mercredi 16 novembre 2011

O dingos, ô chateaux ! de Manchette et Tardi

Manchette et Tardi - © Futuropolis 2011
Michel Hartog est un philanthrope. Suite à la mort de son frère et de sa belle sœur dans un accident d’avion, il a été désigné tuteur de son neveu devenu orphelin et a dû gérer la florissante entreprise familiale en attendant que le gamin soit en âge de prendre les rennes. Hartog a créé une fondation et cherche à faire le bien autour de lui. Il emploie des infirmes dans ses usines et ne s’entoure que de personnes en souffrance ou dans le besoin. Sa cuisinière est épileptique, son jardinier n’a qu’un bras, sa secrétaire est aveugle et son chauffeur est un ancien para qui a sauté sur une mine. Lorsque la nurse du petit Peter rend son tablier, Hartog va en chercher une nouvelle à l’hôpital psychiatrique. Pour Julie Ballanger, l’heureuse élue, la première rencontre avec Peter n’est pas de tout repos. L’enfant, capricieux et colérique, pique une crise et elle doit le gifler violemment pour le calmer. Le lendemain, alors qu’elle l’emmène au parc, tous deux sont enlevés de force, jetés sur la banquette arrière d’une voiture et séquestrés dans une cabane perdue au fond des bois.

Troisième adaptation d’un polar de Manchette par Tardi, Ô dingos, ô châteaux réunit des thèmes chers à l’écrivain : personnages rugueux sans états d’âme, humour noir, violence un peu gratuite… Le récit progresse par paliers, chacun devenant plus tendu et intense que le précédent. Il y a quelques scènes d’anthologie au cours de la course-poursuite sanglante entre la nounou protectrice et ses ravisseurs. Dans cette histoire, tous les protagonistes sont sacrément cintrés et aucun n’attire l’empathie. Le texte d’origine, respecté à la lettre, possède une sorte de réalisme glacial où affleure le désir de choquer.

Une fois de plus, Tardi prouve qu’il a parfaitement digéré le style du romancier. Comment ne pourrait-il pas se sentir à l’aise pour mettre en scène des personnages aussi barrés et une telle violence surjouée ? A l’évidence il s’est régalé des séquences chocs qui traversent le récit (la mémorable tuerie dans le supermarché est un must en la matière) et s’est appliqué comme jamais pour offrir à chaque personnage une trogne digne de son tempérament.

La truculence cynique de Manchette et le dessin au cordeau de Tardi sont pour la première fois réellement en symbiose dans ce road-trip déjanté. J’en viens presque à espérer que cette nouvelle adaptation sera la dernière tant il me semble difficile de faire mieux.


Ô dingos, ô chateaux ! de Manchette et Tardi, Futuropolis, 2011. 96 pages. 19 euros.

L'avis de Wens.

Mon avis sur La position du tireur couché.


Manchette et Tardi - © Futuropolis 2011




10 commentaires:

  1. Personnellement je ne trouve pas que Ô Dingos Ô châteuax soit le meilleur roman de Manchette , et je préfère le petit bleu de la côte Ouest.

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  2. @ Wens : moi aussi je pense que le petit bleu est un meilluer roman. Je trouve juste qu'avec O dingos, les univers de Manchette et de Tardi se rejoignent de la plus parfaite des manières.

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  3. J'attends l'occasion de le lire (elle ne devrait plus tarder maintenant). Je m'étonne de t'entendre dire que tu espères que Tardi s'arrêtera-là dans les adaptations de Manchette. Sans révolutionner la trame qu'il a retenue, un prochain album peut etre aussi appréciable que celui-ci non ?

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  4. @ Mo' : oui, j'ai l'impression qu'une adaptation supplémentaire n'apporterais rien de plus. Lire les trois à la suite permet de mesurer l'évolution des deux auteurs mais aussi de se rendre compte que Tardi a fait le tour de la question.
    Maintenant, si un 4ème album voit le jour, tu penses bien que je courrais l'acheter (on ne se refait pas) !

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  5. Je connais peu Tardi, je me rends compte que c'est un tort !

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  6. Jamais lu d'adaptation de Manchette par Tardi. J'ai Le petit bleu au lycée en BD, mais j'ai envie de lire le roman de Manchette avant.

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  7. En voilà une que je ne manquerai pas de lire !

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  8. J'aimerais commencer à connaître ces auteurs qui semblent très estimés des blogueurs très pointus comme toi.

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  9. Tu rends bien l'ambiance et souligne ce que j'aime sur ce duo du tonnerre, je rajoute celui là dans ma liste au Père Noël.

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  10. @ Noukette : en effet, je pense que c'est un tort !

    @ Soukee : à mon avis, c'est la bonne démarche. Lire d'abord le roman et après la BD permet de mieux saisir la difficulté du travail d'adaptation.

    @ Mango : Pointu, c'est un bien grand mot. Par contre si tu as l'occasion de découvrir une de ses adaptations, laisse toi tenter.

    @ Arsenul : un duo du tonnerre ? Voila une belle façon de qualifier ces deux auteurs !

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