Le carrosse dans lequel se trouve la petite Gerda est attaqué sur un chemin de campagne par des ogres. Avant d’être dévorée par ces derniers, elle se lie d’amitié avec une enfant ogresse et lui raconte son histoire. Depuis des années, Gerda est sur les routes à la recherche de son ami Kay. Celui-ci a un jour été enlevé par la Reine des Glaces et depuis, Gerda se dirige vers le nord car elle pense que c’est là-bas que se trouve le palais de la Reine. Avant d’atterrir chez les ogres, elle a dû s’enfuir du jardin d’une vieille sorcière qui voulait la transformer en plante et elle a involontairement détruit le château d’une princesse qui était en réalité un horrible monstre. Lorsque son amie ogresse la relâche, Gerda peut enfin accomplir sa quête et retrouver Kay. Mais le garçon est-il toujours celui dont elle rêve ?
Marie Pommepuy et Patrick Pion ont choisi de s’attaquer à l’un des plus célèbres contes d’Andersen pour mieux le dynamiter. Des sept parties originelles de La Reine des neiges, les auteurs n’ont gardé que les épisodes pouvant être clairement mis en images : l’attaque des brigands, l’enlèvement de Kay, la sorcière du jardin, la princesse tyrannique… Mais si Andersen proposait un conte somme toute assez classique avec des méchants finalement assez bienveillants, Pommepuy et Pion donnent une vision macabre, étrange et sombre en écartant ce qu’ils considèrent être des bondieuseries inutiles : diable, anges, cantiques, prières… Leur version très librement adaptée se révèle effrayante et la fin, pleine d’amertume face à la réalité des choses, ne laisse aucune place à l’optimisme. Disons que la maxime finale de cet anti-conte de fées pourrait être : « Ils ne vécurent pas heureux et n’eurent jamais aucun enfant. »
Patrick Pion a jusqu’alors publié des séries où l’influence graphique était à chercher du coté des comics (Megaron ou Chrome). Il change ici totalement de registre pour proposer des planches dans un style « gravures d’avant la BD », entre vieux livres illustrés et images d’Epinal. Des couleurs plutôt ternes, une ambiance angoissante et torturée que certains pourront qualifier de gothique. Le coté pesant des épreuves que doit subir Gerda est en tout cas parfaitement rendu. Une histoire sombre, très sombre, voila ce qui se cache derrière ce Cœur de glace…
Une adaptation très moderne et très personnelle dont certains aspects pourront déranger plus d’un lecteur. A ne pas mettre entre toutes les mains donc, et surtout pas celles des enfants.
Cœur de glace, de Marie Pommepuy et Patrick Pion, Dargaud 2011. 70 pages. 14.95 euros.
L’info en plus : Marie Pommepuy est plus connue sous le pseudonyme de Kerascoët, signature qu’elle utilise pour les projets menés à quatre mains avec son compagnon Sébastien Cosset. Leur série Miss pas Touche a notamment été récompensée en 2007 par le prix Jeune talent de la BD décerné par les magasins Virgin. Le second tome a quant à lui fait partie des 20 indispensables de l’année 2007 sélectionnés par les membres de l’ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande dessinée).
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je suis intriguée par cette BD. Tu dis adaptation de conte ? ça me tente !! Mais j'ai encore en tête mon amertume à l'égard de "Jolies ténèbres" et du coup, quand je vois ces visuels, que j'y ajoute quelques éléments de ton article, je me dis que cet album-là va provoquer des choses similaires sur le lecteur. Non ??
RépondreSupprimerTu avais aimé "Jolies Ténèbres" ?
J'ai littéralement adoré Jolies ténèbres, à tel point que je l'ai prêté à plusieurs personnes autour de moi en leur disant : il faut absolument que tu lises ça ! Résultat, on me l'a rendu en me disant qu'est-ce que c'est que cette horreur ! J'ai même deux collègues qui ne l'ont pas terminé. Pour coeur de glace, on est loin de Jolies Ténèbres quand même. Il y a toujours la vision très particulière de l'enfance de Marie Pommepuy mais c'est beaucoup moins "dérangeant". En tout cas, je ne me risquerais pas de le conseiller à qui que ce soit...
RépondreSupprimerEvidemment, tu attises sérieusement la curiosité, une adaptation dérangeante de conte. D'autant que j'ai découvert à Montreuil un magnifique album jeunesse reprenant ce conte. Ce serait intéressant. Je me demande : dérangeante parce que c'est une version noire et macabre ou parce que agressif et violent avec des planches difficiles ? ( je ne sais pas si ma question est claire )
RépondreSupprimerok, tu me donnes un repère parce que je me situe dans le camp de ceux qui ont crié au scandale concernant "Jolies Ténèbres". Ecoeurée en sortant de cette lecture
RépondreSupprimerJ'aurais eu tendance à réagir comme Mo. J'ai tout de suite pensé à Jolies ténébres que je n'ai vraiment pas aimé. Mais si tu dis qu'on en est loin alors pourquoi pas. En plus, j'avais beaucoup aimé Miss Pas Touche.
RépondreSupprimerCa a l'air très particulier, d'autant que je n'ai pas du tout aimé Jolies ténèbres. Je ne suis pas franchement convaincue par le dessin non plus d'ailleurs. Ca a l'air atrocement flippant, non ?
RépondreSupprimerDécidément pas pour moi! Rien qu'à voir les planches que tu montres,je détourne le regard!
RépondreSupprimerJ'aime les contes qui finissent mal et j'aime Kerascoët. Je pourrais me laisser tenter.
RépondreSupprimerLa couverture m'a intéressée mais les planches beaucoup moins...je ne suis pas un bon public pour ce type de BD.
RépondreSupprimerOuïe ! Effectivement, j'ai moi aussi pensé à Jolies ténèbres... et là je freine des quatre fers !
RépondreSupprimerMalgré que j'aie bien aimé le scénario de Miss Pas Touche (mais pas le dessin), je crois que je vais laisser passer celui-là: je n'aime pas les récits exagérément sombres : il y a les journaux télévisés, pour celà!!
RépondreSupprimerJ'hésite, j'hésite...
RépondreSupprimerMerci pour la découverte. Ca a l'air bien glauque mais ça m'intrigue d'autant plus.
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