lundi 22 février 2016

Veracruz - Olivier Rolin

Le narrateur est venu à Veracruz pour donner un cycle de conférences intitulé « Proust m’énerve ». Au cours d’une soirée, il rencontre Dariana, en tombe fou amoureux et vit avec elle une passion aussi courte qu’intense : « Notre liaison dura peu, mais je m’en souviendrai au-delà de la mort, si l’éternité, ou quelque chose comme ça, est une option  possible. »

Alors que Dariana disparaît soudainement sans laisser de trace, son amant reçoit par la poste un pli anonyme contenant quatre récits « brefs et terribles » ayant pour sujet la sensuelle et troublante Susana. Dans le premier, un jésuite défroqué se meurt d’amour pour la belle mais n’ose la toucher, se contentant de lui faire la lecture. Dans le second, c’est Miller, malfrat et mari violent de Susana, qui prend la parole. Vient ensuite le tour d’El Griego, père incestueux de la jeune femme, avant que cette dernière ne vienne clore le manuscrit. Tous les quatre œuvrent dans un trafic clandestin de cigares à destination des États-Unis et tous les quatre sont dans la même pièce, donnant leur point de vue sur les événements en cours et à venir dans un huis-clos étouffant alors qu’un cyclone menace…

Qui sont ces personnages ? Pourquoi ce courrier est-il arrivé dans les mains du narrateur ? Quel rapport avec Dariana ? L’homme s’interroge, voudrait trouver des liens où il n’y en a sans doute pas. Olivier Rolin tisse sa toile de façon magistrale. Il nous laisse en pleine expectative, en plein questionnement, jouant avec nos nerfs, construisant un récit gigogne dont chacun est libre d’interpréter le sens. Surtout, il joue avec le lecteur, insiste sur le lien parfois ténu entre fiction et réalité, jugeant utile de préciser : « Ce serait avoir une idée bien simpliste de la littérature que de penser qu’elle reflète sans détour, sans malice, la personnalité de l’écrivain. Il faut une grande naïveté, une ignorance des règles de l’écriture pour croire ce genre de platitude, qu’enseignaient encore de vieux professeurs du temps que j’étais étudiant. La littérature est une tromperie sans fin. »

Voila, tout est dit. J’ai adoré cette réflexion sur la littérature, cette écriture ciselée et élégante, ce ton parfois badin, cette construction libre et désordonnée où il n’y a pas à chercher ni à trouver de réponses précises. Du grand art et un auteur que je découvre ici avec un infini plaisir.

Veracruz d’Olivier Rolin. Verdier, 2016. 120 pages. 13,00 euros

Merci à Delphine Olympe de m’avoir donné envie de partir à la rencontre d’Olivier Rolin !

Les avis de Delphine et Papillon.

Extrait :

« Mais pourquoi les choses devraient-elles être ordonnées, emboîtées, pourquoi le temps ne pourrait-il pas rebrousser son cours comme le fleuve Alphée des Anciens, ou divaguer, pourquoi ce qui vient après ne serait-il pas la cause de ce qui précède ? D'où tient-on qu'il y a toujours des causes ? Pourquoi toutes les choses du monde doivent-elles être cause ou effet ? Cette construction, nous l’appelons "comprendre", et en vérité nous ne comprenons rien. »







47 commentaires:

  1. Evidemment je suis ravie ! Ravie que tu aies accepté de me suivre, Jérôme, et surtout que tu aies aimé. Ton billet parle tellement bien de ce livre magnifique!
    Et, bonne nouvelle, il te reste plein d'autres oeuvres de Rolin à savourer ;-)

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  2. J'avais repéré ce titre (je n'ai jamais l'auteur) et ton billet confirme mon envie !

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  3. rhooooooooooo ce billet !
    Affreux tentateur que tu es ;-)

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  4. Bon, ça va, j'ai compris, à lire!!!

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  5. Je ne me souviens pas avoir déjà lu Rolin, il va falloir y remédier.

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  6. je ne sais pas pourquoi, mais je n'ai jamais eu envie de découvrir Olivier Rolin...avec le billet de Delphine, et maintenant le tien, il serait temps de changer d'avis !

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  7. Il est noté Monsieur le pourvoyeur :)

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  8. Je suis contente que tu l'aies aimé ! Et tu en parles si bien, c'est un plaisir de te lire.

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    1. Ton billet avait confirmé mon envie de le lire ;)

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  9. Je l'ai acheté après le billet de Delphine ( influençable, moi ? noonn)! !

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  10. Pareil qu'Eva, ton billet est enthousiaste (tant mieux!) mais je ne sais pas pourquoi, les romanciers français (il est français ?) dès qu'ils parlent d'amour, ont tendance à me faire fuir .. mais bon là c'est plus sur la littérature.

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  11. Je ne connais pas du tout cet auteur (sinon de nom) mais ton billet donne envie de le découvrir avec ce titre. Et vu le nombre de pages, ce serait dommage de ne pas tenter.

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    1. Oui, le nombre de pages est très restreint pour le coup ;)

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  12. Je compte le lire dès qu'il sort en poche ^^

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  13. "La littérature est une tromperie sans fin"... voilà une phrase sur laquelle on pourrait discuter des heures. Si tout est du même acabit...

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  14. Je n'ai jamais lu cet auteur et je commence à me dire qu'il faudrait réparer cette erreur.

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  15. Voilà qui tombe bien, ce roman vient de rejoindre ma PAL... Mon petit doigt me dit que je vais adorer...!

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  16. Tu nous donnes vraiment envie de découvrir ce roman! De comprendre le « comment du pourquoi du qui a fait quoi », et pourquoi cette Susana? Ça m’intrigue grave maintenant… Merci de nous le faire découvrir! :D

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  17. Pas mal Rolin, j'aime bien chez lui cette façon de toucher au mystère de manière subtile, avec une ambiance un désinvolte, un peu désespérée, le genre qui laisse un bon souvenir à chaque fois.

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    1. C'est vrai qu'il y a une certaine désinvolture dans ce texte.

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  18. Voilà un auteur que je dois encore découvrir :-)

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  19. Oh ben un roman qui commence par une idée de cycle de conférences intitulé "Proust m'énerve", déjà ça me plaît bien. Et puis tout le reste, avec la réflexion sur la littérature... OK, bouclier KO !

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    1. Et puis il est tout petit, tu l'auras dévoré en mois de deux.

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  20. Décidément, les livres sont bien vendus par ici, j'ai envie de le lire genre maintenant ! Je me le note aussi, du coup. J'aime bien me faire balader par les auteurs.

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    1. C'est toujours agréable de se laisser mener par le bout du nez. Dans un livre du moins.

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  21. Tu me donnes envie de découvrir cet auteur.

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  22. Ta citation m'intrigue énormément !

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  23. Je ne connaissais pas du tout cet auteur et j'ai adoré ce roman vraiment magistral.

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