Chabouté © Vents d'ouest 2012 |
336 planches en noir et blanc et
sans texte, il fallait oser. Chabouté le reconnaît, s’il n’avait pas depuis quelques
années acquis une certaine notoriété, jamais son éditeur n’aurait accepté de
publier un album pareil. Autant le dire tout de suite, je n’étais pas chaud
pour me lancer dans cette lecture et si je ne l’avais pas croisé à la
médiathèque je ne me serais jamais laissé tenter. J’avais peur de l’exercice de
style, de la démonstration graphique froide, sans âme et surtout sans intérêt.
Pour le coup mes aprioris se sont révélés totalement faux. Chabouté parvient à
raconter quelque chose en laissant sa caméra posée face à ce banc sur des
centaines de pages. Des petits riens qui, mis bout à bout, forment un tout. Les
personnages passent, disparaissent, reviennent et évoluent (avec une mention
spéciale pour le policier municipal). Aucun des procédés habituellement
utilisés pour nourrir une intrigue ne sont présents et pourtant cette apparente
futilité m’a beaucoup parlé. C’était d’ailleurs une volonté affichée dès le
départ : « Je voulais un récit à la Tati, capable de rappeler à quel
point l’inutile et le quotidien peuvent être beaux pour peu qu’on les regarde d’un
œil attentif. » (interview casemate)
Graphiquement c’est toujours
aussi fort. Plutôt que de proposer un seul et interminable plan fixe sur le
banc, Chabouté ne cesse de tourner autour, utilisant les cadrages somptueux et
variés qui sont sa marque de fabrique. Pour une fois, les blancs sont davantage
marqués que les noirs et les décors sont réduits au strict minimum, sans doute
pour donner au jardin public où se trouve le banc un coté universel dans lequel
chaque lecteur pourra projeter ses propres références.
Une bien belle surprise donc. Pas
un chef d’œuvre du niveau de Tout seul mais je m’attendais à beaucoup moins
bien et j’avoue sans honte que mes aprioris n’avaient finalement aucun
fondement. Il faut savoir le reconnaître quand on se trompe…
Un peu de bois et d’acier de Chabouté. Vents d’ouest, 2012. 336 pages. 30
euros.
Une lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec
Hélène. Allez vite découvrir son avis. Mon petit doigt me dit qu’elle a moins
apprécié cet album que moi…
Chabouté © Vents d'ouest 2012 |