Ça ressemble à une vie raconte l’histoire de Louis Even. Apprenti menuisier avant guerre. Sa femme Marthe. Son premier fils Martin. Il se met à son compte, voit son entreprise prospérer. Un adultère. Marthe qui s’en va. Entre temps David est né. Attardé. Il sourit et il bave. Toujours dans les jupes de sa mère et puis
« un jour d’avril 77 une lettre c’est marthe.
cancer. Promets-moi de veiller sur lui je ne t’ai jamais rien demandé mais là je te le demande
Promets-moi
s’effondre
il avait oublié ce goût du sel dans la bouche »
Ça ressemble à une vie et les années passent. Il vend son affaire. Vieillit. Martin est enseignant. David grandit et fait des progrès. Un jour ça lui échappe il l’appelle fiston. De la tendresse. Un père et son fils, ensemble, jusqu’à la fin. Une vie quoi...
Ce texte ne se donne pas facilement, il me semble qu’il se mérite. Une existence racontée en 33 tableaux. Forcément elliptique. Le rythme est saccadé, les phrases coupées, les majuscules et la ponctuation absentes la plupart du temps. De la poésie en prose ou de la prose poétique. On s’en fout. Il faut se laisser porter par la beauté et l’âpreté de la langue. Etre submergé par l’émotion quand l’image surgit. En quelques mots à peine. Pas d’effet de style, pas de grandiloquence. Une écriture minuscule à la force d’évocation incomparable. C’est beau. C’est de la littérature.
Ça ressemble à une vie de Roger Wallet. Éditions des Vanneaux, 2005. 70 pages. 10 euros.
PS : vous pouvez retrouver Roger Wallet dans la revue numérique et gratuite « Les années ». Une revue bimensuelle dont il est le co-fondateur et le grand manitou et à laquelle j’ai le plaisir de participer en y alimentant la rubrique BD. Si vous souhaitez la recevoir par mail, il suffit de me le demander.