Le malaise, présent dès le départ, ne fait que s’accentuer au fil des pages. Tout le monde est bizarre dans ce roman, tout le monde agit de façon étrange et fait froid dans le dos. Le photographe serial killer, sa sœur, le créateur de poupées géantes, l’avocat rancunier, le journaliste aux motivations pas très claires… pas un pour rattraper l’autre. Il y a quelque chose de machiavélique dans ce récit, un piège infernal dont on décortique chaque phase avec minutie pour nous prouver que rien n’a été laissé au hasard. Glaçant !
Après, soyons honnête (pour une fois), je n’ai pas tout compris. Et même (c’est encore pire), je n’ai pas eu envie de tout comprendre. Je m’explique. Le mécanisme narratif se déploie sur une partition sans fausse note. Il y a un basculement dans le dernier tiers du roman qui change totalement la vision que l’on se faisait de l’intrigue. Mais les explications données, certes précises, m’ont perdu en route. Je n’arrivais plus à attribuer à chaque personnage son rôle et son statut (frère, sœur, victime, amant, avocat, journaliste, etc.), je me suis égaré dans la succession de documents fournis pour expliquer le pourquoi du comment (lettres, tweets, notes, journal intime…), ayant même du mal à identifier clairement qui était en train de s’exprimer. En gros j’ai joué au lecteur paresseux alors que le texte demandait une attention de tous les instants. Et forcément je suis passé à côté.
Je plaide donc coupable, mais je me dis aussi que si j’ai lu ce roman par-dessus la jambe, c’est parce qu’il n’a pas su me mettre le grappin dessus. C’est du 50-50 en gros. Je n’ai pas fait l’effort mais il n’a rien mis en œuvre pour me motiver et me pousser à faire cet effort. C’est dommage parce que Fuminori Nakamura m’avait séduit avec son texte précédent (Revolver) et je me faisais une joie de le retrouver. Pas grave, ce n’est qu’un rendez-vous manqué. Et promis, je serai encore là pour le prochain roman (en espérant être plus actif et concerné qu’avec celui-ci).
L’hiver dernier, je me suis séparé de toi de Fuminori Nakamura. Éditions Philippe Picquier, 2017. 180 pages. 17,50 euros.