vendredi 9 octobre 2015

Kokoro - Delphine Roux

Depuis le décès de leurs parents au cours d’un incendie, Koichi et sa grande sœur Seki essaient de se reconstruire. Seki s’est réfugiée dans le travail, a eu des enfants et mène une carrière brillante après des études aux États-Unis. Koichi, lui, magasinier dans une bibliothèque, a gardé une âme d’enfant : « Seki pense que j’ai l’âge mental d’un gosse de dix, tout au plus, qu’il faudrait que je pense à grandir, à agir en homme. » Une situation qu’il ne nie pas et avec laquelle il a appris à vivre, ne trouvant le bonheur qu’auprès de sa grand-mère adorée, une vieille femme perdant peu à peu la tête et croupissant dans une maison de retraite.  Mais le jour où sa sœur sombre dans la dépression, le garçon décide de prendre les choses en main et se révèle bien plus mature qu’il ne l’aurait lui-même imaginé.

Soyons clair, j’ai adoré le personnage de Seki version « homme-enfant ». Son absence du monde, son absence d’ambition, son absence d’esprit de compétition, sa philosophie de vie : « Je ne remplis guère mon temps vacant. Le plus souvent, j’observe le monde en proximité. Je n’agis pas sur lui, n’essaie pas de le modifier. Pas l’envie, la volonté de ça. Je laisser aller. » Beaucoup verraient dans ce comportement une parfaite tête à claques. Ce n’est pas du tout mon cas. Je le trouve parfaitement attendrissant, en décalage complet par rapport à une société japonaise hyperactive où une très grande majorité fait de la réussite sociale sa raison d’être. Lui ne regarde pas les choses de haut, en donneur de leçon, il les regarde de loin, en spectateur peu, voire pas du tout concerné. C’est peut-être une posture facile à tenir, une posture de l’évitement, mais c’est une posture qui me parle énormément.

« Délicatesse » est sans doute le mot qui qualifie le mieux ce premier roman. Par le traitement de son sujet d’abord, et par son écriture ensuite. Une écriture légère, en apesanteur, d’une limpidité qui fait mouche. Pas de grands développements, on va à l’essentiel, peu de mots suffisent à dire l’intime, l’amour, les liens familiaux indestructibles malgré les apparences. C’est d’une rare subtilité, sans afféterie plombante. Une magnifique découverte, je suis tombé sous le charme de ce texte à la fois simple et lumineux !

Kokoro de Delphine Roux. Picquier, 2015. 114 pages. 12,50 euros.


Et une nouvelle lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Noukette (oui, je sais, encore une, mais que voulez-vous, on adore ça !)






40 commentaires:

  1. Je l'ai déjà remarqué sur plusieurs blogs, tu en rajoutes une couche. Je n'ai plus qu'à l'attendre en bibli ou en poche.

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  2. La façon dont tu décris ce livre donne vraiment envie de le lire ;)

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  3. erf vos billets et la délicatesse de ce livre... me donnent une folle envie ;-)
    merci merci et un joli vendredi
    mille bises

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    1. En même temps la délicatesse, ça nous connaît :)

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  4. Je vais le lire, c'est certain ;)

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  5. Déjà repéré, ce roman, j'aime bien quand les français écrivent sur le Japon, et qu'ils le font bien !

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    1. Moi aussi j'aime bien (et je pense en premier lieu à Hubert Haddad ;) )

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  6. un personnage qu'on aimerait mieux connaître, donc à lire mais sans urgence cra il faut écluser les listes déjà bien remplies

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  7. Une jolie surprise pour moi...! J'aime ces textes qui touchent au cœur et dont on se souvient longtemps...!

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    1. Pareil, je ne m'attendais à être cueilli de la sorte par ce texte.

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  8. Une écriture en apesanteur ? Voilà qui m'intrigue....

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    1. C'est vraiment l'impression que j'ai eu en tout cas.

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  9. Ton éloge ne me laisse pas insensible, ni le thème de ce roman. Je le note dans un coin, pour mieux y revenir ensuite...

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  10. J'avoue me sentir très très loin de la culture japonaise... Ce n'est pas un livre sur lequel je me ruerai, en dépit des qualités qu'il semble avoir.

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  11. Un livre qui pourrait bien me plaire...

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  12. Oh oh ! Comme cette chronique donne envie !! Merci de partager ton enthousiasme !

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  13. Tiens, intéressant ça, un récit japonais par un auteur français, surtout par rapport aux thématiques et au décalage du personnage par rapport à la société japonaise. Si je n'avais pas un bouclier aussi solide, je notais direct ! ;-)

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    1. Je pense vraiment qu'il est pour toi ce premier roman. En plus il est tout petit :p

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  14. Tu me donnes très envie de découvrir ce roman, je note !

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  15. J'aime beaucoup la littérature japonaise mais si, ici, ce n'en est pas. Mais ça s'en approche. Je note, vu ton enthousiasme.

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    1. Ce n'est pas vraiment de la littérature japonaise mais c'est un regard français plein de sensibilité posé sur la Japon.

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  16. Delicatesse ? comment ne pas être tentée ?

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  17. A nouveau convaincue ! Je note aussi...

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  18. tu en parles merveilleusement bien !

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