Ils sont trois. Un chevalier sans visage, un valet pleutre et sournois et une jeune fille rousse au tempérament de feu. Ces compagnons d’infortune errent sans véritable but en pleine guerre de 100 ans. En chemin, ils croiseront de dangereux lutins, de terribles Dhuards et devront déjouer un complot machiavélique. Ensemble, ils vivront une épopée pleine de bruit et de fureur dont certains ne sortiront pas indemnes...
Le premier album est très bon et constitue une belle entrée en matière. Les personnages sont déjà clairement définis. L’intrusion du fantastique semble naturelle et ne pose pas de problème de compréhension. Bref, c’est un tome d’introduction de grande qualité. On ne peut malheureusement pas en dire autant du second. Le propos est confus, verbeux en diable, alambiqué. Le fantastique est présent à chaque page et l’aspect onirique prend le pas sur tous les autres. Un album que j’ai eu beaucoup de mal à finir. Heureusement, le niveau remonte sacrément avec le troisième opus, de loin le plus abouti. 140 pages, une profondeur et une densité dignes d’un roman. Beaucoup de personnages mais une construction imparable qui laisse l’ensemble d’une grande lisibilité. Naviguant entre le récit historique, le policier médiéval et le conte, ce volume où les histoires s’entrelacent sans jamais perdre le lecteur (pour peu qu’il reste attentif) est maîtrisé avec brio. Et puis l’action se passe en ville et au cœur d’un château, c’est qui rend l’intrigue beaucoup plus réaliste. Une sorte de plongée en immersion dans la réalité urbaine de l’époque assez fascinante.
Que retenir de cette imposante trilogie ? D’abord le plaisir de parcourir les contrées moyenâgeuses avec ces attachants compagnons. Le preux chevalier sans visage, courageux et toujours prompt à lutter contre le mal. Anicet, son valet mignon mais apparemment lâche. Et la belle Mariotte, femme libre, sauvageonne et finalement si moderne. Ensuite, les dialogues d’antan dont on ne saisit pas toujours le sens mais qui possèdent une musicalité envoutante. Enfin, l’éblouissement devant le talent graphique de Bourgeon, son découpage au cordeau, son trait réaliste et si expressif, l’atmosphère particulière qu’il parvient avec créer avec un choix de couleurs d’une grande pertinence et des décors somptueux. Là encore, pour le dessin, ma préférence va, et de loin, au troisième tome qui est clairement le plus abouti.
Une série du début des années 80 devenue aujourd’hui un classique. Certes l’ensemble n’est pas facile d’accès et demande plusieurs relectures pour que l’on en saisisse les enjeux et la finesse, mais au final, difficile d’oublier cet univers mâtiné de mystère, de violence et d’érotisme ou l’aspect fantastique des légendes vient côtoyer la dure réalité d’une époque où la guerre dura 100 ans.
Les compagnons de crépuscule : l'intégrale de François Bourgeon, Éditions 12 bis, 2010. 245 pages. 45 euros.
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