mercredi 6 juillet 2011

Le perroquet des Batignolles 1 : L’énigmatique Monsieur Schmutz

Cette histoire est l’adaptation d’un feuilleton radiophonique créé en 1997 sur France Inter par Jacques Tardi et Michel Boujut. Oscar Moulinet, preneur de son à la Maison de la Radio, enquête sur deux meurtres et des agressions en rapport avec de petites boîtes à musique en forme de canard expédiées à des connaissances par un faussaire aujourd’hui décédé. Un point de départ abracadabrantesque pour une aventure sans temps mort qui mènera Oscar de Paris au fin fond de la Bretagne.

Le Perroquet des Batignolles, c’est de la BD à papa. Le genre franco belge à l’ancienne qui me conforte dans l’idée que je suis passé de l’autre coté de la barrière, proche, toujours plus proche du vieux con un poil réac qui se dit que, décidément, c’était mieux avant. Bien sûr, l’action se passe dans le Paris de la fin du 20ème siècle. Mais le traitement narratif et graphique se veut un hommage aux grands anciens que sont Franquin, Tillieux, Jacobs ou Hergé. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que l’un des personnages lâche à un moment donné en voyant la tournure que prennent les événements : « On dirait une histoire de Tintin. » Et il est vrai que comme chez ce dernier, l’intrigue est ici ultra linéaire avec des rebondissements à toutes les pages.

Autant d'éléments qui laissaient à penser que j’allais me régaler. Et bien pour le coup, c’est raté. Le personnage d’Oscar est plutôt lisse, il manque d’épaisseur. Finalement, les rôles secondaires (notamment sa compagne Edith et son collègue Patafoin) sont les plus intéressants. Et puis dans ce volume d’introduction, on reste dans le flou artistique le plus complet. L’histoire s’emballe sans donner l’impression d’avancer vraiment. Peut-être sera-t-il préférable d’aborder l’ensemble lorsque tous les tomes seront parus. Mais comme Stanislas a déjà prévenu qu’il mettait à peu près un an et demi pour finaliser un nouvel album et que la série devrait en compter quatre ou cinq, on n’est pas arrivé au bout ! Autre problème majeur dû au fait que ce titre est une adaptation d’un programme radiophonique, les planches sont surchargées de texte (voir les extraits ci-dessous). Un vrai inconvénient qui a rendu ma lecture très pénible. Peut-être y-a-t-il un problème de découpage mais en même temps je vois difficilement comment l’auteur aurait pu s’y prendre autrement. Au final, cet envahissement de chaque page par des quantités astronomiques de texte alourdit fait perdre beaucoup de fluidité au récit.

Une déception à la hauteur de mes attentes qui ne m’incite pas du tout à lire la suite. Tant pis !

Le perroquet des Batignolles T1 : L’énigmatique Monsieur Schmutz de Stanislas, Boujut et Tardi, Éditions Dargaud, 2011. 56 pages. 13.95 euros.  





Le challenge Palsèche de Mo'


samedi 2 juillet 2011

Ubel Blatt 1

Il y a 20 ans, en l’an de grâce 3972, l’empereur confia une mission à 14 jeunes gens qu’il dota de 14 lances sacrées. Leur but : vaincre la puissance maléfique de l’armée des ténèbres de Wischtech et rétablir la paix dans le royaume. Trois d’entre eux périrent en chemin. Quatre trahirent l’empire et furent exécutés. Les sept derniers revinrent en héros et furent portés en triomphe dans la capitale. Mais ces sept survivants sont-ils vraiment des héros ?

Aujourd’hui, dans la ville frontière de Rielde Velem, les moines guerriers sont chargés d’octroyer des laissez-passer aux réfugiés qu’ils estiment être des « justes ». La population afflue en masse pour espérer obtenir ce précieux sésame leur permettant de passer de « l’autre coté », au pays des sept héros et de la paix. Ceux qui tentent de franchir la frontière clandestinement sont exécutés sur la place publique. La corruption est bien souvent le moyen le plus efficace pour obtenir l’assentiment des moines.

C’est dans cette ambiance tendue et oppressante que vont se rencontrer Peepi, Vido, Altea et Köinzell. Un quatuor improbable animé par des motivations différentes mais partageant un but commun : parvenir à tout prix à passer la frontière…

Ubel Blatt, c’est de la Dark Fantasy. Je fais le malin, mais n’y connaissant pas grand chose dans les nombreuses appellations propres à ce genre particulier, je suis allé rendre une visite à mon ami Wiki pour qu’il m’en apprenne davantage : "La dark fantasy ou fantaisie noire est un sous genre de la fantasy qui désigne les œuvres dans lesquelles l'ambiance est très sombre et proche de l'apocalypse. Le bien laisse place au mal et les héros sont souvent fatigués et abattus par les épreuves qu'ils ont subies. En partant donc d'une mentalité pessimiste, l'auteur nous présente la plupart du temps une œuvre évoluant dans l'horreur en présentant aux lecteurs les détails des combats. Cela leur donne une dimension plus violente et souvent assez proche de l'horreur sans pour autant en faire partie. Cette dimension nouvelle de la fantasy s'éloigne du classique classement bien/mal et permet une réflexion sur le bien fondé des notions de bien et de mal".

Ambiance, sombre, héros ayant subi de lourdes épreuves, détails dans les combats… Pas de doute, Ubell Blatt réunit ces critères. C’est un univers d’une grande noirceur où il est question de trahison et d’honneur. La violence y est omniprésente et les combats sont plutôt sanglants. Petit contre pied aux poncifs habituels de ce type de récit, le héros Köinzell n’est pas un grand macho baraqué mais plutôt une figure androgyne d’apparence frêle et vulnérable. Pour ce qui est du dessin, on est dans du grand classique où les mouvements et la variété des scènes d’action sont bien rendus. Un petit souci néanmoins avec les personnages féminins qui se ressemblent tous comme deux gouttes d’eau.

Ne se contentant pas d’enfiler les combats comme des perles, l’auteur pose dans ce premier tome les bases d’une fresque complexe où les enjeux géopolitiques sont au moins aussi importants que les destins individuels. D’ailleurs, à la fin de chaque volume on trouve des informations sociales ou historiques qui donnent beaucoup d’épaisseur à l’environnement qui est décrit. Au final, Ubell Blatt est un seinen (décidément, mon vocabulaire spécialisé ne cesse de s’élargir !) riche et violent qui, par certains aspects, rappellera aux nostalgiques du club Dorothée la série Hokuto no Ken (Ken le survivant). A priori pas du tout ma tasse de thé mais j’ai tout de même passé un bon moment de lecture.


Ubell Blatt T1 de Etorouji Shiono, Éditions Ki-Oon, 2007. 216 pages. 7.50 euros.





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La quinzaine Nippone de Choco
 

vendredi 1 juillet 2011

La ballade de Hambone 1

Huzlehurst, Mississipi, années 20. Bull Rockwell et Elmer Turpin débarquent à l’hôtel Plaza, le seul de ce bled paumé comptant 2027 âmes. Les deux hommes sont des tueurs à gage. Leur objectif est un notable de la ville dont la fille Omara fait tourner bien des têtes. Le second client de l’hôtel se nomme Mr Oerle. Il travaille pour la Vocalion American, une maison de disque qui recrute les meilleurs joueurs de blues. L’un de ses rabatteurs locaux lui a parlé de Hambone, un incroyable guitariste qu’il doit absolument emmener à Memphis pour pouvoir l’enregistrer. Problème, Hambone ne peut jouer qu’en présence de sa chérie Ophélia et cette dernière reste introuvable. Dans la moiteur étouffante du sud profond, tous ces personnages vont se télescoper et devenir les acteurs d’un terrible drame.

Avec la ballade de Hambone, les auteurs mettent en scène une tragédie moderne. Des destins auxquels personne n’échappe dans une ambiance à la fois crépusculaire et morbide. Il y a une sorte de poésie sombre qui traverse chaque planche. L’action se déroule à Huzlehurst, localité où est né Robert Johnson, bluesman légendaire qui aurait vendu son âme au diable pour devenir le plus grand guitariste de tous les temps. L’œuvre du Malin plane sur l’ensemble de l’album. La ville et ses habitants semblent possédés. L’intrusion d’éléments fantastiques renforce cet aspect surnaturel. Vous l’aurez compris, la légèreté n’est pas ici de mise…

Visuellement, le travail Leila Marzocchi est tout bonnement incroyable. Utilisant la technique de la carte à gratter, elle donne à chaque case l’aspect d’une gravure. Les personnages sont figés dans des postures dignes de sculptures. Les visages n’expriment aucune joie et semblent tous droit sortis d’un tableau de Munch (Le cri). Les couleurs, où l’ocre et le noir dominent, renforcent le coté crépusculaire de l’intrigue. Finalement, c’est surtout visuellement que ce titre impressionne car le scénario reste très classique et les nombreux récitatifs, un poil verbeux, ont tendance à alourdir inutilement le propos.

Pour autant, j’ai apprécié cet album oppressant dominé par une tension psychologique de chaque instant où l’amour, la mort et la douleur tiennent les premiers rôles. Encore un joli cadeau de Mo’ qui, après Courtney Crumrin et Salvatore, parvient de nouveau à faire mouche en me faisant découvrir une œuvre que je ne serais jamais allé chercher par moi-même dans les bacs de mon libraire. Un grand merci à elle, dont je ne louerais décidément jamais assez les talents d’amatrice plus qu’éclairée du 9ème art.

La ballade de Hambone T1 de Leila Marzocchi et Igort, Éditions Futuropolis, 2009. 64 pages. 15 euros.



Le challenge Palsèche


mercredi 29 juin 2011

Bride Stories 1

Asie centrale, 19ème siècle. Amir, 20 ans, du clan des Hargal, épouse Karluk, jeune garçon de 12 ans du clan voisin des Eyhon. Si ces derniers sont sédentarisés depuis plusieurs générations, la famille de la mariée pratique encore la transhumance estivale. Amir trouve très rapidement ses marques dans son nouvel environnement et est particulièrement appréciée par sa belle famille. Un peu sauvage, bonne archère, instinctive, forte, ingénue, sachant plein de choses sur la nature, la jeune femme se révèle être une vraie perle. Qui plus est, malgré un mariage forcé et une importante différence d’âge entre les époux, ces derniers deviennent naturellement complices. Mieux, au fil des mois, Amir va peu à peu tomber amoureuse de son mari. Mais une ombre plane sur le bonheur du couple : le clan des Hargal, considérant qu’ils se sont précipités en offrant Amir aux Eyhon, décide d’aller la récupérer…

Dans une courte postface, l’auteur résume parfaitement son ambition : « Dans ce manga, je vous raconterai l’histoire du conflit entre les clans Hargal et Eyhon en y insérant des descriptions de la vie quotidienne de l’époque ». Tout est dit ! Kaoru Mori aurait pu faire de ce titre une diatribe dénonçant le traitement réservé aux femmes dans cette région du Caucase à l’époque. Elle préfère se garder de tout jugement péremptoire pour s’attarder sur la description des petits riens du quotidien. Une existence simple entre chasse, cueillette, artisanat et respect des traditions. Elle s’attarde également sur l’importance de la transmission des savoir-faire, notamment à travers la fascination du benjamin de la famille pour le travail de l’ébéniste du village.

Le dessin est d’une qualité rarement vue dans un manga (du moins pour moi qui suis loin d’être une référence en la matière). Les costumes sont somptueusement détaillés, les visages d’une grande finesse et les décors naturels magnifiques. Les scènes d’extérieur, où le mouvement domine, sont par ailleurs d’une grande fluidité.

Une mangaka qui prend son temps pour raconter une histoire toute simple, c’est agréable et ça ne se voit pas souvent (à part le grand Taniguchi, bien sûr !). Avec un dessin qui tient de l’orfèvrerie et une intrigue tout en délicatesse qui n’occulte pas la rudesse de l’environnement et le poids des traditions, Bride Stories propose de découvrir de façon quasi documentaire le mode de vie des tribus du Caucase au 19ème siècle. Un vrai délice !

Bride Stories T1 de Kaoru Mori, Éditions Ki-oon, 2011. 182 pages. 7.50 euros.



Le top BD de Yaneck


La Bd du mercredi, c'est chez Mango


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Le challenge Women's BD de Théoma

La quinzaine nippone de Choco

Fauve : Prix inter-génération 2012

lundi 27 juin 2011

Les vacances d’un serial killer

« Brel aurait aimé ces gens-là. Les rois du camping car, les beaufs à casquette Jupiler vautrés dans la merditude des choses. Les Alphonse, Josette et compagnie qui causent comme des charretiers et se lancent des gros mots à la gueule ».

Comme chaque année, la famille Destrooper part en vacances sur la côte belge. Dans la voiture, il y a Fonske, le paternel, Josette, sa femme, et Steven et Lourdes, leurs enfants. Dans la caravane accrochée à l’arrière, il y a mémé, une Calamity Jane du 3ème âge. Quand un motard pique le sac de Josette à un carrefour, personne ne se doute que ce vol va être le point de départ de vacances tout simplement infernales…

Une ENOOORME farce, voila comment je qualifierais ce texte. Un grand délire, certes maîtrisé, mais quand même ! Déjà, la galerie de personnages est absolument impayable : Mémé Cornemuse, grand-mère nymphomane et manipulatrice. Fonske, père de famille beauf jusqu’au bout des ongles mais attachant en diable. Les enfants, ados cinéastes un brin pervers. Josette, épouse nunuche et superficielle. Biloute, tueur en cavale qui garde des principes malgré ses agissements coupables… Ensuite, l’enchaînement des événements donne un rythme frénétique et ne laisse aucun temps mort au lecteur. Un tourbillon quasi incontrôlable où l’on navigue d’un personnage à l’autre, d’une situation abracadabrantesque à l’autre. Enfin, l’écriture, pleine de gouaille, est à la fois désinvolte et fluide, même si le niveau de langue parfois très peu soutenu pourra heurter certaines sensibilités.

Férocement drôle, politiquement incorrect, à prendre au second, troisième, voire quatrième degré, ce roman inclassable souffre de ces accumulations de scènes improbables. Trop, c’est trop. Et après avoir franchement rit au démarrage de l’intrigue, l’essoufflement s'est rapidement fait sentir. Finalement, plus rien ne devient surprenant tant l’auteur pousse plus loin le bouchon à chaque page. On garde le sourire, mais la lassitude n’est jamais loin.

Un bon titre si l’on aime les blagues potaches et les textes délirants. Fans de Groland et d’humour belge, ces Vacances d’un serial killer sont faites pour vous. Personnellement, je n’ai été que moyennement emballé par cette grosse farce qui m’a plus d’une fois fait frôler l’indigestion.

Les vacances d’un serial killer, de Nadine Monfils, Éditions Belfond, 2011. 236 pages. 18,50 euros.

vendredi 24 juin 2011

Les grenouilles samouraïs de l’étang des Genji

L’étang des Genji est un très vieil étang. Il y a fort longtemps y vivaient en harmonie des grenouilles, des crapauds et des rainettes vertes et rousses. Le Seigneur Yorimoto régnait sur le clan, magnanime. Mais par un bel été survint la catastrophe : un cri transperça la nuit et on trouva une rainette verte gravement blessée au bord de l’eau. Près d’elle, sur le sol, il y avait des empreintes que l’on n’avait jamais vues et un objet long et blanc que la guerrière Tomoé reconnut : le poil de la moustache d’un chat Heiké ! Alors, sur ordre du seigneur Yorimoto, dix mille grenouilles de l’étang des Genji prirent les armes pour aller attaquer le chat malfaisant. Mais l’assaut tourna à la déroute car le chat était trop fort. Il fallut alors toute l’ingéniosité d’une jeune grenouille pour venir à bout de cet adversaire qui semblait pourtant invincible.

Inspiré de la célèbre épopée du Heiké Monogatari qui décrit le combat qui s’est déroulé au XIIème siècle entre les clans Genji et Heiké pour le contrôle du Japon, cet album poétique offre une succession de tableaux se déployant sur des doubles pages. Les illustrations, aux couleurs somptueuses sont d’une rare élégance. Célébrant l’ingéniosité des plus faibles face à la force brute, voila un ouvrage dépaysant qui ravira petits et grands. Une lecture à partager en famille !

Les grenouilles samouraïs de l’étang des Genji, de Kazunari Hino et Takao Saitô, Éditions Picquier Jeunesse, 2009. 40 pages. 15,00 euros. Dès 7 ans.




Ce billet constitue ma 1ère participation à la quinzaine nippone de Choco.




lundi 20 juin 2011

Touriste

Julien Blanc-Gras revendique haut et fort son statut de touriste. Pas forcément la caricature du type en chemise à fleurs qui parcourt des milliers de kilomètres pour manger la même pizza que chez lui. Plutôt un voyageur cherchant à s’assurer que les atlas feuilletés depuis l’enfance contiennent des informations correctes : "Certains veulent faire de leur vie une œuvre d'art, je compte en faire un long voyage. Je n'ai pas l'intention de me proclamer explorateur. Je ne veux ni conquérir les sommets vertigineux, ni braver les déserts infernaux. Je ne suis pas aussi exigeant. Touriste, ça me suffit. Le touriste traverse la vie, curieux et détendu, avec le soleil en prime. Il prend le temps d'être futile. De s'adonner à des activités non productives mais enrichissantes. Le monde est sa maison. Chaque ville, une victoire. Le touriste inspire le dédain, j'en suis bien conscient. Ce serait un être mou, au dilettantisme disgracieux. C'est un cliché qui résulte d'une honte de soi, car on est toujours le touriste de quelqu'un." Tout est dit !

Angleterre, Colombie, Guatemala, Inde, Maroc, Brésil, Chine, Polynésie, Madagascar… Autant de destinations que de découvertes. Julien Blanc-Gras possède une façon bien à lui d’appréhender la dynamique du monde. Il conçoit le tourisme comme une leçon de géographie à l’échelle 1. Et il faut bien reconnaître que ses impressions de voyage sont délicieuses à partager. Refusant (et ne pouvant se permettre) le luxe des grands hôtels, il côtoie les autochtones dans leur milieu, en parfaite immersion. Quand il se rend dans un faubourg ultra violent de Cali ou dans une favela brésilienne, c’est sans à priori, oscillant entre naïveté et réelle lucidité.

C’est un fait, ce voyageur là possède à la fois de l’humour et une vraie profondeur, parfois cachée derrière son goût pour les bons mots et les formules à l’ironie mordante. Son écriture, d’une belle fluidité, est délicieuse. Pas de chichi, pas de langue de bois, pas d’envolée lyrique ou philosophique. Pas non plus de dénonciation outragée ou de prise de position militante. Un point de vue plein de fraîcheur qui sait se faire critique quand la situation l’exige. Sans nier la terrible réalité du monde, Julien Blanc-Gras garde un regard souvent tendre et toujours très respectueux pour les gens qu’il rencontre.

Un récit de voyages parmi tant d’autres ? Surement pas. Une vision moderne et très personnelle du tourisme alliée à un joli brin de plume font de ce recueil passé totalement inaperçu au moment de sa sortie un vrai régal de lecture. Vous serez prévenu…

Touriste, de Julien Blanc-Gras, Éditions Au diable vauvert, 2011. 260 pages. 17,00 euros.

vendredi 17 juin 2011

Où es-tu Léopold 1 : On voit ton pyjama

Trop cool de pouvoir devenir invisible quand on veut ! Léopold découvre qu'il possède ce don par le plus grand des hasards mais il voit très vite les avantages qu’il va en tirer. Attention cependant : à la manière des super héros, il lui faut garder le secret pour ne pas être kidnappé par la CIA ou devenir un objet d’étude pour les scientifiques. Seule sa sœur Céline est au courant. Et pour elle, le pouvoir de son frère devient une inépuisable source d’ennuis, Léopold multipliant les blagues de plus ou moins bon goût avec pour cible préférée sa sœur «chérie».

Des histoires courtes de trois ou quatre planches à l’humour potache, voila ce que propose ce premier volume des aventures de Léopold. Ça ne vole parfois pas bien haut mais c’est tout le charme de cette nouvelle série qui a la particularité de s’adresser aux enfants de 6-8 ans. Un dessin très simple, des cases de grande taille, seulement 30 pages, un petit format que l'on tient bien en main… tout a été pensé pour faciliter la tâche des apprentis lecteurs qui commencent à peine à lire des BD tout seul. Un petit bémol toutefois, le lettrage assez maladroit pourra poser problème à ceux ayant encore quelques difficultés à déchiffrer certaines lettres de l’alphabet.

Entre des relations frère/sœur volcaniques et un humour de cour de récré, ce premier tome fait mouche sur un créneau assez peu couru par les éditeurs. Certes rien de révolutionnaire, juste un divertissement plein de fraîcheur et adapté à son public. Mais c’est déjà pas mal, non ?


Où es-tu Léopold T1 : On voit ton pyjama de Vincent Caut et Michel-Yves Schmitt, éditions Dupuis, 2011. 30 pages. 9,50 euros. A partir de 6 ans.



Le challenge Palsèche de Mo'

mercredi 15 juin 2011

Un privé à la cambrousse, intégrale 1

A la mort de son père, Hubert hérite de l’exploitation familiale avec son frère Bertrand. Le partage est simple : à Hubert la maison et à Bertrand les terres. Un arrangement amiable est trouvé. Le frère et sa femme sont logés gratuitement et en contrepartie Hubert est nourri et blanchi par sa belle sœur. Mais cette dernière est une vraie peau de vache et pour gagner un peu d’autonomie financière et améliorer l’ordinaire, Hubert rend quelques services à droite à gauche, essentiellement surveillance et espionnage. Finalement, rien de bien excitant dans ces affaires purement rurales : des oies pendues à un arbre par un voisin indélicat, un tracteur saboté par un concurrent jaloux, un coin à truffe qui attire les braconniers... Par la suite, les intrigues vont singulièrement se compliquer : entre un trafic de gnole qui tourne mal et des tentatives de meurtres dans les milieux mycologiques, Hubert va devoir faire preuve d’un sens approfondi de la déduction et d’une volonté de fer pour éclaircir ces drôles de faits divers.

Pas facile d’être un privé dans un village de 800 âmes. Comment opérer avec discrétion quand tout le monde vous connaît ? Sans compter que les commérages vont tellement vite qu’il vaut mieux ne pas s’afficher avec le Maigret du coin. Pour couronner le tout, l’autochtone peut être tour à tour taciturne, moqueur, vindicatif, alcoolique et facilement violent. Pas évident, dans ces conditions, de lui tirer les vers du nez.

Bruno Heitz propose une plongée au cœur de la France profonde des années 50. Une époque où l’épicier ambulant et sa camionnette faisait office de lien social fondamental, où les repas du soir était parfois bien pauvres et où les heures passées au bistrot étaient plus importantes qu’une éventuelle vie de famille. Les portraits de femmes sont féroces : la belle sœur vacharde qui se tire après avoir mis la main sur un magot, la commerçante pingre qui ne fait pas souvent crédit, la fille adoptive qui veut venger son père à coup de chevrotine… Pour autant, l’auteur n’y va pas avec de gros sabots. Il y a une vraie finesse dans son analyse quasi sociologique de la société rurale de l'après-guerre.

Graphiquement, d’aucuns qualifieront le dessin au mieux de minimaliste, au pire de franchement mal maîtrisé. Personnellement, je lui trouve beaucoup de charme. Un noir et blanc simple, efficace, au service de l’intrigue, qui rend bien les atmosphères grises et tristounettes de Beaulieu sur Morne et de ses environs. On peut toujours se dire que les aventures d’Hubert auraient eu plus de gueule sous le trait hyper réaliste de Gibrat ou celui plus torturé de Lax, mais je persiste à croire que le travail de Heitz mérite un large crédit et est adapté au propos.

Conjuguer humour et drames paysans avec un dessin limite enfantin tenait de la gageure quasi insurmontable. Pourtant, le challenge est relevé haut la main et l’on suit avec délectation les aventures d’Hubert, ce privé de la cambrousse atypique et franchement attachant.

Cette intégrale reprend les trois premiers tomes de la série qui en compte neuf en tout. Publiés initialement aux éditions du Seuil, les titres encore disponibles végétaient au fond des tiroirs. Suite à un accord tripartite entre le Seuil, l’auteur et Gallimard, la publication de ces intégrales a pu enfin aboutir et constitue une sorte de « collector » qui donne à cette série trop longtemps ignorée l’écrin qu’elle mérite.


Un privé à la cambrousse, intégrale T1 de Bruno Heitz, Éditions Gallimard, 2011. 336 pages. 21.00 euros.




Le challenge Palsèche de Mo'


La BD du mercredi de Mango





dimanche 12 juin 2011

La radio des blogueurs : c'est bientôt l'été

Pour cette nouvelle session de la Radio des blogueurs, Leiloona
propose de créer "une playlist qui nous met de bonne humeur dès le matin". En ce moment avec mes filles de 5 et 8 ans on aime écouter Black Joe Lewis. Un son péchu, du rock soul bluesy qui fait évidemment penser au grand James Brown mais pas seulement.
Sa bio parle d'influences à chercher du coté du Texas Blues, de la soul de Memphis et du punk rock de Detroit. Mais plutôt que les longs discours, mieux vaut écouter ce son qui vous fait taper du pied et vous donne la pêche dès le matin.