jeudi 6 avril 2017

La pomme empoisonnée - Michel Laub

22 janvier 1993 (le jour de mes 18 ans !). Nirvana donne son unique concert brésilien au stade Morumbi de Sao Paulo devant 80 000 personnes, une prestation que Kurt Cobain qualifiera par la suite de « pire concert de la carrière de Nirvana ». Bien décidé à assister à l’événement avec sa petite amie Valéria, le narrateur se demande s’il doit ou non s’enfuir de la caserne où il effectue son service militaire. Une décision pas si évidente que cela à prendre et qui, même s’il ne le sait pas encore, aura une influence considérable sur son avenir. Vingt ans plus tard, se retournant sur ce jour particulier, il constate à quel point son choix a pu être lourd de conséquences.

Entremêlant sa propre histoire à celles de Kurt Cobain et d’une rwandaise survivante du génocide dans une forme d’autofiction aussi épurée que maîtrisée, Michel Laub déroule une gamme de sentiments où la douleur le dispute au regret. Ce faisant, il constate à quel point un destin se joue à peu de choses, à quel point des empreintes peuvent rester indélébiles malgré la fuite du temps.

Le récit passe du témoignage de la rwandaise au séjour londonien du narrateur, d’une méditation sur les raisons du suicide de Kurt Cobain à la trajectoire d’un gradé sauvé de l’alcoolisme par la bible et bien évidemment par ce fameux 22 janvier 1993. Cent chapitres en cent trente pages, comme autant de petits cailloux posés sur un chemin de prime abord sinueux mais au final d’une imparable limpidité. Avec comme pierre angulaire de l’existence passée et à venir une histoire d’amour brûlante et torturée comme un solo de guitare électrique.

Entre la chronique et le journal intime, ce court texte à la construction ambitieuse allie pudeur et profondeur de réflexion. Avec cette confession tout en introspection qui pousse le lecteur à s’interroger sur sa propre condition je découvre un auteur brésilien talentueux que je vais sans nulle doute continuer à suivre de près.

La pomme empoisonnée de Michel Laub (traduit du portugais par Dominique Nédellec). Buchet Chastel, 2017. 132 pages. 14,00 euros.








28 commentaires:

  1. Très intriguant. Décidément, on dirait que Buchet Chastel a le don de dénicher des perles en littérature étrangère. Je note, mais je lirai d'abord le pavé d'Atticus Lish, acheté sur tes conseils!

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  2. Aime bcp bcp les merveilles de cet éditeur ! Toujours étonnantes et qui nous font sortir de notre zone de lecture habituelle ....
    Je note ce titre (bientôt fini le prix Elle, je vais me remettre à dévorer vos précieuses découvertes !)

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  3. Plus je lis de littérature étrangère et plus j'ai envie d'en lire. Ton billet me conforte dans cette idée...

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    1. Perso, j'ai toujours beaucoup aimé la littérature étrangère.

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  4. Ça donne envie oui, même si ça me ferait clairement sortir de ma zone de confort...

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  5. Tiens, ça l'air vraiment intéressant. Un sujet déjanté avec une belle profondeur de réflexion, je ne crois pas connaître cette Maison d'édition, je vais la suivre de près! :-)

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    1. Ils ont aussi une jolie petite collection en littérature française ;)

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  6. Tout ce qui permet de se remettre en question m'intéresse même si le sujet au départ m'étonne .

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    1. Le traitement de l'histoire est vraiment inattendu.

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  7. Le Kurt Cobain me bloque un peu !
    Bon OK beaucoup !

    Sans rancune ;-)

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    1. Rhooo, c'était une de mes idoles à l'époque tu sais :)

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  8. Ah ? Kurt Cobain, Rwanda, auteur brésilien ? Quel cocktail (d)étonnant ! Rien que pour ça, je pense que je le lirai (un jour). Ce livre t'a en plus visiblement conquis.

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    1. C'est suffisamment étrange pour te plaire, je n'en doute pas une seconde.

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  9. Souvent de belles découvertes chez cet éditeur ... merci du conseil.

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  10. Tu en dis juste assez pour qu'on ne sache rien :-D du coup forcément on est tenté... Surtout avec cette histoire d'embranchement, ça me fascine toujours...

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    1. En même temps elle est très compliquée à résumer cette histoire !

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  11. Un mélange à priori bizarre, mais je suis tentée très tentée ;)

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  12. Pourquoi pas ! Le Rwanda, Kurt Cobain, c'est aussi mes années 90 à moi, un mélange de souvenirs parfois atroces...

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