Dandy, premier roman noir, écorché, crépusculaire de Richard Krawiec, m’avait ébloui. J’attendais donc le second avec une
impatience mêlée d’appréhension. L’univers de Vulnérables reste le même que
celui de Dandy, présentant une Amérique pauvre et un personnage principal à la
marge. Billy Pike, quadra sortant tout juste de prison, est appelé à l’aide par
ses parents venant d’être cambriolés. Le fils maudit n’a pas remis les pieds
dans la maison familiale depuis des années. Son arrivée est loin de soulever
l’enthousiasme mais le couple, incapable de surmonter le traumatisme de la
violation de son intimité et craignant une nouvelle effraction, n’a pas eu d’autre
choix que de le solliciter pour assurer un minimum de sécurité autour et à l’intérieur
du logement. Une initiative guidée par la peur et le désespoir qui s’avérera
à l’usage bien plus néfaste que positive.
En préface, Krawiec prévient : « Billy Pike est de
ceux qui sont tombés avant de découvrir qu’il n’y avait personne pour les
relever. » Le moins que l’on puisse
dire c’est que le « sauveur » n’est pas d’une solidité à toute
épreuve. C’est un homme solitaire, fragile, torturé, en plein désarroi. Un géant au pied d’argile
qui avait trouvé dans la fuite loin des siens une manière radicale de les
protéger de ses propres démons. Car Billy est violent, instable, immature, capable
des pires atrocités. Adepte de l’autodestruction, il survit avec les moyens du
bord, seul contre tous.
Vulnérables. Le titre est parfait. Dans ce roman tout le
monde est vulnérable. Autopsie d’un naufrage, le texte ne laisse aucune place à
la lumière. Une noirceur qui a la longue
m’a fatigué. Le pathos tourne au mélo dégoulinant et, un peu comme chez William Boyle, j’ai trouvé que Krawiec forçait le trait dramatique gratuitement et que
cela desservait son histoire. On est à la limite de la complaisance dans la
description finale de la chute de Billy, en tout cas on est loin de la finesse de
Dandy. Dommage parce que le bougre connait à merveille le monde des oubliés du
rêve américain et il n’a pas besoin d’en rajouter pour mettre en scène des marginaux
aux trajectoires aussi fouillées que marquantes. Finalement mon appréhension de
départ s’est révélée légitime. Malheureusement.