Irina, lycéenne vivotant comme elle peut dans une cité de banlieue, hérite suite au décès de sa grand-mère d’un mystérieux artefact capable d’exaucer ses vœux. Devenue richissime, Irina n’accède pas pour autant au bonheur. D’abord parce qu’une mystérieuse organisation semble prête à tout pour mettre la main sur la peau de chagrin. Ensuite parce que la jeune fille comprend vite que chacun de ses vœux, en se réalisant, réduit à la fois la surface de l’objet et son espérance de vie.
Quel pari de proposer non pas une réécriture de La peau de chagrin mais bien une variation autour du roman de Balzac, une mise en contexte moderne de ce conte à la fois philosophique et fantastique. Comme Balzac, Aymon montre une forme de fatalité liée au destin et insiste sur le fait que la prospérité financière n’est en rien un accomplissement. Au contraire, elle est en permanence source d’angoisse et se traduit par une insondable misère morale. Irina cherche le sens de la vie, son utilité. Vaste question, évidemment, qui restera sans réponse et relèguera le pouvoir absolu engendré par la peau de chagrin au rang des futilités.
L’écriture est nerveuse, le texte vire au thriller et la tension ne cesse de monter sans pour autant laisser sur le chemin les aspects philosophiques et moraux de l’œuvre originelle. Un roman jeunesse aussi complexe que maîtrisé, sans concession, oscillant sans cesse entre suspens, drame et émotion. Bluffant !
Et ta vie m’appartiendra de Gaël Aymon. Nathan, 2020. 330 pages. 15,95 euros. A partir de 13-14 ans.