dimanche 23 avril 2017

Novembre - Josephine Johnson

« La ferme était comme un vieil homme malade et geignard qui exigeait de l’attention à toute heure. »

Après avoir lu le Pulitzer 1934 dans la même collection, il me semblait logique d’enchaîner avec celui de 1935. D’ailleurs les deux ouvrages ont de nombreux points communs : des premiers romans, écrits par des jeunes femmes et mettant en scène des familles blanches rurales touchées par la pauvreté.

 Si « Les saisons et les jours » se passait avant la guerre de sécession, « Novembre » se déroule pendant la crise du début des années trente. La narratrice, Margot, a quitté la ville pour s’installer à la campagne avec ses parents et ses deux sœurs. Le père découvre la rude vie de paysan, il s’investit sans compter pour que sa ferme devienne rentable. Mais très vite une sécheresse implacable s’abat sur la région, la production de céréales et de légumes est en danger et la chute du cours du lait met en péril les revenus du foyer. Car si le loyer ne peut être payé au riche propriétaire terrien qui leur met à disposition (et à crédit) les murs et les champs, la famille se retrouvera à la rue.

J’avoue avoir eu du mal à me mettre en route. Le quotidien raconté par Margot a d’abord des allures de pastorale un peu cucul et l’emploi récurrent de l’imparfait du subjonctif donne au texte une préciosité qui interpelle. Mais passé le premier tiers, les événements s’enchaînent de façon plus fluide. Merle et Kerrin, les deux sœurs atypiques de Margot, apportent du piquant à l’intrigue, tout comme l’arrivée de Grant, un jeune homme embauché par leur père qui trouble énormément la narratrice. Sans compter le renforcement de la sécheresse, la déliquescence inexorable des récoltes, l’ombre de la dette et de l’hypothèque qui plombe l’avenir. Le drame est en marche, la tragédie inéluctable…

Je garderai au final l’image d’un beau roman sur la grande dépression, un roman de la résignation devant un désastre naturel qu’il est impossible de combattre. Résignation donc, mais pas pour autant renoncement car cette plongée dans une middle class frappée par la pauvreté montre aussi la volonté sans faille d’un patriarche refusant de baisser les bras face à l’adversité, persuadé qu’il lui suffit de courber l’échine le temps des vaches maigres avant de pouvoir se redresser. Un roman d’une actualité brûlante au moment de sa publication et dont la thématique reste malheureusement au goût du jour 80 ans plus tard.

Novembre de Josephine Johnson. Belfond, 2017. 204 pages. 14,00 euros.









26 commentaires:

  1. Une lecture intéressante, à noter donc.

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  2. J'aime assez cette collection Vintage chez Belfond. Ils ont le don de ressortir quelques classiques d'époque qui, s'ils ne sont pas toujours des chefs-d'oeuvre sans faille et sans bémol, restent de bonne facture et ont un petit goût de feel-good un peu plus relevé que dans les romans d'aujourd'hui.

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    1. Ils sont surtout le reflet des goût d'une époque pour ce qui concerne les pulitzer des années 30 je trouve.

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  3. Tu m'intéresses malgré les lenteurs du début

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    1. Une fois passées les lenteurs, ça roule tout seul ;)

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  4. Bon ben... je vais passer mon tour. J'aime bien l'idée de cette collection, mais encore faut-il que les romans choisis vieillissent bien...

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  5. Emploi du subjonctif !! je passe mon tour

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  6. je suis amusée par ta remarque sur l'imparfait du subjonctif c'est un problème de traduction . Le subjonctif, en français, est d'abord une contrainte grammaticale(il faut que je vienne) mais les traducteurs de l'anglais sont très ennuyés avec le passé. Est ce qu'ils vont dire "il fallait que je vinsse" ou "il fallait que je sois venue" ou comme disent les français "il fallait que je vienne" en se moquant de la concordance des temps . C'est comme ça que quand je lis des polars mal traduits de l'américain je vois des pauvres gosses délinquants parler avec des imparfaits du subjonctif

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    1. Franchement, je n'avais jamais remarqué ce type de pratique dans des traductions de l'américain. C'est pour ça que ça m'a beaucoup surpris.

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  7. j'aime beaucoup les précisions de luocine!
    cette collection vintage est intéressante

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  8. J'aime beaucoup cette collection vintage, j'y puise régulièrement des pépites.

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  9. je n'ai jamais tenté cette collection mais c'est une chouette idée :-)

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  10. Prochaine lecture : le Pulitzer 1936 ?

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    1. Il me semble que celui de 1936, c'est "Autant en emporte le vent" :)

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  11. Pas certaine d'accrocher je dois dire...

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  12. Pas trop tentée, je vais m'en passer je crois.

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  13. très beau livre sur la résignation devant l'inéluctable, la souffrance intérieure de Margot devant son amour inavouable, le regard juste et réaliste sur cette société sans concession , dure ; mais qui courbe la tête en attendant des jours meilleurs car il faut que la vie continue.
    l'imparfait du subjonctif va très bien avec l' ancienneté de l' époque; a lire et faire lire.

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    1. C'est un regard réaliste et sans concession, je suis bien d'accord.

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