samedi 19 mai 2012

L’armoire des robes oubliées

Pulkkinen © Albin Michel 2012
Elsa se meurt. Entourée de sa famille, elle veut profiter de quelques derniers instants heureux, dire adieu dignement aux jolies choses qui furent le sel son existence. Lorsque sa petite fille Anna sort d’un placard une vieille robe ayant appartenu à une certaine Eeva, c’est un secret de famille enfoui depuis des décennies qui refait surface.

En enfilant la robe, Anna raconte l’histoire de sa propriétaire… En 1964, Elsa est une pédopsychiatre renommée qui voyage beaucoup. Son mari Martii est peintre et n’a pas le temps de s’occuper de leur fille. Eeva est donc engagée comme nurse. Au fil des semaines, elle va nouer une tendre complicité avec Martii. Leur relation va peu à peu devenir plus intime et tourmentée. Une liaison clandestine et passionnée qui se terminera de manière dramatique…

Mêlant habilement le présent et le passé, Riikka Pulkkinen dresse le portrait de trois générations de femmes. Symbole du secret d’un amour perdu, la robe est une sorte de trait d’union entre les protagonistes. Le propos se focalise souvent sur les rapports familiaux et aborde des questions existentielles que l’on se pose lorsque la mort s’annonce et que l’on se retourne sur le passé. Pour Elsa, une certitude : « L’enfant naît, sa mère apprend à le connaître, petit à petit, année après année. Et puis viennent d’autres gens sous l’influence desquels il devient un étranger. » En voyant Anna grandir, Martii constate qu’à « chaque époque il y a des gens, jeunes, qui se convainquent que ce qu’ils vivent n’est jamais arrivé à personne d’autres avant eux. Ils croient que leurs vies, leurs joies et leurs chagrins mêmes sont exceptionnels. Que leurs amours à eux sont plus forts que ceux des autres. Ils croient que jamais ne leur échoira de sentir le poids des jours. Et peut-être est-ce le cas. Les jeunes possèdent le monde entier et le dilapident sans tristesse, parce qu’ils sont impatients de gagner d’autres mondes, toujours nouveaux. » Et quand Eleonoora, la fille d’Elsa, pense à la disparition prochaine de sa mère, elle sent sous ses pieds un grande vide se creuser : « Je ne sais pas si je saurais exister sans mère, je ne sais pas si j’aurais le temps d’apprendre pendant ces quelques semaines qui nous restent, j’ai l’impression que ça me prendra le restant de mes jours. »

L’amour interdit, la maladie, la famille et la transmission, tels sont les thèmes abordés tout en finesse par l’auteur. L’écueil de la mièvrerie est écarté avec brio au profit de la sensibilité. La fin est très forte émotionnellement et l’on quitte à regret ses personnages campés avec une rare justesse.

Publié en janvier à 16 000 exemplaires, ce roman connaît, en grande partie grâce au soutien des libraires, un énorme succès puisque son tirage a atteint fin avril les 55 000 exemplaires. L’engouement est d’ailleurs international puisque le texte a été traduit dans douze pays, adapté au théâtre et qu’un film est aujourd’hui en tournage. De mon coté, ce n’est pas à proprement parler un coup de cœur. Il y a quelques longueurs et les dialogues, certes poétiques, sonnent parfois creux. Pour autant, je reconnais la qualité indéniable de l’écriture et j’ai passé un agréable moment de lecture. Sans doute pas un chef d’œuvre mais un roman très abouti.

L’armoire des robes oubliées, de Riikka Pulkkinen, Albin Michel, 2012. 398 pages. 20,90 euros.

21 commentaires:

  1. Oh, voici une lecture qui me plaira ! Les secrets de famille tiennent en haleine en général et si tu dis que l'on ne tombe pas dans le pathos à chaque page, je m'engagerais bien dans cette lecture. Puis mon petit coeur de fille ne résistera pas longtemps ! hihi ! Me reste à trouver le livre mais si c'est un succès le problème sera vite résolu. merci pour cette découverte ;)

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    1. Pour ce qui est de le trouver, ça ne devrait pas poser de problème. Et je pense que tu vas apprécier cette lecture.

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  2. Je note, si je le trouve, pour un moment agréable, c'est déjà beaucoup!

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  3. Certaines lectrices de mon entourages ont été déçues. Et je vois que toi par contre as été touché. Je me ferai ma propre opinion mais j'attendrai le poche.

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    1. Je n'ai pas été enthousiasmé mais au final je garde davantage le coté positif que les quelques longueurs pas forcément indispensables.

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  4. Une collègue m'en a parlé, elle était très tentée. Tu nous refroidis du coup...

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    1. Non, non, il n'y a pas à être refroidie, ça reste un bon roman.

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  5. Un roman qu'on voit décidément beaucoup sur la blogo, et qui me tente, du coup...

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    1. oui, c'est un des best sellers de ce début d'année.

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  6. Plus tentée par sa couverture, que je trouve très jolie.

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    1. La couverture est jolie et sa texture très particulière, un peu comme du velour.

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  7. Le thème me plait, la couverture aussi... pourtant ton dernier paragraphe me fait hésiter...

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    1. Laisse-toi tenter pour te forger ta propre opinion, ça reste un roman très agérable à lire^^

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  8. Je suis en train de le lire et je suis aussi sensible au traitement de ces thèmes : la mort, la transmission. Roman poignant.

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    1. Tu as raison, c'est un roman poignant et tout en sensibilité.

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  9. La couverture me plaît beaucoup et l'histoire me tente aussi : un titre à noter !

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  10. je l' ai lu et je l' ai dévoré, la couverture m' avait plu , ainsi que l' histoire , les secrets de famille s'est une chose captivante. L' auteur travaille les deux époques avec tant de finesse et d'authenticité que parfois je posais le lire et m' intérroger sur certaines phrases. la fin du livre nous laisse hors d'haleine et on en redemande.

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    1. Les secrets de famille, en général, ce n'est pas mon truc. Mais là c'est amené en finesse, du coup ça passe plutôt bien.

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  11. J'ai cliqué sur ce livre dans ta colonne de droite parce que je ne pense pas que je te suivais en 2012 et j'ai été agréablement surprise par ton avis, j'avais beaucoup aimé ce roman, je ne sais plus si j'en avais fait un coup de coeur, je ne pense pas avec le recul mais il m'en reste un très joli souvenir très doux...

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