Un noir serré, amer, sans un gramme de sucre. Il faut s’accrocher au départ pour s’y retrouver dans la foultitude de personnages (merci le trombinoscope présent au début de l’album !) mais une fois les repères trouvés, on se régale de bout en bout. L’atmosphère pesante de l’industrie du cinéma de la fin des années 40 avec ses stars ingérables, ses producteurs véreux et ses scénaristes alcooliques est rendue à la perfection. La dimension politique (chasse aux sorcières communistes dans tous les studios d’Hollywood) est un élément majeur de l’intrigue. Manipulation, corruption, règlements de comptes et secrets inavouables rythment une histoire sans temps mort aux nombreux rebondissements.
Les personnages ont tous une vraie densité, leur évolution psychologique est extrêmement crédible et leurs relations particulièrement travaillées. Un vrai plaisir de se plonger dans ce polar poisseux à souhait, porté par les dessins aussi sombres que réalistes d’un Sean Phillips au sommet de son art. Bars miteux à peine éclairés, femmes fatales en robe fourreau, tapis rouge, chapeau en feutre, verre de whisky dans une main et cigarette dans l’autre, l’ambiance de l’époque, digne d’un roman de Raymond Chandler ou de Ross MacDonald, fascine autant qu’elle effraie.
Un album diaboliquement vénéneux à la mécanique sans faille. Efficace et addictif.
Fondu au noir d’Ed Brubaker, Sean Phillips et Elizabeth Breitweiser. Delcourt, 2017. 380 pages. 39,95 euros.
Une lecture commune partagée avec Mo.
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