vendredi 6 juillet 2012

Bec-en-Fer ou le Moyen âge en BD pour les jeunes lecteurs

Pesch © l'àpart 2012
Bec-en-Fer est un baron qui souhaite par tous les moyens faire disparaître son neveu le comte Phildor dont il est le seul héritier. Apprenant que Phildor va être présenté à la jolie damoiselle Bryndelhène en vue d’un mariage, le vil corbeau ourdit un plan diabolique pour empêcher que les noces se déroulent.

Il n’y a pas d’erreur dans la phrase précédente, j’ai bien dit corbeau. Car dans cette série animalière et moyenâgeuse qui a vu le jour dans les pages du Magazine Le Pèlerin en 1961, tous les personnages sont représentés sous les traits d’oiseaux. Créée par Jean-Louis Pesch, plus connu pour sa reprise de Sylvain et Sylvette,  Bec-en-fer est une BD historique pour jeunes lecteurs très documentée mais qui se singularise aussi par une bonne dose d’humour et de fantaisie. Secondé par Robert Philippe, directeur de l’institut d’histoire de l’université du Mans, le dessinateur ne lésine pas sur les détails : costumes, armes, harnachement des chevaux, architecture des bâtiments, tous ces éléments ont été réalisés à partir de documents iconographiques et littéraires de l’époque. Le cadre chronologique se résume à l’année 1412, au moment où Charles VI, sombrant dans la folie, laisse son royaume plonger dans la guerre civile entre bourguignons et armagnac. Pour contrebalancer le coté quelque peu scolaire de son propos, Pesch opte pour des dialogues empreint d’une certaine modernité. Il dresse également une galerie de personnages secondaires aussi loufoques que savoureux, notamment la sorcière Brandade, amoureuse transie de Bec-en-fer.

Beaucoup de points positifs donc, qui devraient faire de cette série cinquantenaire une très agréable publication jeunesse. Malgré tout, force est de reconnaître que les aventures du baron corbeau ont plutôt mal vieilli. Trop de texte, trop de récitatifs, trop de cases par planches, un découpage trop classique… Sans compter que certaines références apparaissent datées et ne parlent pas du tout aux enfants d’aujourd’hui (par exemple, présentant un troubadour fort célèbre à l’époque, la voix-off le compare à Pierre Dac dans l’émission "Les français parlent au français"). J’ai testé cet album sur ma fille de dix ans et elle a à peine lu les cinq premières pages avant de s’en désintéresser totalement. Même pour moi, la lecture a parfois été pénible. Il y a bien quelques calembours qui font sourire mais il faut avouer que même dans ce domaine, Pesch n’est pas à la hauteur du Goscinny d’Iznogoud.


Tout ça pour dire que si cette réédition pourra intéresser les sexagénaires désireux de relire une BD ayant bercé leur enfance, je doute fort que le jeune public d’aujourd’hui tombe sous le charme de cet irascible corbeau.

Bec-en-Fer T1 : Le complot de Bec-en-fer de Jean-Louis Pesch. L’àpart, 2012. 48 pages. 12,50 euros. Dès 9 ans. 

Pesch © l'àpart 2012

12 commentaires:

  1. Pas plus tentée que ça. Ceci dit, j'ai été étonnée de voir comme il accrochait à mes vieux Sylvain-Sylvette.

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    1. Sylvain et Sylvette, ça marche toujours avec les enfants !

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  2. et "moyenâgeuse", c'est péjoratif...

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  3. C'est l'auteur (ou un des auteurs car plusieurs se sont succédé, je crois) de 'Sylvain et Sylvette' ? Comme dit Marie, j'ai été agréablement surprise de voir mon fils adorer les 'Sylvain et Sylvette' vers 9-10 ans. C'est complètement atemporel (ou intemporel ?) comme les contes de fée, pour moi ! Ma fille a moins accroché, par contre. Moi j'adorais, même si l'idée de vivre sans parents, au fin fond d'une forêt me faisait flipper ! :-)

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    1. Ma fille aussi a beaucoup accroché avec Sylvain et Sylvette. C'est une série qui dégage un charme assez indéfinissable^^

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  4. Mea culpa, lu à toute vitesse, tu parles en effet de 'S & S' !

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  5. Je me suis procuré un album de cette série,il y a plusieurs années, car j'adore tout ce qui touche au Moyen-âge en plus de bien aimer le graphisme des Sylvain et Sylvette... Quelle déception!! Comme tu dis, le texte est affreusement trop verbeux : j'ai été noyé par tant d'information!! De plus, le mélange manque d'unité, sur le plan graphique (personnages animaliers caricaturaux vs accessoires et décors ultra-sophistiqués, proche d'un certain réalisme) m'a déplu au plus haut point! Sans compter que j'avais eu toutes les misères du monde à comprendre le récit!! Je n'en ai pas racheté d'autre... et je m'étonne qu'on en sorte une compil!! Tant d'autres vieilles séries, bien plus intéressantes, en mériteraient une avant celle-là : tout Chakir, tout Claude Marin...!!

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    1. Je crois que cette réédition émane d'un éditeur local qui joue beaucoup sur le positionnement "régional" des aventures de Bec-en-fer. Mais comme tu dis, il y a surement d'autres séries de bien meilleure qualité à ressortir des cartons^^

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  6. Et bien moi, je ne saurais trop conseiller cette série de BD !

    Je reconnais bien volontiers que certaines références sont un peu datées, mais on retrouve ce même travers dans les aventures d'un certain gaulois irréductible, sans pour autant que cela ne porte trop atteinte au récit.

    Pour les textes, et bien ma foi oui, ils sont riches, documentés, historiques...

    Une BD ne peut-elle pas avoir un fond culturel entre deux (généralissimes) calembours et jeux de mots ?

    Bec-en-fer n'est pas une BD pour enfants, elle peut l'être, mais n'est clairement pas destinée principalement à eux, donc rien d'étonnant à ce qu'ils puissent décrocher étant donné qu'ils n'ont pas le bagage culturel nécessaire pour en apprécier les clins d’œils et les références historiques.

    Derrière Bec-en-fer se cache une satyre acerbe du monde des humains, où nos travers apparaissent bien intemporels, alors même qu'ils sont mis en image avec des emplumés...

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  7. Tout à fait d'accord.
    De mon point de vue, cette BD n'est pas destinée aux enfants, au contraire de Sylvain et Sylvette, et à l'instar d'Iznogoud (dont je ne comprenais pas le dixième quand je le lisais étant enfant). Certes il y a beaucoup de textes ; ça peut faire un peu lourd, surtout au début, mais c'est aussi ça qui fait son charme : la documentation ; avec en prime un gag à toutes les pages ou presque. Je découvre la série avec un regard d'adulte (je ne connaissais que de nom jusque là) et je sais pertinemment que si on me l'avait fait lire plus tôt, je n'aurais pas accroché.
    Suite aux récents événements survenus dans la capitale, j'ai été profondément marquée par la sublime représentation de Notre-Dame dans l'album Bec-En-Fer à Paris, trouvé par hasard en brocante.

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