Julien Blanc-Gras revendique haut et fort son statut de touriste. Pas forcément la caricature du type en chemise à fleurs qui parcourt des milliers de kilomètres pour manger la même pizza que chez lui. Plutôt un voyageur cherchant à s’assurer que les atlas feuilletés depuis l’enfance contiennent des informations correctes : "Certains veulent faire de leur vie une œuvre d'art, je compte en faire un long voyage. Je n'ai pas l'intention de me proclamer explorateur. Je ne veux ni conquérir les sommets vertigineux, ni braver les déserts infernaux. Je ne suis pas aussi exigeant. Touriste, ça me suffit. Le touriste traverse la vie, curieux et détendu, avec le soleil en prime. Il prend le temps d'être futile. De s'adonner à des activités non productives mais enrichissantes. Le monde est sa maison. Chaque ville, une victoire. Le touriste inspire le dédain, j'en suis bien conscient. Ce serait un être mou, au dilettantisme disgracieux. C'est un cliché qui résulte d'une honte de soi, car on est toujours le touriste de quelqu'un." Tout est dit !
Angleterre, Colombie, Guatemala, Inde, Maroc, Brésil, Chine, Polynésie, Madagascar… Autant de destinations que de découvertes. Julien Blanc-Gras possède une façon bien à lui d’appréhender la dynamique du monde. Il conçoit le tourisme comme une leçon de géographie à l’échelle 1. Et il faut bien reconnaître que ses impressions de voyage sont délicieuses à partager. Refusant (et ne pouvant se permettre) le luxe des grands hôtels, il côtoie les autochtones dans leur milieu, en parfaite immersion. Quand il se rend dans un faubourg ultra violent de Cali ou dans une favela brésilienne, c’est sans à priori, oscillant entre naïveté et réelle lucidité.
C’est un fait, ce voyageur là possède à la fois de l’humour et une vraie profondeur, parfois cachée derrière son goût pour les bons mots et les formules à l’ironie mordante. Son écriture, d’une belle fluidité, est délicieuse. Pas de chichi, pas de langue de bois, pas d’envolée lyrique ou philosophique. Pas non plus de dénonciation outragée ou de prise de position militante. Un point de vue plein de fraîcheur qui sait se faire critique quand la situation l’exige. Sans nier la terrible réalité du monde, Julien Blanc-Gras garde un regard souvent tendre et toujours très respectueux pour les gens qu’il rencontre.
Un récit de voyages parmi tant d’autres ? Surement pas. Une vision moderne et très personnelle du tourisme alliée à un joli brin de plume font de ce recueil passé totalement inaperçu au moment de sa sortie un vrai régal de lecture. Vous serez prévenu…
Touriste, de Julien Blanc-Gras, Éditions Au diable vauvert, 2011. 260 pages. 17,00 euros.
On ne doit pas lire les mêmes blogs, Jérôme, car je l'ai beaucoup vu ce roman sur la blogo.
RépondreSupprimerTu as raison Valérie, il y a eu un gros partenariat autour de ce titre sur Babelio. Je voulais juste dire qu'il était passé inaperçu dans les médias classiques (notamment la presse écrite) et c'est bien dommage !
RépondreSupprimerUn titre dont le thème m'intéresse ! C'est noté !
RépondreSupprimerj'ai aussi découvert avec plaisir l' écriture ironique de ce roman ! Sa vision est très intéressante. Je regrette juste malgré tout que le contenu s'efface un peu avec le temps et du coup, que ses prises de position ne soient pas plus incisives.
RépondreSupprimerAh, je retrouve mon ordi et avec lui la possibilité de te laisser un commentaire (mon portable fait de la résistance et a refusé trois fois, donc j'avais laissé tomber...) Bon tout ça pour dire que j'ai été moi aussi complètement charmée par ce récit tout en humour et en justesse. Tu décris avec exactitude ce que j'ai ressenti. à ma lecture. :)
RépondreSupprimerOn est sur la même longueur d'ondes, comme presque toujours, non ? :)
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