Après cette entrée en matière, l’hameçon était lancé, je me suis jeté dessus à pleine dents. Ferré, je n’ai pas pu lâcher l’album jusqu’à son terme, incapable d’abandonner Jean dans sa quête du chanteur perdu. Je l’ai donc suivi dans les rues de Morlaix, sur la plage de Berck et les falaises du Cap Gris-Nez, dans une hutte de la baie de Somme et un vieux troquet de Paris, jusqu’à l’île aux Nattes, un caillou de 3 km carrés au large de Madagascar. Avec lui j’ai rencontré une documentaliste à l’ancienne, un garagiste amateur de crêpes, la fille d’un pendu, un comique insomniaque, un ornithologue pas très observateur, un directeur d’hôpital pour enfants fier de son parcours et un Pierre Perret toujours en forme malgré le poids des ans.
Jean mène son enquête au feeling, avançant au fil de découvertes et de déductions improbables, se demandant souvent ce qu’il est train de faire et ne sachant pas pourquoi il s’acharne autant. Il y a comme toujours chez Tronchet une profonde tendresse pour ses personnages, un rapport incessant à l’enfance et à la mémoire et une progression du récit de l’ombre vers la lumière. Progression non linéaire évidemment, ce brave Jean ne cessant de se tromper, d’échouer, d’avancer, de passer du découragement à l’euphorie et inversement. C’est simple, c’est beau, c’est touchant, c’est drôle, mélancolique et plein de vie.
Un bijou d’album, ni plus ni moins.
Le chanteur perdu de Didier Tronchet. Dupuis, 2020. 168 pages. 23,00 euros.
PS : Le pire (ou le meilleur), c’est que le chanteur perdu existe vraiment. Didier Tronchet l’a retrouvé dans une petite île de Madagascar. Sa véritable histoire est racontée à la fin de l’album, photos à l’appui. Et sur le site www.tronchet.com il est possible d'écouter toutes les chansons citées dans le livre.
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