jeudi 8 août 2013

Le pianiste afghan - Chabname Zariâb

C’est l’histoire d’une petite fille née dans les années 80 en Afghanistan. Ses parents font partie de l’intelligentsia locale et suite à l’invasion russe, il leur faut envisager l’exil. Ce sera la France, à Montpellier, chez une tante. L’intégration est difficile, tant à l’école que dans la vie quotidienne. Apprendre la langue, comprendre les us et coutumes de cet étrange pays. La petite fille grandit, devient une lycéenne comme les autres, en oublie presque son passé afghan. Mais là-bas elle a laissé Milad, son ami et son amour d’enfance. Devenue adulte, elle ressent un irrépressible besoin de le retrouver et de renouer avec ses racines. Plus dure sera la chute…

Un texte qui a reçu le prix du festival du premier roman de Chambéry et le prix méditerranée des lycéens en 2012. Personnellement, j’avoue que n’ai pas été emballé. C’est une jolie réflexion sur l’identité et le déracinement mais je suis resté à l’écart du  destin de cette jeune femme qui se raconte à la première personne. Aucune empathie, un regard distancié et presque indifférent sur son parcours que j’ai du mal à m’expliquer. Je crois que c’est à cause de l’écriture que j’ai trouvé plate, très scolaire. Et si l’ensemble se veut touchant, c’est quand même plutôt convenu. Bref je ne vais pas m’attarder, ça a été pour moi une déception même si comprends qu’il ait pu plaire à un public de lycéens (je veux dire par là que quand j’étais au lycée, c’est tout à fait le genre de lecture « facile » qui m’aurait séduit).

Le pianiste afghan de Chabname Zariâb. L’aube, 2012. 184 pages. 7,40 €.




mercredi 7 août 2013

Le vent dans les sables T5 : Du souk dans la casbah - Michel Plessix

Après leur périple dans le désert, Rat, Taupe et Crapaud retrouvent la ville et leur ami Blaireau. Grâce à lui, le trajet de retour vers le Bois Sauvage est enfin envisageable. Mais les choses ne sont pas si simples et un saucisson va entrer dans la danse, provoquant une course poursuite aussi folle que trépidante.

Voila c’est fini. Dix-huit ans après avoir entamé l’adaptation du roman Le vent dans les saules de Kenneth Grahame, Michel Plessix met un point final à l’aventure en clôturant ce second cycle avec maestria. Dix-huit ans pour neuf albums en tout, il aura fallu se montrer patient. Mais Plessix est sans doute l’un des derniers artisans de la BD actuelle : une semaine pour tomber une planche, dix à douze mois pour dessiner un album de trente-deux pages et quatre à cinq mois supplémentaires pour la couleur. Le résultat est là, c’est juste somptueux, découpé au millimètre, bourré de détails et toujours fort drôle. L’écriture des récitatifs et les dialogues sont très travaillés et le ton reste étonnamment léger.

Ce dernier tome est beaucoup plus mouvementé que les quatre précédents et fonctionne avec les mêmes ressorts que la conclusion du premier cycle à savoir un maximum d’humour et d’action. Ce second cycle sous forme de récit de voyage et d’ode à la culture maghrébine aura vraiment été un enchantement graphique : le travail sur la lumière, la minutie des décors et des costumes, tout est parfaitement ciselé.

Je ne suis pas objectif parce que je suis un fan absolu de Plessix mais il faut reconnaître que cette ambiance exotique à souhait, cette délicatesse du trait, cet éloge permanent de l’amitié et de la franche camaraderie rendent l’ensemble irrésistible. De la BD jeunesse réellement tout public comme on en fait plus. A lire, à relire et à faire lire sans modération.


Le  vent dans les sables T5 : Du souk dans la casbah de Michel Plessix. Delcourt, 2013. 32 pages. 12,50 euros.





mardi 6 août 2013

Le premier mardi c'est permis (19) : Il faut jouir, Édith

Bon, ce mois-ci, pas de clit lit à la c.., pas d’essai à la mords-moi-le-nœud mais un petit texte tout en finesse. Un texte publié pour la première fois en 2004 aux PUF dans la collection « Perspectives critiques ». Oui, vous avez bien lu, aux Presses Universitaires de France. Un roman érotique aux PUF, ça a quand même plus de gueule qu’un Passion intense chez j’ai lu, non ?

Ça commence par un coup de téléphone. Elle prospecte pour tenter de placer des stations d’affinage censées purifier l’eau courante. Il décroche et se lance dans un plan drague plutôt convenu mais qui a l’air de fonctionner. Il lui annonce qu’il est écrivain et lui demande ses coordonnées afin de lui envoyer son livre. Ils se recontactent à plusieurs reprises par téléphone puis entament une correspondance. Elle est mariée et mère de famille mais elle se laisse petit à petit embarquer dans un jeu de séduction qui bouscule son train-train quotidien et réveille une libido en sommeil depuis trop longtemps. Leurs échanges deviennent de plus en plus torrides et ils vont se rencontrer à plusieurs reprises, dans un parc, dans une voiture et finalement à l’hôtel. Lui n’a qu’une idée en tête, la faire jouir (car elle ne s’en croit plus capable depuis longtemps). Avec obstination, imagination et persévérance, il va parvenir à ses fins.

Enfin un vrai plaisir de lecture dans le cadre du rendez-vous de Stephie, je commençais à désespérer. Un délicieux petit roman, uniquement basé sur des échanges téléphoniques et épistolaires. C’est fin, jamais vulgaire, tout en suggestion, loin des descriptions quasi gynécologiques qui fleurissent partout ailleurs. Tellement plus émoustillant en somme. Et puis les personnages ont de l’épaisseur. D’un coté l’écrivain canaille, un brin pervers, séducteur patenté qui sait parfaitement ce qu’il fait et ce qu’il veut (sans compter qu’il n’a ni passé douloureux avec une fêlure d’enfance à cicatriser et encore mois un physique de dieu grec) et de l’autre une mère de famille faussement ingénue qui cherche juste à pimenter son quotidien et reste d’une totale lucidité quant à cette relation adultère (pas une oie blanche nunuche qui tombe amoureuse de son patron en attaquant son premier jour de stage).    

Les échanges sont enlevés, il y a ce petit soupçon vachard qui empêche le récit de tomber dans la guimauve et en plus quelques passages sont plutôt drôles. Bref, je recommande chaudement si vous voulez sortir de la médiocrité ambiante.

Il faut jouir, Édith d’Alain Bonnand. La Musardine, 2013. 138 pages. 7,60 €.





dimanche 4 août 2013

Zéro pour l’éternité T1 - Naoki Hyakuta et Souichi Sumoto

Kentarô est un NEET, un célibataire sans emploi ayant arrêté ses études. Un jeune qui passe son temps à ne rien faire et a du mal à se voir un avenir. Quand sa sœur lui propose de faire des recherches sur leur grand-père mort au cours de la seconde guerre mondiale, Kentarô accepte du bout des lèvres. Dès le début de son enquête il découvre que ce grand-père a perdu la vie au cours d’une mission suicide. En rencontrant un des derniers pilotes encore vivant ayant connu son aïeul, il comprend que ce dernier était tout sauf un héros.       

J’avoue que j’y suis allé à reculons. Un manga sur les kamikazes japonais, pas vraiment mon truc. La surprise fut d’autant plus belle. Adaptée d’un roman, cette histoire met en lumière la difficulté pour la jeunesse nippone actuelle d’accepter le passé guerrier de l’archipel. Elle montre aussi à quel point la société a toujours du mal à se considérer à la fois comme victime de la bombe et complice de la folie du Reich. Et puis l’on découvre que nombre de Kamikazes n’étaient pas habités par une quelconque fierté et que leur sacrifice, loin de relever du courage, était souvent dicté par un ordre de la hiérarchie auquel il était impossible de ne pas se plier. Des hommes comme les autres et non des ultranationalistes prêt à tout pour la prospérité éternelle de leur pays (le fameux cri « banzaï » signifie « prospérité éternelle »). Autre thème abordé par ce manga, l’attentat du 11 septembre au cours duquel les djiadistes d’Al-Qaida furent qualifiés par les médias de kamikazes. Une appellation inadmissible pour les japonais tant l’attitude des kamikazes de la seconde guerre mondiale n’avait pour eux strictement rien à voir avec celle des terroristes.         

Une lecture passionnante qui insiste sur la difficulté pour le Japon d’aujourd’hui de faire sereinement son devoir de mémoire. Trois autres tomes sont parus (la série en comptera 5 en tout) et je vais me faire un plaisir de tous les découvrir.



Zéro pour l’éternité  T1
de Naoki Hyakuta et Souichi Sumoto. Delcourt, 2013. 205 pages.  8,00 euros.

L'avis de Choco
L'avis de Yaneck



samedi 3 août 2013

Le guide des voyages (2)

Le guide des voyages revient pour un second numéro (il devrait y en avoir quatre en tout d’ici fin août). Le principe est simple, cette publication de 12 pages regroupe des chroniques livresques réparties en trois catégories : Pays chauds (des ouvrages que l’on a aimé) ; Pays froids (des ouvrages que l’on n’a pas aimé) ; Ailleurs (où l'on parle de quelque chose qui a à voir avec la littérature sans en être directement : une maison d'écrivain, un recueil de photos, une bio de compositeur, de peintre...).

Ce second numéro regroupe une fois encore les chroniques de 11 ouvrages. Parmi les pays froids, nous avons pour la première fois une visite en pays glaciaire avec « L’envie » de Sophie Fontanel (le degré zéro de l’écriture selon l’auteur de la critique) et  une balade sans saveur parmi la bourgeoisie de province avec Stéphane Hoffmann ("Les auto tamponneuses"). Du coté des pays chauds, Lydie Salvayre, Pierre Gamarra, Stewart O’Nan, Philippe Besson ou encore Sandor Marai…

Si je n’avais rien écrit dans le premier numéro, j’ai cette fois-ci contribué avec deux textes (à vous d’essayer de les retrouver, même si je reconnais que d’une part, c’est plutôt facile et que, d’autre part, ce petit jeu n’a aucun intérêt).


En tout cas si vous souhaitez recevoir ce numéro par mail, n'hésitez pas à me le demander, comme d’habitude, je me ferais un plaisir de vous l'envoyer.

vendredi 2 août 2013

Petit éloge des vacances - Frédéric Martinez

Le narrateur se balade dans les rues de Paris. Il pense à l’enfant qu’il était à la fin des années 70, au dernier jour d’école, à la nationale 7, aux séjours dans la Creuse... Surtout, il regarde les passantes et leur imagine un destin. Elles sont jeunes, belles, attirantes et lui il divague, se laisse emporter par son imagination...

Vu le titre, je m’attendais à une variation en finesse sur le thème des vacances, des textes à la Delerm, légers et délicieux. Pour tout dire, ça a été la grosse déception, je me suis retrouvé avec un petit exercice de style tout en futilité. Regarder les jolies filles et fantasmer leur vie, on fait tous ça non ? Là, c’est bien réalisé mais au final on n’est pas loin d’une certaine forme de masturbation littéraire. Le gars sait qu’il a une belle plume mais il ne pense qu’à se chatouiller tout seul dans son coin plutôt que d’en faire profiter le lecteur. Une pratique solitaire qui n’intéresse que lui il me semble. Tout cela m’a paru tellement vain, tellement inutile. Il n’y a rien d’autre à retenir que la vacuité des réflexions, certes bien troussées mais aussi vite lues qu’oubliées. C’est vraiment bien écrit, il y a de forts beaux passages mais j’ai juste eu l’impression de partager les soliloques d’un dandy qui s’écoute parler, tout ce qui me fait horreur quoi.   

Une lecture qui m’a agacé au plus haut point (mais je crois que l’avez compris...).

Petit éloge des vacances de Frédéric Martinez. Folio, 2013. 116 pages. 2 euros.

PS : vous savez quoi, je suis tellement passé à coté de ce texte que je veux bien lui offrir une seconde chance. Alors le premier ou la première qui se manifeste dans les commentaires en précisant qu’il souhaite recevoir ce livre, je lui envoie avec plaisir.


L’avis d’Hélène


jeudi 1 août 2013

Moi après mois : juillet 2013

Moi après mois, d’après une idée de Moka. C’est une grande première, je ne sais pas si je ferai ça régulièrement mais comme je suis en vacances et que j’ai un peu de temps, je me lance.  Et puis bon, c’est une idée Moka et j’adore Moka (elle me le rend bien il me semble). Je m’étais toujours dit que je me prêterai à l’exercice au moins une fois, alors voila. J’espère que vous serez indulgents…


Être sollicité par une chercheuse de l’université // Croiser Hardoc et Hautière par hasard dans une librairie et discuter longuement avec eux de leurs lulus // Amener sa fille une dernière fois à l’école avant le collège // Représenter les collègues au cours d’une réunion houleuse avec la direction pour demander qu’ils soient traités avec un minimum de respect // Recevoir un beau colis de Canel et un livre précieux de la part de Marilyne // Appeler le samu à 4h du mat pour son bébé dans une ville totalement inconnue et tomber sur un médecin de bon conseil qui vous évite de vous précipiter à l’hosto // Faire plus de 2000 km en voiture sans jamais entendre une seule fois bébé pleurer // Porter ce même bébé en écharpe façon kangourou et attirer les regards de la gente féminine // Profiter des vacances en bord de mer pour faire quelques excès alors que l’on est restés sages depuis trop longtemps // Souffrir de la chaleur comme rarement dans une maison trop petite et impossible à aérer // Fêter les 11 ans de sa grande et se dire qu’il y a 11 ans j’avais 10 kilos de moins // Constater une fois de plus que j’ai une femme en tout point admirable // Recevoir un mail qui fait partie de ceux que l’on ne voudrait jamais lire et penser comme Stig Dagerman que notre besoin de consolation est impossible à rassasier // changer de téléphone portable et avoir l’impression de changer de monde // Réaliser et programmer toujours plus de LC BD avec ma partenaire préférée // Passer les 15 derniers jours à lire encore et toujours plus parce que, bordel, il n’y a rien de meilleur quand on a enfin du temps devant soi !

Chiennes de vies - Frank Bill

Bon, après les minauderies cucul la praline de Frédéric Martinez (je vous en parle demain), il fallait que je retourne à la source, que je replonge dans cette littérature américaine cradingue que j’aime tant. En dernière page, parmi une tripotée de remerciements, on peut lire ceci : « Merci à Donald Ray Pollock pour son amitié, son soutien et ses conseils. » Sûr que Frank Bill doit beaucoup à Pollock. Même ambiance de fin du monde dans l’Amérique des paumés, au sud de l’Indiana. Mêmes trouduc alcooliques et violents, accros aux méthamphétamines et vivant dans des mobiles homes entourés de carcasses de bagnoles. Tous voleurs et escrocs à temps partiels, ivrognes à temps plein. Ils ont les cheveux sales, le « regard vide, comme dépouillé de toute étincelle de vie par un dieu qui ne [sait] dispenser que la souffrance. » Ici, on trouve « des couples où les hommes à l’haleine chargée de bière ne savent caresser leur femme qu’à coup de poing, leur offrant généreusement ecchymoses violettes, boursouflures rouge vif et os fracturés. » Ici, ce n’est qu’ « hommes et femmes d’un certain âge aux mains devenues calleuses à force de trimer pour survivre, et qui aspirent au carnage. » 

Dix sept nouvelles en tout où l’on découvre des chasseurs de ratons laveur, des organisateurs de combats de chiens, des dealeurs à la petite semaine, des junkies prêts à tout pour se payer leur dose, des femmes aux mœurs foutrement dépravées. C’est l’Amérique profonde des rednecks où l’on n’hésite pas à enfermer dans un sac un nourrisson né dans l’adultère pour le balancer à la rivière comme un chaton dont on veut se débarrasser et où les rancœurs séculaires entre voisins se terminent dans un bain de sang. Certains personnages se retrouvent d’une nouvelle à l’autre et donnent un semblant de fil conducteur à l’ensemble. Il faut dire que ce monde est tout petit et aux mains de quelques clans. Autre point commun entre ces textes, ils se terminent systématiquement mal, l’espoir n’ayant aucune raison d’être ici-bas.   
    
Âme sensible s’abstenir, un recueil aussi brutal vous secouera forcément. L’écriture est sèche comme un coup de trique, très visuelle. Frank Bill va à l’essentiel, il ne s’embarrasse pas de superflu et ne donne pas dans le gratuitement vulgaire. Chienne de vies s’est vu décerner le titre de meilleur polar de l’année par le magazine Lire du mois d’avril. Je ne vois pas bien en quoi c’est un polar mais on s’en fout un peu. Sachez juste que ça dépote sévère et qu’on en sort pas indemne. Autant dire que j’ai adoré.   


Chiennes de vies : chroniques du sud de l’Indianna de Frank Bill. Gallimard, 2013. 248 pages. 21 euros.

mardi 30 juillet 2013

La vraie vie de Toto : J’adore les animaux

Toto aimerait beaucoup avoir un animal à la maison mais son père ne veut pas en entendre parler. Il faut dire que le garçon possède quelques fâcheux antécédents : plus jeune, il passait son temps à arracher les ailes des mouches et à faire du pâté avec les vers de terre. Sans compter que quand sa grand-mère lui a offert un poisson rouge, ce dernier n’a pas survécu plus d’une semaine. Devant son insistance, ses parents trouvent une solution imparable : s’il rapporte un bulletin sans un seul zéro, il pourra avoir un chien. Autant dire, mission impossible…  

Le personnage de Toto fait immédiatement penser aux fameuses blagues. Déjà présent en BD chez Delcourt, il est devenu depuis peu le héros de mini-romans. Gamin facétieux et déterminé, il va ici tout mettre en œuvre pour faire céder les réticences paternelles en utilisant des procédés  pas toujours très catholiques. L’humour, loin d’être policé, donne plutôt dans l’irrévérencieux et les illustrations de Serge Bloch (connu pour son travail sur la série Max et Lili) sont dans l’ensemble drôles et parlantes.

Ma pépette n°2 (bientôt 8 ans) qui a lu cet ouvrage sur la route des vacances l’a qualifié de « trop classe », ce qui, dans sa hiérarchie de lectrice, correspond au top du top. Je n’irai pas jusque là mais il faut bien reconnaître que ce petit bonhomme malicieux en diable a tout pour plaire au jeune public auquel il s’adresse.

La vraie vie de Toto : J’adore les animaux de Marie-Agnès Gaudrat (ill. Serge Bloch). Tourbillon, 2013. 90 pages. 6,15 euros. A partir de 6-7 ans.


lundi 29 juillet 2013

Les enquêtes du limier T1 : Chien d’aveugle - Jirô Taniguchi

Taku Ryûmon vit quasiment en ermite au cœur d’une région montagneuse. Depuis son chalet, il exerce une activité de détective privé spécialisé dans la recherche de chiens de chasse perdus ou volés. Mais lorsqu’une jeune fille aveugle se fait dérober son chien guide, Ryûmon accepte de faire une exception et il se lance sur la trace du kidnappeur….       

Le dernier Taniguchi en date n’est sans doute pas le meilleur de son imposante production mais il se lit quand même avec un réel plaisir. Adapté d’une série de romans d’Itsura Inami, ce manga mettant en scène un privé un peu particulier ne se caractérise pas par un rythme trépidant et un foisonnement de scènes d’action. Les intrigues sont plutôt convenues et laissent la part belle aux bons sentiments. Ce n’est pas désagréable mais ça manque de peps. Au moins ai-je appris beaucoup de choses sur les chiens d’aveugle et la façon dont on les dresse, sans compter que le dessin de Taniguchi est toujours aussi fluide et aussi lisible. Rien que pour cela, ce volume vaut le coup d’œil.      

Un manga certes loin d’être indispensable mais qui reste néanmoins de fort bonne tenue. Et puis en ce qui me concerne ce titre restera comme la première découverte de cet auteur culte pour ma pépette n°1 qui a beaucoup aimé ces histoires animalières touchantes. Il gardera donc une petite place à part dans la mangathèque familiale.  


Les enquêtes du limier T1 : Chien d’aveugle de Jirô Taniguchi. Casterman, 2013. 228 pages.  

L'avis de manU


samedi 27 juillet 2013

La sauvage - Jenni Fagan

« J’ai été placée à ma naissance, je suis passée par vingt-quatre familles d’accueil avant l’âge de sept ans, j’ai été adoptée, je suis partie à onze ans, et j’ai changé encore vingt-sept fois au cours des quatre dernières années. » Anaïs a quinze ans. Soupçonnée d’avoir agressé une policière, elle est emmenée pour la énième fois dans un foyer pour ados. Au cas où la victime, dans le coma, venait à décéder, Anaïs serait envoyée dans un centre fermé jusqu’à sa majorité, en attendant la prison. Mais si les forces de l’ordre l’accusent, elle est persuadée d’être innocente. A vrai dire, elle ne se souvient de rien.

Au foyer, elle rencontre des gamines de son âge et des garçons un peu plus jeunes. Taciturne, provocatrice, en butte à toute forme d’autorité, Anaïs va peu à peu se rapprocher d’Isla, anorexique et séropositive et de son amoureuse Tash qui se prostitue pour qu’elles puissent louer un appart en sortant du foyer. Mais elle va aussi découvrir Shortie, Dylan, John et quelques autres, enfants en perdition marqués au fer rouge par un passé des plus douloureux. Et si la nouvelle pensionnaire a une réputation sulfureuse à entretenir, elle n’a pas besoin de se forcer pour montrer aux autres qu’il vaudrait mieux éviter de la chercher : « Je déteste dire s’il vous plait, ça me donne l’impression de me rabaisser. Je déteste dire merci. Je déteste dire que j’ai besoin de quelque chose. S’il fallait se lever et demander de l’air tous les jours, je serais déjà morte, putain. »     

Sauvage est roman coup de poing, cru, abrasif. Un récit dur, vulgaire, violent qui met en scène des gamins cabossés. Anaïs est la narratrice. On plonge dans son esprit torturé, ravagé par les psychotropes qu’elle consomme sans retenu. Évoluant constamment à la limite de la schizophrénie, ne cessant de se questionner sur ses origines, elle est persuadée d’être le fruit d’une expérience menée par un laboratoire secret. Totalement insoumise, elle est aussi particulièrement intelligente et lucide. Surtout, elle n’a pas encore tiré un trait sur ses rêves d’avenir.

En filigrane, l’auteur, écossaise, dénonce la façon dont les services sociaux traitent les enfants en souffrance. Elle dresse quelques portraits d’adultes qui frôlent parfois la caricature : il y a forcément un éduc plus compréhensif et humain que les autres, forcément une juge pour enfants incapable d’imaginer que les jeunes délinquants pourront un jour s’en sortir et forcément des forces de police totalement abruties. Mais à la limite peu importe. Le sel du roman tient dans la puissance de l’écriture ultra réaliste, dans la force des dialogues parfaitement crédibles et dans une construction imparable pleine de souffle et de colère contenue.

Un grand premier roman qui secoue furieusement et ne pourra laisser personne insensible. Nul doute que longtemps après avoir tourné la dernière page, la voix d’Anaïs continuera à vous hanter. On prend les paris ?   
Une belle découverte que je dois une fois de plus à Marilyne.


La sauvage
de Jenni Fagan. Métailié, 2013. 312 pages. 19,00 euros. 




vendredi 12 juillet 2013

Saints et pécheurs - Edna O’Brien

Des nouvelles qui se déroulent toutes (sauf une) en Irlande. On y retrouve un ouvrier qui a creusé les canalisations de Londres, une vieille logeuse choquée par les mœurs légère d’une famille qu’elle accueille le temps d’une nuit, un activiste politique à peine sorti de prison et déjà condamné à mort par ses « adversaires », une mère et sa fille, dépitées après leur invitation dans l’une des plus riches familles du village ou encore deux cousins n’arrivant pas à dépasser une querelle de famille séculaire.  

J’attendais beaucoup de ma première rencontre avec Edna O’Brien, grande dame des lettres irlandaises s’il en est. Trop peut-être car au sortir de la lecture de ce recueil, je ne suis pas d’un enthousiasme débordant. C’est certes bien écrit, il y est question de passions, de frustrations, de déceptions, de cet ordre moral typique de la société irlandaise catholique et nationaliste, cependant le tout manque de liant. Les personnages sont bien campés mais mon intérêt a fortement varié d’un texte l’autre et certains m’ont profondément ennuyé. Il y a quand même quelques nouvelles sortant du lot, notamment celles qui ouvrent et ferment le recueil.

Une prose délicate et sensible, une ode à une Irlande de pluie et de tourbières et à sa population la plus ordinaire (dans le bon sens du terme)  mais un ensemble pas suffisamment homogène. Disons qu’en ce qui me concerne Edna O’Brien n’arrive pas à la cheville de Claire Keegan.
 
Saints et pécheurs d’Edna O’Brien. Sabine Wespieser éditeur, 2012. 228 pages. 21,30 euros.

jeudi 11 juillet 2013

Pendant les combats - Sébastien Ménestrier

J’aime que l’on me confie des livres précieux. Par précieux j’entends des livres que l’on a particulièrement appréciés et que l’on a envie de partager. Par exemple quand Marilyne qualifie un texte de « merveille » et qu’elle me l’envoie, je sais d’avance que je vais me régaler. Pour le coup, ça n’a pas manqué.     

Joseph et Ménile se connaissent depuis l’enfance. Quand le premier entre dans la résistance par conviction, le second le suit sans trop réfléchir. Ils multiplient les actions plus ou moins spectaculaires et finissent par être arrêtés. Au moment où leur amitié passe au révélateur des interrogatoires, les choses vacillent : « J’ai donné Joseph. La nuit, quand les soldats sont venus, ils nous ont mis dans ce camion. Joseph et moi, on s’est regardés. On tiendrait l’un pour l’autre. On tiendrait. »

Ce pourrait être l’histoire d’une amitié trahie mais les choses ne sont pas si simples. Disons que l’on y découvre un homme qui renonce, vaincu par la tristesse : « C’est la tristesse, Jeanne, c’est la tristesse qui m’a eu. » C’est une tragédie en cinq actes dont on connait d’avance la funeste conclusion. C’est beau parce que malgré les circonstances, tout cela reste pétri d’humanité. Et puis c’est l’écriture que j’aime. Peu de mots, zéro dialogue, des phrases courtes, des petits  paragraphes qui claquent comme autant de micro-chapitres. La suggestion est tellement plus forte que les descriptions les plus précises : « On l’a conduit dans le bureau du colonel. On l’a fait asseoir en face de lui. Joseph n’a rien dit. Après ils l’ont mené dans un réduit, au fond du couloir, et ils lui ont fait mal, longtemps. Lorsqu’il est remonté par l’escalier, la nuit tombait, ses jambes tremblaient. » Tout est dit sans jamais rentrer dans les détails. Une puissance d’évocation tellement plus parlante, tellement plus forte…

Pendant les combats est un magnifique texte. Un premier roman qui, sous son apparente concision, se révèle particulièrement ambitieux. Et surtout particulièrement réussi. Applaudissements, comme dirait Marilyne.


Pendant les combats de Sébastien Ménestrier. Gallimard, 2013. 94 pages. 9,50 euros.

mercredi 10 juillet 2013

Sirène - Daphné Collignon

Au Maroc, Magda est enceinte de Nour. Ça fait deux ans qu’ils sont ensemble mais elle n’ose pas lui avouer cette grossesse en cours : «  Tu sais ce que c’est un enfant hors mariage au Maroc ? En particulier chez Nour ? C’est la honte, pour moi, l’enfant, le père, toute la famille. Un bâtard né dans le péché. Tu vois l’idée ? » Lorsqu’elle lui annonce la nouvelle par téléphone, le futur père n’est pas content. Pas content du tout : « Il a dit qu’il ne voulait pas en entendre parler, et qu’on avait déjà assez de problèmes comme ça. » Alors Magda décide de prendre la route. De la côte atlantique aux confins de l’Atlas, elle traverse le Maroc et ne cesse de se questionner. En chemin elle rencontre une jeune femme rousse qui semble être tout droit sortie de l’océan. Une jeune femme muette qui va croiser son chemin à de nombreuses reprises et qui semble veiller sur elle d’une étrange façon…

Un portrait de femme qui se veut touchant et intime mais pour le coup, j’avoue que la femme qui sommeille en moi est restée bien cachée. Je comprends qu’avec certaines lectrices ce récit puisse faire « tilt » mais en ce qui me concerne il a fait « plouf ». Sirène est selon moi une BD très sexuée. Le questionnement autour de la maternité, de cet enfant à venir que l’on désire ou pas, tout cela m’a laissé parfaitement insensible (quel salopard je fais quand même !). Aucune empathie pour Magda, aucune envie de la plaindre ou d’espérer que sa situation s’améliore, je n’ai finalement trouvé que très peu d’intérêt pour cet album (punaise, il est temps que je parte en vacances le cynisme professionnel dans lequel je baigne depuis quelques semaines commence sérieusement à jouer sur mon humeur). Le problème c’est que le propos est confus, il laisse place à trop d’interprétations possibles. On voit les doutes et les hésitations, la difficulté de la situation mais il n'est pas évident au final d’y voir clair. Qui est notamment cette jeune fille rousse surgit de nulle part ? Le double de Magda ? Son ange gardien ? Un miroir déformant ? L’image de son destin à venir ? Et puis la correspondance de l’héroïne, insérée au fil des pages dans de nombreux encarts, se perd dans un lyrisme très cucul qui ne relève pas le niveau d’ensemble.  

Graphiquement c’est très beau. Dessin généreux, couleurs franches, beaucoup de gros plans… il faut reconnaître que le trait de Daphné Collignon est des plus séduisants. Malheureusement ça ne suffit pas à faire une bonne histoire et la narration souffre d’une construction que je qualifierais volontiers de «nébuleuse ».

Un album bien trop hermétique pour moi. Ça m’agace de refermer un livre en me disant que je n’ai pas tout compris mais il faut parfois avoir l’honnêteté de reconnaître ses limites… Bon ce qui me rassure c’est que ma binômette habituelle de lecture commune s’est sentie aussi paumée que moi. Du coup je me sens moins seul mais ça ne changera rien à mon ressenti très défavorable.

Sirène de Daphné Collignon. Dupuis, 2013. 68 pages. 14,50 euros.

L'avis de Mo'
L'avis d'Oliv





mardi 9 juillet 2013

L’expédition du Poisson Parlant - W.E. Bowman

Engagé par son ami Wagstaff pour relater une expédition dont le but est de retrouver une espèce de poisson capable de parler (oui, oui, vous avez bien lu, d’ailleurs ce poisson s’appelle le « buburup »), Binder, le narrateur, se retrouve sur un radeau en plein océan pacifique avec pour compagnons d’aventure quelques zigotos affiliés au club des Martyrs. Ces masochistes patentés pensent qu’un explorateur digne de ce son nom se doit de souffrir en permanence. C’est ainsi que le dénommé Batters passera (de son plein gré et avec un plaisir non dissimulé) toute la traversée immergé dans la grande bleue la tête coincée entre deux rondins du radeau. Quant aux autres, ils se nourriront exclusivement de mastic et de sciure de bois. A noter également qu’une drôle de ménagerie, composée notamment d’une huître, d’une grenouille et d’un couple de chats complètent cet équipage de bras cassés qui ne va cesser d’enchaîner les épisodes rocambolesques. Ainsi, après avoir mangé des poissons radioactifs, les félins vont se multiplier de façon exponentielle. Un événement à priori anodin qui va pourtant mettre en danger l’équilibre géopolitique de la planète…

Soyons honnêtes, on n’est pas loin du grand n’importe quoi avec ce roman "So British" ou l’humour très particulier de nos amis anglais éclabousse de sa douce folie l’ensemble de cette improbable expédition marine. Pas pour rien que cet ouvrage datant de 1957 et publié pour la première fois en français fait partie de la collection « Les insensés » des éditions Wombat. Si certains lecteurs (dont je fais partie) trouveront ce court roman hilarant, je ne doute pas que d’autres pourront le qualifier de « complètement c** ». Disons que si les sketches des Monty Python ne vous ont jamais arraché le moindre sourire, mieux vaut passer votre chemin. Sans être fan, j’aime beaucoup, à petite dose, me plonger dans cette forme d’humour très particulière, souvent proche de l’absurde. A n’en pas douter, W.E Bowman fait partie de ces génies loufoques dont la perfide Albion a le secret.

Après le Wilt du regretté Tom Sharp et le Harry de Jack Trevor Story, voila donc ma troisième rencontre avec cet esprit de dérision typiquement anglais qui reste malgré les apparences d’une grande finesse. Amateurs du genre, vous pouvez foncer, vous ne serez pas déçus.  

L’expédition du Poisson Parlant de W.E. Bowman. Wombat, 2013. 152 pages. 16,00 euros.

dimanche 7 juillet 2013

Le guide des voyages (1)


Ceux qui passent ici régulièrement se souviennent peut-être que depuis 1 an et demi  je collabore à la revue en ligne Les années. J’y ai notamment en charge la rubrique BD. Si la revue s’éclipse le temps des vacances, nous avons choisi de la remplacer par Le guide des voyages, un «périodique sporadique » qui devrait compter quatre numéros entre juillet et août. Le principe est simple, cette publication de 12 pages regroupe des chroniques livresques réparties en trois catégories : Pays chauds (des ouvrages que l’on a aimé) ; Pays froids (des ouvrages que l’on n’a pas aimé) ; Ailleurs (où l'on parle de quelque chose qui a à voir avec la littérature sans en être directement : une maison d'écrivain, un recueil de photos, une bio de compositeur, de peintre...).

J’aime bien ce principe. Après tout, le voyage c’est comme la lecture, il y a de bonnes et de mauvaises surprises.

Ce premier numéro chronique 11 livres en tout. Parmi les pays froids, une descente en flèche de Christine Angot (Une semaine de vacances), Grégoire Delacourt (La liste de nos envies) et Caryl Férey (Petits polars du Monde). Du coté des pays chauds, nos « chouchoutes » Annie Ernaux et Jeanne Benameur mais aussi, Mathias Énard, Shumona Sinha,  Hervé Bazin, Jérôme Ferrari…

Si vous souhaitez recevoir directement chaque numéro par mail, n'hésitez pas à me le demander, je me ferais un plaisir de vous l'envoyer ;)

samedi 6 juillet 2013

Paradis (avant liquidation) - Julien Blanc-Gras

Fin 2011, Julien Blanc-Gras se rend sur l’archipel des Kirabati, avant que le réchauffement climatique ne le fasse disparaître. L’écrivain voyageur, décidé à effectuer un « quadrillage méthodique » de la planète, souhaite surtout découvrir « un pays en voie de disparition. » Arrivé sur place, il découvre un décor de rêve, le paradis sur terre. Il n’a qu’une hâte, plonger la tête la première dans le lagon bleu azur. Mais le chauffeur qui l’emmène vers son hôtel douche son enthousiasme : « N’y songe même pas. Le niveau de pollution est rédhibitoire. C’est l’infection assurée. A ce propos, voici l’hôpital. Si tu tombes malade, il ne faut surtout pas venir ici. Ton état empirerait. On est dans le pays d’Océanie le plus défavorisé en matière de santé. » 

Le décor est planté, le « touriste » va découvrir ce petit caillou de 16km² où vivent 50 000 âmes. Une densité de population infernale, un chômage de masse, une alcoolisation frénétique, une violence domestique omniprésente, un manque de ressources criant : eau potable, électricité, circuit d’assainissement des eaux usées inexistant, j’en passe et des meilleurs. Sans compter bien sûr les marées dévastatrices, les inondations à répétition, le niveau de la mer qui ne cesse de monter et des infrastructures de bric et de broc incapables d’enrayer le phénomène. Le paradis vous avez-dit ? 
   
Le tableau n’est certes pas des plus reluisants mais Julien Blanc-Gras possède ce ton si personnel où ne cesse d’affleurer une sincère empathie pour tous les autochtones qui vont croiser sa route. Il narre les épisodes farfelus qui vont jalonner son séjour avec un style inimitable où l’humour est toujours très présent. Petit exemple lorsqu’il se penche sur les problèmes de mœurs : « l’homosexualité est illégale et la sodomie, qu’elle soit masculine ou féminine, est passible de prison. J’ignore si cette loi est appliquée. Je ne suis pas certain que le gouvernement ait les moyens d’entretenir une police anale. »

Le propos se perd parfois dans des considérations sans grand intérêt et certains chapitres relèvent davantage du remplissage que de l’information la plus pertinente mais au final ce livre est drôle, réaliste, d’une grande humanité, à la fois empreint de lucidité et de tendresse envers ce peuple au bord de la disparition. Un véritable récit de voyage ou les aspects journalistiques et littéraires se retrouvent sur un pied d’égalité, ce qui, reconnaissons-le, n’est pas si courant.

Paradis (avant liquidation) de Julien Blanc-Gras. Au diable Vauvert, 2013. 252 pages. 17,00 €.

L’avis d’Hélène 
Mon avis sur Touriste, son ouvrage précédent, que j’avais trouvé encore meilleur que celui-ci.

vendredi 5 juillet 2013

Promesses - Julia Billet

Un recueil composé de deux nouvelles clairement estampillées "littérature de jeunesse".

Dans la première, Ankidou a laissé sa mère et sa sœur dans ce pays en guerre qui est le sien. Le bateau l’a amené en France. Il a découvert le foyer, l’école, la rudesse du climat. Un environnement où il ne se sent pas à sa place, où il ne se sent pas chez lui. Sans compter la barrière de la langue. Petit à petit, il va se rapprocher d’Agostino, « ce garçon un peu trop petit, un peu trop maigre, un peu trop à l’écart. » Un garçon qui ne parle jamais. Leur complicité, faite de silences, va se renforcer au fil du temps. Deux amis qui vont devenir inséparables.    

La seconde met en scène Sarah et Fred. Ils vivent dans la même tour et eux aussi sont inséparables. La destruction programmée de leur immeuble risque de les éloigner à jamais l’un de l’autre. Les familles seront bien sûr relogées mais pas forcément au même endroit. Une situation inacceptable pour les deux enfants, décidés à tout mettre en oeuvre pour rester voisins, quitte à tenir tête à leurs parents.  

Un nouvel éditeur (Le muscadier) et une nouvelle collection (Place du marché) souhaitant offrir aux jeunes lecteurs « un monde de partage et non un partage du monde », voila qui a tout pour me plaire. Les deux récits de ce recueil sont traversés par une indéfectible amitié symbolisée comme le titre l’indique par des promesses impossibles à trahir. Le message est simple, efficace et limpide, l’écriture agréable et le format court pourra inciter les moins courageux à se lancer sans risque de lassitude.

Typiquement le genre de publication plutôt confidentielle qui mériterait d’être davantage sous le feu des projecteurs tant la qualité est au rendez-vous.


Promesses de Julia Billet. Le Muscadier, 2013. 62 pages. 6,90 euros. A partir de 9 ans.

L'avis de Stephie

jeudi 4 juillet 2013

Et si on parlait de la rentrée...

"Hou ! Quelle honte ! Les vacances ne sont même pas commencées et voila qu’il nous parle déjà de la rentrée ! "

Pas faux, j’accepte les huées et les tomates que vous mourez d’envie de m’envoyer mais si je souhaite vous parler de la rentrée c’est parce que j’ai pris le temps de parcourir l’épais dossier de Livres Hebdo consacré à la rentrée littéraire. J’aime bien retrouver chaque année le dernier numéro du mois de juin parce qu’il présente l’ensemble des romans français et étrangers qui vont paraître entre fin août et octobre.

Premier constat, je suis bien mois emballé que l’an dernier : pas de Jérôme Ferrari, pas d’Antoine Choplin, de Philipp Roth, de Claire Keegan ou de Patrick Deville. Et je suis déjà certain de ne pas lire les trois blockbusters annoncés dès août : A. Nothomb, E.E Schmitt et Jean d’Ormesson. Parmi les autres « grands noms », je me passerai aussi de Marie Darrieussecq, Yasmina Khadra et Yann Moix. Par contre je profiterais peut-être de la rentrée pour découvrir enfin des auteurs tels que Sorj Chalandon et Véronique Ovaldé, voire Paul Fournel.

Chez les français « moins connus » il n’y a vraiment pas grand-chose qui me fait envie en dehors d’Emmanuelle Guattari (Ciels de Loire, un roman sur son enfance) et Thomas B. Revedy (Les évaporés, l’histoire d’un japonais qui, comme tant d’autres avant lui, disparaît du jour au lendemain sans que personne ne cherche à le retrouver). Pour les premiers romans, plus nombreux cette année qu’en 2012, Tartes aux pommes et fin du monde de Guillaume Siaudeau est un titre qui titille ma curiosité.


Finalement, et comme souvent, c’est dans le domaine étranger que je risque le plus de trouver mon compte. L’incontournable de la rentrée qui me tente beaucoup est le nouveau roman de Louise Erdrich (Dans le silence du vent, National Book Award 2012). Mais je sens que je vais aussi craquer pour Laura Kasischke (Esprit d’hiver, un huis clos tendu entre une femme et sa fille adoptive), Milena Michiko Flasar (La cravate, un roman qui se déroule au Japon), l’islandais Bergsveinn Birgisson (La lettre à Helga, édité par Zulma) et le japonais Yasutaka Tsutsui (Hell) publié par les éditions Wombat dans l’excellente collection Iwazaru.

Un dernier petit mot sur la rentrée de la littérature de jeunesse que je n’ai pas encore étudiée de près mais dont un titre sort déjà largement du lot, Pas assez pour faire une femme de l’incontournable Jeanne Benameur.

Si je fais les comptes ça donne, à coup sûr, trois auteurs français, cinq étrangers plus un roman jeunesse. Pas énorme mais je sais bien que je vais tomber sur quelques divines surprises présentées ici ou là sur la blogosphère et pour lesquelles je vais forcément craquer. Au final, ce premier rapide débroussaillage ne présage en rien de ce que seront mes lectures définitives de la rentrée. Et en attendant je vais de ce pas préparer ma pal de vacances, un exercice pas si évident que cela quand je vois le nombre affolant d’ouvrages non lus qui trônent sur les étagères de ma bibliothèque.

Et vous, vous avez déjà des idées livresques pour la rentrée ?





mercredi 3 juillet 2013

Ardalén : Vent de mémoires - Miguelanxo Prado

Sabela débarque dans un minuscule village de montagne. Elle cherche des informations sur son grand-père, un ancien marin qu’elle n’a pas connu et dont on aurait perdu la trace près de Cuba mais qui pourrait avoir eu des liens avec certains habitants du coin. Au café local, on lui conseille d’aller voir Fidel, vieux monsieur un peu simplet surnommé « le naufragé » qui aurait navigué dans les caraïbes à l’époque de son grand-père. Mais Sabela va vite constater que Fidel, vieillard fantasque et attachant, a la mémoire pour le moins défaillante… 
       
« Je voulais proposer au lecteur un univers en bascule entre rêve, réel et fantastique, comme dans la littérature sud-américaine dite de réalisme magique. » (Miguelanxo Prado)

Un album ambitieux, fortement imprégné d’onirisme et dans lequel viennent s’intercaler des coupures de presse, des témoignages de scientifiques ou des documents juridiques. Difficile de faire le tri dans les souvenirs de Fidel. Sa mémoire s’effiloche, elle s’efface et invente des souvenirs. C’est un labyrinthe dont les contours sont difficiles à cerner. L’ardalén est un vent chaud et humide qui arriverait sur le sud ouest de l’Europe après avoir traversé l’océan atlantique depuis les côtes américaines. Fidel aime aller écouter le bruit que fait ce vent dans la forêt d’eucalyptus derrière chez lui. Métaphoriquement, il lui transmet des souvenirs arrachés ici ou là. Tout se mélange dans l’esprit du vieil homme : sa propre vie, celle des autres, les histoires qu’on lui a raconté et celles qu’il a lues. Pas évident de s'y retrouver dans ces bribes qu’il tente d’assembler, pas simple de discerner les amis et les amantes qu’il a vraiment connus parmi ces fantômes qui ressurgissent du passé. Sabela va beaucoup s’attacher à Fidel mais elle va se rendre compte que les informations qu’il fournit ne sont pas à prendre au pied de la lettre. Jusqu’au jour où…  
             
Niveau dessin, c’est de toute beauté. Il aura fallu trois ans à Miguelanxo Prado pour réaliser les 256 planches de l’album en couleur directe à la peinture acrylique. Du très grand art, un esthétisme rarement vu en BD même si les visages sont souvent figés et possèdent une texture proche du bois qui pourra dérouter plus d’un lecteur.

J’ai embarqué Mo’ dans cette lecture commune en lui présentant ce titre comme l’album de l’année. Je ne sais pas pourquoi mais je m’imaginais quelque chose, certes fort différent, mais au moins aussi emballant que Daytripper. Le problème c’est que je suis constamment resté à distance de l’univers de Fidel. Et pour le coup si l’on ne parvient pas à rentrer dans son monde, impossible d’apprécier le récit. Pour tout dire, je me suis ennuyé. Les derniers chapitres, plus ancrés dans le réel, m’ont davantage accroché mais cela ne suffit pas à faire de cette lecture un vrai grand moment de plaisir. C’est pourtant une très jolie réflexion sur la mémoire qui s’efface et le temps qui passe. Beaucoup de poésie, d’émotion et de mélancolie. Malgré tout je suis passé à coté et je le regrette vraiment. Mon petit doigt me dit que Mo’ y a plus trouvé son compte. Tant mieux, filez vitedécouvrir son avis !   
 

Ardalén : Vent de mémoires de Miguelanxo Prado. Casterman, 2013. 256 pages. 24 euros.






mardi 2 juillet 2013

Le premier mardi c'est permis (18) : Déshabille-moi de Mila Braam

Je n’avais pas du tout prévu de lire ce livre ce mois-ci pour le rendez-vous de Stéphie. A vrai dire je ne connaissais même pas son existence. C’est Liliba qui a pensé à moi après avoir découvert cette histoire de culotte sale. Une charmante attention, je la remercie...    

Eh oui, parce que dans Déshabille-moi, la narratrice est une culotte. Une culotte achetée en vitesse par Célia dans un bazar en bas de chez elle. Plus aucun sous-vêtement de propre avant de partir au boulot, elle n’avait pas d’autre solution. Une culotte toute simple en coton avec un hippocampe sur le devant. Très cul-cul, quoi. Donc la culotte raconte. Elle raconte qu’elle possède un pouvoir magique et qu’elle ressent les expériences sexuelles vécues précédemment par ses propriétaires. Plus fort même puisque la femme qui l’enfile va elle aussi ressentir le passé sexuel de celles qui l’ont portée avant elle. Bon, pour ça, il faudrait que l’on se prête une culotte comme on se prête un pull. Je vous passe les détails mais figurez-vous que c’est exactement ce qui va arriver. La culotte va naviguer de main en main (ou plutôt de chatte en chatte, excusez ce langage un peu vulgaire mais j’essaie de me mettre au niveau du texte.) sans que jamais personne ne la lave (c’est mieux pour garder les sensations des porteuses précédentes). Oui parce que dites-vous bien que ses porteuses sont ou vont devenir de sacrées petites cochonnes, forcément. Et qu’une fois qu’elles auront découvert son pouvoir, plus question de la laver au cas où ce pouvoir disparaisse. Du coup ça nous vaut ce constat plein d’à-propos de ladite culotte : « Je vous rappelle au passage qu’il y a moins de quatre ou cinq jours que j’ai été sortie de mon emballage, que depuis quatre femmes différentes m’ont portée et je n’ai toujours pas bénéficié du moindre lavage. Je sens si fort que je me dégoûterais presque moi-même. Mon entrejambe est si imprégné de liquides divers, asséchés et solidifiés, qu’il a perdu toute souplesse. » Il y en a qui aiment, il paraît. Des fétichistes de la culotte. Perso je préfère quand un sous-vêtement sent la lessive et l’assouplissant. Chacun son truc.

Un petit livre sans prétention, c’est le moins que l’on puisse dire si on ne veut pas être méchant. L’histoire est totalement tirée par les cheveux (j’aurais pu écrire « par les poils pubiens » pour rester au niveau) et la narration ne tient pas debout. Ben oui, si c’est la culotte qui raconte, elle ne peut normalement relater que les événements qui se passent sous les yeux de son hippocampe. Alors quand elle décrit les faits et gestes d’un mec tout seul à l’hôtel qui attend sa maîtresse, on n’y croit plus (déjà qu’au départ c’était pas gagné). Comment elle fait pour savoir ce qui se passe dans cette chambre d’hôtel alors qu’elle n’y est pas ? Elle est omnisciente la culotte? Bon je chipote mais avec des détails comme ça, je décroche.

Sinon, sachez que dans ce livre on « frémit du gland » (longtemps que ça ne m’est pas arrivé), il y a des « copeaux de plaisir qui éclaboussent la chambre, les draps, les vêtements » (longtemps que ça ne m’est pas arrivé non plus) et notre narratrice est une petite sensible qui n’hésite pas à s’exclamer : « Je refuse de sentir ces grosses couilles poilues sur moi ! ». Voila, voila. La grande classe.

Soyons clair, ça sent à plein nez le texte de commande torché à la va vite et sous pseudo. Battons le fer tant qu’il est chaud, pas certain que la ménagère soit encore demandeuse de clit litt l’année prochaine...  Lamentable et sans aucun intérêt. Désolé Lili, ça m’a fait sacrément plaisir que tu penses à moi en m’envoyant ce roman mais j’avoue que je n’ai pas aimé grand-chose en dehors de quelques passages qui m’ont arraché un sourire. Finalement je constate que je suis plutôt mauvais public pour ce genre de bouquin. Je devrais le savoir depuis le temps. Et pourtant à chaque fois je replonge. Y a comme un hic, non ?

Déshabille-moi de Mila Braam. J'ai lu, 2013. 156 pages. 5,60 euros.

L'avis de Liliba ; ceux de L'irrégulière et Fée Bourbonnaise

PS : juste un petit retour sur mon billet du mois dernier qui a soulevé un nombre inattendu de réactions positives, drôles ou émoustillées. Je tenais vraiment à remercier toutes celles (et les rares « ceux ») qui ont pris le temps de découvrir ma nouvelle et m’ont fait part du plaisir qu’elles ont eu à la lire. Je ne m’y attendais pas du tout et je peux vous avouer aujourd’hui que j’étais absolument terrifié à l’idée de me mettre « à poil » de la sorte sur ce blog.
Un clin d’œil particulier à Cess sans qui rien de cela ne serait arrivé, à Noukette pour sa complicité et son avis plein de bon sens, à Sarah pour son incroyable billet sur mon billet et à Mo'Stéphie et Sara (qui va me manquer !) pour la gentillesse de leurs commentaires. 



lundi 1 juillet 2013

Tobi et les souvenirs - Anne-Kathrin Behl

Tobi ne sait pas comment s’occuper. Tous ses copains sont partis en vacances et il n’y a plus personne pour jouer avec lui. Dans la rue, c’est simple, il n’y a que des vieux. « Les vieux, c’est ennuyeux » ronchonne Tobi. Quand Mr Bouc lui demande pourquoi il est de mauvaise humeur, sa réponse est simple : « Tout le monde est au moins un million de fois plus vieux que moi dans cette ville. » Mais quand Mr Bouc commence à lui parler de son passé de pilote de ligne, Tobi est intéressé. Puis c’est Madame Rhino qui revient sur sa carrière de chanteuse et enfin Mr Loup qui lui révèle qu’il était détective et qu’il a arrêté bien des criminels. Au final, Tobi se rend compte qu’être vieux, ce n’est pas si mal que cela : au moins on a toujours de belles histoires a raconter !     

Un album qui souligne avec malice l’importance de l’échange entre les générations. Tobi ne voit pas chez les vieux qu’il croise dans la rue des interlocuteurs dignes d’intérêt et pourtant, ils vont le faire rêver. C’est simple mais bien amené et très facilement compréhensible pour un petit lecteur. Les illustrations s’étalent sur des doubles pages et fourmillent souvent de détails rigolos. Une lecture vraiment très sympathique sur un thème pas si courant, à recommander chaudement.  


Tobi et les souvenirs d’Anne-Kathrin Behl. Tourbillon, 2013. 28 pages. 11,95 euros. A partir de 4 ans.



samedi 29 juin 2013

Archanges : roman a capella - Velibor Colic

Vous ai-je déjà dit à quel point j’appréciais Athalie ? Enfin pas elle personnellement puisque je ne la connais pas. Son blog plutôt et ses billets plus particulièrement. Elle possède cette capacité rare à vous empoigner dès les premières lignes pour vous emmener dans un tourbillon de bons mots, de phrases enlevées, de tournures qui vous font rire ou vous laisse béat d’admiration devant tant d’inventivité. C’est un fait, je suis fan des billets d’Athalie. Tout à fait fan. Alors quand j’ai découvert son avis concernant ce roman de Velibor Colic, impossible de ne pas craquer. Je me le suis procuré dare-dare et j’avoue que je ne le regrette pas.   

Archanges est une succession de monologues. Quatre voix témoignent de l’horreur de la guerre en ex-Yougoslavie. Trois bourreaux et une victime. Deux vivants et deux morts. Le premier a sévi en Bosnie. Il s’appelle Esdras. Ses compagnons d’armes le considéraient comme un poète. C’était aussi et surtout un tueur implacable, grisé par le mauvais alcool, qui aimait couper les oreilles de ses victimes après les avoir violées. Aujourd’hui c’est un clodo qui vit dans un parc, à Nice. Ses journées sont toujours les mêmes : « Je bois et je pue. Et j’invente mes poèmes et je pense aux femmes. » Son état physique est déplorable, il se sait condamné, il veut juste qu’on le laisse tranquille. La guerre, il y pense avec nostalgie et il ne regrette rien, à part la défaite.

Le second était surnommé le duc. C’était le meilleur ami d’Esdras. Un officier d’une effroyable cruauté qui menait ses troupes d’une main de fer. Il se déplaçait avec un chien monstrueux portant un collier fait avec des yeux humains. Ce gars était une légende. On a écrit des chansons sur lui. Une bombe lui a ôté les bras et les jambes. Pour cela que maintenant on l’appelle le tronc. Il a été arrêté et emprisonné. C’est un maton qui vient le nourrir tous les jours. Au biberon. Pour passer le temps, il n’a plus que ses souvenirs. Les villages pillés, les hommes et les femmes tués de la pire des façons, les jeunes filles torturées avant d’être violées. L’âge d’or de son armée, avant la défaite.        

La troisième est Senka, une jeune fille qui a subi les assauts de ces ordures. Elle avait 13 ans. C’est un ange qui erre dans un paradis où tout lui semble être un enfer : « Dieu existe et c’est un chien. » Elle vient régulièrement hanter les nuits d’Esdras. Pas pour se venger. Juste parce qu’il faut que son bourreau ne l’oublie jamais car elle sait que l’on meurt deux fois : « La première fois physiquement, et la deuxième fois quand il n’y a plus personne sur cette terre qui puisse se souvenir de vous. Et moi, je suis toute seule. Et si on m’oublie, on oublie aussi le crime. C’est pourquoi j’espère qu’il vivra encore longtemps, ce vieux salaud. »

Le quatrième est le fils du tronc, il accompagnait son père sur le terrain de ses « exploits ». Lui aussi est mort. Égorgé dans un train, bien après la guerre. Il porte à son tour un regard nostalgique sur les heures glorieuses du conflit : « Tout était si facile. La guerre n’était qu’une rigolade, une camaraderie, on flinguait un peu, et on sautait tout ce qui bougeait. On libérait enfin, cinq siècles après, toute notre terre, une ville après l’autre, et le soir on fêtait ça comme il faut. » Il est aussi le plus lucide des quatre : «  Et puis merde, voilà, si l’on regarde bien, n’importe quelle tragédie peut devenir une farce. N’importe quelle victime n’est qu’un bourreau raté ; vous aussi, vous êtes tous coupables, parce que vous étiez témoins. » 

Archanges, c’est le requiem des vaincus. Un texte d’une rare dureté. La guerre est montrée dans toute son horreur, sans apologie. Les mots sont durs, crus, lyriques ou poétiques. Ils claquent, ils sonnent et laissent groggy. Ces voix résonnent et bousculent, elles dérangent et vous mettent mal à l’aise. La quatrième de couverture parle d’ « une parabole tourmentée pour faire acte de mémoire. » Pas mieux.     


Archanges (roman a capella) de Velibor Colic. Gaïa, 2008. 156 pages. 16,30 euros. 


vendredi 28 juin 2013

A l’heure du loup - Kochka et Les Manouchkas

Quand la nuit arrive, le jour s’enfuit, il a peur du loup. Pour Lili, c’est pareil : à l’heure du loup, quand elle est seule dans son lit, c’est son courage qui s’enfuit. Mais heureusement, Lili a un papa très fort et très intelligent. Pour éviter que Lili soit terrorisée lorsqu’arrive l’heure du loup, il lui construit un nid. C’est bien connu, aucun loup n’a jamais grimpé dans un nid. Du coup, le courage de Lili revient et la petite fille peut tranquillement fermer les yeux.      

Une histoire toute simple qui traite des peurs nocturnes avec finesse. L’occasion d’aborder la question en douceur afin de dédramatiser ce moment qui reste angoissant pour nombre d’enfants. Des illustrations naïves et très parlantes, des couleurs pastel qui laissent à distance les teintes trop sombres et un super papa trop fort qui trouve une solution magique au problème... décidément, rien n’est grave à l’heure du loup. Il suffit juste de faire comprendre à ce dernier qu’il n’est pas le bienvenu dans la chambre des petites filles !  


A l’heure du loup de Kochka et Les Manouchkas (Laura Guéry et Julie Wendling). Ricochet, 2013. 32 pages. 13,70 euros. A partir de 3 ans.