Au début la déstabilisation a été totale. C’est simple, je n’ai rien compris. Qui est le narrateur, de quoi parle-t-il ? Où sommes-nous ? À quelle époque ? Que s’est-il passé pour que l’on en arrive là ? Le flou complet ! Je suis heureusement assez vite retombé sur mes pieds. Une grosse louche de dystopie, une fable philosophique qui ne dit pas son nom, une dénonciation de notre rapport aux animaux, une interrogation sur la notion de responsabilité, une réflexion sur la loi du plus fort qui finit toujours par desservir ceux voulant l’appliquer… rien que ça oui.
C’est donc particulièrement dense, assez perché, et le raisonnement est très construit. Trop même. Le narrateur théorise énormément, j’ai parfois eu l’impression d’être dans un essai plutôt que dans un roman. Il donne beaucoup d’explications, absolument nécessaires, j’en conviens, mais qui nuisent à la fluidité de l’histoire en elle-même. Une histoire qui avance d’ailleurs peu. Ou très lentement. Et puis c’est bien trop psychologique pour moi. Et trop politique aussi (les débats au parlement m’ont assommé).
Après, je suis obligé de reconnaître que le propos est solide, cohérent, engagé et pertinent. C’est un roman culotté, ambitieux, qui ne se cache pas comme tant d’autres derrière son petit doigt. Rien que pour cela j’admire la démarche et la prise de risque. Mais ce n’était tout simplement pas un roman pour moi, ce qui en soi n’a rien de dramatique. Même si je sais que celle qui a eu la gentillesse de me l’offrir aurait préféré que je l’adore. On va dire que ce n’est que partie remise.
Défaite des maîtres et possesseurs de Vincent Message. Seuil, 2016. 300 pages. 18,00 euros.