Roman d’apprentissage, roman d’aventure, hymne à la nature, il y a un peu de tout dans ce texte. On ne peut pas dire que le sujet déborde d’originalité mais il est bien traité. Les codes du western sont revisités à travers le cheminement d’Hakan, du chercheur d’or à la tenancière de bordel en passant par l’explorateur scientifique, l’arnaqueur ou le shérif crapuleux. C’est rythmé sans excès, on alterne les phases quasi contemplatives et les scènes d’action, on avance doucement aux côtés de ce personnage étrange, clairement pas à son aise entouré d’une telle cour des miracles. Hakan l’âme pure est en quelque sorte le révélateur de la nature humaine, chacun tombe le masque à son contact, et ce n’est en général pas beau à voir. D’ailleurs, malgré sa naïveté de façade, le jeune homme comprend vite que si l’homme est capable du meilleur comme du pire, c’est très souvent pour le pire qu’il est le meilleur. D’où sa volonté de trouver refuge loin de toute civilisation.
J’ai vraiment passé un bon moment avec ce roman mais davantage grâce à son ambiance générale et à sa galerie de personnages secondaires que grâce à Hakan. Difficile de ressentir de l’empathie pour un tel taiseux, difficile de trouver sa légitime misanthropie touchante. Recroquevillé dans une coquille fermée à double tour, le garçon ne se livre pour ainsi dire jamais, il subit les choses plus qu’il ne les vit, dans une forme d’indifférence qui nous éloigne de lui au fur et à mesure que lui-même s’éloigne du monde. Après, si tel était le but d’Hernan Diaz, il faut reconnaître que le contrat est parfaitement rempli.
Au loin d’Hernan Diaz (traduit de l’anglais par Christine Barbaste). Delcourt, 2018. 335 pages. 21,50 euros.
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