Outch ! Après Pike, Benjamin Whitmer en remet une couche et nous montre une Amérique en perdition. Ses personnages se laissent submerger par la tristesse, ils baissent les bras, sachant le combat perdu d’avance. Aucun espoir dans ce roman, même si les figures féminines apportent une petite note de sagesse, elles ne se font pas d’illusions, disons juste qu’elles sont peut-être un poil plus combatives que leurs hommes. Des hommes qui ont eux depuis longtemps baissé les bras, trouvant leur salut dans une fuite en avant semée d’embûches et d’excès en tout genre.
Depuis le décès de son jeune fils suite à une erreur médicale, Patterson Wells sillonne les zones sinistrées par les ouragans et autres catastrophes naturelles afin de déblayer les décombres et de remettre en état les réseaux électriques. A la fin de chaque saison, il retourne avec son chien dans la cabane en bois qu’il a construit de ses propres mains, au fin fond des forêts du Colorado. Il survit en ermite, enchaînant les cuites en attendant le prochain lever de soleil. Le jour où il rencontre Junior, dealer, bagarreur et grand consommateur de cocaïne, Patterson sait qu’il noue une relation avec le diable. Une relation toxique qui va l’entraîner toujours plus près d’un précipice l’attirant comme un aimant.
Cry father, c’est l’Amérique dont personne n’a rien à cirer. Bienvenue chez les camés, les paumés, les sans grades. Bienvenue dans un monde régit par une violence qui surgit sans crier gare. Mettre une raclée ou prendre une branlée, tel est le quotidien de Patterson et Junior. Un duo à la dérive, ayant parfaitement conscience de filer droit sur les récifs, mais ne faisant rien pour résister au courant. La haine d’un monde dans lequel ils n’ont pas leur place chevillée au corps, ces deux-là avancent de concert vers l’inéluctable et le lecteur, pas dupe, sait très bien que les choses vont mal tourner…
Cry father, c’est une noirceur totale, brutale, sans aucun brin de lumière. L’écriture, âpre et concise, se fait parfois lyrique tandis que chaque dialogue est d’un réalisme criant. Il y a quelque chose de profondément immoral dans ce texte abrasif. Il y a aussi tout ce que j’aime dans la littérature américaine d’aujourd’hui.
Cry Father de Benjamin Whitmer. Gallmeister, 2015. 315 pages. 16,50 euros.
Les avis d'Alex et Marie-Claude
Tu me vois très heureuse que le roman t'ait plu. Tu le dis bien: Il y a aussi tout ce que j’aime dans la littérature américaine d’aujourd’hui.
RépondreSupprimerTu as lu Pike?
Dès le départ il avait tout pour me plaire.
SupprimerC'est le genre de roman qui semble très fort... mais très pas pour moi. J'ai du mal quand il n'y a aucun espoir.
RépondreSupprimerJ'ai beau chercher, l'espoir n'est nulle part dans ce texte.
SupprimerPunaise! Je viens de lire ton billet sur Pike! Ça répond à ma question!
RépondreSupprimerJe n'ai même pas eu besoin d'y répondre ;)
SupprimerPike avait déjà pas mal noirci l'atmosphère, alors j'hésite...
RépondreSupprimerJe trouve que là c'est encore plus noir.
SupprimerCe n est pas pour moi...
RépondreSupprimerJe comprends.
Supprimeren lisant le billet j'ai pensé "mais c'est tout ce qu'il aime en littérature", et puis j'ai lu ta dernière phrase ^^
RépondreSupprimerVoila, voila. Je suis tellement prévisible ;)
SupprimerDans la lignée de Pike, que j'avais beaucoup aimé... Banco !
RépondreSupprimerDans la lignée oui mais avec une atmosphère et un décor assez différents finalement.
SupprimerPas très gai tout ça, pourquoi pas un jour...
RépondreSupprimerAh non, pas gai du tout, même.
Supprimerça a l'air bien noir en effet!
RépondreSupprimerça l'est, crois-moi !
SupprimerA force tu dois savoir que je suis une fan de cette maison d'édition ;) Cette collection est une vraie réussite !! :)
RépondreSupprimerJe le sais oui, nous sommes tous les deux fans de cet éditeur.
SupprimerIl m'attend, signé par l'auteur... je repousse sa lecture pour la savourer en vacances...
RépondreSupprimerHâte de connaître ton avis.
SupprimerTrop noir pour moi je pense.
RépondreSupprimerIl faut vraiment aimer la noirceur pour s'y lancer.
SupprimerAh oui ça c'est tout à fait ton genre de romans ! :-) Bon j'en ai trop noté déjà ce soir alors je vais être raisonnable, mais j'adore ton extrait au début !
RépondreSupprimerC'est mon genre, oui, tu me connais bien ;)
SupprimerRepéré déjà chez la lectrice en campagne... Il y a un petit côté de Garden of love qui m'attire ; le style déjà qui est spécial, et un côté venimeux et trouble... A voir donc, mais ça me paraît sombre, bien sombre... Je rajoute ton billet avec celui de la lectrice... Bises
RépondreSupprimerC'est très éloigné de Garden of love sur le fond et la forme mais il y a incontestablement un coté trouble et venimeux.
SupprimerC'est noir, très noir.
RépondreSupprimerTu as beaucoup aimé aussi je crois.
SupprimerTu m'as donné envie de le lire. J'aime beaucoup le style d'écriture un peu abrupt et je pense que ce roman pourrait me plaire...
RépondreSupprimerN'hésite pas, c'est un roman coup de poing !
SupprimerÇa m'a fait penser à ce "contractor" qui nous avait dit qu'en Amérique, un clochard peut être milliardaire cinq ans plus tard s'il le/se décide. Apparemment, ce n'est pas le point de vue de Whitmer. Et le rêve américain alors ?
RépondreSupprimerLe rêve américain, Whitmer s'assoit dessus sans vergogne. Longtemps qu'il n'y croit plus je pense (je me demande même s'il y a cru un jour).
SupprimerUne lecture électrochoc, pourquoi pas ? Voilà qui me sortirait de ma zone de confort ! ;-)
RépondreSupprimerTu as le même genre de lecture dans tes valises, commence donc par celui-là :p
SupprimerBlack is black
RépondreSupprimerTu connais tes classiques ;)
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