mercredi 12 avril 2017

Le maître d’armes - Xavier Dorison et Joël Parnotte

Début du 16ème siècle. Alors que la bible impose ses règles à l’occident, des réformistes osent remettre en cause la seule et unique Vérité détenue par les catholiques « papistes ».  Le Moyen-âge tente d’étouffer dans le sang les premières lueurs de la Renaissance en brûlant les hérétiques (qui deviendront les protestants) et Hans Stalhoffer, le maître d’armes de François 1er, doit abandonner sa charge après avoir combattu en duel le comte de Maleztraza. Reclus au fin fond du Jura, Hans est contacté par le chirurgien Gauvin pour aider le jeune réformiste Casper à franchir les Alpes afin d’amener à un imprimeur suisse une bible traduite en français. La mission est périlleuse, surtout en plein hiver, et le maître d’armes est rapidement poursuivi par une horde de furieux catholiques prêts à tout pour l’empêcher de mener sa tâche à bien.

Une histoire médiévale aux allures de western matinée de chasse à l’homme à la sauce Rambo. C’est âpre, violent et crasseux comme l’était cette époque si particulière où l’obscurantisme recouvrait l’Europe de son voile terrifiant. Avec son vieux maître d’armes revenu de tous les combats, Xavier Dorison met en scène un personnage flamboyant, rugueux et taciturne, défenseur de valeurs chevaleresques d’un autre temps. Le scénariste ne se contente pas d’une BD d’aventure où seule l’action prédomine, il décrit un monde figé, victime d’une religion au service de traditionnalistes déterminés à garder le pouvoir en répandant la terreur.

Joël Parnotte excelle à représenter les décors forestiers et montagnards. Son découpage très cinématographique offre une esthétique de la violence assez fascinante. Les couleurs sombres, les jeux d’ombres et de lumière renforcent l’ambiance pesante qui écrase chaque planche.

Un one-shot qui ne fait pas dans la dentelle et s’avère au final parfaitement maîtrisé, tant au niveau du fond que de la forme. Les BD pleines de souffle aux allures de superproduction sont devenues bien trop rares pour ne pas apprécier comme il se doit une telle démonstration de force.

Le maître d’armes de Xavier Dorison et Joël Parnotte. Dargaud, 2015. 96 pages. 16.45 euros.



















mardi 11 avril 2017

Le groupe - Jean-Philippe Blondel

C’est la prof de philo qui a eu l’idée : un atelier d’écriture au sein du lycée encadré par son collègue Mr Roussel, qui a la double casquette d’enseignant et d’écrivain. Sur la base du volontariat, une heure par semaine pendant six mois. Résultat, dix élèves de terminale et deux adultes pour se plier à divers exercices où chacun va pouvoir mettre à l’œuvre son imaginaire. Les consignes sont précises, les contraintes plus ou moins légères, les règles clairement définies : pas de jugement, pas de critiques négatives ni de conseils. Après une légitime hésitation, voire une certaine appréhension, chacun se lance, se livre, et les barrières tombent, révélant des personnalités aussi riches que complexes, loin des apparences derrière lesquelles on se cache dans la vie de tous les jours.

Je ne vais pas vous raconter ma vie mais j’ai eu la chance, il y a une quinzaine d’années, d’encadrer des ateliers d’écriture avec un écrivain. Je l’accompagnais dans les classes, j’aidais les différents groupes à formaliser leurs textes, je participais aux restitutions et aux corrections. Nous avions volontairement choisi des publics compliqués, des élèves de collège en grande difficulté, des classes relais, des SEGPA, des EREA, des handicapés mentaux et des déficients intellectuels qui n'étaient pas en mesure d’écrire et avec lesquels nous utilisions le procédé de la dictée à l’adulte. Pour être honnête, il ne se passait parfois pas grand-chose, tout dépendait du groupe qui était face à nous, de la bonne volonté de chacun, de notre capacité à proposer des exercices « motivants ». Mais l’écrivain qui menait les débats maîtrisait l’exercice à la perfection, sa gentillesse, sa bienveillance, son autorité naturelle, sa légitimé indiscutable et son implication totale et sans faille dans chaque atelier ont toujours permis d’aboutir à un résultat au pire satisfaisant, au mieux totalement bluffant. J’ai vu des moments de grâce, des grands gaillards rebelles pleurant en lisant leur texte à voix haute devant leurs camarades, prêts à casser la figure au premier qui se fouterait d’eux. J’ai vu des profs sceptiques au départ  retournés comme des gants au bout de quelques semaines. Ça reste les meilleurs moments de ma vie professionnelle et j’ai pris un réel plaisir à la lecture de ce roman de Jean-Philippe Blondel qui sent le vécu à plein nez et m’a rappelé bien des souvenirs.

Ils sont touchants ces lycéens. Et loin de toute caricature. L’atelier d’écriture va engendrer une émotion non feinte, une plongée dans leur intimité, dans le tumulte d’une adolescence où l’on ne cesse de se poser des questions, tant sur le présent que sur l’avenir. Ils sont si différents les uns des autres et en même temps tellement à l’écoute les uns des autres. L’acte d’écrire devient un lien solide qui les unis, il sonne comme une révélation permettant de livrer des secrets, de confier des sentiments jamais partagés, sans retenu mais avec dignité.

Un roman jeunesse qui dit le pouvoir de l’écriture, la force de cette mise à nu qui pousse  à se dévoiler sans tricher. L’ensemble est maîtrisé de bout en bout, j’ai aimé cette conclusion abrupte, limite frustrante, qui correspond parfaitement à ce que peut être la fin d’une telle aventure. Une fois encore, Jean-Philippe Blondel sonne juste, terriblement juste. Un de ses meilleurs textes, dans une bibliographie qui, de toute façon, ne souffrait déjà d’aucune fausse note. C’est suffisamment rare pour être souligné.

Le groupe de Jean-Philippe Blondel. Actes sud junior, 2017. 128 pages. 13,00 euros. A partir de 13-14 ans.


Une pépite jeunesse que je partage comme chaque mardi ou presque avec ma chère Noukette.












lundi 10 avril 2017

Lagos Lady - Leye Adenle

Envoyé par son employeur anglais couvrir les élections présidentielles au Nigéria, Guy Collins a la mauvaise idée de sortir seul, le soir, dans les rues de Lagos. Le concierge de son hôtel l’avait pourtant rassuré et mis en confiance en lui affirmant que le Ronnie’s est un endroit sûr, qui plus est fréquenté par de nombreux blancs, mais une fois sur place, Guy comprend qu’il s’est fait berné et sent très vite le coup fourré. Une impression renforcée par la découverte sur le trottoir devant le bar du corps d’une prostituée aux seins coupés. D’abord effaré, son instinct de journaliste reprend vite le dessus. Mais rester sur place jusqu’à l’arrivée de la police est une seconde très mauvaise idée. Embarqué manu militari, l’anglais découvre les charmes des commissariats nigérians et les méthodes radicales des forces de l’ordre. Sorti d’une geôle surpeuplée par la belle Amaka, il doit en contrepartie enquêter sur le meurtre dont il a été témoin et qui semble être lié à des pratiques de sorcellerie locales. Une mission qui s’avérera à la longue bien plus dangereuse encore que la prison, c’est dire…

Oui, j’ai lu un polar nigérian, ça me surprend autant que vous. Mais si je me suis lancé, c’est parce que l’éditeur m’a gentiment proposé de rencontrer l’auteur lors du salon du livre et qu’il m’était inconcevable de me présenter devant lui sans avoir lu son ouvrage. Une sorte de lecture sous la contrainte donc (même si tout est relatif !) qui s’est révélée au final une très agréable surprise.

Il faut dire qu’il avait tout pour me plaire le Guy. Un pied nickelé du journalisme, naïf et maladroit, peu au fait des us et coutumes d’un pays au fonctionnement très différent de sa Grande-Bretagne natale. Second point positif, la délicieuse Amaka, déterminée, courageuse et n’ayant pas froid aux yeux. Rajoutez quelques politiciens et policiers véreux, des méchants aussi crétins que violents, une ambiance survoltée digne de Tarantino et une écriture tendue dont l’humour n’est pas absent et vous obtenez un cocktail détonnant à boire cul sec.

Leye Adenle ne se contente pas de proposer un polar pétaradant et sans temps mort. Il dénonce le traitement réservé aux femmes, l’écart monstrueux entre les plus riches et les plus pauvres, le poids de la religion, de l’argent et de la corruption dans la société nigériane. Son roman tient vraiment la route, il est solidement construit et sait vous agripper dès les premières pages. Après, ce n’est clairement pas le meilleur guide touristique pour le Nigéria, m'étonnerait qu'il donne envie aux occidentaux de se rendre dans son pays en en dressant un tel tableau. Mais peu importe, ce Lagos Lady me donnerait presque envie de mettre plus souvent le nez dans un polar, c'est dire s'il est efficace !

Lagos Lady de Leye Adenle (traduit de l’anglais par David Fauquemberg). Metailié, 2016. 332 pages. 20,00 euros.








samedi 8 avril 2017

Kadogo - Ingrid Chabbert et Joël Alessandra

Aujourd’hui Gabriel fête ses 11 ans. Au village, les femmes dansent, « les chants se mêlent aux cris de joie ». Pour son anniversaire, le garçon reçoit une kalachnikov. Pas un jouet mais une véritable arme de guerre. « Tu es un homme maintenant », lui dit son oncle en lui pressant l’épaule. D’abord amusé et fier de posséder un tel objet, Gabriel déchante lorsque le soir même on l’oblige à monter à l’arrière d’une jeep qui l’emmène vers une destination inconnue pour faire de lui un enfant soldat…

Un sujet terrible. Terriblement casse-gueule aussi. Comment parler aux enfants des enfants soldats ? Sans les traumatiser, sans non plus adoucir la dramatique réalité ? Comment éviter le voyeurisme, la surenchère ? Comment trouver le juste équilibre, comment placer le curseur au bon endroit pour faire mouche ? A la lecture de cet album, cela semble simple. Il suffit d’un texte sobre mais explicite. De dessins tout en suggestion mais particulièrement parlants. Il faut conjuguer émotion et information, sans oublier de pousser le lecteur à la réflexion. Il faut enfin ouvrir une porte vers la reconstruction, vers un avenir possible où le retour à une vie « normale » est envisageable, pour que l’espoir demeure malgré l'horreur.

Finalement, il suffit de faire les choses intelligemment. Avec tact, conviction et sensibilité. Il suffit de ne pas avoir peur d’affronter des thèmes complexes mais importants. Bon, ok, je reconnais que c’est en fait loin d’être simple. Mais quand des auteurs de talent et engagés, soutenus par Amnesty International et par un éditeur tout aussi engagé, se lancent dans une telle entreprise, le résultat est à la hauteur et ne peut que susciter l’admiration. Un album essentiel, indispensable, incontournable. Autant d’adjectifs pour une seule et même conclusion : à lire et à faire lire au plus grand nombre !

Kadogo d’Ingrid Chabbert et Joël Alessandra. Des ronds dans l’O, 2017. 34 pages. 13,50 euros. A partir de 8-9 ans.


Une lecture commune que j'ai une fois de plus le plaisir de partager avec Noukette.





jeudi 6 avril 2017

La pomme empoisonnée - Michel Laub

22 janvier 1993 (le jour de mes 18 ans !). Nirvana donne son unique concert brésilien au stade Morumbi de Sao Paulo devant 80 000 personnes, une prestation que Kurt Cobain qualifiera par la suite de « pire concert de la carrière de Nirvana ». Bien décidé à assister à l’événement avec sa petite amie Valéria, le narrateur se demande s’il doit ou non s’enfuir de la caserne où il effectue son service militaire. Une décision pas si évidente que cela à prendre et qui, même s’il ne le sait pas encore, aura une influence considérable sur son avenir. Vingt ans plus tard, se retournant sur ce jour particulier, il constate à quel point son choix a pu être lourd de conséquences.

Entremêlant sa propre histoire à celles de Kurt Cobain et d’une rwandaise survivante du génocide dans une forme d’autofiction aussi épurée que maîtrisée, Michel Laub déroule une gamme de sentiments où la douleur le dispute au regret. Ce faisant, il constate à quel point un destin se joue à peu de choses, à quel point des empreintes peuvent rester indélébiles malgré la fuite du temps.

Le récit passe du témoignage de la rwandaise au séjour londonien du narrateur, d’une méditation sur les raisons du suicide de Kurt Cobain à la trajectoire d’un gradé sauvé de l’alcoolisme par la bible et bien évidemment par ce fameux 22 janvier 1993. Cent chapitres en cent trente pages, comme autant de petits cailloux posés sur un chemin de prime abord sinueux mais au final d’une imparable limpidité. Avec comme pierre angulaire de l’existence passée et à venir une histoire d’amour brûlante et torturée comme un solo de guitare électrique.

Entre la chronique et le journal intime, ce court texte à la construction ambitieuse allie pudeur et profondeur de réflexion. Avec cette confession tout en introspection qui pousse le lecteur à s’interroger sur sa propre condition je découvre un auteur brésilien talentueux que je vais sans nulle doute continuer à suivre de près.

La pomme empoisonnée de Michel Laub (traduit du portugais par Dominique Nédellec). Buchet Chastel, 2017. 132 pages. 14,00 euros.








mercredi 5 avril 2017

Gonzo : une autobiographie graphique de Hunter S. Thompson - Will Bingley et Anthony Hope-Smith

« Sur ma pierre tombale, ils graveront : ça n’allait jamais assez vite à mon goût. »

Pour le grand public Hunter S. Thompson est l’icône du journalisme gonzo, « une espèce de lascar furieux au cerveau fumeux, profondément déprimé et autodestructeur ». Vénéré par Johnny Depp, adulé par de nombreux fans, l’homme fascine davantage pour son aura sulfureuse que pour la qualité de ses écrits, souvent torchés à la vite pour subvenir à ses besoins, notamment d’alcool et de drogues dures. Thompson a pourtant commis d’excellentes choses, je garde par exemple un excellent souvenir de son roman « Rhum Express » et du célèbre « Las Vegas Parano ».

Cette biographie graphique s’attarde peu sur son enfance dans le Kentucky au début des années 40. Après dix-huit mois dans l’armée il devient journaliste sportif dans le New-Jersey en 1957. Il enchaîne ensuite les postes à New-York, Porto-Rico, San Francisco, l’Amérique du sud ou encore le Nouveau-Mexique, incapable de garder un job plus de quelques mois, le plus souvent viré pour cause d’insubordination. Son premier coup d’éclat, il le réussit en 1965 avec un reportage sur les Hells Angels. Infiltré dans une bande de motards ultra violents, il en tire un ouvrage qui connaît un succès retentissant. Suivront une plongée au cœur du monde des courses de chevaux, un compte rendu de sa candidature au poste de shérif dans le Colorado publié par le magazine « Rolling stone », la description d’un bidonville hispanique à Los Angeles en 1971 ou encore, la même année, la fameuse virée à Las Vegas avec son compère Oscar Acosta.

C’est à Vegas qu’il dessine les contours du journalisme Gonzo, menant son enquête de terrain en toute subjectivité, considérant que « l’objectivité requise n’autorise que les faits. Pas la vérité ». Résultat, une suite de récits hallucinés à la première personne, « une satire, un conte picaresque atavique. Marrant. Pas une histoire fondée sur des faits réels, mais peut-être une histoire vraie ». La légende était en marche, pour le meilleur et surtout pour le pire. Rongé par une consommation abusive de drogues, Thomson s’enfonça les décennies suivantes dans la folie et la dépression,  jusqu’à un suicide aussi tragique qu’inéluctable en 2005.

Tout va très vite dans cet album, on a parfois l’impression de survoler les événements mais c’est finalement plutôt raccord avec la vie du bonhomme. Le récit est en grande partie centré sur les années 70, c’est à la fois la trajectoire d’un homme à l’existence chaotique et une description grinçante de l’Amérique de Nixon pendant la guerre du Vietnam.  Le dessin manque de caractère, il est passe-partout, sans relief, mais reste fluide et efficace.

Un portrait qui ne sombre pas dans l’hagiographie et permet de découvrir les faits « marquants » de la carrière de Thompson sans forcément rentrer dans les détails. Idéal pour les néophytes, cette première approche rondement menée est complétée par l’excellente préface sans langue de bois d’Alan Rinzler, qui a été son éditeur pendant trente-cinq ans.

Gonzo : une autobiographie graphique de Hunter S. Thompson de Will Bingley et Anthony Hope-Smith. Nada, 2017. 190 pages. 18,00 euros.







mardi 4 avril 2017

Parties communes - Anne Vassivière

Reprenons cette affaire depuis le début. L’éditeur annonce la création d’une collection (la collection G.) de romans érotiques pour les femmes et rien que pour les femmes. Je tique un peu mais la curiosité me pousse à y regarder de plus près. Une collection où les auteurs « doivent être des femmes, des vraies, pas des hommes masqués derrière des pseudos féminins ». Pourquoi pas. Et parce que, selon la directrice de la collection Octavie Delvaux, « beaucoup de lectrices attendent plus de la littérature érotique que des contes de fées saupoudrés d’étreintes passionnelles », elle veut défendre « une littérature érotique qui ne prend pas de pincettes pour décrire les actes sexuels ». Avec, ce qui avant le coup me plaisait le plus, des personnages féminins qui ne soient pas « d’éternelles victimes, des nunuches apprenant tout de la vie par un mentor, des femelles qui ne se définissent que par l’image que les hommes leur renvoient d’elles-mêmes ».

Une intention louable, une ligne directrice claire et précise, il y avait tout pour lancer un projet éditorial riche de promesses. Alors peut-on m’expliquer pourquoi le premier ouvrage de la collection est à ce point catastrophique ? Franchement, il y a loin de la coupe aux lèvres. En dehors du titre plutôt parlant et pertinent, je n’ai rien trouvé à sauver dans ce roman. Une succession de points de vue dans un immeuble Haussmannien, des voisins qui prennent tour à tour la parole, qui cachent des secrets, des vies sexuelles tristounettes, des tromperies, des coucheries, des frustrations. Un ramassis de nymphos, de beaufs, de machos, de jeunes, de vieux, d’insatisfaits chroniques et au final, aucun intérêt.

Déjà rien n’est crédible. On se croirait dans un vieux porno à papa. Un regard, un battement de cils, un tortillement du cul en montant les escaliers suffisent à déclencher les hostilités. Le livreur sonne à la porte et c’est parti, le plombier y a droit aussi… affligeant. Ensuite bonjour les clichés : les hommes pensent tous être de bons coups, les femmes comptent les fissures au plafond en attendant que ça se termine et dès qu’elles changent de partenaire, bingo, ça roule ! C’est bien connu, l’herbe est plus verte ailleurs. Cerise sur le gâteau, tout le monde pense au cul 24 heures sur 24. La proprio vieille France se fait tripoter par sa gyneco avant de roucouler avec un jeunot pendant que son mari joue à touche pipi dans l’ascenseur avec la nympho du deuxième étage, le gros macho du premier se tape la gardienne (espagnole et non pas portugaise, n’y allons pas trop fort non plus sur les clichés) avant de se faire enfiler (violer, je ne vois pas d’autre mot) par le célibataire du sixième, debout sur le palier. Et il adore ça le bougre (en même temps c’est bien connu les machos sont tous des homos refoulés). Je m’arrête là dans le ridicule mais je pourrais multiplier les exemples à l’infini.

Juste un mot sur l’écriture. Dans sa note d’intention, Octavie Delvaux prône une exigence de qualité littéraire. Elle réclame « de l’élan, du suspense, de l’émotion. En somme, de la surprise ». Bien, bien, bien. Alors pourquoi la prose est aussi pauvre que gratuitement vulgaire et pourquoi les métaphores navrantes n’engendrent pas le moindre soupçon d’excitation ?

Conclusion : j’ai sans doute commis une erreur fatale en me lançant dans une collection faite par des femmes pour les femmes. Mon instinct de mâle obtus ne m’a à l’évidence pas permis de voir l’or sous le vernis du fumier. J’aurais peut-être dû prendre ce roman au second degré (voire au troisième ou au quatrième) pour l’apprécier à sa juste valeur. Il faut dire aussi que je ne vis pas en appartement, je ne sais donc pas si le fait que tous les habitants d’un immeuble soient de gros obsédés correspond à la norme ou pas. En tout cas dans mon quartier pavillonnaire je ne suis jamais tombé sur une voisine cochonne (vous remarquerez que je ne précise pas « à mon grand regret »). En même temps je vis entouré d’octogénaires, ceci explique sans doute cela.

Mais trêve de digressions, revenons à l’essentiel. Ce roman n’est pas bon. Pas bon du tout. Je ne vois pas en quoi il diffère de ce qui est proposé ailleurs dans le même genre, sauf à considérer que sa médiocrité le singularise du reste de la production. En tout état de cause pour moi, par rapport à l’objectif initial, il y a clairement tromperie sur la marchandise. Ce n’est que mon avis et je vous accorde qu’il ne vaut pas grand-chose mais je le donne quand même.

Parties communes d’Anne Vassivière. La Musardine, 2017. 250 pages. 16,00 euros.

PS : Je vais conclure ce billet par un extrait que je trouve parlant. L’auteure affirme qu’elle s’adresse moins à la raison des lectrices qu’à leur ventre. N’étant pas une lectrice mais un lecteur, je me demande si un paragraphe comme celui-ci remplit cette belle intention.

« J’aime me faire un mec par soir pour me sentir sale et bonne grosse salope jusqu’au suivant. J’aime être la seule de l’immeuble qui se fait enculer et suce après, la vraie salope pur jus de couilles, celle qui chie des bulles de sperme pendant trois jours après une bonne enculade. Et attendre le maximum avant de me laver de la sueur des ébats bestiaux. Et aussi garder la trace argentée du sperme séché qui craquelle la raie du cul, le ventre, les miches, le cou et la joue. Admirable souillure. La preuve tangible et fièrement affichée qu’on m’est passé partout et qu’on s’y est bien affairé. Oui, attendre pour me débarrasser des traces du qualificatif chéri entre tous de "pute", que je m’applique dare-dare à remériter le soir d’après, tous derrière, queues devant. »

Alors, verdict ?











dimanche 2 avril 2017

Flying Witch T1 - Chihiro Ishizuka

Au moment d’entrer au lycée, Makoto, une apprentie sorcière, quitte Tokyo pour rejoindre ses cousins Kei et Chinatsu à la campagne. Avec son chat noir Chito, elle découvre les charmes de la vie au grand air. Mais pour une jeune fille de 15 ans espiègle et spontanée comme Makoto, il n'est pas simple de garder secret son statut de sorcière auprès de ses camarades de classe et de ses nouveaux voisins.      

Un titre parfait pour une première prise de contact avec le manga. Le dessin est épuré à l’extrême et les décors sont minimalistes, les personnages étant souvent mis en scène sans arrière-plan. C’est une façon efficace de fluidifier la narration et de gagner en lisibilité, l’idéal en somme pour ceux qui ouvrent leur premier manga et doivent en priorité s’habituer à un sens de lecture déroutant. Après, ce tome d’introduction pose les bases de l’intrigue et permet de découvrir en douceur les différents protagonistes et leur environnement. Pas d’événements majeurs donc, pas de rebondissements permanents mais juste suite de petites scénettes de la vie quotidienne à la campagne.

Une série que je pourrais qualifier (pour l’instant du moins) de « calme », loin des aventures pétaradantes et sans temps mort que l’on trouve souvent dans la BD japonaise, même pour les plus jeunes. Makoto est attachante, son étourderie, sa maladresse et son sens de l’orientation défaillant, utilisés sous forme de running-gag, déclenchent le sourire. L’aspect fantastique lié à sa condition de sorcière est finalement très peu évoqué mais nul doute que le sujet sera au cœur du récit par la suite.

Un manga jeunesse que ma pépette n°2 (11 ans) a dévoré. Elle n’est pourtant pas une adepte du genre, c’est bien la preuve que cette Flying Witch est parfaite pour les débutants.

Flying Witch T1 de Chihiro Ishizuka. Nobi-nobi, 2017. 160 pages. 6,95 euros. A partir de 8-9 ans.






samedi 1 avril 2017

Trois ans de pépites jeunesse : les gagnants !

Sans fausse modestie, jamais nous n’aurions cru que ce concours anniversaire aurait autant de succès. Et au-delà du nombre de participants, les commentaires laissés ici ou chez Noukette nous ont fait chaud au cœur, c’est rien de le dire. Devant le nombre important de participants, nous avons décidé de faire gagner trente personnes au lieu de vingt-six. Je profite de l’occasion pour remercier chaleureusement les éditeurs qui ont eu la gentillesse de nous fournir les exemplaires que nous glisserons dans les enveloppes.

Mais trêve de blabla, voici la liste des gagnants :

Alex Mot-à-Mots – Antigone – Asphodèle – Bidib - Blandine (Vivrelivre) – Dadou – Didi - Fanny (pages versicolores) – Framboise – Gambadou – Hélène – Julia – Kathel – Krol – Lacomtesse – Lasardine – Laurielit – Manika – Manu B – Marie-Claude - Martine écri'turbulente – Mo – Moka – Nadège - Nadine – Nahe - Petite Noisette – Saxaoul – Stephie – Violette -

On ne vous dit pas quel livre vous allez recevoir, ce sera la surprise en ouvrant votre boîte aux lettres.Vous n'avez qu'à nous transmettre votre adresse, on s'occupe du reste. De toute façon, comme il n’y a que du bon dans nos pépites, vous ne devriez pas être déçus. Et nous vous donnons évidemment rendez-vous pour fêter les quatre ans de nos pépites jeunesse l’an prochain !









vendredi 31 mars 2017

Sacha et Tomcrouz T1 : Les vikings - Anaïs Halard et Bastien Quignon

Sacha est un brillant élève qui impressionne ses camarades. Pour ses 10 ans, il rêve d’avoir un rat qui l’assisterait dans ses expériences scientifiques. A la place il reçoit un chihuahua riquiqui qu’il baptise Tomcrouz en l’honneur de l’idole de sa mère. Après avoir lapé le contenu d’une fiole interdite, le chien éternue et est transporté avec son maître au temps des vikings. Fait prisonnier dès son arrivée par le clan Vik du chef Oda, Sacha se demande comment il va pouvoir retourner chez lui.

Rien de transcendant dans cette histoire mais une barque bien menée, des traits d’humour qui font mouche, un rythme haletant et quelques respirations bienvenues comme la fiche « prends en de la graine » ou la fiche « Einstein » qui donne la recette de la fusée aspirine. L’album fonctionne aussi grâce à la confrontation forcément inégale entre le héros gaulé comme une crevette accompagné de son chihuahua maigrelet et les grosses brutes de vikings qui le prennent pour un nain. Un gamin qui n’a pas sa langue dans sa poche, sauvé par sa débrouillardise et une répartie à toute épreuve, c’est le genre de protagoniste que les enfants adorent.

Le coup du voyage temporel est tout sauf original mais au moins le lecteur connaît le principe et sait à quoi s’en tenir. Le charme de ce premier tome tient également à l’univers graphique plein de peps de Bastien Quignon, très à l’aise pour alterner scènes d’action et moments calmes avec un découpage particulièrement dynamique. Mention spéciale aux personnages secondaires, de la maman excentrique au bellâtre viking en passant par la douce et jolie esclave qui n’aura de cesse de venir en aide à Sacha.

Une nouvelle série jeunesse sympathique et riche de promesses tant le champ des possibles offert par le thème du voyage dans le temps est vaste. Pas de quoi révolutionner le genre pour autant mais la mayonnaise prend dès ce premier tome, et c’est évidemment de bon augure pour la suite.

Sacha et Tomcrouz T1 : Les vikings d’Anaïs Halard et Bastien Quignon. Soleil, 2017. 84 pages. 16,95 euros.

Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Mo.