Dans les autres histoires, une petite fille confiée à ses grands-parents par sa mère semble terrorisée à l’idée de monter sur les manèges d’un parc d’attraction, un père n’ayant pas vu sa fille depuis plus de vingt ans découvre qu’elle est devenue une artiste reconnue et que ses œuvres sont exposées dans la ville où il se trouve pour un rendez-vous professionnel, un frère rend visite à son aîné parce qu’il s’inquiète de le savoir vivre seul dans un hôtel bon marché, une sœur s’apprête à revoir son cadet dont elle a été séparé au moment du divorce de ses parents, une vieille dame fait une jolie rencontre dans un parc et deux frères ayant dû abandonner leur chien suite à un déménagement vont traverser une forêt pour tenter de le retrouver.
Des hommes, des femmes, des enfants à un moment charnière. Ils ont une décision à prendre, une situation difficile à affronter, un passé douloureux à se remémorer. Tout se joue en retenu et en discrétion, dans les regards, les silences, les attitudes. On ne s’épanche pas, on ne se livre pas, on n’étale pas ses sentiments. L’émotion ne peut qu’être contenue et il se dégage de chaque histoire une beauté douce et déchirante qui vous touche en plein cœur avec une simplicité dénuée de tout effet de manche inutile. Taniguchi n’était jamais aussi à l’aise que dans ce genre d’intimité pudique, dans l’expression d’un réalisme du quotidien aussi banal qu’émouvant. Assurément l’un de ses meilleurs recueils.
L’Orme du Caucase de Jirô Taniguchi (d’après l’œuvre de Ryûichirô Utsumi). Traduit du japonais par Marie-Françoise Monthiers et Frédéric Boilet. Casterman, 2019. 220 pages. 18,95 euros.
Les avis de Moka et Hélène