«
J’ai décidé de m’avancer sans masque. Nu. (C’est le cas de le dire). Je n’en tire aucune gloire, mais je n’en ai aucune honte. Voici ce que je suis. »
Extases où l’itinéraire d’une vie sexuelle. Ce premier tome sous-titré «
Où l’auteur découvre que le sexe des filles n’a pas la forme d’un x… » s’étire de l’enfance au début de l’âge adulte avec quelques détours dans un passé beaucoup plus récent. JeanLouis Tripp, co-auteur avec son complice Régis Loisel du fabuleux
Magasin général, dit tout et annonce la couleur en introduction : « Tout ce que je raconte dans ce livre est vrai. […] Le personnage principal, c’est moi, JeanLouis ».
On retrouve donc JeanLouis à l’école, dans les années 70. La vie en province, les parents communistes, les premiers questionnements autour de ce qui se cache sous les jupes des filles. Le premier baiser pendant un voyage en Angleterre, la première branlette, les premiers touche-pipi au collège avec la peu farouche Véronique. Et puis le lycée. Caroline. LE grand amour. La première fois. Des mois, des années avec Caroline. Des envies d’infidélité, une sexualité de couple qui tombe dans la routine, des tentatives pour relancer la machine. Le plan à trois, Caroline avec un autre homme, les partouzes. JeanLouis accro aux prostituées, JeanLouis et ses expériences homosexuelles. Tout est mis sur la table, sans fard ni faux semblant.
Rarement (voire jamais) un auteur aura autant dessiné sa bite. Et dans des proportions tout à fait raisonnables, il est important de le préciser. JeanLouis Tripp ne se met pas à nu pour fanfaronner ou pour la gaudriole. Sa biographie entièrement centrée autour d’une sexualité débordante n’a rien du grand déballage malgré les apparences. Loin d’une bête confession intime sans saveur, il allie franchise, modestie et pudeur (si, si, je vous jure !) avec une justesse des plus touchantes. Les trouvailles graphiques sont nombreuses pour analyser avec pertinence un ressenti brut et alimenter la réflexion. On ne cache rien mais on ne force pas le trait, on suggère autant que l’on montre. L’équilibre est fragile mais les fondations restent solides, en grande partie grâce à un sens du récit absolument bluffant.
Évidemment, ce n’est pas à mettre en toutes les mains. C’est cru, très cru. Jamais vulgaire pour autant, ni particulièrement excitant. J’ai adoré cet album pour sa sincérité, son autodérision, son mélange de sérieux et de légèreté et la limpidité de sa narration. 270 pages dans ce premier volume et il en reste deux à paraître. Autant dire que la vie sexuelle de JeanLouis Tripp est loin d’avoir livré tous ses secrets.
Extases T1 de JeanLouis Tripp. Casterman, 2017.
270 pages à réserver à un public averti. 22,00 euros.