Le précédent album de Koren Shadmi m’avait emballé. C’est donc avec plaisir et impatience que je me suis lancé dans ce pavé mélangeant SF et récit d’initiation. Le résultat est surprenant, ne cherchant pas à naviguer d’un genre à l’autre mais créant au contraire une alchimie aussi improbable que séduisante entre les aspects futuristes et la relation amoureuse difficile et ultra-réaliste de Victor et Patricia.
Un roman graphique d’une belle densité. Koren Shadmi prend le temps de développer les interactions entre les deux ados, de l’ignorance à l’attirance, de la douceur à la douleur, des illusions à la dure réalité. Les personnages sont extrêmement fouillés, les caractères s’expriment dans toute leur complexité et les rôles secondaires ne sont pas là pour donner dans la figuration. Victor, au départ touchant de naïveté, mis à mal, balloté, manquant de confiance en lui et ne possédant les codes propres au jeu de la séduction, s’affirme peu à peu, certes maladroitement, mais avec une persévérance qui finit par forcer l’admiration.
Incroyable de constater à quel point cette banale amourette d’ados m’a passionné. Évidemment, ceux qui ont lu Le voyageur savent que Shadmi n’est pas du genre à céder aux tentations du feel-good gnangnan. La conclusion m’a certes paru un peu abrupte mais j’ai aimé retrouver la noirceur et le pessimisme qui caractérisent son univers. Les histoires d’amour finissent mal en général et cette impossible histoire d’amour en particulier ne pouvait pas déroger à la règle.
Bionique de Koren Shadmi (traduit de l’anglais par Bérengère Orieux). Ici Même, 2018. 180 pages. 26,00 euros.
J'avais loupé ce billet. Moka semble moins emballée que toi... Mais moi j'aime la SF alors pourquoi pas !
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