en littérature jeunesse. C'est le genre que je lis le plus dans l'année mais je publie la plupart de mes billets jeunesse sur le blog Lire pour le plaisir.

J'ai quand même dû faire à peu près 25 chroniques ici et il y a eu, comme toujours, du bon et du moins bon.

Tops littérature jeunesse :


La vie extraordinaire des gens ordinaires, de Fabrice Colin
Fabrice Colin comme on ne l'a jamais lu. Un recueil de nouvelles plein de surprises, de tendresse et d'humanité.









Petit Pierrot T1 : décrocher la Lune, d'Alberto Varanda
Un album plein de tendresse et de poésie. Les illustrations de Varanda ont un charme fou. A lire et relire, avec les enfants où tout seul dans son coin.







Kenny et le dragon, de Tony di Terlizzi
Un petit roman superbement illustré idéal pour lecteurs débutants (à partir de 8 ans). Un lapinot solitaire qui adore la lecture rencontre un jour un dragon passionné par les livres. Une bien belle histoire qui rend hommage à l'univers bucolique créé par le très grand Kenneth Grahame (Le vent dans les saules).








Flops littérature jeunesse :

Thomas Drimm T2, de Didier Van Cauwelaert
Une énOOOrme déception après un excellent premier tome. Beaucoup d'avis unanimes chez les bloggeurs sur la médiocrité de ce second volume. Comme quoi, rien n'est jamais gagné d'avance...








La plus grosse polémique de l'année sur ce blog. Beaucoup de lecteurs sont venus défendre ce titre que je n'ai personnellement pas du tout aimé. Des échanges vifs mais toujours très courtois et au final une belle confrontation de points de vue.

 
 
 
 
 
Une pâle copie d'Harry Potter à la sauce mythologique. Mon principal reproche : c'est très mal écrit (ou très mal traduit).

mercredi 29 décembre 2010

Chosp T1 : Le pouvoir aux moches !

C’est une journée importante sur l’île de Tee Ville. Le nouveau gouverneur doit prendre ses fonctions au cours d’une grande fête populaire retransmise à la télévision. Sur cette île pas comme les autres où se concentrent toutes les stars du monde du spectacle, le gouverneur se nomme Mike Goodnave et est un ancien acteur bodybuildé qui fait ses débuts en politique. Sa femme n’est autre que l’ultra célèbre Stella Star, qui est à la fois actrice, chanteuse et icône publicitaire. Alors que la cérémonie bat son plein, un étrange personnage, petit et pas franchement joli, surgit de nulle part et proclame la fin de la dictature « des mèches blondes et des nez refaits ». Le problème, c’est que ce nabot n’est autre que le fils caché de Mike et Stella. Scandale assuré sur l’île des stars ! De toute façon, Chosp (c’est son nom) est persuadé que ses vrais parents sont ailleurs. Le jeune garçon, aidé par son amie Mélodie va partir à la recherche de ses origines.

Voila une nouvelle série jeunesse pleine de peps et farfelue à souhait. Alessandro Barbucci se plaît dans un premier temps à railler Hollywood et toutes les stars de pacotille pour qui le paraître est devenu plus important que tout le reste. Il porte aussi un coup de griffe à la toute puissance de la télévision avec la présentatrice chargée de commenter la cérémonie de nomination du gouverneur (elle s’adresse à ses auditeurs en les qualifiants de « chers télédépendants »). Mais finalement, très vite, l’intrigue se recentre sur la quête de Chosp pour retrouver ses vrais parents. C’est à partir de là que l’histoire décolle, essentiellement grâce à l’ajout de personnages secondaires savoureux : l’agent spécial Wendy qui se fait engager comme baby-sitter de Chosp, la vieille Norma Bates, une mamie déjantée qui vit à la lisière de la forêt ou encore Loup, un gamin portant un masque et qui habite dans la décharge publique. L’action est très linéaire et facile à suivre. C’est trépidant, souvent drôle et on se laisse très rapidement embarquer, même si les adultes trouveront peut-être quelques ficelles scénaristiques un peu grosses.

Niveau dessin, Chosp a tout du manga, à part la taille (plus grande) et la pagination (plus petite) : Premier chapitre en couleur, utilisation de trames, personnages aux yeux surdimensionnés, découpage typiquement manga avec beaucoup de gros plan, de mouvements et des visages souvent déformés par les émotions. Seul le nombre important de cases par planche rappelle que Barbucci est un auteur italien et pas nippon. Son trait rappelle parfois celui d’Akira Toriyama période Dr Slump. Il y a même quelques passages d’humour scatologique que n’aurait pas renié le papa de Dragon Ball.

Une belle surprise que ce petit album à prendre comme un divertissement, rien de plus. Il devrait sans problème faire mouche chez les 9-12 ans et dans les CDI des collèges.

Chosp T1 : le pouvoir aux moches, d’Alesandro Barbucci, Soleil, 2010. 126 pages. 14,90 euros.


L’info en plus : Allessandro Barbucci est le dessinateur de la série Sky Doll, le plus grand succès des éditions Soleil à l’étranger, déjà vendue aux USA, en Chine ou au Japon. Au mois de novembre est parue une intégrale regroupant les tomes 1 à 3 avec, en prime, un prologue de 10 pages, un spin off inédit en France (Heaven Doll), ainsi qu’une galerie d'hommages réalisés par des illustrateurs de renommée internationale.




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mardi 28 décembre 2010

Bilan des lectures 2010 : les tops et les flops (2)

Second épisode du bilan des lectures 2010 avec cette fois-ci un petit tour du coté des BD.

Les tops

Scalped, de Jason Aaron et RM Guera.
Polar crépusculaire et violent qui montre avec beaucoup de réalisme la décprépitude de la nation indienne. Un vrai coup de poing à l'estomac dont le second tome est sorti il y a peu.








Lulu femme Nue, de Davodeau
La crise de la quarantaine d'une femme qui se cherche une raison de vivre. Touchant et d'une rare finesse.






Echo, de  Terry Moore
Une femme contaminée en plein désert par une explosion atomique devient un enjeu politique et stratégique majeur pour le gouvernement américain. Entre thriller et SF, une série trépidante et intelligente doublée d'un beau portrait de femme. Trois tomes sont parus pour l'instant en France.








Les flops

Jonah Hex, de Justin Gray et Jimmy Palmiotti.
Du western spaghetti gratuitement violent et sans véritable intérêt. 30 euros (!!!!) jetés par la fenêtre.









Scott Pilgrim T1, de de Bryan Lee O’Malley.
Présenté par mon libraire comme le phénomène BD de l'année. J'ai juste trouvé ça consternant de médiocrité. Je dois être trop vieux pour ce genre de publication...









Bambou, de Gaëlle Alméras
Une parodie de Bambie dessinée aux crayons de couleur, il fallait oser. Très undergound mais finalement sans grand intérêt.

lundi 27 décembre 2010

Bilan des lectures 2010 : les tops et les flops (1)

Un grand classique. Avec la fin d'année qui arrive, il est temps de faire un petit bilan des 12 derniers de mois de lecture. Comme d'habitude des bonnes et des moins bonnes surprises, même si je trouve que la cuvée 2010 est supérieur à 2009.

Pour cette année, j'ai choisi 3 tops et 3 flops dans les catégories suivantes : romans, BD, littérature de jeunesse.

On commence aujourd'hui avec les romans.

Les tops :

Où j'ai laissé mon âme, de Jérôme Ferrari.
Une écriture éblouissante. La grosse claque de la rentrée littéraire pour beaucoup, la grosse claque de l'année pour moi.









Tête de chien, de Morten Ramsland
Un roman picaresque. L'épopée d'une famille norvégienne depuis la seconde guerre mondiale. Drôle, profond et déjanté. Excellent.









Frères de sang, de Richard Price.
Furieux, cru, violent... La littérature américaine à son sommet : totalement décomplexée.









Les flops

A la pointe te de l'épée, d'Ellen Kushner.
Le pire texte que j'ai lu cette année. Imbuvable ! Si je n'avais pas dû le lire dans le cadre d'un partenariat, je ne serais jamais allé au bout.









Bifteck, de Martin Provost
Une bonne idée de départ, mais du grand n'importe quoi pour finir. Pas accroché du tout à ce petit roman de la rentrée littéraire.









Les chroniques de Thomas Covenant T1, de Stephen R. Donaldson Trop lent, trop long, trop déprimant... Un pavé que j'ai lu en vacances parce que je n'avais rien d'autre à me mettre sous la dent. Pas question en tout cas de lire la suite.










Voila, le bilan 2010 pour les romans est quand même très positif. Les 3 romans qui constituent mon top sont vraiment excellents. En général, j'ai du mal à en trouver autant sur une année de lecture. Espérons maintenant que 2011 sera du même tonneau !

vendredi 24 décembre 2010

La légende de Little Boost

Le scénario était pourtant limpide : Etats-Unis, 1876. Little Boost, l’indien renégat, devait massacrer le général Hamend et ses sbires dans une embuscade tendue près de la frontière mexicaine. L’Histoire avec un grand H aurait même intitulé ce moment de gloire La bataille de Little Big Twin. Mais tout est chamboulé lorsqu’Abe le scénariste et Lagribouille le dessinateur sont projetés dans leur propre BD. Plus rien ne tient debout et pour retourner chez eux, les deux zigottos vont tout mettre en œuvre pour que l’intrigue puisse retomber sur ses pattes, condition indispensable afin de sortir de ce cauchemar.

Fane a choisi de mettre en branle un grand n’importe quoi avec cette sorte de mise en abîme pas piquée des hannetons. D’abord, il n’explique pas du tout comment les deux auteurs apparaissent dans leur BD. Ensuite, il déroule une course poursuite trépidante en enchaînant volontairement les anachronismes les plus inattendus. Enfin, il enrobe le tout avec des dialogues fleuris ou les jurons et les engueulades se taillent la part du lion. C’est farfelu, déjanté et surtout suffisamment décalé pour ne jamais se prendre au sérieux. Après, il faut aimer les vannes au ras des pâquerettes et choisir de se laisser embarquer dans une histoire tarabiscotée à souhait.

Niveau dessin, Fane se reconnaît au premier coup d’œil. Les médisants verront dans son travail du sous Franquin mais pour ma part, je pense que si l’influence du papa de Gaston est évidemment présente, elle saute moins aux yeux qu’à l’époque de Joe Bar Team. C’est du classique franco belge, peut-être passé de mode aujourd’hui à l’heure du manga et du dessin assisté par ordinateur, mais ça reste très bon dans le genre. Seul bémol, les planches contiennent trop de cases (jusqu’à 13 et jamais moins de neuf) et l’ensemble est beaucoup trop bavard. Les dialogues auraient été encore plus percutants s’ils avaient été moins envahissants.

Au final, cet album ressemble à une distraction un peu fourre-tout qui ne plaira pas à tout le monde, c’est une certitude. Un humour qui ne fait pas dans la dentelle, ça me convient à petite dose. Je ne suis pas sûr d’être partant s’il y a un jour une seconde aventure de Abe et Lagribouille, mais je ne regrette pas non plus d’avoir passé quelques minutes en leur compagnie.

La légende de Little Boost, de Fane, éditions 12 bis, 2010. 48 pages. 10,00 euros.



L’info en plus : Toujours chez 12 bis, Fane s’est lancé en 2009 dans une nouvelle série racontant L’histoire d’une mère au foyer qui travaille pour les services secrets sous le nom de code Gemma (un pitch qui rappelle évidemment le film La Totale ! de Claude Zidi). Deux tomes sont parus pour l’instant.


Le challenge Pal sèche de Mo'

mercredi 22 décembre 2010

Jazz Maynard, intégrale : une trilogie barcelonaise

Jazz revient à Barcelone après dix ans passés à New York. Il ramène sa sœur qui, en voulant le rejoindre aux États-Unis, s’est retrouvée embarquée dans un réseau mafieux de traite des blanches. De retour dans son quartier natal d’El Raval, Jazz retrouve Téo, son grand ami d’enfance. A l’époque, ils formaient un fameux trio avec un troisième larron prénommé Judas, mais ce dernier a choisi un autre chemin et est devenu un des barons de la pègre locale.

La situation devient critique pour Jazz lorsque les américains débarquent en Espagne pour lui faire payer chèrement la libération de sa sœur. Judas lui vient en aide, mais il propose en contrepartie une mission quasi impossible à remplir…

Les espagnols Raul et Roger ont voulu décrire un quartier barcelonais des années 50-60, entre violence et prostitution. L’ambiance est sombre, très sombre et la violence omniprésente. Les méchants le sont vraiment, pas de doute là-dessus. Entre politiciens véreux, proxénètes New- Yorkais, mafia locale et triade chinoise de Hong Kong, les gros bras à la gâchette facile sont légions. C’est d’ailleurs un peu le souci avec l’ensemble des personnages. Ils sont très caricaturaux. Si les bandits sont d’horribles salauds, les gentils, représentés par une journaliste et un commissaire de police, sont à l’inverse sans aucun défaut : honnêtes, incorruptibles et cherchant coute que coute à rétablir la justice, ils sont les chevaliers blancs d’El Raval. Et au milieu de ces caractères tout noirs ou tout blancs naviguent Jazz et Téo, des héros un peu fades dont la psychologie n’est pas très fouillée. Finalement, tout est prétexte à l’action. Les scènes de bagarres et de fusillades ultra violentes se succèdent à un rythme effréné à tel point que l’on se croirait parfois dans un film de Tarantino. Une BD d’action donc, ni plus ni moins, qui s’adresse avant tout aux fanas du genre.

Et la musique me direz-vous ? Elle se résume au titre de la série et au fait que Jazz est un grand trompettiste. On est à la limite de la tromperie sur la marchandise (surtout au vu de la couverture du tome 1 et de l’intégrale) et j’aimerais bien savoir combien de lecteurs se sont fait avoir en pensant acheter une BD dont le thème principal est la musique.

Coté dessin, Roger mélange réalisme et caricature. Ses influences sont à chercher du coté du manga et des comics. Jazz est une copie quasi conforme du personnage principal de la série Cowboy Bebop tandis que la cambrioleuse Anita fait penser à la Elektra de Frank Miller. Attention, ce n’est pas un reproche, les influences du dessinateur sont parfaitement digérées et cette intégrale en noir et blanc rend davantage hommage à son somptueux travail que les trois volumes publiés individuellement en couleur.

Digne d’un excellent film d’action à l’Américaine, Jazz Maynard a tout pour plaire à un large public. Personnellement, le manque d’épaisseur du scénario et l’omniprésence d’une violence quasi gratuite me gêne beaucoup. Pas ma tasse de thé donc, mais je comprends que l’on puisse aimer cette trilogie barcelonaise.

Jazz Maynard, intégrale : une trilogie barcelonaise, de Raule et Roger, Dargaud, 2010. 152 pages. 29 euros.


Jazz
Spik Spiegel Cow Boy Bebop




L’info en plus : Prévue initialement en trois volumes, la série compte depuis le mois d’avril un quatrième tome. Pour les aficionados, le réseau de librairies BD Fugue Café a édité un tirage de tête de cet album contenant les planches encrées non retouchées. Ce TT est numéroté sur 250 exemplaires et signé. Il s’agit d’un grand format (36cm) avec dos toilé. Un ex-libris ainsi qu’un carnet de croquis de 16 pages complètent l’ensemble. Le tout est vendu au prix de 95 euros. Toutes les infos ici : http://www.bdfugue.com/tirage-de-tete-jazz-maynard-t-4-sans-espoir-edition-luxe-numerotee-signee

Couverture tirage de tête du tome 4








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lundi 20 décembre 2010

Babylone Vegas

Mike Demon vend des assurances agricoles depuis plus de dix ans. Son territoire s’étend de la Californie à l’Arizona en passant par le désert du Nevada. Le jour où sa voiture le lâche à quelques kilomètres de Las Vegas, il ne peut que maudire le sort. Sa femme et son fils l’attendent à Los Angeles et il risque de perdre un gros client si les réparations ne sont pas faites rapidement. En plus il déteste Vegas. Cette ville totalement artificielle est pour lui le comble de l’horreur. Cloué sur place pour plusieurs jours, Mike erre dans les rues écrasées par la chaleur ou dans les salles de casino réfrigérées par des climatisations trop puissantes. Peu à peu, l’ambiance folle de la ville l’irradie. Les lumières, les couleurs, le bruit obsédant des pièces que l’on glisse dans les machines à sous… Perdant toute notion du temps dans cette cité qui ne dort jamais, Mike commence à jouer. L’engrenage se referme alors et la décadence absolue d’un homme à priori bien sous tous rapports se met en branle…

Le mécanisme de basculement vers la folie et l’enfer du jeu est décrit avec une implacable précision. José Luis Munoz prend son temps car il sait qu’il va conduire son personnage vers une chute inéluctable. Mike Demon est condamné. Il ne peut échapper à l’appât du gain et à la luxure. Le lecteur est lui aussi pris au piège. Devant ses yeux se déroule un drame difficilement supportable. Un mince espoir subsiste pourtant et l’on se dit par moment que Mike va s’en sortir, qu’il va arrêter les frais à temps, fuir cette ville et rentrer bien sagement chez lui. Mais l’évidence nous rattrape. Las Vegas a définitivement refermé ses griffes sur sa proie, le poussant à commettre l’irréparable.

La ville. Voila l’autre personnage principal du roman. L’auteur décrit magnifiquement sa grandeur, sa futilité, la faune qui arpente ses hôtels et ses casinos. Une vision très très sombre de cette Babylone moderne dans laquelle il n’existe aucune échappatoire. Je n’avais rien lu de tel au sujet de cette ville depuis l’éblouissant Leaving Las Vegas de John O’Brien.

Un excellent roman, hypnotisant et fort, qui décrit à la perfection la facilité avec laquelle on peut sombrer lorsque l’on perd ses repères. Seule la fin est quelque peu décevante. Les trente-cinq dernières pages ne s’imposaient pas, le texte pouvant très bien se terminer au bas de la page 246. Ceux qui ont lu le roman savent de quoi je veux parler mais je ne peux pas en dire plus au risque d’en dire trop. En tout cas, voila une nouvelle jolie pépite dans la collection actes noirs des éditions Actes Sud. Et puis ça change de Millenium.

L’info en plus : Babylone Vegas est le second roman de José Luis Munoz traduit en français. Les éditions Actes Sud ont publié il y a deux ans La dernière enquête de l'inspecteur Rodriguez Pachon, l’histoire, à La Havane, d’un inspecteur véreux qui, avec son collègue Vladimir, est chargé d'enquêter sur le meurtre d'une prostituée décapitée. On retrouve déjà dans ce roman la décadence d'un individu sur fond de ville ambivalente, une thématique qui semble passionner l’auteur.

Babylone Vegas, de José Luis Munoz, Actes Sud, 2010. 280 pages. 19 euros.