vendredi 24 janvier 2025

Le testament de Sully - Richard Russo

Une ombre plane sur North Bath. Alors que la cité, au bord de la faillite, vient d’être rattachée à sa cossue voisine Schuyler Spings, ses habitants semblent hantés par la présence envahissante du défunt Sully. Le fils de ce dernier, Peter, a acheté des parts du bar dans le lequel son père passait la majeure partie de ses journées pour aider Birdie, la vieille tenancière de ce lieu iconique de la ville. Tandis que Ruth, ancienne maîtresse de Sully, entretient des rapports compliqués avec sa fille et sa petite fille, Rub, son meilleur ami, sombre dans la dépression. Au même moment Doug Raymer, shérif démissionnaire de North Bath, retrouve Charyce Bond, son ancienne adjointe nommée à la tête de la police de Schuyler Spings, après la découverte d’un corps en décomposition dans le hall d’un hôtel à l’abandon. Et que vient faire Thomas, le fils de Peter qu’il n’a pas vu depuis des années, sur le seuil de sa maison avec dans son coffre une cargaison de bidons d’essence ? Bref, la petite communauté est en pleine agitation, et les exactions du flic ripoux Delgado ne vont pas arranger les choses.

La boucle est bouclée. Après Un homme presque parfait et À malin, malin et demi, Richard Russo conclut la trilogie de North Bath comme il l’a commencée, avec beaucoup d’humanité. Orchestrant en maestro ce ramassis de médiocrité, il papillonne entre la myriade de personnages, offrant à chacun toute l’attention nécessaire. Des personnages qui, à défaut d’autodérision, démontrent une impressionnante capacité d’auto apitoiement. Il faut dire que leur quotidien ne les épargne guère et que leurs maladresses s’avèrent coûteuses. Tout le roman se passe en deux jours, les existences se croisent, les ressentiments s’accumulent, remords et regrets se conjuguent pendant que la neige tombe à gros flocons sur la ville. 

C’est beau comme du Russo. Mélancolique, désabusé, ambitieux, foisonnant. Avec peut-être un poil moins d’ironie mordante et de d’humour grinçant que d’habitude. Sans doute un choix judicieux pour achever la trilogie en douceur et offrir à ses protagonistes le réconfort qu’ils méritent après les avoir tant malmenés. Seul bémol pour mon goût de lecteur pessimiste, une conclusion « positive » qui aurait pu être saupoudrée d’une pincée supplémentaire de noirceur. Parce que oui, à la fin, tout se termine bien. Les méchants sont punis et les gentils s’en sortent. Un peu simple, un peu facile. Et pas forcément réaliste. Imaginer de la justice, de l’amour, de la joie et de l’espoir dans l’Amérique d’aujourd’hui, c’est presque de la science-fiction, non ?

Le testament de Sully de Richard Russo. La Table Ronde / Quai Voltaire, 2025. 550 pages. 24,00 euros.






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