jeudi 11 juillet 2019

Mes beaux habits au clou - Langston Hughes

New-York, 1927. Langston Hughes publie « Mes beaux habits au clou » et la critique l’assassine. Membre éminent du mouvement culturel afro-américain « La renaissance de Harlem », le poète subit les foudres de la bourgeoisie noire. Cette dernière lui reproche une langue populaire sans esthétisme et des thématiques « de caniveau ». Comme le souligne le traducteur Frédéric Sylvanise dans la postface, pour cette bourgeoisie singeant de plus en plus les blancs, ce recueil est trop « noir ». Trop noir parce que plusieurs poèmes respectent strictement la forme « vulgaire » du blues (un vers répété puis un troisième qui rime avec les deux premiers). Trop noir parce qu’il est écrit en vers libres dans une langue vernaculaire à la tonalité très orale. Trop noir parce qu’il « raconte des histoires de prolétaires dans leur vie de tous les jours » et que ces prolétaires ont une vie bien trop dissolue pour être respectables.

Ils sont tous là, ces prolo du ghetto, la poisse collée aux basques : Gin Mary l’alcoolique, filou le clodo, le boxeur, le joueur de craps ou la nouvelle fille du cabaret. Les histoires d’amour finissent mal, le gars qui travaille rentre chez lui sans trouver sa traînée de femme et dans « La chanson pour une fille foncée », l'amoureuse au coeur brisée pleure son chéri lynché par le klan : Là-bas, au fin fond du Sud / (J’en ai le cœur brisé) / Ils ont pendu mon jeune amant noir / A un arbre au croisement routier / Là-bas, au fin fond du Sud / (Un corps meurtri haut dans les airs) / J’ai demandé à notre Seigneur blanc Jésus / A quoi servait la prière / Là-bas, au fin fond du Sud / (j’en ai le cœur brisé) / L’amour est une ombre nue / Sur un arbre nu et déformé.

Publié pour la première fois en France par un petit éditeur nantais, le recueil est proposé en version bilingue avec chaque poème en VO sur la page de gauche et sa traduction sur celle de droite. Ne tournons pas autour du pot, Mes beaux habits au clou est un monument de la poésie afro-américaine. De la poésie américaine tout court, même. Un monument à découvrir d'urgence, évidemment.

Mes beaux habits au clou de Langston Hughes (traduit de l’américain par Frédéric Sylvanise). Joca Seria, 2019. 150 pages. 13,50 euros


Rieurs

Chanteurs du rêve / Conteurs d’histoires / Danseurs / Grands rieurs entre les mains du Destin / Mon peuple / Plongeurs / Garçons d’ascenseur / Femmes de chambres / joueurs de dés /  Cuisiniers / Serveurs / Jazzmen / Nourrices / Dockers / Noceurs / Auteurs de revues / Comédiens de cabaret / Et musiciens de cirque / Des chanteurs du rêve, tous / Mon peuple / Des conteurs d’histoires, tous / Mon peuple / Danseurs / Et Dieu ! Quels danseurs / Chanteurs / Et Dieu ! Quels chanteurs ! / Chanteurs et danseurs / Danseurs et rieurs / Rieurs ? / Oui, rieurs… rieurs… rieurs… / Rieurs aux éclats entre les mains du Destin.   








4 commentaires:

  1. Vendu ! Et vivent les petits éditeurs grâce auxquels on peut découvrir ces indispensables injustement méconnus !

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  2. Bon, dommage que je ne sois vraiment pas "poème" car je trouvais intéressant le contexte de la publication de ce recueil.

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  3. Original, mais pas du tout pour moi.

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