mercredi 17 novembre 2010

Fais péter les basses, Bruno !

Slimane est un jeune africain doué pour le football. Embobiné par un agent véreux, il arrive en France dans la soute d’un cargo, sans argent et sans papiers.
Zinedine sort de taule. Il a un plan pour se faire un max de fric : braquer un fourgon de la Brink’s avec l’aide de vieux truands rangés des voitures. Mais si le casse se passe bien, il y a embrouille au moment de se partager le magot.
Que vient faire Slimane dans cette galère ? Il débarque comme un cheveu sur la soupe et sera impliqué jusqu’au trognon dans cette histoire pleine de gouaille et de truculence.

Baru s’amuse. Pour lui, cet album sonne comme une récréation, un divertissement nécessaire après la publication de son précédent ouvrage, le très très sombre Pauvres zhéros. Dans Fais péter les basses, Bruno, il oppose deux mondes. Celui des caïds de cités cherchant à se lancer dans le grand banditisme et celui de truands à l’ancienne que Lautner et Audiard n’auraient pas reniés. Pas de place ici pour les demi-sel sans saveur. On fait dans le fort en gueule qui a du tempérament. L’album contient une belle galerie de personnages qui, au final, se révèlent tous plus ou moins attachants. Même les plus demeurés des porte-flingues apparaissent parfois sympathiques.

Au cœur de ce polar déjanté, on trouve la dimension sociale chère à l’auteur : les sans papiers, les petits bleds de province où la classe ouvrière tente d’exister, le match de foot du dimanche qui finit souvent en pugilat…

Le trait de Baru se reconnaît au premier coup d’œil. C’est brut de décoffrage. Ses marlous sur le retour ont par exemple des trognes inoubliables. Sans parler des décors et du choix des couleurs qui créent une ambiance parfaitement adaptée au propos.

Seul petit bémol dans ce concert d’éloges, le rythme endiablé de cette comédie policière offre par moment des concours de circonstance un peu tirés par les cheveux. Et même si on veut déguster l’ensemble avec délectation, l’album se lit trop vite ! Mais ne gâchons pas notre plaisir. Un nouveau Baru est toujours le bienvenu dans une bédéthèque.

Fais péter les basses, Bruno ! de Baru, Futuropolis, 2010. 124 pages. 20 euros.


L’info en plus : Depuis qu’il a remporté le Grand Prix à Angoulême au début de l’année, Baru a vu nombre de ses albums précédents réédités. Rien que cet automne, les éditions Casterman rééditent Quéquette Blues (1ère édition en 1984) et Le chemin de l’Amérique (1ère édition en 1990) tandis que Dupuis ressort de ses tiroirs une intégrale de l’Enragé (1ère édition en 2004). Voila un Grand Prix qui aura permis de mettre un sérieux coup de projecteur sur une œuvre majeure encore trop méconnue.






Challenge Pal sèche de Mo'




La BD du mercredi, chez Mango



lundi 15 novembre 2010

Le fabuleux amour d’Aucassin et Nicolette

Aucassin et Nicolette est une chantefable du XIIIéme sicècle. C’est l’histoire d’Aucassin, fils du Comte de Beaucaire et de sa bienaimée Nicolette, jeune femme achetée aux Sarrasins mais qui est en fait la fille du roi de Carthage. Leur amour est impossible car le jeune homme est issu d’une famille chrétienne et la demoiselle considérée comme musulmane. A l’époque, le récit de leur amour contrarié était sans doute récité et mimé par un jongleur. Il mêlait les vers et la prose, alternant tableaux poétiques et scènes burlesques.

Dans cette adaptation théâtrale pour les plus jeunes, Sylvaine Hinglais et l’illustrateur Tom Schamp racontent l’arrivée des jouvenceaux sur l’île du roi Torelore après le naufrage du navire à bord duquel ils s’étaient enfuis. Il y a six tableaux en tout mettant en scène le roi, la reine, Aucassin, Nicolette et Merliflette, la femme de chambre du roi. Le ton se veut léger, ingénu et drôle tout en abordant des thématiques très modernes telles que la tolérance ou la stupidité de la guerre.

Les tableaux illustrés de Tom Schamp sont sublimes. On pense au Douanier Rousseau et à l’art naïf. Les couleurs sont éclatantes et les détails fourmillent. Quand au texte, il peut très bien être joué par toute la famille : papa fait le Roi et Aucassin, maman joue la Reine et les enfants se partagent les rôles de Nicolette et Merliflette. Pour les enseignants, c’est aussi le genre de lecture-spectacle que l’on peut très facilement mettre au point avec les élèves.

De plus, l’ouvrage en lui-même est un très bel objet-livre présenté dans un format à l’italienne avec un rabat aimanté qui maintient les pages. Sans compter que le prix est raisonnable pour une telle qualité d’édition. Bref, vous l’aurez compris, c’est un coup de cœur que je vous recommande chaudement.

Le fabuleux amour d’Aucassin et Nicolette, de Sylvaine Hinglais et Tom Schamp, Albin Michel jeunesse, 2010. 36 pages. 15,00 euros. A partir de 8 ans.


L’info en plus : Tom Schamp est un illustrateur belge. Il a notamment réalisé pour les plus petits un magnifique Carnavalphabet, défilé joyeux et haut en couleur des 26 lettres de l'alphabet déguisées, de A, qui rit aux éclats, à Z, qui arrive bon dernier quand le carnaval est terminé.

vendredi 12 novembre 2010

Les Sisters T5 : Quelle chouchoute !

Wendy et Marine sont des Sisters. Wendy, c’est la pré-ado qui aimerait bien vivre sa vie sans avoir constamment son boulet de petite sœur dans les jambes. Marine, c’est la cadette. Une pile électrique qui n’arrête pas une seconde, qui gesticule et parle trop fort. Pour elle, sa grande sœur est un exemple. Mais c’est aussi une complice, une confidente ou parfois un souffre douleur, tout dépend du contexte ! Au menu de ce cinquième volume, du grand classique : prises de bec à répétition, décalage constant entre l’insouciance de Marine et les préoccupations adolescentes de Wendy (les garçons !!!), running gag autour du journal intime de l’ainée, expressions impayables de la cadette (sa sœur a des idées de génisse et met au point des plans nikol crème)… Bref, les habitués ne seront pas dépaysés. Avec toujours en filigrane et malgré les apparences beaucoup de tendresse et d’amour entre ces chipies.

Si vous êtes les heureux parents de deux adorables gamines, l’une préado et l’autre un peu plus jeune, certaines situations auront pour vous un air de déjà vu. Et si vous avez une sœur qui vous a cassé les pieds pendant votre enfance, cette série vous rappellera à coup sûr quelques souvenirs.

Le dessin de William est toujours aussi réussi : des cadrages ultra dynamiques, beaucoup de mouvement et une grande expressivité des visages, le tout agrémenté de couleurs pastels impeccables.

Voila une série pleine de fraîcheur, drôle, jamais méchante et qui sent le vécu à plein nez. Les enfants adorent et les parents peuvent y jeter un œil, ils ne devraient pas être déçus. A noter que la première édition de ce nouvel album contient en bonus 8 pages des Super Sisters, un Spin off dans lequel les Sisters deviennent de super héroïnes combattant dragons, sorciers, robots géants et animaux mutants. Le premier tome de cette nouvelle série sera dans les bacs en juin 2011.

Les Sisters T5 : Quelle chouchoute !, de Cazenove et William, éditions Bambou, 2010. 48 pages. 9,95 euros. Dès 8 ans.




L’info en plus : Pour les jeunes lecteurs préférant le roman à la BD, les Sisters se déclinent maintenant en livre de poche. Le premier volume de cette novelisation est paru au mois d’avril et s’intitule Exposé grandeur nature. C’est toujours édité par Bamboo au prix de 5,95 euros. 86 pages, à partir de 8 ans.



Le challenge Pal sèche de Mo'


jeudi 11 novembre 2010

Concours Tardi - Manchette : 3 BD à gagner

Pour fêter la sortie du nouveau Tardi (La position du tireur couché, j'en parle ici), je vous propose un petit concours vous permettant de gagner un exemplaire du Petit bleu de la côte Ouest, première adaption d'un roman de Manchette par Jacques Tardi.



Le concours est simplissime : 3 questions, 3 bonnes réponses et le tour est joué. Les gagnants seront départagés par tirage au sort. Il y a trois exemplaires en tout à gagner.

Allez hop, voici les questions :

Manchette et Tardi ont publié en 1978 un album aux éditions du Square. Quel est le titre de cet album qui vient d’être réédité par Casterman ?

a) Griffon
b) Griffu
c) Griffé

Dans Le petit bleu de la côte Ouest, quel est le nom du personnage principal ?

a) Gerfaut
b) Tarpon
c) Terrier

Tardi s’est lancé dans l’adaptation d’un troisième roman de Manchette qui devrait sortir en 2011. Quel est le titre de ce roman ?

a) Fatale
b) Iris
c) Nada

Vous avez jusqu'au dimanche 21 novembre 2010 à minuit pour participer. Les réponses sont à envoyer à l'adresse suivante : dunebergealautre@gmail.com

Les belges, les suisses, les québecois et tous les membres de l'union europénne peuvent participer.


mercredi 10 novembre 2010

La position du tireur couché

Martin Terrier est un tueur à gages. Sa dernière mission achevée dans une ruelle de Liverpool, il rentre à Paris pour annoncer à son employeur qu’il se retire définitivement. Son but est de repartir dans son village natal où, pense-t-il, un amour de jeunesse l’attend. Mais de vieilles rancœurs et une sombre machination vont contrarier ses plans.

Quand Tardi adapte Manchette, il faut s’attendre à déguster un petit noir très serré à l’amertume bien prononcée. Ne cherchez pas ici de héros au grand cœur, il n’y a que de pathétiques losers. Martin Terrier le tueur est surtout un pauvre gars naïf, stupide, incapable de s’en sortir avec les filles. Et que dire des autres personnages. Tous, absolument tous, sont au mieux antipathiques, au pire d’infâmes salauds. Même les femmes ! Pas un pour rattraper l’autre.

Dans une lettre adressée à son ami Pierre Signac datant de 1977 et reprise au début de l’album, Manchette écrivait à propos de son roman : « […] une histoire de tueur absolument sans intérêt intrinsèque, uniquement un exercice technique de mon point de vue. » La position du tireur couché relève donc de la mécanique de précision. Tout s’enchaîne pour aboutir à cette fin où le « héros » est plus pitoyable qu’il ne l’a jamais été. Pour Tardi, la difficulté était là : ne pas dérégler cette horlogerie en respectant au maximum le texte original. Et le challenge est relevé avec brio. Les 40 premières pages ronronnent un peu (trop de récitatifs qui nuisent à la fluidité du récit) mais la seconde partie est beaucoup plus prenante.

Pour le dessin, pas de surprise, Tardi fait du Tardi. Un noir et blanc maîtrisé, des trognes qu’on reconnaît au premier coup d’œil, quelques balades dans les rues de Paris ou à la cambrousse pour les décors. Les scènes ultra-violentes sont retranscrites avec froideur. Pas de théâtralisation, c’est net et précis : les os craquent, le sang coule, les cadavres s’accumulent… Le trait est parfait pour retranscrire le désespoir qui traverse l’œuvre de Manchette. Pas une once d’humanité, juste des hommes et des femmes dépassés par les événements.

Rein à rajouter, ce Tardi-là me plaît. Autant je n’ai jamais accroché avec Adèle Blanc-sec, autant je ne suis pas fan des titres sur 14-18, mais pour les adaptations, c’est toujours du très bon. Le Cri du peuple avec Jean Vautrin est monumental et les Nestor Burma sont tous excellents. Bref, vous l’aurez compris, je recommande chaudement cet album à tous les amateurs de polar en général et de Manchette en particulier. Même si je me doute qu’ils n’ont pas besoin de mon avis pour être convaincus.

La position du tireur couché, de Tardi et Jean-Patrick Manchette, Futuropolis, 2010. 100 pages. 19 euros.



L’info en plus : Les éditions Casterman rééditent l’album Griffu, première collaboration du duo Tardi/Manchette. Publié initialement en 1978, Griffu raconte les déboires d'un conseiller juridique embarqué dans une histoire de gros sous qui finira dans une mare de sang...




La BD du mercredi, c'est chez Mango

Le challenge Pal sèche de Mo'



lundi 8 novembre 2010

Thomas Drimm T1 : La fin du monde tombe un jeudi

Thomas Drimm est un préado normal avec pour seuls problèmes des parents qui se disputent et quelques kilos en trop. Mais sa vie bascule le jour où il tue accidentellement avec son cerf volant le professeur Pictone, l’un des plus éminents savants du pays. Parvenant à dissimuler le corps, Thomas a la surprise de voir le scientifique se réincarner dans son ours en peluche. Et le professeur Pictone de lui annoncer qu’il est désormais le seul être vivant capable de sauver le monde… Petite précision qui a son importance, Thomas vit dans une société où le gouvernement possède le contrôle total de chaque individu grâce à une puce implantée dans le cerveau. Le jeu est devenu la seule religion et les États-Uniqes sont le dernier pays existant au monde. Entre complot gouvernemental, premiers émois amoureux et course contre la montre, Thomas va devoir grandir bien plus vite qu’il ne l’aurait sans doute jamais souhaité.

Il est rare de voir de célèbres écrivains pour adultes « s’abaisser » à écrire pour la jeunesse. Didier Van Cauwlaert le fait avec maestria en proposant aux jeunes lecteurs un texte trépidant, plein d’humour mais également assez exigeant d’un point de vue formel. Le roman est rédigé à la première personne. C’est Thomas Drimm lui-même qui raconte ses déboires. Et le ton colle parfaitement à celui d’un ado dépassé par les événements.

Pour le reste, les personnages constituent à l’évidence le point fort de ce premier tome. Tous sont parfaitement campés : du vieillard devenu ours en peluche à la mère hystérique en passant par le père désabusé et alcoolique, sans oublier Brenda, top modèle sur le retour ou Boris Vigor, un ministre dont le QI ne doit pas être supérieur à celui d’une tasse à café. Il n’y a aucune personnalité « creuse ». Toutes ont été franchement bien pensées et ce carambolage entre des personnages si forts donne tout son sel à l’aventure. Et que dire de la société imaginé par le prix Goncourt 1994. Là encore, il fait très fort. Rendre crédible une telle organisation sociale est une gageure qu’il relève haut la main. Et force est de reconnaître qu’au-delà du sourire que cela engendre, ça peut aussi faire froid dans le dos. Mais c’est là que le bas peut blesser pour les jeunes lecteurs qui ne saisiront peut-être pas toute les subtilités « politiques » du texte.

D’ailleurs Thomas Drimm est-il vraiment un roman jeunesse ? Peu importe. Chacun y trouvera son compte. Pour les adultes, les clins d’œil à l’évolution de notre propre société sont jubilatoires. Pour les enfants, c’est l’aventure avec un grand A et la découverte d’un roman d’initiation furieusement moderne et très parlant. Plusieurs niveaux de lecture donc, mais aussi et surtout un vrai plaisir pour tous, de 12 à 112 ans, comme le précise la 4ème de couverture.

Lu dans le cadre du Prix littéraire des bloggeurs.

Thomas Drimm T1 : la fin du monde tombe un jeudi, de Didier Van Cauwelaert, Albin Michel, 2009. 392 pages. 17 euros. Dès 13 ans.

L’info en plus : Didier Van Cauwelaert est un talentueux touche à tout. Il a notamment créé une pièce de théâtre intitulée Le Rattachement qui met en scène Napoléon III et l’impératrice Eugénie au moment de l’union de la ville de Nice à la France en 1860. La pièce s’est jouée à Nice du 12 au 20 juin 2010 avec notamment la présence sur scène d’Alexandra Lamy, Mélanie Doutey et Samuel Labarthe. Le texte est disponible en librairie (éditions Albin Michel) au prix de 10 euros.

samedi 6 novembre 2010

Chouette, la suite vient de sortir !

J'ai présenté beaucoup de premiers tomes au cours de cette année. Depuis début octobre, quelques séries se sont enrichies d'un nouveau volume. Petit tour d'horizon :


Dr Slump T6 : ultimate edition
Résumé : Aralé, la jeune fille aux lunettes imposantes, rencontrée par Sangoku dans la série Dragon Ball, est le personnage principal de cette série, dont l'action se situe au village Pingouin.

Mon avis : Déjanté, scatologique, totalement délirant. Un must du manga d'humour. Indémodable.
J'en ai parlé ici.


Echo T3 : course poursuite
Résumé : Pourchassée par un psychopathe qui dispose des mêmes pouvoirs qu'elle, Julie s'enfuit dans le désert, accompagnée de Dillon. Elle cherche à établir un lien entre le projet Phi, les visions prophétiques de sa soeur et Ivy Raven.

Mon avis : un excellent comics en noir et blanc. Une des meilleures surprises de l'année. J'en ai parlé ici.
 
 
 
 


Empowered T3
Résumé : La plus vulnérable des super-héroïnes apprend à son grand désarroi qu'une autre super-héroïne risque bien de lui voler la vedette. Et qu'elle en fait une affaire très lucrative. Quant à son sbire adoré, il en sait peut-être un peu trop sur ses habitudes coupables... la nuit. Heureusement qu'il y a le karaoké, et Ninjette quand elle n'est pas trop occupée à échapper aux ninjas qui veulent sa peau.

Mon avis : Encore un comics n noir et blanc du grand Adam Warren. Une série complètement barrée à l'humour plutôt gras. J'en ai parlé ici.
 

Mr Blaireau et Mme Renarde T4 : Jamais tranquille
Résumé : L'hiver approche, c'est pourquoi monsieur blaireau, madame renarde et leur famille préparent leur maison avant l'arrivée du grand froid. Cependant les blaireaux et les renards ne vivent pas l'hiver de la même manière. Madame renarde veut initier sa fille à la chasse, tandis que les blaireaux profitent de l'hiver pour dormir.

Mon avis : la meilleure série pour les 7-9 ans qui découvrent la BD. Indispensable ! J'en ai parlé ici.
 


Le Narval T2 : Terrain vague
Résumé : Robert Narval et son équipe de plongeurs de l'agence Bloodshift parcourent le monde pour des missions parfois dangereuses. Dans ce second volume, l'action se déroule dans le désert, à Cuba, dans les égouts de Paris...

Mon avis : une nouvelle série d'aventures en histoires courtes. Pas révolutionnaire mais très agréable à lire. J'en ai parlé ici.
 
 
 
 

Scalped T2 : Casino Boogie
Résumé : Depuis son retour dans sa réserve indienne Dashiel Bad Horse s'est mis au service de Red Crow, chef de la police et de la mafia locale. C'est une soirée spéciale pour la réserve de Prairie Rose : le casino Crasy Horse ouvre ses portes.

Mon avis : Encore un comics. Pour moi, c'est clairement la BD de l'année. Un polar crépusculaire dans une réserve indienne gangrenée par la corruption, la violence et l'alcool. Monumental ! J'en ai parlé ici.



Une sacrée mamie T8
Résumé : 1958, Hiroshima. A cette époque, il est difficile pour une jeune femme d'élever seule ses deux fils. Elle décide de confier le plus jeune, Akihiro, à sa mère. C'est dur de quitter la ville pour la campagne sans y être préparé. Mais le petit garçon s'habitue vite à sa nouvelle vie au grand air. Suivant l'exemple de sa mamie débrouillarde, il apprend à s'adapter à toutes les situations.

Mon avis : Toujours un plaisir de retrouver Akihiro, sa grand mère et ses copains. Plus que 3 tomes avant la fin définitve de la série. Snif  !
J'en ai parlé ici.

vendredi 5 novembre 2010

Jean-Loup

Pour Jean-Loup, c’est enfin les grandes vacances. Mais une mauvaise surprise l’attend. Ses parents lui annoncent qu’il passera son été en Normandie chez Papi et Mamie Toussaint, ces grands parents qu’il ne connaît même pas. Pour lui c’est la catastrophe : « Mais c’est horrible la Normandie, il y pleut tout le temps ! L’été ça existe pas là-bas ! ». A son arrivée, il découvre que la maison où il va habiter est une baraque toute sombre en lisière de forêt. Papi et Mami ont l’air d’être de sacrés illuminés mais petit à petit, Jean-Loup va apprendre à les apprécier. Il va aussi rencontrer la petite Rosanne et le séjour va se révéler au final plutôt agréable pour un gamin qui pensait au départ passer les pires vacances de sa vie.

Voila un album inclassable. Déjà, il conviendra aussi bien aux enfants (à partir de 9 ans) qu’aux adultes. Chacun pourra y trouver son compte. Ensuite, c’est à la fois poétique, onirique et fantastique. Si je rajoute que les couleurs sont franchement psychédéliques, ça commence à faire beaucoup de « iques ! ». Allez, un petit dernier pour la route : disons que Jean-Loup est quelque sorte un récit initiatique. C’est le passage de l’enfance à l’adolescence, la découverte des premiers émois amoureux et la révélation d’un secret de famille qui va bouleverser la vie d’un jeune garçon. Au niveau graphique (encore un « ique »), on sent l’influence de Joann Sfar. Les membres très étirés des différents personnages m’ont aussi fait penser au travail de Cyril Pedrosa sur son chef d’œuvre Trois ombres. Certaines pages tiennent presque plus du story board que du dessin vraiment léché mais ça passe sans problème car on reste dans l’ambiance vaporeuse du récit.

Un album plein de charme qui plaira à ceux qui aimaient entendre leur maman leur raconter une histoire le soir avant de s’endormir. A lire avant de plonger dans les bras de Morphée.

Jean-Loup, de Benoît Frébourg, éditions Delcourt, 2010. 58 pages. 13,95 euros. A partir de 9 ans.

L’info en plus : Jean-Loup est inspiré du recueil de poésie de Tim Burton La Triste Fin du petit enfant huître et autres histoires dans lequel le réalisateur raconte des histoires courtes sur des enfants-monstres. Le poème de Benoît Frébourg que l’on peut lire à la dernière page de l’album est le véritable point de départ du projet de création de Jean-Loup.



Lu dans le cadre du challenge Pal sèche de Mo'

mercredi 3 novembre 2010

Milady de Winter T1

Épouse du mousquetaire Athos, la future Milady de Winter est pendue à un arbre par son mari le jour où il découvre une fleur de lys sur son épaule, une marque symbole d’infamie que les bourreaux infligeaient aux voleurs et aux prostitués. Ayant survécu miraculeusement à cette tentative d’assassinat, elle se réfugie en Angleterre où elle rencontre Lord de Winter, dont elle tombe amoureux. Ce second époux périt suite à un terrible concours de circonstances. Violée par le Duc de Buckingham le jour de l’enterrement, Milady de Winter ne va cesser de nourrir sa rancœur vis-à-vis de la gente masculine. Engagée comme espionne par le cardinal de Richelieu, elle va notamment être impliquée dans la fameuse affaire des férets de la Reine Anne d’Autriche. Doublée par les mousquetaires au dernier moment, elle restera néanmoins dans les bonnes grâces du Cardinal et deviendra une intrigante manipulatrice, sans aucun état d’âme.

Agnès Maupré à choisi de prendre à contre-pied la classique histoire des mousquetaires en focalisant son attention sur un personnage secondaire. Une femme ambitieuse, libre, qui n’hésite pas à user de ses charmes pour obtenir ce qu’elle veut. Mais Milady est aussi une femme seule qui doute et qui souffre, se révélant au final à la fois fragile et vulnérable.

Le trait m’a rappelé celui du duo Kerascoët sur la série Miss pas touche. Le choix du lavis (technique picturale consistant à n'utiliser qu'une seule couleur diluée pour obtenir différentes intensités) permet une grande variation des niveaux de gris et donne aux aventures de Milady un coté clair/obscure très parlant. Avec ce portrait de femme en BD, comment ne pas penser à la magnifique biographie de Calamity Jane (Martha Jane Canary) mise en images par Matthieu Blanchin et Christian Perissin. Petit bémol toutefois au niveau du dessin, les décors urbains et les intérieurs manquent parfois de détails et de réalisme. Autre très gros soucis, les différentes représentations des chevaux sont tout simplement affreuses.

Mais ce ne sont là que quelques détails sans importance. La vie de l’espionne de Richelieu telle que l’a imaginée Agnès Maupré vaut vraiment le coup d’œil. Les femmes fatales qui ne se cantonnent pas au rôle de potiche ne sont pas légion en bande dessinée. Une chose est sûre, cette Milady de Winter tient plus de la Nana de Zola que de Bécassine. Le second et dernier tome est prévu l'année prochaine.

Milady de winter T1, d’Agnès Maupré, éditions Ankama, 2010. 134 pages. 14,90 euros.



L’info en plus : Agnès Maupré a réalisé l’adaptation en BD de quatre Contes du Chat Perché d’après Marcel Aymé. Deux volumes sont parus en 2008 aux éditions Gallimard dans la collection Fétiche.




Challenge Pal sèche

La BD du mercredi chez Mango


lundi 1 novembre 2010

Où j'ai laissé mon âme - Jérôme Ferrari

Alger, mars 1957. Le capitaine André Degorce et son équipe ont pour charge de faire parler les prisonniers qui passent entre leurs mains. Tous les procédés sont bons pour obtenir une information. Lorsque les « terroristes » ont vidé leur sac, ils sont transférés chez le lieutenant Horace Andréani qui, le plus souvent, les fait disparaître définitivement. Degorce et Andréani ont un passé commun. Ils ont combattu ensemble en Indochine. Les deux hommes ont vécu l’horreur de la détention et l’humiliation de la défaite. Degorce a de plus été interné plusieurs mois à Buchenwald pendant la seconde guerre mondiale. De victime, il est devenu bourreau. Il s’applique à remplir les missions qui lui sont confiées mais il s’interroge sur le sens de ses actions. Un questionnement métaphysique qui le pousse à affronter l’évidence : il a laissé son âme quelque part derrière lui, sans se rappeler ni où ni quand.

Trois jours. Du 27 au 29 mars 1957. Les événements s’enchaînent avec l’arrestation de Tahar, le commandant de l’ALN. Le réseau est enfin décapité mais le capitaine Degorce n’en tire aucune satisfaction. Il repense au cheminement qui, depuis son engagement dans la résistance en 1944 alors qu’il n’avait que 19 ans, l’a poussé à se retrouver en ce printemps 1957 à torturer des pauvres bougres dans des caves algéroises. Une plongée au plus profond des tourments de l’âme humaine.

N’ayons pas peur des mots : l’écriture de Jérôme Ferrari est ici éblouissante. Le ton n’est ni trop sec, ni trop lyrique. Il n’y a pas un mot de trop. La construction est limpide et tous les éléments s’imbriquent pour que le lecteur comprenne les errements du capitaine Degorce et le courroux affiché par le lieutenant Andréani. Les descriptions des scènes de tortures ne sont pas du tout racoleuses. Froides, inhumaines, elles frappent aux tripes et donnent la nausée. Comment pourrait-il en être autrement ?

Où j’ai laissé mon âme est un roman ambitieux. Il m’a tout simplement bouleversé. Il y a bien longtemps que je n’avais pas lu un texte aussi fort. Clairement un des chocs de la rentrée littéraire.

Où j’ai laissé mon âme, de Jérôme Ferrari, Actes Sud, 2010. 154 pages. 17 euros.

L’info en plus : Où j’ai laissé mon âme fait partie de la sélection du prix des libraires qui sera remis le 18 mars prochain. Je ne suis pas libraire mais franchement, si je faisais partie du jury, il y a fort à parier que le roman de Jérôme Ferrari serait mon petit chouchou, loin devant les 17 autres candidats !