C’est un tort. Il y a des moments dans la vie où ce qu’on croyait solide s’effondre. Alors il faut faire son bagage. »
Pour Nani, ce moment est arrivé. L’île où elle née et sur laquelle elle a toujours vécue est en train de s’enfoncer dans l’océan. Accompagnée de sa mère Youmi et de son père Janek, la petite fille gagne le port comme des milliers d’autres habitants. Bientôt des bateaux viendront les chercher pour les amener sur le continent. Un continent dont ils ne savent rien et une nouvelle vie dans un environnement auquel ils vont devoir s’adapter, au milieu de personnes pas forcément prêtes à les accueillir à bras ouverts. Nani a laissé derrière elle son grand-père adoré, Enoha, paralysé depuis un accident et qui, ne pouvant suivre les siens, a dû se résoudre à rester sur l’île. En chemin, la fillette rencontre Semeio « graine de petit homme trop tôt meurtri par la vie ». Un enfant de 8 ans, comme elle, qui va devenir par la force des choses le frère qu’elle n’a jamais eu.
Un très beau roman jeunesse sur l’exil, le déracinement. J’y ai retrouvé toute la douceur et la sensibilité de Kochka, une auteure qui m’enchante à chaque nouvelle publication. La thématique des réfugiés climatiques offre en filigrane une réflexion sur la responsabilité des pays industrialisés et la nécessité pour eux d’assumer leur statut de « pollueurs ». L’écriture poétique donne une dimension bouleversante au périple de Nani et de sa famille, sans jamais sombrer dans le pathos. Le message se veut positif, fraternel, solidaire, sans occulter les difficultés d’adaptation et les préjugés qui perdurent.
Détail non négligeable, l’objet-livre est superbe, illustré en trichromie par le talentueux Tom Haugomat. Un roman malheureusement d’actualité dont la portée universelle touchera petits et grands. A lire et à faire lire, surtout à l’heure où l’ouverture aux autres et l’acceptation des différences est de moins en moins une évidence.
Frères d’exil de Kochka. Flammarion jeunesse, 2016. 155 pages. 12,00 euros. A partir de 10 ans.
Une lecture commune que je partage une fois de plus avec Noukette.
L’avis de Mirontaine