mercredi 29 mai 2019

Maïdan Love T1 : Olena - Aurélien Ducoudray et Christophe Alliel

C’est beau l’amour. Regardez Olena et Bogdan. Ils s’aiment et rien d’autre ne compte, même pas les remous politiques d’une Ukraine en crise.

Février 2014, Kiev s’embrase. Bogdan sort tout juste de l’école de police auréolé de son statut de « Berkout » (flic antiémeute). Olena manifeste sur la place Maïdan pour renverser le gouvernement. Envoyé sur les lieux pour sa première mission de maintien de l’ordre, Bogdan reçoit sur son portable un SOS d’Olena. Prêt à tout pour la retrouver et lui venir en aide, il devient malgré lui une icône des insurgés. Improbable me direz-vous. Certes, mais les talents de conteur d’Aurélien Ducoudray transforment cette romance en récit haletant, proche de la course poursuite.

Bogdan semble être dans un labyrinthe sans fin. Sa copine disparaît, il déserte, se fait tabasser par des manifestants avant d’endosser les habits de héros de la révolution tout en étant traqué par ses ex-collègues. Au-delà des nombreuses péripéties, le scénariste s’attache à décrire avec clarté une situation politique des plus complexes. Le mélange de la petite et de la grande histoire fait mouche, le rythme est parfait, le découpage dynamique en diable et le dessin de Christophe Alliel restitue à merveille l’atmosphère irrespirable d’une ville au bord de l’explosion.

Ce premier tome d’un diptyque se conclut comme il se doit sur un insoutenable suspens. Et comme il se doit, j’attends la suite avec la plus grande impatience !

Maïdan Love T1 : Olena d’Aurélien Ducoudray et Christophe Alliel. Grand Angle, 2019. 56 pages. 14,90 euros.




Les BD de la semaine sont à retrouver chez Moka












mardi 28 mai 2019

Le concours de nouvelles - Jo Hoestlandt

Orane, bientôt 14 ans, décide sur un coup de tête de participer à un concours de nouvelles. Excellente en français, la collégienne a toujours aimé écrire. Seulement, écrire pour soi et écrire pour un jury littéraire, cela n’a rien à voir. Conseillée par sa prof de français et encouragée par la documentaliste, Orane s’installe au CDI, bien décidée à se lancer. Mais l’exercice n’est pas simple. Que raconter ? Et comment le raconter ? Très vite elle s’oriente vers une histoire très personnelle, une histoire d’amitié déçue qui reste pour elle une blessure à vif.

Du Jo Hoestlandt tout craché ! Une histoire simple, pleine de pudeur et de délicatesse, des personnages sensibles, une émotion contenue et des rencontres inattendues qui réservent de belles surprises. Orane manque de confiance en elle, c’est une solitaire qui peine à nouer des contacts avec ses camarades. Et quand elle y parvient la déception est au bout du chemin. Si l’écriture n’est pas un exutoire, c’est néanmoins une façon de clore un chapitre qu’elle n’avait jusqu’alors pas pu refermer, de « tirer un trait définitif sur ce douloureux moment de [sa] vie ».

Après l’ode à la lecture de mardi dernier ce « Concours de nouvelles » offre un bel hommage au pouvoir de l’écriture, à cette capacité qu’ont parfois les mots à exprimer le mal être et à panser les plaies : « Sans doute est-ce cela aussi, parfois, écrire : s’adresser en longue et intime confidence à d’invisibles amis, dans l’espoir fou qu’ils vous comprendront, qu’ils vous pardonneront vos erreurs et vous aimeront autant. »

Le concours de nouvelles de Jo Hoestlandt. Magnard, 2019. 145 pages. 11,90 euros. A partir de 10-11 ans.   




Une lecture commune évidemment partagée avec Noukette














mercredi 22 mai 2019

La maison de la plage - Séverine Vidal et Victor L. Pinel

La maison de la plage, la tribu y passe tous les étés. Les trois frères, leurs enfants et Elno, le petit fils. Mais cette année l’ambiance est pesante. Albert, l’un des trois frères, voudrait récupérer sa part. Pour sa nièce Julie, impossible d’imaginer perdre cette maison. Enceinte et ayant perdu son compagnon dans un accident de voiture, la jeune femme  franchit le seuil de la maison des idées noires plein la tête. Soutenue par sa cousine Coline, elle attend l’arrivée du reste de la famille en espérant qu’une solution sera trouvée pour que la maison de la plage ne soit pas vendue.

2018, 1968, 1959. Trois époques et un même lieu, trois parties qui n’en font qu’une. D’abord le présent, ensuite le moment où les grands parents ont acquis la maison et enfin un coup de projecteur sur les propriétaires précédents et leur douloureuse histoire. Un roman graphique qui se veut positif malgré ses personnages bousculés par les aléas du destin. La construction alternant entre les époques est facile à suivre et toutes les pièces du puzzle s’imbriquent avec fluidité. Rien de révolutionnaire niveau scénario mais le but est atteint, on s’attache à tous les protagonistes et l’empathie ne fait que grandir au fil des pages.

Pourtant j’y suis allé à reculons. J’ai senti d’emblée un arrière-goût de feelgood dégoulinant de bienveillance et de bons sentiments et j’ai eu peur de tomber dans un récit insistant lourdement sur les effets dramatiques pour faire pleurer dans les chaumières. Heureusement ce n’est pas le cas, Séverine Vidal ne mange pas de ce pain-là et je la remercie de m’avoir évité une lecture inutilement larmoyante. Pour ce qui est du dessin, difficile de ne pas tomber sous le charme du trait lumineux et expressif de Vicor L. Pinel, un trait à l’évidence idéal pour illustrer une telle histoire.

Au final un joli roman graphique tout en pudeur et en émotion contenue. Simple et imparable !

La maison de la plage de Séverine Vidal et Victor L. Pinel. Marabulles, 2019. 160 pages. 17,95 euros.





Toutes les BD de la semaine sont chez Stephie !








mardi 21 mai 2019

Le trésor de Barracuda - Llanos Campos

Il était une fois une bande de pirates menée par le terrible capitaine Barracuda. Une bande de pirates à la recherche du fabuleux trésor de Phineas Krane. Ce trésor, ils le trouvèrent. Malheureusement, ce trésor n’était qu’un vulgaire livre. Des années à parcourir les mers pour tomber sur un fichu bouquin en guise de récompense, quelle déception ! Jamais les pirates n’avaient vu trésor aussi inutile. Quel intérêt pouvait avoir un livre quand on ne savait pas lire ? Parmi eux, seul le corse surnommé "Deux-Dents" parvenait à déchiffrer quelques mots. Quand ses compagnons le trouvèrent un soir tapi sous l’escalier de la cale le livre entre les mains, ils lui demandèrent de leur en faire la lecture. Et très vite ils le sommèrent de leur apprendre à lire. Ce fut le début de la plus grande aventure que l’équipage ait jamais connue…

Quelle belle découverte ! Un roman de piraterie qui démontre avec brio que la lecture est le plus beau des trésors. Racontée par un jeune mousse plein d’entrain, l’histoire est drôle et pleine de rebondissements. Le livre trouvé par les pirates est l’autobiographie de Krane. Il renferme de précieuses indications qui vont permettre de déchiffrer des secrets bien gardés. Au cœur d’un volcan ou dans une maison abandonnée en pleine jungle, c’est en lisant entre les lignes que la troupe de Barracuda va parvenir à percer les mystères les mieux cachés.

Entre tempêtes et criques paisibles, tavernes mal famées et fêtes à tout casser sur le pont du bateau, le récit déroule avec gourmandise une succession de scènes plus savoureuses les unes que les autres. Au fil des événements les pirates prennent conscience du pouvoir offert par la maîtrise de la lecture. Pour la première fois de leur vie ils peuvent lire un menu ou s’orienter dans une ville en déchiffrant le nom des rues. Une source infinie d’enrichissement qu’aucune pierre précieuse ne pourra jamais égaler.

Un roman d’aventure original qui prouve s’il en était encore besoin que la lecture est à la fois un bagage indispensable et un émerveillement de chaque instant.   

Le trésor de Barracuda de Llanos Campos (traduit de l’espagnol par Anne Cohen Beucher, illustré par Nicolas Pitz). L’école des loisirs, 2018. 175 pages. 13,50 euros. A partir de 9 ans.




Une lecture commune partagée avec Noukette












mardi 14 mai 2019

Nos cœurs tordus T2 : New-York avec toi - Séverine Vidal et Manu Causse

« Un pauvre gars handicapé, sa muse cérébrale, son petit pote de la cité, la copine en fauteuil, des jumelles fusionnelles et un ado trisomique à l’assaut du rêve américain. »

Quel plaisir de retrouver Vlad, Lou, Saïd, Mathilde, Dylan, Théa et Charlie ! Après s'être formée non sans remous dans le premier volume, cette bande hétéroclite s’apprête à s’envoler pour New-York afin de participer à un festival de films amateurs pour lequel le court métrage de Vlad et Saïd a été sélectionné. Alors que Dylan, trisomique, est resté au collège, ses ex-camarades ont tous fait leur entrée au lycée. Vlad « le pantin désarticulé » et Lou filent le parfait amour, Saïd aimerait que Charlie s’intéresse à lui tandis que Mathilde, en fauteuil roulant, est toujours aussi râleuse. Accompagné du principal Flachard et de l’AVS Irène, les enfants vont découvrir Big Apple et passer un séjour où les émotions fortes seront au rendez-vous.

Toujours écrit à quatre mains par Séverine Vidal et Manu Causse, les tribulations de ces cœurs tordus m’ont à nouveau ravi du début à la fin. Toujours pas la moindre mièvrerie ni le moindre apitoiement, toujours un bel alliage de subtilité et de sensibilité, toujours un regard sans langue de bois sur le handicap et toujours la même facilité à se mettre avec le plus grand réalisme dans la tête des ados. A chaque chapitre l’un d’eux prend la parole et à chaque chapitre on découvre une personnalité aussi forte que touchante. La variété des caractères est incontestablement le point fort du roman, elle permet des interactions crédibles et tout en nuances.

L’écriture est vive, moderne, pleine de peps et une fois encore, malgré les embûches et le grand huit émotionnel n’occultant aucun coup dur, on ne peut s’empêcher de refermer ce roman jeunesse en se disant qu’il déborde de joie de vivre !

Nos cœurs tordus T2 : New-York avec toi de Séverine Vidal et Manu Causse. Bayard Jeunesse, 2018. 272 pages. 13,90 euros. A partir de 11 ans.


Mon avis sur le tome 1