Dinah ne supporte pas le sort des migrants. Elle ne supporte pas de voir des policiers aller chercher des enfants en situation irrégulière dans leur classe pour les renvoyer « chez eux ». Enlever Mihran est le seul moyen de le soustraire au triste sort qui l’attend. Parvenue à ses fins, la jeune fille s’enfuit, d’abord dans le métro. Main dans la main avec le petit garçon, elle erre ensuite dans un centre commercial avant de rentrer chez elle. Ses parents sont en voyage, son grand-père va l’attendre pour manger. Mais peu importe. Dans la tête de Dinah tout se bouscule. Se cacher, passer pour une grande sœur avec son petit frère. Et ne pas penser à la suite, ne pas penser à ce qui les attend, elle et lui, après.
Il est bizarre ce petit roman. Très bizarre. On se demande ce qu’il se passe, on se demande dans quelle direction on nous emmène. Rapidement on comprend que l’enlèvement mis en œuvre par Dinah n’est pas aussi clair qu’elle voudrait nous le faire croire. Son comportement est étrange, son discours parfois confus, le portrait qu’elle dresse de ses parents est plutôt inquiétant et la réaction de son ex-petit ami lorsqu’il apprend son geste confirme qu’il y a chez elle un truc qui ne tourne pas rond.
Malgré tout rien n’est affirmé clairement, on navigue à vue, en plein brouillard. Plus qu’une tension montant crescendo c’est une sorte de malaise qui se diffuse au fil des pages, on ne sait plus si Dinah œuvre pour sauver un migrant ou si elle est une gamine paumée en mal de petit frère. Au final la surprenante conclusion remet les pièces du puzzle en place et conclut le récit sur une note positive qui n’a rien d’artificiel. Troublant et dérangeant comme j’aime !
Sans un mot de Romuald Giulivo. L’école des loisirs, 2019. 75 pages. 12,00 euros. A partir de 12-13 ans.
Une pépite jeunesse évidemment partagée avec Noukette