Nous sommes auprès d’Alban, dans les minutes qui suivent l’annonce du verdict des médecins. Anouk est l’unique narratrice de ce monologue bouleversant. Ses pensées naviguent entre l’insoutenable présent et les souvenirs heureux. Alban et sa passion pour la construction de meubles en palettes. Une sortie mémorable au parc d’attraction. Une tanière construite dans les bois pour jouer les fugueurs le temps de quelques heures. Des petits moments. Des trucs du quotidien. Anouk cherche les arguments pour convaincre sa mère, pour respecter la volonté de son frère. Sans la heurter, sans la brusquer. Mais du haut de ses 16 ans, elle se sent démunie à la fois face au drame et à l’urgence.
Encaisser le choc. Être en pleine sidération. Sans déni accepter la réalité. Et au-delà ne pas pouvoir se projeter vers cette décision que le corps médical attend avec impatience. C’est là que le titre prend tout son sens. Quelques secondes encore. Du temps gagné sur la réponse impossible à donner.
Il y a évidemment quelque chose de déchirant dans ce texte. De l’ordre de la douleur la plus violente, la plus intime, la plus insupportable. Mais on ne sombre pas pour autant dans des abysses de noirceur, on ne tire pas avec excès sur la corde lacrymale. Douceur, dignité et humanité servent de cadre au récit. Tout en retenu, les mots d’Anouk ne se laissent pas submerger par la colère ou la tristesse. Pas encore. Pas avant la fin du compte à rebours.
Un roman à la beauté fulgurante, d’une infinie délicatesse.
Et comme toujours avec cette collection, l'achat du livre papier offre accès à la version audio et à la version numérique via une application dédiée.
Quelques secondes encore de Thomas Scotto. Nathan, 2021. 56 pages. 8,00 euros. A partir de 15 ans.